Août 2023
- 01/08/2023 : Ricky Patel - Silent Awakening
- 02/08/2023 : Rémi Orts Project - Respire
- 03/08/2023 : Milanku - À l’aube
- 04/08/2023 : Cold Flame - A Circus in Paradise
- 05/08/2023 : Ossi - Ossi
- 06/08/2023 : Judith Parts - Meadowsweet
- 07/08/2023 : Rhùn - Tozïh
- 08/08/2023 : ifsounds - MMXX
- 09/08/2023 : Egor Lappo - Abandoned Corners
- 10/08/2023 : Cinétiqua - Crossing Borders
- 11/08/2023 : Neolia - Neolia
- 12/08/2023 : Authari - Golden Age
- 13/08/2023 : Echoes of Zoo - Speech Of Species
- 14/08/2023 : Cosmograf - Heroic Materials
- 15/08/2023 : Homunculus Res - Ecco l'impero dei doppi sensi
- 16/08/2023 : Envy of None - That Was Then, This Is Now
- 17/08/2023 : Balletto di Bronzo - Lemures
- 18/08/2023 : Klidas - No Harmony
- 19/08/2023 : Chaos and The Cosmos - Our Song
- 20/08/2023 : Lyonel Bauchet - Tractatus Lyra-Organismus
- 21/08/2023 : I Viaggi di Madeleine - Tra Luce e Ombra
- 22/08/2023 : The Cry - The Cry
- 23/08/2023 : Malombra - T.R.E.S.
- 24/08/2023 : Gravity Fields - Disruption
- 25/08/2023 : The Drinking Club - ...really?!?
- 26/08/2023 : Victor Go - In a Trap of Anticipations
- 27/08/2023 : Monika Roscher Bigband - Witchy Activities And The Maple Death
- 28/08/2023 : Skáld - Huldufólk
- 29/08/2023 : K'mono - Mind Out of Mind
- 30/08/2023 : The Moondig - Ca
- 31/08/2023 : The Rosen Corporation - Nostalgia
01/08/2023 : Ricky Patel - Silent Awakening
Ricky Patel
Silent Awakening
progressif crossover / cinematic post-rock – 48:34 – Royaume-Uni – 2022
Ricky Patel est un producteur audio-vidéo qui a travaillé durant la pandémie pour sortir son bébé musical après avoir joué pour d’autres; sur un style moderne avec reverbération, ambiances cinématographiques; sur du rock prog, du trip hop alternatif bariolé de couches de synthés, comme Portishead et Massive Attack, bref on plonge.
«Nil» entame solennelle entre vagues de l’océan et piano ambiant, sombre, majestueux, introduisant «The Maw» à la reverbération guitares sur une batterie sèche; un beat électronique de base lance la voix de Ricky, le riff refrain énergique, un son neuf, de l’émotion ça fait du bien. «Pilot Dread» continue et file sur un air entraînant... mélancolique; aérien, éthéré, avec des touches synthétiques anesthésiantes et un pad rapide. «Thick Fog To Spill The Light» insiste sur l’ambiance trip hop éthérée atmosphérique; vocal vocoder stéréo instrumentalisé, air planant et guitare spleen au loin; ça coule calmement sans prétention comme un son IA. «Glasspane» change de ton avec une boîte à rythmes monogame amenant une touche mélodique soft-jazzy, celle qui passe en pub les soirs pour meubler le vide; de l’électronique sur un air que faisaient The Gathering à leur fin, entre spleen ambiant et émotion froide. «Ritual Ink» pour le morceau onirique avec chœurs célestes sur un synthé atmosphérique; un peu des Dead Can Dance, de la spiritualité ambiante avec cordes amplifiant la sensation de l’éther musical; Rick utilise sa voix telle un instrument sur ce titre lugubre digne d’un «Silent Hill»; des cordes nipponnes viennent encore plus jeter le trouble. «Matador» ou la rencontre entre Portishead et Sigur Rós, des cors qui montent, font frémir, le piano et la batterie syncopés, hypnotique, mettant en transe; le final monte, redescend sur des sonorités asiatiques et des voix NASA mal réglées. «Noct / Of Kin» beat syncopé envahissant; Rick en avant avec sa voix monochrome, un riff éthéré post-rock derrière, un air désopilant à la frontière progressive; une ballade nocturne sans heurts au beat accrocheur. «The Prow» au staccato marqué, des cordes réelles, samplées pour amplifier le solennel; la voix robotisée hachée donne le change jusqu’à ce que les synthés agressifs fassent passer le titre sur un versant prog moderne heavy ambiant.
Rick Patel a sorti un album dans l’air du temps, cinématique, ambiant et lunaire; des titres qui fondent l’éther, la pensée, aux abords du son prog par la texture mais non par le rythme, enivrants et linéaires, où la part électronique amène un son nouveau peut-être trop avant-gardiste pour le moment. Très bon mais aussi répétitif et mélodique avec un manque de créatif qui l’a fait passer presque en travers des curseurs prog.
Brutus
https://rickypatel.bandcamp.com/album/silent-awakening
02/08/2023 : Rémi Orts Project - Respire
Rémi Orts Project
Respire
New Age / mélodique – 48:03 – France – 2023
Après l’exploration symphonique de ses trois albums cinématiques, Rémi nous replonge dans les ambiances veloutées de partitions relativement courtes où tout est calme et sérénité dans le lignée de sa série «Peaceful Moments». Le présent album s’ouvre sur des sonorités proches de celles de la bande originale de «Interstellar» composée par Hans Zimmer. Une douceur éthérée qui se prolonge dans sa vision musicale des «Origines De La Vie». Cette plage évoque les grands espaces d’une Nature vierge de toute présence humaine et de sa civilisation matérialiste. Harpe et chœurs angéliques se marient dans la brise légère et intemporelle d’un royaume féerique. Une invitation à l’introspection et à la méditation. «Air» prolonge cet état transcendantal en y ajoutant des arpèges de guitare aux notes délicates comme le duvet de la plume caressé par le souffle du vent. Ainsi conjugués, les choeurs virtuels, les notes de harpe et la guitare acoustique tissent une impalpable trame rêveuse dans un style proche du New Age. L’«Éveil» y ajoute une partition de piano accompagné de la harpe enchanteresse. «Biosphère» pourrait ensuite évoquer des moments atmosphériques proches cette fois de l’univers de Max Richter («Sleep»). La voix féminine séraphique nous envole et colore en pastel harmonique cette composition d’une extatique beauté qui émeut profondément. Harpe encore et arpèges scintillants des claviers créent le frisson pour cette merveilleuse tranche de rêve. «Natura» scintille aux sons de cloches tubulaires pour introduire une composition où le piano élève une fois de plus une mélodie étoilée par des chœurs célestes. «Protection» travaille avec les mêmes composants, voix angélique, piano et harpe conjugués en y invitant le violon. Au total, des compositions aériennes tant courtes que riches en émotions. Une combinaison oniriphore qui invite l’auditeur à se lover dans un cocon de soie fait de quiétude et de perfection. «Respire» est un havre de paix, une retraite, un appel au voyage interne. Il est l’apaisement total des sens et une ouverture vers les espaces infinis de notre moi profond.
Clavius Reticulus
https://open.spotify.com/intl-fr/album/74vUo7mGEpX4T2oQIvdxi9
03/08/2023 : Milanku - À l’aube
Milanku
À l’aube
post-rock atmosphérique – 38:16 – Canada – 2023
Nos amis québécois de Milanku nous reviennent avec un cinquième album, «À l’aube». Inspiré des écrits de l’auteur franco-tchèque Milan Kundera (d’où Milanku), «À l’aube» propose un nouveau voyage des sens en cinq chapitres. «De leurs silences» nous propose un post-rock mélancolique coupé par la rage d’un chant musclé comme savent le faire Alcest ou encore Cult of Luna. «Il sera déjà trop tard» est dans la même veine, un instrumental chargé en émotions et en mélancolie. En écoutant cet album au casque, on ne touche plus terre, on se laisse naturellement emporter au gré des variations. «À l’aube; prêchant la mauvaise nouvelle» attaque directement avec une distorsion pour nous plonger dans une superbe agression sonore avant de retourner dans un méandre de variation subtile. Cet album a un son parfait et il est très bien produit; malheureusement très peu de surprises sonores. Un peu plus de diversité de style pourrait permettre à l’auditeur de ne pas décrocher des titres au cours de l’écoute. Si vous ne connaissez pas Milanku, je vous conseille grandement l’écoute de «À l'aube».
