Mai 2023
- 01/05/2023 : Strange Pop - 1979-1982
- 02/05/2023 : Single-celled organism - Event Horizon
- 03/05/2023 : Light - The Path
- 04/05/2023 : Barale'Space Trip - Barale'Space Trip
- 05/05/2023 : Leprous - Aphelion (Tour Edition)
- 06/05/2023 : Arð - Take Up My Bones
- 07/05/2023 : Andy Pickford - Forbidden Spheres
- 08/05/2023 : Mystery - Redemption
- 08/05/2023 : Wheel - Rumination
- 09/05/2023 : Wizrd - Seasons
- 10/05/2023 : Ogives - La mémoire des orages
- 11/05/2023 : Kerygmatic Project - Dreams World
- 12/05/2023 : Och - Pö om pö
- 12/05/2023 : Voivod - Ultraman
- 13/05/2023 : Przemysław Rudź & Roman Odoj - Daydreamer and Nightwalker
- 14/05/2023 : Glass Hammer - At The Gate
- 15/05/2023 : Wax Machine - Hermit's Grove
- 16/05/2023 : The Rome Pro(G)ject - V - Compendium of a Lifetime
- 17/05/2023 : Ten Jinn - Ardis
- 17/05/2023 : Zahorí - El doctor don Worry y los don Worry doctor's
- 18/05/2023 : Seventh Station - Heal The Unhealed
- 19/05/2023 : Yes - Mirror To The Sky
- 20/05/2023 : Kerry Livgren - Q.A.R.
- 21/05/2023 : Alase - Matter Of Time
- 22/05/2023 : Samtar - Shadow Of The King's Charade
- 23/05/2023 : RPWL - Crime Scene
- 24/05/2023 : Ticket to the Moon - Elements
- 25/05/2023 : Various Artists - A Beginner's Guide to Sublime Frequencies vol. 1 & 2
- 26/05/2023 : Initial Mass - Alluvium
- 27/05/2023 : Leon Alvarado - Charging The Electric Dream
- 28/05/2023 : Bärlin - State of Fear
- 29/05/2023 : HamaSaari - Ineffable
- 30/05/2023 : Ultraphauna - No No No No
- 31/05/2023 : Furio Chirico's The Trip - Equinox
- 31/05/2023 : Geminii - Geminii
01/05/2023 : Strange Pop - 1979-1982
Strange Pop
1979-1982
crossover / rock progressif – 36:40 – Pologne – 2023
Strange Pop c’est Michał Dziadosz, compositeur, chanteur et multi-instrumentiste du groupe Iluzion; c’est son 2e album en solo avec les pointures que sont Michał Wojtas, Ryszard Kramarski et Maciej Sochoń; un son vintage rock progressif 70’s comme Pink Floyd, Tangerine Dream ou celui de Lunatic Soul. Un voyage de 40 ans, un album concept sur la rupture de relations toxiques, c’est parti.
«Last Time»: intro planante d’un Pink Floyd, air latent avec guitare slide et orgue; un titre vintage oui, avec réminiscences anciennes et un son moderne pour éviter la redite; le solo de Michał d’Amarok vaut son pesant; mélodique, planant avec ce bruit de vague en final. «Friend»: titre rock bien frappé, le riff nerveux plonge sur un air entraînant avec claquements de mains; morceau brut qui semble sortir des décennies d’antan où le solo guitare de Daniel donne toute la sensibilité au titre, aidé par l’orgue vintage; simple puis envoûtant. «Lost Years/Working Hour»: instrumental avec l’intro Schulze du courant berliner; son monolithique, vocal de la NASA, air monolithique avec synthé réverbérant; ça me rappelle le dernier morceau d’Hipnosis latent; break à mi-parcours où les cymbales augmentent la clarté musicale après un début sombre; le synthé de Ryszard remplit toute l’oreille, enclume, étrier et osselet et renvoie aux errements musicaux de feu Vangelis. «Nothing Really Happened»: second instrumental avec ces quelques notes qui explosent ma mémoire, oui Maciej et Michał ont l’art de renvoyer à «Faites entrer l’accusé» de feu Michel Legrand; l’air latent part ensuite sur un thème S.-F. avec airs planants ambiants à la Tangerine Dream et Jean-Michel Jarre; la batterie donne du relief et un son flirtant avec ceux de Michal des Riverside. «All Days»: sonorité saccadée pour le titre mélodique, intimiste avec la voix chaude de Michał, titre à la structure rock mélodique intimiste.
