Septembre 2023

01/09/2023 : Yossi Sassi & The Oriental Rock Orchestra - Prediluvian

Yossi Sassi & The Oriental Rock Orchestra
Prediluvian
crossover progressif oriental – 41:05 – Israël – 2023
Yossi Sassi, membre des célèbres Orphaned Land, a sorti un album dès 2012; son 6e explore et fusionne les frontières musicales; il utilise des instruments traditionnels orientant sa lecture sur... l’Orient en surfant sur l’empreinte rock-tradition avec bouzouki, violons, charango et bouzoukitara (fait maison entre guitare et bouzouki) orientaux.
«On Shoulders of Nephilim»: atmo sombre sur un acoustique guitare mystérieux. «Uriel Machine» déboule, rock prog de là-bas bien rythmé avec montée suave. «Oopart»: rock satrianesque funky avec mélodie arabisante et final Serra Knopfler d’Orient. «Atlantis»: banjo mélancolique amenant une sérénade slide guitare ambiante, un pad au fond et un rythme sicilien, beau avec ce solo guitare évolutif. «Armaros Fall»: rock pêchu avec Ross des Haken aux vocaux; plus longue, AOR, avec une évolution progressive aux chœurs orientaux qui tient haut le pavé; finale harmonique vocale. «Anelo»: interlude arpège guitare minimaliste avec flûte typée sur un vocal plaintif.
«Watchers of Iyrin» s’enfonce dans les méandres du désert, le vent souffle, les instruments en rajoutent pour faire partir sur mille nuits excitantes. «Architect of the Stars»: intermède électronique jazz-rock plat avec une flûte qui fait louvoyer et un air immédiatement ensorcelant, entraînant. «Vision of Water» pour un thème alcalin, danse sur l’eau frénétique; l’ambiance de la danseuse évidemment présente. «Kumlar»: plus traditionnel avec la flûte de Pan enfin de là-bas qui distille un ton tranquille et beaucoup d’émotion. «Sirius» revient à un air rock guitare avec effluves de «Vidocq» et de Steve Vai pour un délire de notes, Yossi très bon et trop rare dans cette position. «The First Sunrise» jazzy à la Al Di Meola emmène sur le souvenir d’un de nos premiers levers de soleil et de son émerveillement, mis en scène par Yossi avec ses mille doigts.
Yossi Sassi entouré de son orchestre s’enfonce dans les méandres des sonorités orientales, sombres, éphémères, douces; une thérapie musicale pour lutter contre l’atmosphère du monde actuel, un son qui par contre s’écarte de plus en plus du metal à mon grand regret car très à l’aise dans ses soli; lorgnant plus vers Hackett & Djabe. «Prediluvian»: celui qui a vécu avant le déluge ou le voyage musical hébraïque hors frontières pour moment de détente.
Brutus
https://yossisassi.bandcamp.com/album/prediluvian
https://youtu.be/5v-M-wNmWAA

02/09/2023 : Motorpsycho - Yay!

Motorpsycho
Yay!
folk progressif / psychédélique – 42:08 – Norvège – 2023
Voici un 26e album studio en 33 ans d'existence pour le trio de Trondheim (un creuset prog de 200.000 habitants avec, par exemple, Arab's in Aspic et Kornmo). Les fondateurs Bent Sæther (compos, basse et voix) et Hans Magnus «Snah» Ryan (guitare, chœur) sont toujours là et la batterie est tenue par Tomas Järmyr (depuis 2017). Ils nous livrent, généralement, un heavy rock psyché parfois quasi metal où les voix sont toujours très soignées. Souvent chroniqués dans nos colonnes, ils ne nous sont pas inconnus, mais, si l'on garde les harmonies vocales, on change tout le reste. Vraiment. Les références sont à trouver entre America, CSNY et Paul Simon! Les instruments des 2 seuls guests convoqués confirment l'espace musical: Lisa-Maria Linnéa Isaksson à la flûte et au chant, et Josefin Runsteen au violon. Les 2 premières pistes sont acoustiques, organiques; c'est frais, on croirait sentir l'odeur de l'herbe grasse au printemps. Exit les epics de 12 ou 20 min comme sur le précédent; c'est généralement plus ramassé, plus immédiat, sauf sur le superbe «Hotel Daedalus» où il fait bon se perdre pendant quasi 8 min. On y reviendra.
Peu à peu, les pistes s'électrifient parfois mais sans s'éloigner de cette ambiance douce tels «Dank State» du CSNY où les voix enchantent, «WCA» plus chaloupé où les voix convoquent America.
«Loch Meaninglessness & the Mull of Dull», avec son riff en accord ouvert, apporte une note étrange, world, médiévale avant que le plus traditionnel «Hotel Daedalus» ne nous ouvre ses portes. La richesse des voix perdure dans un magnifique morceau soft psyché symphonique. La superposition des violons et de la guitare qui solifie est superbe!
«Rapture» qui conclut l'album dans un retour organique exprime bien le sentiment que provoque ce feel good album et qui pourrait être son titre «Ravissement».
Cicero 3.14
https://motorpsycho.bandcamp.com/album/yay
https://www.youtube.com/watch?v=8N71-adU9Ww

03/09/2023 : Búho Ermitaño - Implosiones

Búho Ermitaño
Implosiones
space rock – 31:06 – Pérou – 2023
Búho Ermitaño a été formé en 2008, à Lima (Pérou), par les guitaristes Franz Núñez et Diego Pando.
La formation actuelle, un sextet, s’est fixée en 2014. C’est également l’année de la sortie de leur premier album «Horizonte». Il faut ensuite attendre neuf ans pour qu’un deuxième arrive dans les bacs.
À part les bonnets, les lamas et le Machu Picchu, je dois bien vous avouer que je ne connais pas grand-chose du pays et la flûte (de Pan) est jusqu’à présent ma seule référence musicale! Voyons donc ce que nous réservent les sept titres de cet O.M.N.I. !
Búho Ermitaño est un groupe instrumental, même si quelques voix se laissent entendre ici ou là («Explosiones»). Le groupe semble se poser comme un chef de file de la scène underground de Lima et, en marge de leurs engagements envers Búho Ermitaño, la plupart des membres du groupe sont activement impliqués dans de nombreux «projets musicaux d'expérimentation sonore».
Étonnamment, le titre «Preludio» est le troisième de l’album. C’est aussi le morceau le plus court. Entrelacées de chants d'oiseaux, les guitares pastorales de la mélodie offriraient pourtant une introduction radicale aux assauts expérimentaux qui habitent les autres parties de l'album.
Quelques traits de rock lourd («Herbie»), des passages funk, jazzy («Renacer») et même une touche de râga indien («Buarabino»), pour faire bonne mesure, émergent des explorations instrumentales hypnotiques, passages mélodiques et éléments de rock cosmique. La cithare, la flûte et la charango (un type de luth andin), parmi lesquels se glissent les guitares wah-wah, apportent la touche folk andine qui permet de rendre unique le son du groupe.
Un album qui peut prétendre, sans honte, se ranger tout à côté de Hawkwind. En espérant ne pas attendre neuf autres années pour pouvoir écouter un troisième... disque.
Publius Gallia
https://buhrecords.bandcamp.com/album/implosiones
https://www.youtube.com/watch?v=LQXpZ16719c

04/09/2023 : Stefano Panunzi - Pages from the Sea

Stefano Panunzi
Pages from the Sea
art jazz / ambient – 67:12 – Italie – 2023
J'avais déjà eu la chance de chroniquer son 3e album (https://www.progcensor.eu/2021-juin.html#C8e9zkcY). Donc, quand j'ai vu ce nouvel opus dans la liste des sorties, j'ai très vite levé le doigt! Stefano continue à composer et jouer des claviers. Il s'entoure toujours d'une myriade de musiciens talentueux pour réaliser sa musique raffinée. Parmi les 20 guests qui prêtent leur concours, je dénonce les plus connus, par moi: on trouve Fabio Trentini (Le Orme, basse sur 4 titres), Jakko Jakszyk (King Crimson) au chant sur 3 titres, Pat Mastelotto (King Crimson, batterie) et son compère dans Stickmen, Markus Reuter (touch guitar), officiant sur un titre chacun. Malgré cela, les 12 titres montrent une totale cohérence, grâce sans doute au maître d’œuvre et à la mise en son parfaite que j'avais déjà remarquée sur le précédent CD.
«Which Truth», instrumental d'ouverture où le flugelhorn (sorte de trompette au son plus moelleux) évolue entre soft jazz et ambient, pour une rêverie cinématique reverbérée. «Not Waving, But Drowning»: dans une ambiance plus sombre, douce batterie syncopée, basse qui tricote de son côté, guitare lointaine et la voix de Jakko nostalgique. Ces 1res pistes m'évoquent Japan et David Sylvian, des '80 où Fripp tissait parfois sa toile. Superbe.
«The Secret» où l'on sent un peu plus que le maître d’œuvre est claviériste, mais la magie opère toujours; c'est fourni et limpide! À l'inverse de cet instrumental, «The Sea» met en valeur les voix qui évoluent entre Anathema et Wobbler sur un tempo lent.
En 4 pistes il a gagné, et il en reste 2 fois plus à savourer! Mention spéciale aux 2 dernières: «An Autumn Day» sonne plus Fripp, sans doute grâce à la présence remarquable de Markus et à une fin multicouche math (quoique très brillante). «The Sea Woman»: retour final vers le rythme aérien et syncopé de Japan pour une apothéose qui me laisse loin en moi, dans une douce torpeur, dont il faut que je sorte pour terminer cette chronique. D'ailleurs que faites-vous encore ici? Ruez-vous sur le lien et profitez!
Cicero 3.14
https://stefanopanunzi1.bandcamp.com/.../pages-from-the-sea
https://www.youtube.com/watch?v=XjHpoNiY2_s