Vespasien
https://milanku.bandcamp.com/album/laube
https://music.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_nFQqPyi6gK2TZtMDbUHda50YzF69T3hyw
04/08/2023 : Cold Flame - A Circus in Paradise
Cold Flame
A Circus in Paradise
rock progressif – 97:00 – Angleterre – 2023
Cold Flame est un groupe formé en 1984 par Pat Rowbottom et qui a d’abord joué du blues/rock dans les pubs du comté du Grand Manchester. Au milieu des années 90, des claviers ont fait leur apparition ainsi que des «bois» [famille d'instruments à vent, ndlr]… C’est à cette époque (1997) que, parallèlement à ses productions habituelles, le groupe a présenté un spectacle hommage à Jethro Tull, lors d’une tournée européenne.
Cette année, le groupe présente son 16e album.
Ici, point de blues; nous avons un pur produit de rock progressif, conçu et interprété de manière magistrale.
C’est un album riche, chaleureux, avec un fort recours aux bois (flûte, saxophone…), aux percussions et à des bruitages (orages, vagues, cloches…), dans lequel chaque titre mélange habilement acoustique et électrique.
La musique, même si la flûte peut rappeler le Tull, va chercher son inspiration dans l’oriental («Passport To Oblivion»), le hard rock («The Deep Blue»), le Floyd («The 11th Hour») et le folk («Last Flight») et dans une pléiade de titres nichés au fond de votre mémoire.
La voix de Pat (avec une magnifique articulation) finira, si c’était nécessaire, par définitivement asseoir que c’est à un voyage dans les années 70 que Cold Flame vous invite. De ce fait, même si vous n’aviez jamais entendu ce groupe, vous aurez l’impression de bien le connaître!
Si la musique sent bon la nostalgie, les thèmes abordés sont bien actuels: réchauffement climatique, Brexit, cupidité, corruption, guerre en Ukraine…
Indéniablement, l’expérience et le professionnalisme de près de quarante ans de carrière ne sont pas pour rien dans la qualité de cette production qui, mine de rien, sous une apparence de légèreté et de facilité d’écoute, révèle énormément de surprises et provoque tout autant d’émotions.
Publius Gallia
https://open.spotify.com/intl-fr/album/0COE8iTEfcaAvLAdu8tKgM
05/08/2023 : Ossi - Ossi
Ossi
Ossi
rock psychédélique à texte – 41:51 – Italie – 2022
L'album s'ouvre dans la vraie vie, une manifestation. Vous pouvez tirer profit de ce morceau pour vous faire un vocabulaire italien d'insultes. La musique énervée, quasi punk, monte après une minute, ponctuée de gimmicks électroniques, le second morceau est plus rockabilly. Le 3e rock voit apparaître un harmonica! Aucun des 3 premiers ne dépasse les 3 min, c'est dire que la ligne directrice est nébuleuse.
Le 4e, plus mainstream, tire son «Toy Boy» un peu dans le style commercial d'Alice Cooper. Un étonnant break final aiguise les sens et ouvre sur les 9 min de «Out Demons Out», lente rythmique lourde psyché, sur laquelle un Hammond solifie en alternance avec une Strat: très sixties tout cela. Cela ressemble de plus en plus à une pochade faite par de talentueux musiciens tels nos Au bonheur des Dames ou les Italiens de Elio e le Storie Tese. Et quand s'insinue un sitar, cela devient franchement jouissif. Clairement, les textes sont importants et politiques, mais mon niveau d'italien ne me permet pas de vous éclairer totalement sur ce point, l’éditeur ne nous ayant pas envoyé le livret de 28 pages qui comprend, outre les textes, une BD style 70.
Mais rien que la musique vaut l'écoute; la voix évoque parfois celle de Jim Morrisson à laquelle s'ajoute du scat indien. Pur délire. Plus loin, les Ossi sonnent des guitares comme les Stones début 70 ou du Hammond comme les Doors.
Outre les influences possibles déjà citées, Zappa peut être ajouté, plus pour l'esprit que pour la musique et son traitement.
Je ne résiste pas à dénoncer les coupables tels qu'ils se sont crédités: Vittorio Nistri (clavier et... bruit), Simone Till (voix), Andrea Appino et Dome la Muerte (guitare), Bruno Dorella (batterie, sauf «Out Demons Out», Silvio Brambilla).
Album qui mérite, largement, une écoute; après, le coup de cœur n'est pas impossible si vous goûtez aux précités.
Cicero 3.14
06/08/2023 : Judith Parts - Meadowsweet
Judith Parts
Meadowsweet
ambient / expérimental – 39:41 – Estonie – 2023
Au travers d’une douceur parsemée de bruits, entre nature (field recording) et électronique (les sons qu’elle apporte et le synthétiseur modulaire de Mads Kinnerup Jørgensen), Judith Parts, Estonienne installée à Copenhagen, combine les instruments acoustiques – elle-même chante et joue du violon, en plus des invités à la trompette ou au violoncelle – et les traitements numériques dans les six chapitres qui construisent l’histoire de ce premier album (après un EP en 2020). C’est des racines de son pays natal qu’elle nous entretient (les visuels du disque en proviennent, augmentés des bijoux spectaculaires de Claudia Lepik), des plantes du nord ("meadowsweet" se dit ici "reine des prés"), des ancêtres de la région dont elle s’éloigne en même temps qu’elle s’y accroche. Il y a un peu d’une Björk apaisée et assagie dans les élancements de la compositrice – comme autant de tentatives de réconciliation entre modernité et histoire, entre développement sociétal et ondoiement dans l’herbe fraîche.
Auguste
07/08/2023 : Rhùn - Tozïh
Rhùn
Tozïh
zeulh – 38:15 – France – 2023
Trois morceaux, à la trame complexe, forment ce nouvel album de Rhùn, collectif français à l’alias (La Fanfare du Chaos) aussi descriptif que franc, qui, en 2011-2012, enregistre un premier essai «Ïh», dans un genre, le zeulh, où la production est centrée sur son créateur, un dieu batteur dont l’intransigeance ne favorise pas la relève. «Tozïh» débarque, dix ans plus tard, sous une accroche marketing tarabiscotée – qu’on élirait reine de l’incertitude si elle ne ressortait pas du deuxième degré: «Premier volume d'une série de deux albums enregistrés au cours de la même session d'enregistrement qui devaient initialement sortir en double album. Mais afin de préserver l'ouïe de ses auditeurs, le groupe préfère sortir deux disques, mais qui seront peut-être regroupés dans une édition vinyle, qui sait?» –, annonce anticipatrice d’un deuxième moment intense, tant les compositions, collectives, touffues, allaitées aux saxophones de Jean Bonëth et aux claviers de Chfab Kaouenn et de Ludal Le Chacal (sans parler du violon de Charlotte Pace), sont intelligentes, nourrissantes, réjouissantes.
Auguste
08/08/2023 : ifsounds - MMXX
ifsounds
MMXX
crossover – 48:22 – Italie – 2023
Des chœurs en canon nous ouvrent l'album, et mon salon se fait cathédrale! Un orgue liturgique (Hammond 😉 ) les rejoint, puis le chant inspiré de Runal arrive avec un cortège rock guitare/basse/batterie, non sans qu'un contrepoint de chœurs ne vienne compléter un instant le panorama. Fantastique intro pour cet epic de 24 min!
Plus loin, les canons reviennent avec le soutien du groupe sur un tempo ample, les développements mélodiques semblent tendre vers l'infini. L'emphase est certaine, mais reste pertinente. On assiste à une sorte d'opéra rock baroque et jazz. À mi-parcours, une lente reprise de claviers/batterie me fait penser au meilleur de Goblin. Et retour de ces chœurs obsédants, souvent en canon, qui rendent inclassable ce morceau dont le crescendo final est magnifique.
Ifsounds est né If en 93, seul Dario Lastalla (guitare, voix, synthé) subsiste dans le line up actuel avec Runal (voix), les Lino Messina (batterie) et Giugliano (claviers), Italo Miscione (basse) et Ilaria Carlucci qui offre, outre sa belle voix, sa capacité à diriger et créer les fantastiques chœurs qui parsèment l'ensemble de l'album. C'est un 7e album complexe, fait dans une époque complexe, qui, selon ses auteurs, tente de traduire les sentiments, émotions et le sentiment d'abandon général; la 1re piste fait mouche!
Le retour à «The Collector» est d'autant plus rude. Chantée en anglais (pas toujours simple pour nous les Latins), c’est une chanson basique à la mélodie soignée; il m'a fallu 2-3 minutes pour être dedans. En fait, c'est une bonne chanson, comme les Italiens savent les faire, mais légèrement sirupeuse, un slow de l'été; elle soutient difficilement la comparaison. Avec un vinyle, il aurait fallu se lever et changer de face, ce qui aurait ménagé une pause salutaire après l'immense «MMXX».
Les 2 pistes suivantes répondent aux mêmes critères; puis vient «MMXXII» qui retrouve une verve prog jazz pendant 9 min et permet de terminer agréablement cet album inégal sur une envie irrépressible de remettre la 1re piste!
Cicero 3.14
https://ifsounds.bandcamp.com/album/mmxx
https://www.youtube.com/watch?v=Ije_wpdWTvY&list=OLAK5uy_laTsXhipK2IAtvpBTL5fuSGmfuHtSiUVA
09/08/2023 : Egor Lappo - Abandoned Corners
Egor Lappo
Abandoned Corners
crossover progressif – 40:35 – Russie – 2023
Avec ses «Abandoned Corners» (de sa ville de Saint-Pétersbourg?; plutôt des recoins de sa propre existence, comme quand il parle de surprotection dans «Neverending Storm» ou de l’incessante bataille pour la vie dans «Monochrome» – ou encore du deuil avec l’instrumental «Engraved on My Heart»), Egor Lappo, qui a déjà quelques albums au compteur (cinq), propose dix nouvelles chansons, bien construites, obligeamment arrangées, produites comme il faut, pêchues comme le sont les cross-fitters quarantenaires qui, deux fois par semaine, troquent tenue de coton gris contre tenue de lycra fluo. C’est direct (les amateurs de Marillion ou de Steven Wilson aimeront), parfois pop («My World on Pause»), synthwave («Last of Her Kind») et «Creature Comfort» grignote même au râtelier disco. Peu novateur mais distrayant.
Auguste
10/08/2023 : Cinétiqua - Crossing Borders
Cinétiqua
Crossing Borders
rock progressif – 35:13 – France – 2023
La cinétique désigne l’étude du mouvement et de la vitesse, des notions qui reflètent bien la musique de ce groupe né en 2018 mais dont le line up s’est fixé réellement en 2022. Nos musiciens ont tous un parcours plus ou moins étoffé en études musicales et en participations de groupe, ce qui fait que nous pourrons découvrir une dose de Radiohead pour le côté rock accessible mais expérimental, de Jethro Tull pour la forte présence de la flûte, de GoGo Penguin pour les ambiances planantes et de Tool pour les signatures rythmiques asymétriques…
Le tout étant différent de la somme des parties…
Si «Agony» (d’après un poème d’Emily Dickinson) est un pur exercice de style, dans la mesure où il s’agit de leur première composition rock prog, créée lorsque le groupe a acté de la volonté commune d’aller dans cette direction, c’est «If you want» qui est peut-être le titre plus représentatif, en ce qu’il concentre les caractéristiques saillantes du groupe.
C’est un morceau prog avec une dizaine de parties différentes mais qui reste facile d’accès avec un fil rouge, une métrique à 9 temps qui sonne pourtant rock et simple avec un riff efficace, du chant et des harmonies vocales, des thèmes joués à la flûte, un solo de guitare et un solo de clavier, une alternance entre parties planantes et énergie très rock voire metal à la fin… Un titre irrésistible !
Rien dans la qualité du son n’indique que ce sont des enregistrements et une production maison, chaque musicien a fait les prises live avec son installation personnelle, le reste a été enregistré dans la cabine insonorisée de l’un ou l’autre.
Préparez-vous donc à un voyage où l’on peut fermer les yeux et se laisser entraîner dans d’autres contrées.
Avec des musiciens issus des quatre points cardinaux de la région parisienne et avec cet album, les prémices de la formation d’une étoile sont donc déjà bien présentes pour figurer dans le ciel de notre genre favori.
Publius Gallia
https://open.spotify.com/intl-fr/album/59YuymlkdENNRI4iFqpiQB
11/08/2023 : Neolia - Neolia
Neolia
Neolia
metal progressif – 74:57 – Israël – 2023
Neolia est un jeune groupe de métal progressif Israélien formé en 2013 à Tel Aviv. Il nous présente son premier album éponyme. Dans l’ensemble, cet album est une réussite; on y retrouve du metal progressif classique mais une recherche d’originalité avec des sons expérimentaux. On y retrouve un son jazzy ou encore flamenco mélangé à de gros riffs bien musclés. La pochette est magnifique et montre bien aussi la diversité ressentie dans la musique. Par contre, je ne suis pas spécialement fan du chant clair, je le trouve inconstant. Entre les titres plus longs, ils placent un titre «outro» et je trouve que cela rallonge inutilement l’album et casse un peu la dynamique. Le titre principal de l’album est «Rise and Fall» qui démarre avec une intro lourde classique metal prog et enchaîne avec des variations basse-batterie des plus techniques. Ce titre est particulier car il est la base de l’album. Il est directement lié au concept de l'album et aux luttes de la vie quotidienne. Dans la trame de cet opus, le personnage principal, Alex, fait de son mieux pour recréer son passé en tant que prophète qui conduit les faibles, meurtris et innocents à suivre son chemin, mais il ne réussit pas cette fois… Alors il rampe vers ses démons et ceux-ci le poussent vers la dépression. Ce premier album est de bonne qualité, original et recherché. On y retrouve des influences de Protest The Hero, Coheed and Cambria ou encore Cult of Luna. Il va contenter nombre des fans de metal progressif que vous êtes… Alors, soutenez ce jeune groupe israélien et écoutez cet album, vous n’allez pas le regretter.