05/09/2023 : Giant The Vine - A Chair at the Backdoor

Giant The Vine
A Chair at the Backdoor
crossover progressif / post-rock – 46:55 – Italie – 2023
Giant The Vine, groupe italien de post-rock progressif, jouant depuis 2014 et déclinant des notes atmosphériques de toute beauté; nom tiré du groupe Gentle Giant et d’un morceau des Genesis, tout est dit; des sonorités amenant l’émotion idéale pour voyager loin et agréablement dans ce 2e opus.
«Protect Us from the Truth» post enjolivé avec déclives progressistes, un saxo, un crescendo avec riff, un solo final mélancolique, onirique génésisien qui en fait un chef-d’œuvre. «Glass» arpège guitare spleen me rappelant le fameux «Capt’aine», Kwoon pour un tableau post envoûtant pour s’immerger encore plus loin, mono comme le groupe, beau comme une montée vers l’Olympe. «The Potter's Field» sombre et ténébreux, sur les enterrés de Hart, sur le covid et son horreur, beauté sinistre. «Jellyfish Bowl» représentant le vide et la recherche d’occupation, comme d’écouter une musique de film; air latent, monolithique, primaire, Sakamoto en ligne de mire; le break médian sur le piano cristallin de Simone et la montée onirique rappelle Genesis et King Crimson versions porc-épic. «The Heresiarch» change de ton avec un air rythmé rock énergique pour le réveil, la basse incisive qui enchaîne sur «The Inner Circle» cinématique, chœur religieux qui dénote, des voix au loin, le piano d’Ilaria solennel pour «parler» de Dolcino et Marcion et leurs hérésies. «A Chair at the Backdoor» tiré d’un vers de Talk Talk, sur la crainte d’une arrivée, sur la porte pour se dérober; titre long en crescendo post, Gregory avec son saxo l’emmène sur les relents crimsoniens frénétiques avant le final plus posé.
Giant the Vine a pris de Mogwai, de Radiohead, de Wilson, et a mélangé pour sortir cet album planant magnifique, post-rock avec du Genesis et King Crimson des 70 un peu, du rock punk, le rock de Tool, des premiers Porcupine Tree; onirique, novateur, une grande bouffée d’air frais musical.
Brutus
https://giantthevine.bandcamp.com/album/a-chair-at-the-backdoor-2
https://youtu.be/rYjtohVGq3U

06/09/2023 : Mouth - Getaway

Mouth (mouth)
Getaway
rock progressif – 43:59 – Allemagne – 2023
«Getaway» démarre avec un épique, éponyme, aux relents ancrés dans l’expérience de «666», l’album franco-hellénique (pourtant partis pour Londres, les musiciens se fixent à Paris), historique (1972) et ravageur (la volonté de Vangelis d’aller vers l’expérimental met fin au groupe après trois Long Playing) d’Aphrodite’s Child, le groupe de Papathanassiou, Demis Roussos et Lucas Sideras: on s’attend à entendre surgir sept trompettes sonnant fort, fort, fort, sur les chevaux des quatre cavaliers, au mariage du mouton – le break d’avant-final donne un désarçonnant coup d’«Imagine». Beaucoup plus court, «On The Boat» confirme les liaisons dangereuses entre psychédélique et progressif, suivi du crimsonien «Sea» aux guitares étirées et à la rythmique décalée, lui-même détrôné par le lourd et pénétrant «Purge & Hunt» qui me rappelle les heures roses (et bleues) de Frijid Pink (de Detroit) à l’aube des années 1970, tandis que «Once» et son pas d’éléphant et «Drowning» et ses nappes de claviers figurant cet entre-deux-eaux dans lequel les poumons se remplissent d’eau, clôturent un album enthousiasmant – il a la fraîcheur, l’imperfection (le chant aux limites évidentes, intelligemment mixé en retrait), le côté brouillon qui font craquer.
Auguste
https://mouthprog.bandcamp.com/album/getaway
https://www.youtube.com/watch?v=YWveU1ihT04

07/09/2023 : Deep Imagination - The Children of the Moon

Deep Imagination
The Children of the Moon
dark wave / gothique – 41:21 – Allemagne – 2023
Si l’on pouvait trouver des relents jazzy ou des ressemblances avec Pink Floyd dans le «Live at Electronic Circus Festival» de 2011, il n’en est plus question ici (ou alors de façon très anecdotique et pas celui de «Dark Side of the Moon», même si notre satellite est aussi à l’honneur; on ira plutôt chercher dans leur période psyché). Par ses ambiances ténébreuses, le présent opus évoque le style gothique d’un Saviour Machine, fût-ce par le chant crépusculaire tout en restant malgré tout moins luciférien. Assez éloigné des premières œuvres instrumentales électroniques «Scapes» (2005), «Gemstones» (2008) et «Awareness» (2010), cet album comporte des intonations vocales à certains moments proches de celles de Till Lindemann (Rammstein) (particulièrement dans le très incantatoire et mystique «The Magic Moon»); mais ne faites surtout pas une comparaison de style, on est à des années-lumière du metal. Thorsten Sudler-Mainz, maître opérateur de cette imagination profonde, s’occupe de tout: enregistrement, mixage et production, comme si le fait d’être en sus multi-instrumentiste (chant, claviers, guitares, basse et percussions) ne suffisait pas. Cet album est son sixième projet solo et succède à l’excellent «My Silent Celebration» d’il y a trois ans. Plus sombre qu’icelui malgré la voix de Ann Kareen qui vient s’ajouter par touches subtiles à celle de Thorsten pour écarter les nuages plombés d’un univers fait de matière noire. Le jeu de guitare de Achim Von Raesfeld allume lui aussi des étoiles dans cette noirceur un peu glauque. Les percussions drapées d’un léger écho ajoutent au mystère de ces enfants de la Lune. «The Silence of Winterland» est, avec «The Magic Moon», l’un des joyaux flamboyants de cette nébuleuse opaque, semant des particules d’espoir assombries par un chant grave, même si celui-ci est tempéré ponctuellement par la voix séraphique de Ann Kareen qui en reconduit l’impalpable silence. Conjointement, la voix de Ann et les arpèges de guitare de Achim ouvrent un portail luminescent dans cet obscur vortex où flottent comme des lamentations («No Words to Say»). Résonances cristallines appuyées par la basse et les riffs complétés de percussions au tempo lancinant. Cet album est comme un diamant noir qui jetterait d’improbables éclats de lumière sélénite. Une belle réussite à déguster sans modération.
Clavius Reticulus
https://www.deep-imagination.com/home
https://www.youtube.com/watch?v=qBaqx764Y1c

07/09/2023 : Covet - Catharsis

Covet
Catharsis
rock psychédélique – 28:30 – États-Unis – 2023
«Catharsis» est le troisième EP de Covet. Trois personnes constituent le groupe qui balance une sorte de psychédélique surf (on n’est pas originaire de Californie pour rien). À la guitare, on trouve Yvette Young, à la basse, c’est David Adamiak qui officie tandis que la batterie est l’apanage de Forrest Rice. Remarquons dès le début qu’Yvette nous balance de sacrés riffs à la tête. Des chœurs harmonieux nous accueillent dès l’ouverture de «Coronal» et la guitare fait des merveilles. Avec «Vanquish», on ne serait pas étonné de voir débarquer d’évanescentes vahinés au sein de notre salon. Voici donc l’album parfait pour vos soirées de vacances!
Tibère
https://covetband.bandcamp.com/album/catharsis
https://www.youtube.com/playlist?list=PLawMNLVMLgQVKWP4R0glaruz7gBtqs-UL

08/09/2023 : François Long - Get Away

François Long
Get Away
rock 'n' roll – 43:24 – France – 2023
Fin 2020, mon collègue Centurion présentait un guitariste amiénois qui se consacre à la musique depuis presque 40 ans: François Long, peut-être plus «anonymement» connu comme un des Rabeats, groupe de reprise des Beatles depuis 1999, qui a joué dans tous les Zéniths de France et des dizaines de fois à l'Olympia et a également parcouru plusieurs continents.
En 2014, sa longue expérience musicale l’avait amené à créer sous son propre nom, et ce avec l’aide de quelques amis et invités, dont Gail Ann Dorsey (Bowie, Kravitz…), son premier album studio, «The Seven Others». Un deuxième album, «Light Years From Home», paraissait deux ans plus tard. Et c’est en 2018 qu’il se consacrait à l’écriture de son troisième album, «Breathe».
Aujourd’hui, il s’agit de faire connaissance avec son nouveau et quatrième LP de dix titres: «Get Away». Précisons tout de suite que notre artiste se charge de presque tous les instruments et boucles.
Alors, c’est assez difficile à définir tant chaque titre est une surprise et sonne différent du précédent. On peut, ici ou là, sentir les influences, éclectiques comme le rock qu’il joue: Bowie, Nine Inch Nails, Queens Of The Stone Age, The Cure et Depeche Mode…
Pour simplifier, c’est comme si nous écoutions Johnny Cash sous acide, qui aurait rejoint les Sex Pistols. Il y a de grands renforts de bruits d’ambiance, de sons électro, entre rock ’n’ roll pur et dur et guerre des étoiles. Au détour de tel ou tel titre, des cordes apparaissent et s’estompent.
Énergie et puissance, riffs rageurs, entêtants et fulgurants de guitares guerrières, sans doute un peu grâce à Bérenger Nail qui a tout mis en son.
Tout cela donne des compositions percutantes qui s’ancrent dans notre cerveau reptilien.
Soulignons l’apport de Hervé Mabille dont le saxo, sur deux titres, se pose comme une cerise sur le gâteau.
On ne va pas se mentir, ce n’est pas du prog, excepté peut-être «Night flight II», céleste, au rythme lent, qui grimpe, sans hâte, dans un velours prog que la basse fait tanguer. Mais c’est un disque que vous aurez plaisir à écouter plusieurs fois.
Publius Gallia
https://open.spotify.com/intl-fr/album/3veOvKAXugkoIm94zQbn3x
https://www.youtube.com/watch?v=UQO12NzEV2g

09/09/2023 : Sesam - Modern Voodoo

Sesam (SESAM)
Modern Voodoo
jazz progressif – 47:34 – France 2023
Ils viennent de Metz, avares d’autres informations les concernant, hormis leurs noms (Emmanuel Abdul, Yacine Belmahi, Mathis Klaine, Léo Lévêque et Marc Stehlin) et leurs instruments de prédilection (respectivement, guitare, basse, claviers, batterie, trompette), et ont publié deux morceaux avant d’enregistrer ce premier album de jazz progressif, cinq pièces taillées pour la scène (ils jouent pas mal autour de Metz), captées et mixées aux Downtown Studios de Strasbourg par Matthieu Pelletier. Ça groove (parfois à un train de sénateur, comme dans «One Year Beneath The Ice» – avant de s’énerver et de secouer les endormis, qu’une petite sieste ambiguë attend après le tournant), la trompette alterne son rôle en tête de gondole avec le piano électrique (comme dans le morceau titulaire «Modern Voodoo») ou une langueur de chaleur étale de longues notes de guitares plus évocatrices de l’ouest américain que du pays messin («Passages»). «Jean-Luc» (c’est le titre) conclut cet éclectique disque par une atmosphère stellaire et ambient, déployée sur un gros quatre minutes.
Auguste
https://sesammusic.bandcamp.com/album/modern-voodoo
https://www.youtube.com/watch?v=niz2scaF9_I

09/09/2023 : Fairy Tale - Live from studio session (Bypass 1.)

Fairy Tale
Live from studio session (Bypass 1.)
hard rock – 16:39 – Slovaquie 2023
Après la Hongrie pour ma chronique précédente, voici dans la Slovaquie.
Fairy Tale n’est pas un groupe débutant, même si peu d’informations sont disponibles sur le web. En effet, si j’en crois les infos trouvées, le fondateur Peter Kravec a déjà bricolé quelques démos vers 1997-1998 avant qu’il ne rencontre vers 2003 la chanteuse Barbora Koláriková. Leur précédent album «That is the Question» a déjà été chroniqué sur cette page le 10 juin 2022 (http://www.progcensor.eu/2022-juin.html#E4So5VQ8) et avait reçu une excellente cote de 4/5.
Cette plaque n’est pas un nouvel album mais le résultat d’une session live enregistrée rapidement en studio. On y retrouve en effet deux morceaux (sur les quatre que compte cette production) déjà présents sur le précédent album.
J’avoue ne pas comprendre l’utilité de la démarche! En effet, par acquit de conscience, j’ai écouté les versions studio de deux morceaux en question et ces versions live sont, à mon sens, de vraies catastrophes, alors que les morceaux originaux sont tout à fait acceptables. Le son y est étriqué, la voix est enregistrée sans aucun relief et prend des intonations assez anachroniques; guitares et batterie sonnent également petit. Cela ne rend en tous cas pas service à leur musique. La démarche est d’autant plus étonnante que le groupe semble ne pas manquer de métier.
Pour le style, le groupe se présente comme «art rock»; sur ce live, cela sonne comme du hard sans originalité. Bref, cela ne m’a absolument pas touché. Si vous appréciez ce groupe, replongez-vous dans les productions précédentes et oubliez celle-ci au plus vite.
Amelius
https://fairytaleartrock.bandcamp.com/album/live-session-in-studio-bypass-1
https://www.youtube.com/watch?v=Z7KHALiSiDg

10/09/2023 : Marekvist - Varde

Marekvist
Varde
folk progressif – 39:29 – Norvège 2023
Ne manquez pas de lire l’interview que Marekvist a bien voulu nous accorder. Vous y découvrirez plus précisément l’univers de ce groupe norvégien. Les liens repris ci-dessous vous permettront de bien vous imprégner de leur musique absolument charmante et enchanteresse. Le chant de Live-Andrea s’y fait envoûtant, c’est particulièrement le cas sur la plage titulaire de cet album, mais c’est également le cas sur le titre «Draug» où les guitares se montrent capables d’envol quasi métallique. Le plus long, «Fanden», n’est toutefois pas en reste. «Myling» est un titre court et parfait pour clore les débats. Je vous invite vivement à porter votre attention sur cette plaque particulièrement emballante.
Tibère
https://marekvist.bandcamp.com/album/varde
https://www.youtube.com/channel/UCq2Gb_sDWWtS0We3d5UGG5Q

11/09/2023 : Godsticks - This Is What A Winner Looks Like

Godsticks
This Is What A Winner Looks Like
crossover progressif – 42:08 – Royaume-Uni 2023
Déjà un sixième album pour les énergiques membres de Godsticks… Pour tenter de coller une étiquette au groupe, le titre «This Is My New Normal» est un bon exemple; un metal prog dur, lourd et dynamique mais qui garde toujours une ambiance mélodique de fond. «Silent Saw» rappelle un peu Queensrÿche avec une ambiance mélancolique à base de guitares résonantes et un chant cristallin. Godsticks est vraiment un groupe d’une grande créativité, on ne s’ennuie pas une minute avec cet album. «Throne» est plus dans le style Dream Theater dans la partie gros riff que John Petrucci ne pourrait renier, avec de multiple changements de la base rythmique. «Mayhem» est carrément du heavy bien lourd, un peu à la Gojira ou encore Alter Bridge. Le son est parfait, la recherche est là, la puissance et le feeling… rien à dire. Il y a des riffs lourds à profusion et une section rythmique hyper douée, mais il y a aussi des mélodies de haut vol. Si vous êtes fan de metal progressif et que vous ne connaissez pas Godsticks, il est temps de corriger cette lacune avec cet excellent «This Is What A Winner Looks Like». Bonne écoute.
Vespasien
https://kscopemusic.bandcamp.com/album/this-is-what-a-winner-looks-like
https://music.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_lTF6oHxht0pDdWGw7UyBTGodJVWo9VNGQ

12/09/2023 : Laughing Stock - Songs for the Future

Laughing Stock
Songs for the Future
crossover – 49:59 – Norvège 2023
À 12ans, en 1978, Havard Enge (voix, clavier, flûte) et Jan Mikael Sorensen (voix, guitare, basse, claviers, batterie) se sont rencontrés; Jan-Erik Kirkevold Nilsen (voix, guitare) n'est arrivé que beaucoup plus tard pour former Laughing Stock.
Si vous êtes un fidèle lecteur de Prog censor, vous les connaissez déjà, au travers de 2 chroniques sur l'histoire, assez déprimante, de Zero, héros que l'on suit sur 2 albums, depuis sa naissance.
Alors, quelle n'est pas ma surprise de découvrir «For the Boys (featuring Colin Moulding)»! Cette piste introductive est... joyeuse! Le riff de trompette triomphante est jouissif. Et c'est la première fois que je ressens cela à l'écoute de LS! Le nom du groupe (signifiant «risée») vient d'un morceau de Talk Talk, et nos compères ont aussi beaucoup écouté de XTC. Ils étaient ados dans les '80, alors on ne s'étonne pas vraiment d'y trouver Colin Moulding (XTC basse, chant).
Rupture avec les 2 albums précédents. Là où je trouvais quelques traces du Floyd ou de Crimson, on trouve toujours le phrasé de David Sylvian (Japan), mais les morceaux sont résolument plus crossover et ramassés que jamais.
La gaieté du morceau introductif ne se poursuit pas, et l'on retrouve le climat délicat et nostalgique, qui semble, pour moi, la marque de fabrique de LS.
«The other Side» accueille Colin Bass (Camel) pour une belle piste d'une langueur toute nippone.
Dans «The Ocean», Billy Sherwood (Yes) en ultime guest bassiste chanteur vient apporter son concours à cette chansonnette qui, bien que plutôt entraînante, ne laisse pas grand-chose. Contrairement aux 5 derniers morceaux de l'album. «Changed» dont l'atmosphère noire s'interrompt trop tôt après 3:19. «Night of a thousand Stars» est une superbe chanson, 12 cordes et chœurs et envolées en 2:42. Que les 7 min de «It is Time» ne nous abusent pas, un long break médian divise cette pièce la plus prog. Les 12 pistes tiennent en moins de 50 min. Histoire de multiplier les voyages, rapidement!
Loin de faire la risée 😉 , ce 6e album confirme la qualité de ce groupe. D'ailleurs vous l'écoutez déjà!
Cicero 3.14
https://laughingstock1.bandcamp.com/album/songs-for-the-future
https://www.youtube.com/watch?v=iULk5G3NPQM