Vespasien
12/08/2023 : Authari - Golden Age
Authari
Golden Age
stoner / metal progressif – 41:27 – Allemagne – 2022
Authari est un power trio de quatre ans d'âge, basé à Hanovre, et qui chante en anglais. Et pourquoi pas? Ils ne sont pas les premiers et ne seront pas les derniers à surfer sur la langue de Robert Plant! Nils, Patrick et Kris, en ordre décroissant de frontmen, sont venus en découdre façon stoner-metal-prog pour défendre les armoiries de leur premier disque «Golden Age», sur cover grise, cousue de fil doré! Rien que ça! Eh bien, tout bien, tout bien les Bas-Saxons! Après deux ou trois écoutes, on a plaisir à se repasser vos rengaines rétro-hypnotiques dans nos têtes. Dans le vif du sujet, la voix obsédante de Nil n'est pas acrobatique mais, quand il le faut, elle sait feindre celle du mammifère death-finitivement! Toutefois, on lui préféra ses talents de riffeur, sans vantardise, certes, mais certainement pas sans caractère. Ses lignes sont d'une griffure exemplaire. Prêts à bondir, Patrick et Kris complètent la garde du temple en bons légionnaires, l'un bassiste pugnace, l'autre batteur pétillant. À juger l'œuvre sur morceau, abstraction faite du single de rigueur et d'un interlude asiatique, méritants sans être héroïques, leur rock-quête fait corps vers une apogée rocailleuse dans le sillage de quatre longs morceaux décomplexés: «Birth of A Canyon», «Sinus», «God Eater» et «Authari». Après tout, la musique, c'est comme une montgolfière: pour qu'elle puisse monter, il faut bien lâcher quelque chose! À mon avis, ils auront tout misé sur la chanson épilogue, baptisée non sans raison: «Authari». Ce dernier son concentre en une seule prise leurs atouts encore en devenir, des mélodies denses et versatiles, aux consonances garage, servies avec appétit, mais… sans mot dire. Bilan de tout ça, ils devraient chercher en eux un chant plus engagé et un zeste de fantaisie embrouilleuse… Le Golden Age n'est donc pas encore pour tout de suite, même s'ils en ont déjà affiché la bannière…
Kaillus Gracchus
13/08/2023 : Echoes of Zoo - Speech Of Species
Echoes of Zoo
Speech Of Species
jazz psychédélique – 44:43 – Belgique – 2023
C’est joyeux, vif, pétillant comme un Spa citron frais secoué, on pense à SighFire ou a Sons of Kemet, le saxophone le dispute à la guitare, l’électrique à l’acoustique, l’âme est rock, l’énergie est punk, l’esthétique emprunte au jazz – mais pas que –, le mélange est psychédélique (avec d’indécises connotations orientales, comme dans «Lizard Dance»), le souffle est court, le temps est schizophrène (un rythme sans répit – sur des grooves qui puisent dans les musiques brésilienne ou d’Afrique de l’Ouest – mais un développement qui se permet tout de même de prendre le temps). Les musiciens (Bart Vervaeck à la guitare – il officie aussi dans Compro Oro, dont je vous parle ailleurs sur cette page –, Lieven Van Pée à la basse et Falk Schrauwen à la batterie), responsables de ce deuxième album après «Breakout» en 2021, et menés par le compositeur et saxophoniste Nathan Daems impulsent, dans «Speech of Species» (un titre motivé en droite ligne par l’intérêt que porte Daems aux subterfuges communicationnels des animaux entre eux: positions du corps, mouvements, couleurs, structures géométriques, vibrations, odeurs, lumière…), une musique qui répond, par ses incessants basculements de rythme et de mélodie, à autant de tentatives de mises en relation. Riche et coloré comme les essaims de perruches du Parc Léopold à Bruxelles.
Auguste
14/08/2023 : Cosmograf - Heroic Materials
Cosmograf
Heroic Materials
rock progressif – 45:27 – Angleterre – 2022
Petite séance de rattrapage pour cet album encore sorti l’année passée. Je dois avouer que le rédac-chef me l’avait recommandé depuis longtemps (il est sorti en septembre dernier), mais les occupations diverses ne m’ont pas permis de me pencher dessus plus tôt; voici donc cet oubli réparé.
Plantons le décor tout d’abord. Cosmograf n’est pas un groupe à proprement parler mais bien le projet solo de Robin Armstrong qui assure ici chant, guitare, basse et claviers. Pour cet album, il s’entoure de Danny Manners aux claviers et au piano et de Kyle Fenton à la batterie. Cet album est déjà sa 9e production et je dois bien avouer que ce projet était complètement passé sous mes radars.
«Heroic Materials» peut être considéré comme un concept album car il raconte l’histoire d’un ancien pilote de la RAF durant la Seconde Guerre mondiale (d’où l’illustration de la pochette) qui, à 99 ans, porte un regard dubitatif sur le monde qui l’entoure. Il s’agit donc d’un album sur le changement, notre refus de l'accepter, mais aussi de reconnaître qu'il est essentiel à notre survie.
Avec un tel point de départ, on s’attend à ce que l’album ne soit pas folichon (inutile d’attendre une folie débridée à la Spock’s Beard, par exemple). Le ton général est à la hauteur du sujet; la musique est douce, lente et mélancolique. Le piano et les guitares acoustiques constituent l’essentiel de la trame sonore et constitue un écrin pour la voix de Robin Armstrong. Ce n’est certes pas un grand chanteur mais cela sonne juste et authentique. L’ensemble fait assez bien penser à Pink Floyd au vu de l’utilisation quasi-exclusive de mid-tempi.
Le morceau «If things don’t change» lorgne vers un peu plus de modernité à la Porcupine Tree mais, vu l’influence que le Floyd a aussi eu sur Wilson, on reste en terrain de connaissance.
La lenteur de ce court album (45:27) est à mon sens également sa principale faiblesse. Sur les dix plages, six font moins de trois minutes et fonctionnent plus comme des transitions et les quatre plages restantes sont exactement dans le même type d’ambiances lancinantes. Les soli de guitare sont très jolis, mais assez convenus et prévisibles, et donc il se dégage au final de cet album un sentiment de monotonie, pour ne pas dire d’ennui.
Cela reste de l’excellent travail, bien joué et bien produit, mais il manque vraiment un petit brin de folie qui aurait pimenté l’ensemble et l’aurait rendu plus mémorable.
Amelius
15/08/2023 : Homunculus Res - Ecco l'impero dei doppi sensi
Homunculus Res
Ecco l'impero dei doppi sensi
Canterbury italien et + – 50:00 – Italie – 2023
Qui dit Canterbury dit souvent raffiné et accessible, et ce groupe sicilien qui se nomme «petite chose» nous propose ce 5e album en dix ans, «L'empire du double sens»!! La dimension humoristique est souvent présente dans l'École de Canterbury, surtout chez Caravan.
Ici, on n'est pas déçu: c'est léger comme la voix douce de Dario D'Alessandro, compositeur principal, qui joue aussi de la guitare, des claviers et a même créé la pochette, comme souvent! Le groupe est complété de Davide Di Giovanni (claviers), Daniele Di Giovanni (batterie), Mauro Turdo ( guitare) et Daniele Crisci (basse). Sur le disque, près d'une vingtaine de guests viennent prêter leur concours, ajoutant un panel d'instruments: oud, sax, flûte, hautbois, trompette, trombone et autres vents, produisant des musiques très riches mais limpides malgré le nombre important d'instruments utilisés.
Tous se fondent parfaitement dans la création d'une musique légère, pleine de rebondissements, malgré le format assez court de la plupart des morceaux, 3 à 6 min, sauf l'ultime «Doppi sensi» qui double la mise à 10 min; il faut bien cela pour un double sens!
L'album commence avec... le grand final, «Il gran finale». On est séduit, la guitare pétille, les voix, en échos, sonnent très fin 60, l'orgue est bien sûr saturé pour affirmer le style. Si ce n'était le chant en italien, on se poserait la question de savoir quel est ce groupe canterburien inconnu!
Les textes (fournis) ne sont pas en reste. Ainsi «Il bello e il cattivo tempo» évoque le Big Bang gaiement, mais nous promet le Big Crunch comme fin, momentanée, avant d'autres pompages! Le suivant, seule composition de Davide Di Giovanni, évoque le voyage d'une boulette de viande dans cet univers en expansion/implosion, avec une voix de dessin animé!
«Fine del mondo» annonce l'extinction de tout sur notre planète invivable avec la même légèreté. L'humour est la politesse du désespoir. Ces musiciens doivent être sacrément désespérés, et moi de souhaiter, égoïstement, que leur déprime se poursuive, pour notre plus grand plaisir!
Cicero 3.14
https://homunculusres.bandcamp.com/album/ecco-limpero-dei-doppi-sensi
https://www.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_mSpL960W0nKt_GjdRgVt_YO_bWA0ow6cY
16/08/2023 : Envy of None - That Was Then, This Is Now
Envy of None
That Was Then, This Is Now
progressif électronique – 21:20 – Canada / États-Unis – 2023
Ne vous précipitez pas sur cette sortie en espérant écouter un nouveau «Rush» car, bien que le nom d’Alex Lifeson figure dans le line-up, il serait tellement réducteur de poser une oreille sur cet EP uniquement pour le guitariste, tant le reste du quatuor et notamment la chanteuse Maiah Wynne apportent au groupe. La collaboration entre ces quatre artistes a été initiée par le bassiste et membre fondateur de Coney Hatch, Andy Curran.
Il a contacté son ami Alex Lifeson il y a sept ans pour lui demander de jouer quelques lignes de guitare sur des compositions qu’il travaillait.
Puis Curran a rencontré Maiah Wynne dans un concours de chansons auquel il participait en tant que juge.
L’ingénieur du son Alfio Annibalini est venu compléter la formation musicale.
Envy of None est donc un groupe plutôt bien éloigné du rock progressif. Si on devait définir son style, il pencherait plutôt du côté de la synthpop avec un son éthéré, oriental, grâce à des claviers extrêmement bien produits, mais évoque également le côté plus industriel de la pop par ses rythmiques très indus. Le titre «Lethe River» instaure le même genre d’ambiance que le titre «I Follow Rivers» repris par [le groupe belge, ndlr] Triggerfinger…
Beaucoup de claviers et de programmation, ce qui nous donne à écouter un habile équilibre avec des textures sonores à moitié synthétiques et une composition organique.
Mais ce qui marque très clairement est la voix sublime de Maiah Wynne qui rappellera le côté aérien de Beth Gibbons (Portishead) ou Dido. La chanteuse arrive à insuffler ce groove et cette légèreté qu'on avait déjà trouvés sur l'album précédent, sorti en 2022, dont sont extraits deux remix qui ne figuraient que sur l’édition de luxe.
L’écoute de ce travail apportera son lot de déçus comme l’avait initié, il y a quelque temps, l’évolution de Steve Wilson… Mais on peut l’écouter si on a vingt minutes à perdre…
Publius Gallia
https://kscopemusic.bandcamp.com/album/that-was-then-this-is-now
https://www.youtube.com/watch?v=MsN-v7pvUVA
17/08/2023 : Balletto di Bronzo - Lemures
Balletto di Bronzo
Lemures
rock progressif sombre – 58:12 – Italie – 2023
Si je vous révèle que ce nouvel album est paru chez Black Widow, vous aurez tout de suite une idée du type de musique développé tout au long des neuf titres présentés sur cette plaque, fatalement sombres. Pour mémoire, Il Balletto di Bronzo existe depuis 1969 avec, fatalement, des périodes d’arrêt plus ou moins longues. Gianni Leone, l’un des fondateurs, décide en cette année 2023 de réincarner ce groupe quelque peu mythique avec Ivano Salvatori à la basse et Riccardo Spilli à la batterie. Parmi les plages présentées ici, «Deliquio Viola», l’une des plus horrifiques de l’album, a ma préférence. Plus accessible (dans une certaine mesure), «L’Ombra degli Dei» vaut son pesant de cacahouètes également, sans pour autant oublier «Labyrinthus», ni «Certezze Fragili». Personnellement, je le recommande aux amateurs de musique sombre, même si plusieurs écoutes sont nécessaires pour s’en imprégner complètement.
Tibère
https://open.spotify.com/intl-fr/album/6bz3FqFxg7ER7krJz2G3fm
https://www.youtube.com/watch?v=a-dIiRDi3h0
18/08/2023 : Klidas - No Harmony
Klidas
No Harmony
crossover rock jazz psychédélique – 35:50 – Italie – 2023
Un disque de musique intitulé «Sans Harmonie», fait par un groupe qui se présente comme le «Géant du silence» («Klidas» en tchèque), voilà qui intrigue! Créé en 2014, Klidas c'est initialement un groupe de cover, à l'éventail large, allant du prog au jazz, passant par le psyché et même le rock alternatif, en fonction des affinités de ses membres.
Pour ce premier album, leurs créations sortent de ce panorama. La spécificité vient de l'emploi important du sax, Samuele De Santis étant même doublé par Francesco Fratalocchi sur scène. Sinon le quatuor habituel du prog est assuré par Emanuele Bury (voix, guitare), Francesco Coacci (basse, voix), Alberto Marchegiani (clavier), Giorgio Staffolani (batterie); sur scène Lisa Luminari apporte voix et seconde guitare.
Beaucoup de chanteurs mais très peu de chant dans cet album qui fait la partie belle au sax et à la guitare pour nous conduire au milieu de «Shores» avec un jazz-rock assez prévisible mais néanmoins très efficace, alors que, plus loin, «Shine» fait briller un peu de psyché et quelques chœurs au milieu de motifs de math rock. Plus intéressant.
«Not To Dissect»: jazz et rock énervé avec un riff de sax rapide, n'en disons pas plus, vu le titre. 😉
«Arrival»: tempo plus lent, le sax se fait caressant, un peu plus de chant, plus d'humanité dans cet album plutôt froid, voire un peu post-rock, comme dans «Circular» qui revient vers un jazz-rock où le sax s'exprime à l'aise dans un morceau tout en tension, qui s'achève avec puissance. Superbe!
«Trees Are In Misery»: fin rock et psyché du disque, ce morceau étale ses 7 min sans faiblir, mais sans m'enthousiasmer sur disque; ce ne doit pas être la même chose en live, où je pressens qu'il doit prendre une autre dimension!
En conclusion: un premier album prometteur quoique parfois encore un peu convenu.
Groupe à suivre!
Cicero 3.14
https://klidas.bandcamp.com/album/no-harmony
https://www.youtube.com/watch?v=gnKSHIwpFdg
19/08/2023 : Chaos and The Cosmos - Our Song
Chaos and The Cosmos
Our Song
pop psychédélique / shoegaze – 39:43 – États-Unis – 2023
Une vraie bizarrerie pour cette fois. Chaos and the Cosmos est un duo originaire de Seattle et composé de John Allday aux claviers et de Paul Langer au chant et à la guitare. Sur cet album, ils sont accompagnés d’une section de cordes; à noter que John Allday est également membre du groupe Moon Letters qui a publié en 2022 un album appelé «Thank you for the future» qui semble avoir reçu un bon accueil critique.
Autant le dire de suite, pour ce «Our Song», laissez votre sérieux et votre sens critique. Bien que sorti en 2023, cet album rassemble des morceaux datant déjà de quatre ou cinq ans. C’est en allant voir leur canal YouTube que vous comprendrez l’état d’esprit avec Paul Langer habillé en Capitaine Kirk de Star Trek et John Allday arborant une cape que n’aurait pas reniée Rick Wakeman. Cet album est en effet à considérer comme une récréation humoristique et parodique. La musique n’est pas vraiment prog mais plutôt une pop acidulée mâtinée de psychédélisme et d’ambiance sixties. Les cordes ajoutent un petit côté sympho qui lorgne du côté de ELO. Ce n’est pas non plus sans évoquer des musiques de films de série B. Le parti pris est donc résolument humoristique et sans prise de tête.
Cela fonctionne-t-il toutefois? Sur ce point, je suis plus réservé. Les morceaux sont un peu tous dans les mêmes ambiances et nous avons peu de moments vraiment surprenants. C’est charmant et mignon mais, en matière d’humour, je préférais nettement l’approche déjantée d’un groupe tel que Rachel’s Birthday qui alliait humour et brio dans la composition et l’instrumentation. Ici, tout est assez convenu, sans vraiment de relief et avec une production un peu plate qui empêche l’ensemble de décoller.