13/09/2023 : Animatone - Who Saw Us

Animatone
Who Saw Us
metal progressif / jazz progressif – 16:30 – Hongrie 2022
Très peu d’informations pour cette sortie; Animatone est un duo originaire de Hongrie qui livre ici ce qui semble être son premier EP avec trois morceaux relativement courts (moins de 6 minutes).
Il est difficile de savoir si les deux fondateurs, Zoltán Szécsi et Bernát Kiss, guitaristes de leur état, jouent de tous les instruments; il semblerait que la basse soit une vraie basse, la batterie est à mon avis programmée et le duo agrémente ses compositions de quelques jolies parties de claviers et se permet même une incursion electro dans la plage titulaire.
Le style est un prog métal mâtiné de jazz avec une vraie patte pop dans le sens où il y a un soin pour les mélodies et les arrangements. On pense inévitablement aux références du genre que sont Polyphia ou Arch Echo. Certes, c’est une autoproduction, cela manque de moyens, mais le duo a des idées et un sens mélodique. Il faudra donc surveiller ce qu’ils pourront produire à l’avenir.
À recommander donc aux amateurs des groupes précités et à garder du coin de l’œil pour le jour où ils auront les moyens de sortir un album complet.
Amelius
https://animatone.bandcamp.com/album/who-saw-us

13/09/2023 : Franck Carducci & The Fantastic Squad - The Answer Live

Franck Carducci & The Fantastic Squad
The Answer Live
crossover – 75:57 – France 2023
Si vous lisez cette chronique, cliquez immédiatement, s'il vous plaît, sur le lien qui mène vers la page Bandcamp de ce merveilleux album. Et, éventuellement, poursuivez votre lecture... Vous écoutez donc le témoignage de la tournée de 65 dates, support de l'album «The Answer» qui s'est terminée fin 2022, pour laisser la place en 2023 à un «Extravaganza Tour» [une trentaine de dates prévues, ndlr].
«(Love Is) The Answer» ouvre l'album; 12 cordes et harmonies où l'on apprécie le mariage vocal de Franck Carducci et de Mary Reynaud, un rien médiéval avant de tendre plus vers un Genesis qui aurait passé les années 1980 sans rien perdre. Le Hammond rugit, la guitare saturée solifie gentiment. Comme intro aussi «Love Is The Answer»!
Suit le bluesy «Closer to Irreversible». Puis c'est «The Betrayal of Blue», epic inédit qui m'évoque Bowie pour le ton et la 12 cordes. Et là, on touche l'essence même de notre genre favori, lorsque la délicate «flûte» s'envole, que la guitare saturée riffe, rageuse, que 12 cordes bouclent sur une suite d'accords, que les voix mettent en valeur un texte intelligent, que le piano arpège, qu'un thérémine solifie, et que tous nous laissent à pleurer sur notre belle planète dans un choral imparable accompagné d'un piano floydien (Cédric Selzer). Larmes transformées en rage d'un tel gâchis planétaire dans un prog rock apocalyptique (révélation!).
«The Angel» avec son motif lancinant de 4 notes, sur un tempo lourd (Léa Fernandez, batterie) avec la voix claire de Mary en opposition, propose une belle et lente digression que le solo final déchire (Barth Sky, guitare). Plus loin, «Alice's Eery Dream» nous fait passer 15 min plus rock, avant de devenir prog et théâtral.
Depuis 2011, outre 3 albums studio, c'est le 2e album live de Franck; il y en aura d'autres tant ses concerts sont extraordinaires (ouvrant pour Sting – celui-ci s'est-il demandé comment il pourrait passer ensuite?). Alors ne le ratez pas s'il ne passe pas trop loin de chez vous, car il est l'un des rares groupes français à tourner à travers l'Europe!
En attendant, vous avez l'album... Bonne écoute!
Cicero 3.14
https://franckcarducci.bandcamp.com/album/the-answer-live
https://www.youtube.com/watch?v=hsatnCzqqvk&list=OLAK5uy_mSZa8eqowi5Iyl8WoI5w7N0sBxrDJbeao&index=4

14/09/2023 : The Chronicles of Father Robin - The Songs & Tales of Airoea – Book 1

The Chronicles of Father Robin
The Songs & Tales of Airoea – Book 1
rock progressif – 46:15 – Norvège 2023
The Chronicles of Father Robin ont accepté de nous livrer quelques réflexions sur leur projet. Vous les lirez ailleurs sur cette page, mais laissez-moi vous livrer mes propres impressions sur cette plaque hautement progressive. Ils sont en effet fortement influencés par les plus grands du progressif des seventies et, ma foi, c’est très bien réalisé. Je trouve que la musique développée ici ne peut qu’attirer les afficionados de prog vintage que vous êtes très certainement. Notons que le collectif comprend en son sein des membres de Wobbler, de Tusmørke, de Jordsjø ainsi que de The Samuel Jackson Five. Vous avouerez qu’il y a pire comme collaborateurs. Quelques longs titres se démarquent sur cette plaque («The Death of the Fair Maiden», «Twilight Fields» ou encore «Eleision Forest»). Soyez assurés de passer un bon moment à l’écoute de cette superbe réalisation. Nous suivrons avec un grand intérêt les prochaines sorties du projet.
Tibère
https://fatherrobin.bandcamp.com/album/the-songs-tales-of-airoea-book-1
https://www.youtube.com/watch?v=tfX3ReI4vbM

15/09/2023 : Comedy Of Errors - Threnody For A Dead Queen

Comedy Of Errors
Threnody For A Dead Queen
néo-progressif – 58:58 – Écosse 2023
Comedy Of Errors connus en 1988, 4 ans après leurs débuts; dissolution puis redémarrage avec Joe Cairney, Mark Spalding et Jim Johnston restant à la barre, dans un genre d’Aragon, Marillion, Pendragon, Galahad, IQ, Pallas ou Abel Ganz; bref ce 7e album rentre dans la terminologie de néo-prog mélodique à tendance mélancolique avec des détours new age avérés.
«Summer Lies Beyond»: intro new age, vangélisienne, mélancolique, tempo linéaire lent contemplant la mer; vocal de Joe et une dérive orchestrale imposante sur IQ et Pendragon à la pelle, synthés et guitare en avant; break planant intimiste avant le crescendo final. «Seventh Seal» change, plus dynamique entre un Magellan et un Yes surboosté, avec prédominance des synthés de Jim; la seconde moitié presque orchestrale avec vocal éthéré et des parties de guitare stratosphériques. «We Are Such Stuff As Dreams Are Made On»: interlude instrumental oriental, aérien, venant des limbes, délicat et reposant, puis «Jane (Came Out Of The Blue)» au son 70’s love flower pour la ballade pop romantique agrémenté d’un beau solo bucolique, consensuel, puis «Through The Veil» clôt ce triptyque avec un titre similaire à «We Are»; intermède avec pad accompagnant l’air complainte hypnotisante d’église. «Threnody For A Dead Queen» et la dernière des trois longues suites pour un voyage répétitif dans lequel le rythme semble maintenu à son élan basique; piano d’orient, guitare plaintive; il faut attendre 5 minutes pour avoir un synthé gras qui coupe la procession; l’air nippon n’est pas loin, sidérant; je retrouve Kitaro, Apsaras et Kitajima bien sûr; fin à 9 minutes… avant l’envolée solo guitare et les voix yessiennes religieuses. «And Our Little Life Is Rounded With A Sleep» vient refermer cette envolée lyrique avec un climat intimiste jouissif lorgnant vers Sigur Rós et Vangelis. «Funeral Dance» comme seconde chance, Mozart, Chopin ou Purcell, cochez la case; baroque à tout va et clin d’œil pour les fans au «Prélude» de leur premier album; final bucolique oldfieldien folklorique, bucolique et festif.
Comedy Of Errors n’en finit pas de surprendre en proposant un son rempli de claviers surfant sur le new age par instants; un rock prog mélodique ambiant frais et singulier, innovant qui change du néo, plus contemplatif.
Brutus
https://comedyoferrors.bandcamp.com/album/threnody-for-a-dead-queen
https://youtu.be/3KmfO3DRWzw