Comme souvent, il est préférable que chacun se fasse sa propre opinion mais, personnellement, je ne suis pas arrivé à rentrer dedans.
Amelius
https://chaosandthecosmos.bandcamp.com/album/our-song
https://www.youtube.com/watch?v=FORe4CkmONc
20/08/2023 : Lyonel Bauchet - Tractatus Lyra-Organismus
Lyonel Bauchet
Tractatus Lyra-Organismus
soundscape / ambient – 48:17 – France – 2023
Non, la première note n’est pas l’introduction d’un morceau bien connu de Santana. Lyonel Bauchet navigue à nouveau sur les eaux de l’étrange et des sombres sonorités évoquant l’univers des bandes originales de films créées par Hans Zimmer ou de John Carpenter. La guitare en alternance aérienne et grinçante de «Tout ce qui a lieu» accompagne quelques notes de piano très spartiates couchées sur un lit synthétique inquiétant. On y entend comme des voix venues du fin fond de l’Univers, jouxtant des bruitages abyssaux, avant l’aube lunaire d’un piano qui libère un coulis d’arpèges luminescents. Pour une très courte durée, car bien vite on repart dans les profondeurs mélancoliques des âmes océanes perdues. «Le grand miroir» égraine alors un rythme répétitif lent, vêtu de bruitages acides et angoissants. Sombre reflet de la bande originale de «The Thing» de John Carpenter. Ambiance oppressante et froide. «L’ordre a priori des choses» refait appel aux arpèges de piano qui flottent sur un tulle synthétiste, complétés par ce rythme de basse ténébreux, cousin du leitmotiv obsédant de ce même «The Thing». Des bruitages métalliques complètent cet univers glacial. Une mélodie va ensuite changer la donne en apportant un animique mélange d’espoir et de tristesse qui, au fil des minutes, prendra une ampleur quasi cinématique. Superbe construction ascensionnelle. «Le nombre des noms» m’évoque la BO de «Interstellar»; un univers parallèle né conjointement de l’Absence qui caractérise l’après vie et de la froideur des étoiles figées sur la toile noire de l‘infini. «Une seule et même réalité» marie encore une partition de piano aux flottements synthétiques où résonnent l’écho du chant de baleines subspatiales. À la fois berçant, beau et étoilé. Monde de plénitude et de mélancolie. Les compositions de Lyonel sont d’une redoutable efficacité émotionnelle. Ses arrangements naissent de thèmes simples et répétitifs où viennent se lover des ambiances construites sur un rythme complété de quelques bruitages fondus dans une trame synthétique des plus discrètes.
Clavius Reticulus
https://din7d.bandcamp.com/album/tractatus-lyra-organismus-din79
https://www.youtube.com/watch?v=07yPRHx8DvI
21/08/2023 : I Viaggi di Madeleine - Tra Luce e Ombra
I Viaggi di Madeleine
Tra Luce e Ombra
crossover / rock progressif italien – 39:59 – Italie – 2023
I Viaggi di Madeleine est né trio en 2015 et, après un bon premier album éponyme en 2019, c'est un duo formé de Francesco Carella (clavier, voix et guitare) et Giuseppe Quarta (batterie) qui poursuit les voyages de Madeleine, ici entre ombre et lumière.
«Migrazioni» est le premier des voyages du disque. Il évoque ceux pour qui c'est aussi le dernier. Le sud de l'Italie connaît bien cela et le groupe est de Lecce! Aussi, l'atmosphère très marquée Goblin (groupe qui fit, avec grand talent, les B.O. de films d'horreur dont nombre de Dario Argento) est parfaite ici pour exprimer l’indicible. Cette piste de 7 min est hétérogène; ainsi à mi-parcours on trouve du Francis Lai, puis un break abrupt se conclut sur le début du morceau. Cependant cette piste initiale totalement instrumentale est appétissante!
Autre ambiance pour le suivant, «Frequenze solari», très Deep Purple, avant de pointer vers d'autres horizons plus rock. Chanté en italien, le morceau finit au son du sax langoureux de Roberto Gagliardi. «Poker», plus jazzy avec les vocalises du plus italien des bassistes anglais, Richard Sinclair, en guest, vocalise sur un Rhodes aérien, avant qu'une pulsation orientalisante de synthé ne découvre une nouvelle orientation pour cette caravane décidément bien éclectique! «Bronx»: sirènes, texte mi-chanté mi-parlé, rock oppressant passant à cent à l'heure. «L'ultima battaglia» s'introduit médiéval et met en place un thème sautillant et martial, mutant en une rythmique lourde et lente; l'orgue quasi dissonant apporte le malaise de la guerre. Le tempo s'accélère jusqu'à la victoire finale d'une ultime bataille.
«Androgino»: un synthé aérien égraine quelques notes avant qu'une basse électronique ne ramène un son Goblin, mais le chant et le Moog transcendent cette piste en une superbe ballade.
«Nostalgie»: récitation, tempo slow et bien vite un superbe violon (Francesco Del Prete) s'envole sur un Rhodes réverbéré, fournissant une belle conclusion à cet album, peut-être un peu trop hétéroclite, mais très plaisant!
Cicero 3.14
https://open.spotify.com/intl-fr/album/78cqQkpowo4U40bMzdfJMm
https://www.youtube.com/watch?v=0uxiVLMX_xA
22/08/2023 : The Cry - The Cry
The Cry
The Cry
progressif expérimental / krautrock – 55:49 – France – 2023
Il y a quelque chose de fascinant dans la musique improvisée de ce trio strasbourgeois composé de Christine Ott, Mathieu Gabry et Pierre-Loïc Le Bliguet, ce dernier responsable de la batterie et des percussions, le précédent penché sur le piano, les synthés et les pédales d’effet, la première concentrée sur les ondes Martenot, le piano et le Korg: The Cry distille une atmosphère vaporeuse, nonchalamment stratosphérique; sans abus de nappes malgré les agrégats de textures, aux sonorités aspirées, inspirées, respirées; lentement volutée comme une lave encore mouvante, tiède ou brûlante mais plus à ébullition, apaisée sur les pentes du volcan; ouverte sur les mondes mais stricte dans sa progression. Des sept pièces de cet album (le premier), enregistré live, «Fire of Love», qui l’entame, s’étale sur plus de vingt minutes – les sons organiques du Korg MS20 stimulent l’évolution du morceau, sa métamorphose – et se réfère au film documentaire éponyme qui rend hommage aux volcanologues Katia et Maurice Krafft, est l’axe déterminant de cette séance d’un jour aux Downtown Studios de Strasbourg, où Le Bliguet rejoint pour la première fois les deux autres musiciens, envoûtés par le groove du batteur (écoutez-le soulever les ondes Martenot dans «Chorus Alpha») qu’ils découvrent quelques mois plus tôt lors de son concert de fin d'études. Une musique troublante – comme sa pochette (évidemment) Munch-ienne.
Auguste
https://the-cry.bandcamp.com/album/the-cry
https://www.youtube.com/watch?v=7sspYR02UoA
23/08/2023 : Malombra - T.R.E.S.
Malombra
T.R.E.S.
progressif sombre – 60:35 – Italie – 2023
Après un quart de siècle d’existence, Malombra revient aux affaires avec cette nouvelle offrande aux bons soins de Black Widow. Bienvenue dans leurs cauchemars! D’emblée, il faut remarquer que les premiers enregistrements datent de 1997-1998 par le line up original, mais le mixage final est réalisé par le line up actuel, soit Matteo Ricci (basse, Mellotron, guitare), Fabio Cuomo (claviers, percussions), Giulio Gaietto (synthétiseurs, batterie) et Mercy (chant). De très belles sensations musicales sont à trouver sur cette plaque (le long «Cerchio Gaia 666», plus de dix-sept minutes, ou «Fantasmagoria 1914»). Il est juste dommage que le chant se montre, par instants, quelque peu approximatif… La note aurait été nettement plus élevée!
Tibère
https://open.spotify.com/intl-fr/album/4H8lIBGrHM45dhiPWR2Z9U
https://music.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_kaS-GwBZ_EGPXXCP-PAz29aArOpNfNBTo
24/08/2023 : Gravity Fields - Disruption
Gravity Fields
Disruption
rock progressif – 53:37 – Espagne – 2023
Gravity Fields est un nouveau groupe espagnol de rock progressif instrumental composé d'Alex Ojea (batterie), Toni Munné (basse), Jordi Prats (guitare) et Jordi Amela (claviers). Ils nous proposent un album recherché aux influences oscillant entre rock progressif, jazz-rock et électronique. «Disruption» est rassemblé sous un concept directeur axé sur la manière dont l'espèce humaine évolue à travers un chemin qui nous pousse vers un avenir très incertain. «Rage» qui commence cet album est stylé post-rock et space rock avec une fusion de la guitare et des claviers. «Mutants» qui enchaîne nous dévoile le côté jazz-rock du groupe. «The hard core» ne verse pas, heureusement pour vous, dans le metal extrême mais continue avec un jazz-rock progressif sonnant très années nonante. Le son y est particulièrement cristallin et on apprécie la moindre note, la moindre direction prise. On y retrouve l’influence de nombreux groupes de prog classique comme Camel, Asia, Caravan ou encore par moments Deep Purple. J’aime beaucoup «Detuned Love»; la rythmique de batterie évolue en permanence et les instruments s’y intègrent de manière fluide, agile et réfléchie. Franchement, Gravity Fields est un groupe à découvrir absolument; ils ont une originalité et une qualité de composition très intéressantes. L’album n’a pas de réel défaut et ne demande qu’à être écouté et partagé. On entendra surement encore parler de Gravity Fields les prochaines années. Bonne écoute.
Vespasien
https://gravityfields.bandcamp.com/album/disruption
https://www.youtube.com/watch?v=vNldQCdOT7w
25/08/2023 : The Drinking Club - ...really?!?
The Drinking Club
...really?!?
rock néo-progressif – 52:01 – Royaume-Uni, Australie – 2023
The Drinking Club, si je dis Marillion, IQ, Pendragon ou Pallas... Album fabriqué à distance par web et transferts sur des textes retraçant les aberrations politiques, personnelles, climatiques, immigrationnistes et religieuses; opus qui se veut comme l’envie de copains de se prouver qu’ils peuvent faire ce dont ils ont rêvé en secret; un prog mélodique, symphonique et dynamique.
«Eternity» à l’ouverture néo-symphonique, synthés mélodiques spleen; solo guitare sombre sur du Pallas, ça monte jusqu’à la batterie rageuse amenant la voix feutrée de Kevin, le tout contrôlé par un piano; des chœurs pour terminer. «Ticking Clocks» mélodie dérivant sur un Pendragon intimiste, texte sur le climat, mais le principal c’est bien la musique; arpège guitare à chœurs pour faire passer le désarroi? «But for the Waves» sur un jingle d’info sur l’immigration; heureusement que j’assimile la voix comme instrument sinon je serais plus triste; une guitare rotheryenne, agréable, des claviers cotonneux, Marillion vient de passer; break vocal en deçà vite sauvé par un solo guitare bien juteux, les 80 à leur apogée; le final avec redite voix-off. «A Song of Life» morceau consensuel court où la voix est mise très en avant, partant sur une comptine anglicane avec trompette bucolique. «Zero Sum Game» plus IQ de fait avec des synthés en sac qui inondent et le vocal convenu; une déclinaison au tiers se veut intimiste avant l’arrivée de Tony qui lance des notes solo à fondre; final voix-off ouvrant «Light Years» pour le titre épique et son intro dark wave à la Joy Division; sombre et envoûtant, spleen avec trompette magnifique et tristesse heureuse, tout ça pour une séparation forcément douloureuse; à mi-parcours la trompette se veut jazzy tandis que les synthés virevoltent et amènent frissons. «A Song of Death» intro sombre encore sur la vie, la mort, traité de manière funky désopilante comme la trompette.
The Drinking Club ne fait pas de clin d’œil au néo, il lui prend un œil carrément; un premier opus agréable à écouter, néo, mélo et rien de nouveau; c’est beau mais les 80 sont bien derrière nous et la créativité manque obligatoirement même si la musique est belle; pour ceux qui baignent dans cette période, vous serez conquis.
Brutus
thedrinkingclub.bandcamp.com/album/really
https://youtu.be/UykVY2BtW1E
26/08/2023 : Victor Go - In a Trap of Anticipations
Victor Go
In a Trap of Anticipations
rock progressif – 62:00 – Ukraine – 2023
Originaire d'Odessa, le compositeur/multi-instrumentiste Victor Go se dit inspiré par de nombreux musiciens dans un large éventail de genres, en particulier le rock (The Beatles, Led Zeppelin, Queen), le rock progressif (Yes, Genesis, Gentle Giant, Emerson Lake & Palmer), mais aussi le jazz (Pat Metheny, Al Di Meola).
Il nous présente les 12 titres de son 6e ou 7e album, entouré de quelques collègues à la basse, au violoncelle et à la batterie.
Et comme vous pouvez vous y attendre après la lecture de mon intro, de nombreux genres sont reconnaissables dans cet album.
Cela nous donne un recueil agréable et léger d'influences «teintées estivales» avec un concept qui fonctionne plutôt bien ici, fusionnant pop et musique progressive; les deux genres se marient admirablement, de manière presque naturelle, avec un résultat étonnamment atypique, se promenant du Canterbury au latino en passant par le spatial, avec des claviers extrêmement brillants, des morceaux de guitares aux expressions diverses et pétillantes.
J’avais découvert, par hasard, le titre «Headwaters» juste quelques jours avant de recevoir l’album et j’avais été très agréablement surpris, dans la première partie, de l’ambiance, que je qualifierai «à la Gato Barbieri» (sans saxo)…
Un album, sans prétention, dans l’air du temps, chaud, musicalement cosmopolite, ouvrant sur plein d’horizons, à écouter indifféremment en sourdine durant l’apéro sur la terrasse ou à fond dans sa voiture sur la route du soleil.
La production est soignée et chaque instrument est valorisé et à sa juste place. La section rythmique carrée, parfois un peu lourde, assure néanmoins du début jusqu’à la fin et les amoureux de sons vintage se satisferont avec de nombreux passages.
Une bien bonne découverte, donc, qui vient compléter l’offre ukrainienne aux côtés du célèbre Antony Kalugin.
Publius Gallia
https://victorgo.bandcamp.com/album/in-a-trap-of-anticipations
https://www.youtube.com/watch?v=IJaQO7Uwvdo
27/08/2023 : Monika Roscher Bigband - Witchy Activities And The Maple Death
Monika Roscher Bigband
Witchy Activities And The Maple Death
art rock / big band progressif / math-jazz – 64:17 – Allemagne – 2023
«8 Prinzessinnen», avec ses hachures et sa lancinance titubante ouvre, comme sur un seul pied, ce nouvel (et troisième) album de la munichoise Monika Roscher qui, avec son big band (des trompettes, flûtes, clarinettes, trombones, didgeridoo, basse, guitares, piano, batterie) étale une musique stupéfiante pour qui aime les cuivres, les rythmes tronçonnés du math-rock (ici plutôt du math-jazz), les relents (obscurs, fumeux et brassicoles) de cabaret, les drôles de chants d’oiseaux («Witches Brew: Dance Of The Sleepy Spirits»), le déséquilibre constant de ce qui est à la fois fort comme un roseau et fragile comme un chêne: on est au cirque, on est à la fête foraine, chez Marcel Carné, chez Jean Cocteau, parmi les Enfants du Paradis: ça foisonne et ne s’arrête jamais, coloré, encombré, tourbillonnant comme les quilles du jongleur, débordant comme le clown de son costume trop étroit, convertissant comme un prêtre ses ouailles – et, si l’on n’y prend pas garde, épuisant à dose constante.