16/09/2023 : Heatwaves - Kappa

Heatwaves
Kappa
rock fusion – 42:51 – Norvège 2023
Groupe originaire de Bergen dont les premières traces d’existence numérique remontent à avril 2020.
Le nom du groupe (de circonstance pour cet été 2023 et/ou notre futur!) ne doit pas vous emmener, comme ce fut mon cas, à le confondre avec le quatuor espagnol et à considérer l’album « Kappa » au regard de ce que je croyais être des productions précédentes… Nos musiciens nordiques, Eirik (guitare) / Pablo (basse) / Jonas (claviers) / Jakob (batterie), en sont à leur premier effort.
Heatwaves évolue, avec cet album, dans un paysage indé nostalgique avec des relents de soul, de jazz et de funk dans une ambiance générale de quiétude, de paresse, de langueur, comme pouvaient l’être certains morceaux de Pink Floyd. Le seul énervé de la bande étant, dans le cas présent, le batteur (en toute relativité).
Les chansons ne sont pas mauvaises mais elles sont sans aspérité, à ranger dans le registre « musique de Prisunic » (pour ceux qui n’ont pas connu ces magasins, c’est du même registre que « musique d’ascenseur » !), (pour ceux qui n’ont jamais pris d’ascenseur musical, c’est du même registre que « musique d’ambiance, de fond ») de la fin des années 60, début des années 70. 
Au premier abord il est assez surprenant d'entendre des sons produits à grand renfort de pédale wah-wah de la part d’un groupe norvégien qui propose du proggy-funk avec un zest d’électronique. Mais cette surprise est assez vite remplacée par un ennui induit par la sensation d’écouter onze fois le même titre ou presque...
Vous comprendrez que je n’ai pas été emporté par une vague d’enthousiasme par « Heatwaves » et cela ne tient pas à la qualité d’interprétation, sans faille, ni à la production impeccable.
Pour faire passer tout ça, je suis retourné écouter quelques Isaac Hayes et quelques vieux Floyd !
Publius Gallia
https://heatwavesbergen.bandcamp.com/album/kappa
https://www.youtube.com/watch?v=y6RIZJ3ZgW8

17/09/2023 : Beyond Berlin - World gone Mad

Beyond Berlin
World gone Mad
Berlin School – 66:20 – Pays-Bas 2023
L’aventure commune de nos deux compères, René de Bakker et Martin Peters, commence en 2020 au terme d’une jam improvisée. Sur cette base, après mûre réflexion, ils donneront naissance à l’album «Epiphany» en 2021. Une riche collaboration, on peut l’affirmer sans crainte, du meilleur duo de la Berliner Schule néerlandaise. Ils nous offrent ici un nouveau trip au cœur de strates séquentielles que le fantôme du grand Klaus étoile de ses courants cosmiques. Le premier voyage, au titre éponyme, est rythmé comme une aube lunaire qui se lève dans le zéphyr du temps, en glissement progressif sentient. «Legacy» reste dans la nébuleuse schulzienne sur un rythme lent et discret où flottent des nappes synthétiques d’une éthérale douceur. Parfums de plénitude qui, au fil des minutes, combinent les séquentiels en cascades scintillantes semblant naître d’un ciel peuplé d’anges aux ailes diaphanes. C’est comme si le regard plongeait dans les miroitements irisés d’un diamant de la plus belle eau. Une caresse plurielle des sens. Le calme reste de mise dans le pulsatile «Stages» qui s’écoule tels les grains d’un sablier mariant les couleurs d’un rêve empreint d’une absolue sérénité. Sursaut d’énergie à mi-parcours. Élévation incrémentale. Envol. Plénitude à nouveau. Regard vers l’infini. Plongée stellaire. Un rythme discret de basse accompagne tout au long du voyage jusqu’au dénouement étrange et inquiétant. «Pleasant Challenge» se vêt des parures d’un «Mirage» schulzien. Voyage de velours, mirage adamantin encore une fois d’une douceur évanescente. Au fil des minutes qui s’égrènent, la magie opère et l’on se perd dans les bras d’une nébuleuse envoûtante, un cocon astral tissé de séquenceurs moirés dont l’aboutissement entraîne une sorte d’état de transe hypnotique. Captivé, l’auditeur change inconsciemment de monde. L’esprit s’évade définitivement, flotte dans un ailleurs qu’il croyait enfoui. Simplement oublié, sublimé et retrouvé. Le voyage s’achève à regret. Pourquoi les plus beaux songes se fanent-ils pour nous abandonner à la triste réalité? Mais la vraie Réalité ne serait-elle pas dans un rêve comme celui-ci? Perfection des notes, perfection d’un voyage aux confins de la Conscience. Une bulle d’oxygène dans un monde devenu fou.
Clavius Reticulus
https://beyondberlinongroove.bandcamp.com/album/world-gone-mad
https://www.youtube.com/watch?v=nsnxg8vs56Y

17/09/2023 : Vertiges - Doriflore

Vertiges
Doriflore
jazz progressif / improvisation – 21:23 – France 2023
Curieux projet que celui de Vertiges, duo atypique d’un autodidacte aux claviers (Bruno Mutschler – ailleurs, il joue aussi d’autres instruments et compose) et d’un (musicalement) éduqué (Djid Chic) à la flûte traversière – il manie également plusieurs saxophones: le concept, risqué, sans compromis et assumé, met en jeu une improvisation (à distance, ça se passe pendant vous-savez-quoi), avec pour seuls préliminaires un accord sur le tempo (pour synchroniser les effets) et, pour «Doriflore», sur un mode – le premier prépare un éventail de sons sur ses claviers ou son ordinateur, le second saisit un de ses instruments (ténor, sopranino, alto, soprano) en fonction de l’instant. Le résultat en est une suite (5 parties) de musiques aux textures originales, libre de s’écarter de la tonalité, parsemées d’instants vocaux – les onomatopées de Djid Chic, dont la voix (mais pas que) évoque Robert Wyatt (une source d’inspiration partagée).
https://music.apple.com/us/album/doriflore-ep/1661057484
https://www.youtube.com/watch?v=kxCDtePmj34
Auguste

18/09/2023 : Actionfredag - Turist i eget liv

Actionfredag
Turist i eget liv
Canterbury – 39:30 – Norvège 2023
Le premier album d’Actionfredag établit une liaison (ferroviaire, de bus, de ressources, c’est selon) directe Oslo-Canterbury, par laquelle les cinq garçons et une fille, copains de l’est de la capitale norvégienne (Ivar Haugaløkken Stangeby aux claviers, Aksel Valheim Lem à la guitare, Katrina Lenore Sjøberg au chant, Martin Hella Thørnquist à la guitare et au chant, Espen Fladmoe Wolmer à la batterie et Ola Mile Bruland à la basse), ambitionnent de faire résonner, comme entre les murs de l’école d’arts britannique, les instruments qu’ils maîtrisent depuis un moment déjà (dans des groupes comme Tusmørke, Lupa, Jordsjø, Mt. Melodie…) et qu’ils chargent aujourd’hui de rendre hommage aux collections de disques de leurs parents, directement importés, cinquante ans plus tôt, de cette ville en ébullition créatrice du sud de l’Angleterre – les six sont épaulés par une série d’interventions de musiciens affiliés, qui à la clarinette, qui au violon, au glockenspiel, au mélodica ou au saxophone. C’est dire si les six morceaux, à l’ambition et aux longueurs respectables (mais raisonnables), bénéficient d’arrangements riches, parfois touffus («Peaches en Ulven»), de rythmes souvent actifs voire emballants, au sein desquels «En behagelig durakkord som sier noe om hvordan det er å se uten å bli sett» ("Un accord majeur agréable qui en dit long sur ce que c'est que de voir sans être vu") introduit une oasis reposante. Ah oui, «Turist i eget liv» signifie "touriste dans ma propre vie". Un disque intense.
Auguste
https://actionfredag.bandcamp.com/album/turist-i-eget-liv

19/09/2023 : Elegant Simplicity - Don't Look Down (at the End of the World)

Elegant Simplicity
Don't Look Down (at the End of the World)
néo-progressif – 41:50 – Angleterre 2023
C’est en 1992 que Steven McCabe a développé son projet. Il a sorti vingt-deux albums avant celui-ci. Si, au début, notre homme était seul aux commandes, il s’est par la suite entouré de musiciens et d’un chanteur pour nous faire profiter de sa musique, fortement influencée par le néo-prog. C’est toujours dans ces eaux-là qu’il nous invite aujourd’hui avec cette nouvelle plaque. Les arrangements sont tout à fait superbes, j’en veux pour preuve le titre «A Creature Apart», notamment. N’oublions pas pour autant la plage titulaire qui clôture l’album, ni la longue suite «Reflections» (dix-huit minutes au compteur). Le nombre des années ne tarit en rien la veine créatrice de notre lascar. C’est toujours un plaisir de découvrir une nouvelle production de Steven. Ne boudez pas votre bonheur (je sais que le genre n’est guère prisé par les puristes).
Tibère
https://elegantsimplicity.bandcamp.com/album/dont-look-down-at-the-end-of-the-world
https://www.youtube.com/channel/UCWioy3ksbBAHbvoFIaUpa7A