Auguste
https://monikaroscher.bandcamp.com/album/witchy-activities-and-the-maple-death-album
https://www.youtube.com/watch?v=j0d7HE64frQ
28/08/2023 : Skáld - Huldufólk
Skáld
Huldufólk
néo-folk – 43:48 – France – 2023
Avec ce troisième album de Skáld, nous quittons le monde de l’eau évoqué sur «Vikings Memories» (http://www.progcensor.eu/2021-janvier.html#NzrCNBNL) pour les contrées rocheuses et montagneuses habitées par des créatures cachées: le peuple Huldufólk. Nous quittons hélas également les chants de Justine et de Pierrick pour une pléiade d’autres chanteurs et musiciens, treize au total, mais tout aussi bons. Parmi eux, le seul subsistant de ce projet: le producteur et compositeur Christophe Voisin-Boisvinet qui a travaillé auparavant et durant plusieurs années avec de nombreux artistes de variété française et aussi Luc Arbogast.
Comme dans les albums précédents, à part les reprises, les textes sont écrits en vieux norrois et, concernant les instruments traditionnels, on en retrouve un peu plus, comme le morin khuur, le didgeridoo ou encore le hurdy gurdy.
Les titres sur cet album sont tantôt teintés de douceur, comme «Mánin Líður», voire d’apaisement («Hinn Mikli Drekir»), tantôt de rythme guerrier comme «Ríðum, ríðum» (à la première minute, on entendrait un peu The Hu mais en moins puissant). Pas moins de huit chanteurs et chanteuses permettent un beau contraste entre les chants sombres ou éraillés masculins et chants aériens ou mélodieux féminins; soulignons, par exemple, «Då Månen Sken», «Elverhøy», ainsi que mon titre préféré de cet album, «Ljósálfur», où la chorale féminine me rappelle Le Mystère des Voix Bulgares. Skáld propose également sa version de «Herr Mannelig», jolie mais un peu trop uniforme, et se lance dans la reprise de «Du Hast», reconnaissable mais pas calquée, ainsi que «A Forest», harmonisée comme un chant incantatoire.
Je pense que ces elfes et trolls prendront toute leur dimension sur scène lors de festivals folk/fantastiques!
La Louve
https://open.spotify.com/album/6YJbqjVTiFgR9rTRsQIsJ6
https://www.youtube.com/watch?v=epGvHSRizT0
29/08/2023 : K'mono - Mind Out of Mind
K'mono
Mind Out of Mind
crossover – 45:25 – États-Unis – 2023
K’mono est un projet d’un trio de musiciens du Minnesota. Ceci constitue leur second album. La plage titulaire (la plus longue avec ses neuf minutes) se donne à se découvrir à votre écoute et développe une forme de pop progressive où des claviers peuvent, par instants, se référencer à des sonorités familières à nos oreilles. On pourrait citer Steely Dan pour certains côtés de leur musique, notamment sur «Good Looking». Un peu de Gentle Giant peut être trouvé sur «Tell Me The Lore». Sur «Millipede Man», c’est une basse funky en diable qui nous accueille, nous éloignant quelques instants du prog pur jus. Le dernier titre de cet opus («Answers In The Glass») utilise également la basse (l’influence de Chris Squire se fait d’ailleurs sentir), mais également des synthés sautillants et une fin tout en douceur.
Tibère
https://kmono.bandcamp.com/album/mind-out-of-mind
https://www.youtube.com/watch?v=znZhBERtAP8
30/08/2023 : The Moondig - Ca
The Moondig
Ca
rock psychédélique – 64:52 – Belgique – 2023
Certains visent un son nouveau, une musique qu’aucun musicien n’a encore jamais produite, une combinaison de notes, un timbre, un rythme, plus ou moins distinctement imaginés; d’autres choisissent de pousser plus loin dans une voie défrichée par leurs prédécesseurs: le quatuor belge est de ceux-là, qui ancre ses racines dans une époque (le tournant des années 1960-1970), un courant musical (le psychédélique, embranchement allemand de l’Ouest – mais pas que – vers le kraut et le space rock) et culturel (la contre-culture et le vent de liberté qui l’accompagne) et une pratique (l’improvisation) où spontanéité et production se rejoignent au point d’étaler, depuis sa création en 2021, une discographie (digitale) pléthorique. Pour «Ca», aux quatre instruments de base (la basse de Jan Vermeulen, la batterie de Timo Jacobs, la guitare de Tim Nonneman et les claviers de Tom Bessemans) s’ajoutent une deuxième guitare (Erik Heyns) et le saxophone ténor de Dirk Reyners, qui injecte (et complète ainsi le travail de la pédale wah-wah) une touche de chaleur onirique aux développements, souvent longs, proposés par The Moondig – qui n’invente donc rien, mais le fait très bien.
Auguste
https://themoondig.bandcamp.com/album/ca
https://www.youtube.com/watch?v=bI6zhXvuqsA
31/08/2023 : The Rosen Corporation - Nostalgia
The Rosen Corporation
Nostalgia
ambient / spatial – 59:04 – Allemagne – 2023
Je vous parle (me souviens) d’un temps que les moins de vingt ans ne peuvent pas connaîtreueu, comme disait un grand nom de la chanson française qui n’a jamais rien eu à voir de près ou de loin avec l’e-music: un temps, une époque où l’on n’imaginait même pas que l’ordi et la clé USB seraient inventés. Une époque où la sortie d’un nouvel album était un réel événement pour le fan. Le chroniqueur que je suis a fait ses armes en 1976 pour le fanzine «La Boîte à Musique», dirigée alors par Bernard Scholl, dans lequel je publiais mon premier article consacré au concert de Tangerine Dream à l’auditorium Paul-Émile Janson à Bruxelles. Déjà fan d’e-music et de la Berliner Schule que je découvrais alors. Je devais compter mes deniers pour me payer le vinyle choisi. Aujourd’hui, les artistes bénéficient du numérique et leur production devient exponentielle. Ce qui n’est pas toujours un bien. Ce n’est pas le cas pour Peter Baldwin, l’âme créatrice de la Corporation de la Rose. À tel point que je dois sélectionner l’opus que je vais vous présenter parmi les sorties en cascade du mois en cours. Une seule et unique longue plage sous ce titre énigmatique décrit sur Bandcamp comme inspiré de l’électronique des années 72 à 82, un rêve du futur vu du passé, méandres circonvolutifs de mondes fantastiques, surréels et psychédéliques. Musique, surtout, d’un calme céleste et d’une sérénité absolue. Presque une heure de voyage sur des sonorités spatiales serties d’une mélodie simple et d’une redoutable et scintillante efficacité. Le leitmotiv répétitif d’une grande quiétude s’accompagne d’un phrasé de basse synthétique qui se fait le vaisseau impalpable nous entraînant dans le vortex où s’éveillent des sens subliminaux. Au fil des minutes, l’auditeur est entraîné dans un flux harmonique qui l’aspire à coup sûr dans une sorte de transe hypnotique jusqu’aux surprenantes dix dernières et l’aboutissement du trip. Une musique comme celle-ci ne se décrit pas, elle se savoure d’un bout à l’autre et ne souffre aucune interruption. C’est une reconstruction de l’âme, une élévation séraphique, une transfiguration akashique. C’est la preuve de l’existence d’un monde où la matière n’est plus, où la définition du mot «être» prend toute sa signification. Le vrai monde qui pourrait nous laisser croire qu’effectivement la mort n’est pas une fin mais un début. La musique de la métamorphose. La fin du mythe «Dieu» et le début de l’ultime Vérité.
Clavius Reticulus
Bandcamp: https://the-rosen-corporation.bandcamp.com/album/nostalgia