19/09/2023 : BRUIT ≤ - Apologie du temps Perdu Vol.1

BRUIT ≤
Apologie du temps Perdu Vol.1
modern classic / post-rock – 23:44 – France 2023
Je dirais que, d’une manière générale, notre quatuor toulousain s’inspire à la fois de Cliff Marinez (B.O. de «Solaris»), de Hans Zimmer pour une partie de la bande originale de «Interstellar», de Jóhann Jóhannsson (B.O. de «Arrival») et aussi, par touches subtiles, perceptibles par un mélomane averti, d’un compositeur contemporain polonais: Górecki et ici je pense particulièrement à sa « Symphony of Sorrowful Songs - Opus 36», troisième du nom. Pour les cinéphiles, ils se souviendront du final émouvant de «État Second/Fearless» de Peter Weir (1983) avec l’excellent Jeff Bridges dans le rôle principal. Ces sources d’inspiration étaient déjà bien présentes dans leur album de 2021, «The Machine is burning and now everyone know», à peine plus long que celui-ci (chroniqué sur cette page par votre serviteur également) [http://www.progcensor.eu/2022-mars.html#rv4dDhpC], notamment pour les plages «Amazing Old Tree» et «Industry». Dans le présent EP, on trouvera peu, voire pas du tout, de mouvance ainsi nommée post-rock. D’entrée l’auditeur navigue plutôt dans les eaux mélancoliques d’un néo-classique contemporain proche de l’œuvre de Górecki susnommée ou encore de Max Richter dont j’ai découvert quelques résonnances empruntées au coffret «Sleep». «La Sagesse de Nos Aïeux» est une partition qui prend aux tripes, qui émeut presque autant qu’une symphonie de Gustav Mahler et que donc le récitatif aux relents «Charles Denner» anarchique et «has been» vient gâcher en fin de parcours. Ils nous avaient déjà fait le coup dans l’album de 2021. Aucun intérêt d’ajouter ce verbiage déphasé. «Rêveur lucide» fait intervenir des accords (?) synthétistes plutôt brouillons. Aucune mélodie mais une spirale de bruitages soutenus par une ligne de basse «ronflée». Une batterie minimaliste vient s’y greffer puis laisse la place à un style cousin du downtempo. Bien à propos ensuite, dira-t-on, tout se reconstruit avec des nappes aériennes de synthés glissant sur un rythme chill-rock. Le rêveur s’éveille enfin. «Les Temps Perdus» («short music film») ajoute à une mélodie faite de trois notes des voiles de chœurs séraphiques et un répétitif qui s’apparente d’entrée majoritairement à la magie de «Interstellar» ou, dans une autre veine d’inspiration, de la mélancolie éthérée de «Solaris» composée par Cliff Martinez. La meilleure plage de ce trop court opus. Cela dit, cet EP n’atteint pas la puissance de leur création de 2021. Mais une chose est sûre, cela reste tout sauf du bruit!
Clavius Reticulus
https://bruitofficial.bandcamp.com/album/apologie-du-temps-perdu-vol-1
https://www.youtube.com/watch?v=o68aJ5IrQbI

20/09/2023 : Tusmørke - Hestehoven

Tusmørke
Hestehoven
rock psychédélique – 40:20 – Norvège 2023
Voilà Tusmørke de retour pour un 10e album depuis 2011. Formation à membres et géométrie variables; cette fois c'est un quatuor qui comprend des membres de Wobbler et Alwanzatar. Lesquels? Benediktator (basse, voix), Krizla (flûte, voix), HlewagastiR (drums) ou Haugebonden Gode Gullstein (clavier) sont leurs pseudos... Moi, je ne dénonce personne!
Ces noms prouvent que le groupe ne se prend pas au sérieux, et dans leur musique, cette fois plus psy que folk (pas de guitares), on retrouve un peu de cette folie. Tel «Hestehoven» le morceau titre (joué sur scène depuis 2015!), une pochade qui marie en son sein extraits de musique sérielle, de l'opérette «Un violon sur le toit», de la lambada et des laï laï! Mais ce n'est pas ici pour divertir les enfants, contrairement à l'album «Bydyra» (2017) qui leur était dédié: ce LP est pour adultes avertis; vous avancerez au milieu de dangers et de tentations, entourés de nymphes et de satyres en bacchanales, de revues pour adultes ou assisterez à d'anciens rites érotiques de fertilité!
J'en viens à regretter de ne pas comprendre la langue d'Ibsen.
Mais leur musique ne demande pas de traduction, c'est du psyché multiforme efficace, pas des longues pièces, plus ou moins, improvisées sur une rythmique établie dès la première mesure. Ici tout est fluctuant, les signatures variant plusieurs fois par morceau. L'orgue y est parfois très Banton (VdGG), donnant en simultané soutien de fond et mélodie. La flûte prend plus d'altitude, plus soliste comme souvent, comme dans «Den behornede guden» ("le dieu cornu") où flûte et Hammond crunchy nous emmènent sur un rythme joyeux jusqu'à un inattendu mantra final olé alléluia!
«Jeg klumser deg» ("je te trompe") démarre avec un intéressant duo flûte et «violon» qui se poursuit durant toute la pièce où s'introduit peu à peu une dissonance certaine, remarquable!
«The Wicked Ways of Witches and Wizards» clôt cet album ébouriffant en apothéose sur un rythme plus sautillant (à cloche-pied? la flûte y étant plus tullienne!) et des vocaux zappesques.
Cicero 3.14
https://tusm-rke.bandcamp.com/album/hestehoven

21/09/2023 : Howard - Event Horizon

Howard
Event Horizon
classic rock – 38:47 – France 2022
Second album pour les Franciliens de Howard. Ils nous distillent un classic rock dont personne, à leur place, n’aurait à rougir. Je dois reconnaitre que, parfois, cela fait du bien des musiques heavy et fuzz simples, mais terriblement efficaces. C’est sur un orgue Hammond que s’ouvre la première plage, «Bankable Sermon». Immédiatement, les intentions sont claires: vous faire tournebouler la tête et cela continue, bien entendu, plus loin avec «Need Want Get». Mais «qui fait partie du groupe?», me demanderez-vous. C’est simple, il s’agit d’un trio avec JM Canoville au chant et à la guitare, Raphaël Jeandenand à l’orgue et à la basse. N’oublions pas évidemment Tom Karren à la batterie. Il n’en faut pas plus pour nous concocter une musique prenante et surtout enthousiasmante. Faites comme moi et prenez un plaisir non coupable à l’écoute de cette galette.
Tibère
https://howardtheband.bandcamp.com/album/event-horizon
https://www.youtube.com/watch?v=7uLCbmTGNi0

22/09/2023 : Rick Wakeman & The English Rock Ensemble - A Gallery Of The Imagination

Rick Wakeman & The English Rock Ensemble
A Gallery Of The Imagination
rock progressif – 53:55 – Angleterre 2023
Nouvelle collaboration de Rick Wakeman (74 ans!) avec The English Rock Ensemble.
La dernière en date était de 2020, pour l’album instrumental «The Red Planet» (http://www.progcensor.eu/2020-octobre.html#Qg2NubFL).
On retrouve donc ici, avec le même plaisir, Ash Soan (batterie), Lee Pomeroy (basse), Dave Colquhoun (guitare), Erik Jordan et Toby Wood (mixage et co-production). Cette fois, Rick Wakeman a invité la chanteuse Haylay Sanderson. Excellente idée!
«Hidden Depths» est un entraînant mélange de piano acoustique, de guitare, de synthés, augmenté de chœurs. Il faudra attendre le deuxième titre, «The Man In The Moon», pour découvrir la très belle voix d’Haylay Sanderson, la basse parfaitement posée de Lee Pomeroy et le(s) synthé(s) de Rick avec cette signature typique, telle que je l’ai toujours appréciée. Les chœurs contribuent à donner beaucoup d’ampleur à ce titre. Sans surprise, on retrouve les mêmes ingrédients dans «A Mirage In The Clouds».
Après «The Creek», délicate pièce classique pour piano solo, clavier et guitare nous servent une mélodie imparable, très enjouée et hyper-soignée, écrin rêvé pour la partie vocale dans «My Moonlight Dream». Rick passe d’un clavier à l’autre avec l’aisance et l’"imagination" qu’on lui connaît et revient au piano pour le tendre «Only When I Cry».
L’intermède «Cuban Carnival» apporte une touche d’exotisme dansant assez inattendue; Soan et Rick s’en donnent à cœur joie, tandis que la voix d’Haylay semble «dédoublée» au mixage (à moins qu’une deuxième voix féminine ne soit venue se joindre à la première, mais, si c’est le cas, elle n’est pas référencée).
Retour au romantisme avec «Just a Memory» (piano seul).
L’instrumental «The Dinner Party» n’est pas sans me rappeler un certain… «Criminal Record».
Passons rapidement sur «A Day Spent on the Pier», chanson un peu trop mièvre à mon goût, pour découvrir «Visitation», sans doute une des meilleures compositions de l’album, surprenante tant la voix d’Haylay se rapproche (ici) de celle de Kate Bush.
L’album se termine en beauté avec «The Eyes of a Child», un duo piano-voix au charme indéfinissable, d’une immense douceur.
L’attrait de cette "galerie" réside sans aucun doute dans l’accessibilité de ses mélodies, toujours attachantes, souvent émouvantes, Rick Wakeman ayant délaissé l’emphase pour un style presque classique. Le résultat est un album très agréable à l’écoute, où la voix exceptionnelle d’Haylay Sanderson ne peut que séduire.
J’ai la chance de pouvoir écouter l’album dans sa version multicanale (DVD-Audio) superbement mixée. Soyez sans crainte, le CD est parfaitement produit lui aussi et, quel que soit le support choisi, vous serez sous le charme, j’en suis sûr.
Vivestido
https://madfishmusic.bandcamp.com/album/a-gallery-of-the-imagination
https://www.youtube.com/watch?v=wTsFV6cfnk0

23/09/2023 : Zio - Truewaves

Zio
Truewaves
néo-progressif moderne – 36:53 – Angleterre 2023
ZIO groupe né d’une éviction de Karnataka avec Jimmy et Hayley sur un réel engouement pour les jeux vidéo; un son metal prog symphonique lorgnant vers Ayreon, Toto, Dream Theater, Haken pour un concept musical avant-gardiste.
«Truewaves» entame S-F, vagues et jeux vidéo. «Untenable» metal prog endiablé; les vocaux d’Eric et Hayley donnent du piment à ce titre frostien, au riff des Dream Theater. «Amused» voix d’Hayley, belle, sublime, un interlude avec piano. «Space Heater» son récent avec synthé en avant, la voix d’Eric et de Magda & Miranda en chœurs pour un reflet musical aérien; break instrumental énergique en second temps. «Living Behind» chansonnette-comptine sur un mid tempo bucolique, opérette avec violons et batterie pour un interlude salvateur. «Above the Wheels» dauphin, orage, montée riff hard, la batterie qui claque, l’une des plus belles intros de l’album; la voix rauque de John chaleureuse envahissante; le riff hard reprend, le break instrumental avec un très beau solo synthé d’Olivier rappelant Lonely Robot. «Lonely Diamond Pt. 1» intermède floydien avec la montée batterie et guitare rageuse, vibrant. «Close» arpège piano et la voix d’Hayley envoûtante pour la ballade mélancolique, break nerveux avec Ayreon en toile de fond; solo guitare aérien. «I Hear Them Whistling» avec Gabriel en avant et un son folk irlandais, oriental, moyenâgeux; le morceau qui se convulse pour sortir le prog metal de demain, le son partant sur du Neal Morse; final grandiloquent avec le retour à l’intro et quelques notes de Genesis frissonnantes. «Endwave» la fin, retour de l’air S-F/jeux vidéo.
ZIO sort cet opus avec le souvenir de vagues inondant notre monde depuis la pandémie; moments inimaginables bien réels; cet espace musical traduit cela; du pur prog metal vitaminé, des ballades, des mélodies, du metal avec des riffs révélateurs; innovant oui, désopilant oui, trop court oui. Au départ presque conventionnel, très vite la suite de cette douce folie musicale bariolée commence à porter ses fruits et crée justement le manque. À suivre de près.
Brutus
Spotify: https://open.spotify.com/intl-fr/album/4A0p0h1KxDdhLc3TVHkglo
YouTube: www.youtube.com/channel/UCDNl4MXBk3kdWqqb-jg2iMg

24/09/2023 : Michał Wojtas - Lore

Michał Wojtas
Lore
folk celtique – 56:41 – Pologne 2023
C’est le premier album solo pour Michał Wojtas, ce multi-instrumentiste qui n’est pas un inconnu puisqu’il est le leader du groupe polonais Amarok. «Lore» a été composé pour le spectacle de danse (du même nom que l’album), dirigé par le James Wilson Company. Michał Wojtas pose sa voix envoûtante sur tous les titres et s’occupe des synthés, samples, de la guitare acoustique, du violoncelle, des tambours sur cadre et autres percussions; il est accompagné de Sebastian Wielądek qui se consacre au kora (famille de la harpe), hurdy gurdy, lyre, duduk (sorte de hautbois), shawn (flûte traditionnelle) et de Kornel Popławski pour les violons.
Le spectacle étant axé sur la connexion à la nature, la bande-son choisie s’inspire de la musique folklorique viking, celtique et slave. Le défi musical est une réussite tant à l’écoute de titres comme «Lore» (où l’on ressent l’état de transe avec les «essoufflements» des danseurs, ainsi que le rythme en claquettes) ou encore «Myth Of Creation» (où l’on imagine des mouvements tantôt élancés, tantôt plus lents), on perçoit que le travail de Wojtas a vraiment été pensé pour une chorégraphie. Au niveau de la thématique, la création musicale a été également bien respectée, les instruments à vent et à cordes cités plus haut s’intègrent bien avec la nature, à cela s’ajoutent des sonorités comme des hurlements (de loups?) dans le lointain sur «Ritual» (qui porte très bien son titre), de fortes pluies et orages, alors que la musique est calme et langoureuse sur le très beau, sombre et ensorcelant «The Oak Tree». Et évidemment, on ne peut pas passer à côté des 12 minutes de «The Echoes» où ce sont de magnifiques chants doux, murmurés et éthérés qui résonnent comme un écho mais se transforment aussi en chants et rythmes tribaux.
Pas besoin d’aimer la danse pour apprécier cet album captivant!
La Louve
https://michalwojtas.bandcamp.com/album/lore
https://www.youtube.com/watch?v=KID3zy9TE48

24/09/2023 : Thierry Zaboitzeff - LUVOS migrations

Thierry Zaboitzeff
LUVOS migrations
rock in opposition / soundtrack – 16:51 – France 2023
«LUVOS migrations» est une chorégraphie (Editta Braun), un film (Menie Weissbacher) et une musique (Thierry Zaboitzeff): LUVOS, groupe de danseurs spécialisés de e b c (la compagnie de la chorégraphe autrichienne, compagne du compositeur) parle – et montre et met en scène et sort du rêve – un monde étrange, peuplé de créatures ciselées et indéterminées (un corps, des membres, pas de tête), mouvantes et vivantes, habitant des décors de béton et de graffitis qui disent former une civilisation. Cette vision dure (l’apocalypse d’une vision architecturale brutale) et optimiste (le mouvement vital d’êtres torsadés – peut-être adaptatifs) est portée une bande son luxuriante (la riche palette de timbres), animée (les sons animaux et naturels), intrigante (les ruptures de rythmes), mobile (elle nous mène dans la scène) et mobilisatrice (on veut y être, on veut repeindre ces murs, en araser les angles).
Auguste
https://thierryzaboitzeff.bandcamp.com/album/luvos-migrations-ep
https://vimeo.com/751118062

25/09/2023 : Agamon - Mythology

Agamon
Mythology
rock progressif symphonique – 47:09 – Suède 2023
Agamon est un projet comprenant une vingtaine de musiciens, sous la houlette du compositeur Magnus Andersson Lagerqvist dont ce n’est pas ici la première production, loin de là (outre les musiques de films qu’il a composées), on peut compter sur pas moins de huit autres plaques à l’actif de notre bonhomme. Il développe ici un progressif flirtant entre symphonique et néoclassique. «Socrates» est chargé de nous mettre dans l’ambiance d’entrée de jeu et l’on peut dire que c’est réussi. Les orchestrations sont en tous points splendides et riches. Le piano délicat de «Vägvisaren» vous permet de rêver à l’envi. C’est encore le piano qui semble mener la danse sur «Bedragaren» avant que la section rythmique n’entre en jeu et permette au morceau de véritablement décoller. Plus loin, «Tony Curtis» (non, pas l’acteur) permet à la guitare de nous dévoiler des accords tout à fait remarquables. «Lova», emphatique à souhait, nous permettra de quitter cette plaque de la meilleure des façons.
Tibère
https://agamon.bandcamp.com/album/mythology
https://music.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_np3jn0zGLe9OuHgHK3rd1j9QzTypLSsAU

26/09/2023 : Sigur Rós - Átta

Sigur Rós
Átta
post-rock dino – 56:37 – Islande 2023
Sigur Rós, fondé en 1994, le père du post-rock et d‘«Ágætis Byrjun», sort son 10e opus et je suis là à en dire deux mots; Kjartan rejoint ses deux acolytes Jónsi et Georg pour sortir de l’émotion musicale grandiloquente, créer des espaces d’atmosphère intime, parler du climat, de la décadence de notre monde avec une note d’espoir et de paix; avec l'accompagnement du London Contemporary Orchestra, le voyage commence.
«Glóð»: départ majeur, le son, les voix, certaines à l’envers, l’envoûtement; le voyage onirique avec les claviers de Kjartan qui revient, tout est là pour vous entraîner, vous faire fondre comme la glace remplie de braise. «Blóðberg» enchaîne beauté langoureuse basée sur des crescendos en vague et Jónsi en hopelandic se promenant près de vous pour une méditation sombre, symphonique, sublime. «Skel» continue, son d’ailleurs, sur la voix en falsetto; air latent contemplatif, fabuleux, rempli d’espoir où l’orchestre montre la puissance des instruments; final avec un cor, un cello archaïque pour «Klettur» à l’ambiance «La Dernière Tentation du Christ», un pad métronomique, des chœurs angéliques, violons mélancoliques d’où l’on attend l’explosion; le post devient cosmique, partant sur des limbes éthérés et donne le relief, immense. «Mór» avec Jónsi pour prolonger l’état de transe religieuse dans laquelle vous vous êtes englués, au réveil d’une sieste onirique tendant à vous y replonger avec un final en douceur.
«Andrá»: premiers sons de «Radio-Activity», premiers moments de vie de l’Homme sur Terre; l’hopelandic [langue construite inventée par Jón Þór Birgisson, leader du groupe de rock islandais Sigur Rós, ndlr] est parfait pour symboliser cela, un air contemplatif, une montée vers les cieux tout en restant vivant, voilà ce à quoi nous tendons; la guitare acoustique et l’air enflent, les sons font monter l’ambiance avant la fin, on se dirait sur une vague. «Gold» ressemble mais dissemble, plus de majesté et de grandeur; planant et songeur. «Ylur» au piano cristallin et à la voix de Jónsi en avant pour une énième dérive bucolique sur les terres australes noires, une de plus pour rester en apesanteur. «Fall» survient, piano et sa pédale de sustain pour prolonger, le vocal minimal comme interlude et l’air solennel pour garder espoir. «8» clôt l’album, titre consensuel reprenant en boucle le thème du sombre clair, un oxymore de plus pour ces 3 fantastiques et leur orchestre; 5 minutes et c’est fini… pour un decrescendo méditatif final.
Sigur Rós lance ce pavé musical créant une fusion entre l’art, l’art rock, le post-rock et la musique de cathédrale; envoûtant, déphasant, monolithique et plaisant, son de là-haut que l’on peut écouter d’en bas; un son néo-classique cosmique, un concept album à écouter d’une traite, à l’heure où beaucoup surfent sur 2-3 titres, pensant tout savoir et tout comprendre; méditatif, onirique, beau tout simplement car parvenant à faire espérer en un monde meilleur, serein, voilà ce que Sigur Rós est encore capable de faire. Parfait dans le genre.
Brutus
https://store.sigurros.com/album/tta
https://youtu.be/seQGmak5b7s

27/09/2023 : The Decadent Orchestra - Decadent Orchestra

The Decadent Orchestra
Decadent Orchestra
électronique / krautrock – 42:30 – Belgique 2022
Projet énigmatique de Marc Gilboux, bassiste féru de musique électronique analogique (et de Rhodes, et de Mellotron), The Decadent Orchestra livre une douzaine de mélodies (enregistrées dans son home studio namurois et abritées derrière une pochette au graphisme en noir et blanc, ésotérique et surréaliste) aux ambiances à la fois nostalgiques (l’analogie est un marqueur du siècle passé), rétrofuturistes (l’électronique baigne de ses sons de synthèse l’avenir qu’on imaginait dans le passé) et actuelles (Tesla, X, Meta… l’univers cybernétique, c’est aujourd’hui – dans le ciel ou dans l’eau, les drones font la guerre; au SAV c’est l’IA qui vous parle; le garagiste est passé de la clé à molette à la clé USB et se repose sur le diagnostic établi par la voiture). On y retrouve le goût d’un Kraftwerk des débuts («Himmel»), le rythme motorik («Eko» et bien sûr «Rotorik»), les vagues à la Tangerine Dream (les roulés de synthétiseurs qui découlent de l’annonce, paléontologico-futuriste d’«Archeo»), le subterfuge lounge des salons de thé aux fauteuils défoncés («Sonny»), l’angoisse de la série B («Failed») et même, de-ci de-là, des touches d’épanouissement floral à la Jacno – le tout enregistré, aux petits oignons et d’un bout à l’autre, avec une sonorité cristalline.
Auguste
https://decadentorchestra.bandcamp.com/album/decadent-orchestra
https://www.youtube.com/watch?v=GuZbK9Lp07U

28/09/2023 : La Gota - Paisaje Interno

La Gota (Viajero Inmóvil Records)
Paisaje Interno
rock progressif – 35:32 – Argentine 2023
Cinq musiciens forment La Gota («La Goutte») et nous livrent ce «paysage interne» d’Argentine, pays d’Astor Piazzolla, musicien le plus important de la seconde moitié du XXe siècle pour la musique de tango. Un sixième musicien (bassiste) les a rejoints pour cette production.
Dans ce troisième album studio, le groupe incorpore le bandonéon pour nous offrir un brillant amalgame de «rock progressif/jazz-rock/avant tango», avec, comme on dit dans ces cas-là, «son propre son contemporain».
Les 9 titres relativement courts se font complexes, variés. Ils déconstruisent les rythmes traditionnels, usent et abusent du contrepoint, mêlent quelques ingrédients du répertoire classique à celui des tangueros (danseurs). Si le bandonéon est le roi de cet album, la guitare flamboie à ses côtés, soutenue par une base rythmique sans défaut qui laisse également virevolter les claviers. Électrique et acoustique s’enlacent, s’étreignent, se séparent. Chaque titre, tel qu’on pourrait définir le tango, sublime deux principaux ingrédients: la séduction et la nostalgie. La séduction s’exprime par un laisser-aller de chaque musicien qui accepte de se laisser totalement guider par l’autre. Quant à la nostalgie, c’est celle originelle des faubourgs de Buenos Aires, celles des rêves brisés et des ambitions déçues.
Ne cherchez pas de comparaison avec des groupes tels que Gotan Project; nous sommes dans un registre rock qui sera, peut-être, fustigé par les gardiens de la tradition mais qui ne peut que finir par s’inscrire parmi les maîtres incontestés du tango ou, plus précisément, du tango nuevo.
Le tango est inscrit depuis 2009 sur la liste représentative du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’UNESCO. Gageons que La Gota ne démérite pas et participe, non seulement à sa préservation, mais également à sa diffusion.
Publius Gallia
https://viajeroinmovilrecords.bandcamp.com/album/la-gota-paisaje-interno-2023
https://www.youtube.com/watch?v=B4ruRDfC54s

29/09/2023 : Schizo Fun Addict - Love Your Enemies

Schizo Fun Addict
Love Your Enemies
dream pop – 30:41 – États-Unis 2023
Schizo Fun Addict est un groupe en provenance du New Jersey. Ici, tout n’est qu’ordre, calme et volupté, même leur reprise du classique de Led Zeppelin, «Over the Hills and Far Away», est d’une douceur incroyable (je ne l’avais pas reconnu à la première écoute). Par certains aspects, on pourrait rapprocher ce sextet à des groupes des années 90, comme My Bloody Valentine. Dès la plage introductive, «Forever Before», on se trouve plongé dans l’ambiance de ces années. Les morceaux sont courts (il y en a dix au total). C’est à la chanson qui clôt l’album, «Meet You in the Wind», qui a définitivement ma préférence. En conclusion, cette plaque n’est pas dénuée d’intérêt, mais je regrette, personnellement, le chant féminin souvent malheureusement approximatif, ce qui m’a obligé à ne pas attribuer une cotation élevée.
Tibère
https://schizofunaddict.bandcamp.com/album/love-your-enemies
https://www.youtube.com/channel/UCtRK6uVal3HSKGUn5L51Y4w

30/09/2023 : Pixie Ninja - Hypnagogia

Pixie Ninja
Hypnagogia
progressif éclectique instrumental – 40:23 – Norvège 2023
Pixie Ninja débute en 2015, proposant un son psyché/post-rock assez détonnant; son hors norme, avant-gardiste, à base d’électronique et de vieux claviers envoûtants provenant de Jostein Haugen et Marius Leirånes, accompagnés de Mattias Olsson ayant œuvré au sein d’Änglagård et White Willow. Un 3e album frais, inventif, qui risque d’en laisser plus d’un sur le carreau pour un concept fabuleux.
«Thanatosis»: entame symphonique avec claviers et saxo; break électro sombre avant le retour saxo tonitruant; à la limite de la musique des Art Zoyd pour un délire musical déphasé. «Silver Paper Unicorns» surfe sur une base cold wave agrémentée d’un clavier nippon donnant fraîcheur et détente. «Pandæmonium»: pas celui des Killing Joke, quoique cet interlude ait tout d’un espace musical introuvable sur terre, entre Art Of Noise et les Devo; son onirique électrifié. «Dance Macabre»: son improbable entre U2 et Simple Minds, des voix angéliques de sirènes accrochées aux récifs; un break digne d’un maelstrom et une fin où les mouches attaquent des pilotes dans un trou de ver, unique, désopilant, son immense! «Ora Antarctica»: création, naissance, un peu des Sigur Ros du début, un peu du Mike Oldfield des… débuts, avec ses cloches; onirique et bluffant; sur un mid-tempo surfant sur «Rencontres du 3e Type», immense. «Alpha Waves»: électro dub hypnotique avec un Mellotron envoûtant ramenant aux magnifiques heures des Tangerine Dream; ça évolue sur un riff jarrien puis heavy hawkwindien, c’est de la nitro musicale. «Oneironaut»: onirique, basse archaïque, glockenspiel, cloches de «Birdy», un riff prenant, mi-heavy, mi-asiatique... mi-ensorcelant, sur un Pure Reason Revolution boosté puis une longue montée transe hypnotique finale.
Pixie Ninja sort donc cet OMNI instrumental, dans la lignée d’un Steve Austin, plus expérimental, plus ambitieux, plus planant. J’avais un temps, en tant que thérapeute en relaxation, bossé sur les éidolies et autres hypnagogies, ces états que la musique progressive peut générer assez facilement, une évidence ici; fini le vintage, bonjour le son Pixie Ninja avec Mellotron et samples, arpèges et basses lourdes pour la baffe d’août.
Brutus
https://pixieninja.bandcamp.com/album/hypnagogia
https://youtu.be/KZL5tPogqFM