Strange Pop propose donc un voyage au tournant des années 70-80, c’est clairement énoncé; un côté naturel art-rock sans concession sur du rock prog atmosphérique, une continuité et une évolution pour un moment hors du temps.
Brutus
https://strangepopmusic.bandcamp.com/album/1979-1982
https://youtu.be/GJGWnj2k4uA
02/05/2023 : Single-celled organism - Event Horizon
Single-celled organism
Event Horizon
Neo Prog – 59’38 – Allemagne – 2023
Non, ce projet Single Celled Organism n’est nullement un cours de biologie, mais bien du progressif, œuvre d’un gars (Jens Lueck) qui fait (presque tout en solo), malgré la présence, sur cette plaque, de plusieurs invités. Il en est ici à sa troisième salve, après «Splinter in the Eye» et «Percipio Ergo Sum». Dès la plage d’ouverture, «Memories in a Box», les fans de guitare inspirée par Pink Floyd ou Eloy seront aux anges et le chant se montre délicat et enveloppant, oserais-je dire «angélique»? Des claviers virevoltants font également leur apparition (comme dans «Inhale What’s Forbidden»). Dans cette production, tout respire la quiétude, le calme et la volupté; plongez sur «Keep My Faith in Humans» pour vous en persuader. «Distorded Night» est un (court) instrumental, c’est également le titre le plus énergique de l’album, juste avant de retrouver une ambiance plus délicate avec la plage titulaire qui clôture notre écoute. Une plaque agréable à entendre et à se repasser lors des longues soirées de spleen hivernal.
Tibère
https://singlecelledorganism.bandcamp.com/album/event-horizon
https://www.youtube.com/channel/UCWrGO6YXuF-zVSIpRaDQE5A
03/05/2023 : Light - The Path
Light
The Path
rock progressif – 77:29 – France – 2023
J’ignore quelle mouche pique Camille De Carvalho lors de son voyage en Chine, mais il en revient avec une appétence renforcée pour la composition orchestrale, qu’il tente d’appliquer dès son retour, en 2009, se heurtant rapidement à la difficile réalité de l’écriture et de l’enregistrement pour un grand effectif. N’empêche, depuis et avec une persévérance inhabituelle, le musicien accumule le matériel et les prises, jouant lui-même d’une (impressionnante) série d’instruments (claviers, vents, bois, percussions… en plus des précurseurs de la synthèse sonore que sont le thérémine et les ondes Martenot), aidé par une plus de vingt interprètes, dont huit forment finalement le noyau dur de Light et chacun contribuant, à sa façon, à la mise en place des idées de départ. L’album, à la palette de timbres particulièrement étendue – il évite toutefois (sauf peut-être dans «Newts») l’écueil de l’addition de couleurs sonores telle qu’imaginée par Mike Oldfield dans le séminal «Tubular Bells» (on a adoré, mais une fois la ficelle dévoilée, le mystère s’effiloche) –, est parsemé d’interludes qui assurent la transition entre des pièces plus conséquentes, dont la structure s’éloigne, sans complexité excessive, du format rock et qui dénotent des sources inspirations issues d’esthétiques différentes et complémentaires, classique (le chant grégorien dans «Dive»), contemporaine (l’ombre de John Adams plane sur «The Sweet Release Of Death»), ambient à l’occasion des transitions («Electris»), jazz souvent, progressive toujours («Blue Sun» évoque Magma, «The Sublimation of an Oak» emprunte aux atmosphères sombres et alourdies de King Crimson). Une œuvre atypique.
Auguste
https://lightprogrock.bandcamp.com/album/the-path
https://www.youtube.com/watch?v=CKTrEWxsg5k
04/05/2023 : Barale'Space Trip - Barale'Space Trip
Barale'Space Trip
Barale'Space Trip
soft progressif – 31:18 – Italie – 2022
À part vous dire que les Barale sont deux frères, Fabio (voix et batterie) et Davide (claviers), je n'ai pas trouvé grand-chose sur leur parcours, sauf que le guitariste crédité a été membre de Barock Project (c’est une référence!). Mais l'important restant la musique, suivez les liens pour vous faire votre idée!
Après une introduction vaporeuse, «Mountain of madness» égrène un thème au piano, la voix sombre lente s'ajoute et peu à peu le morceau prend corps. Le premier chorus marque une filiation assez prog-floydienne. Dès le break, l'ensemble verse du côté psyché, la reverb n'y est pas pour rien, et court retour pour la fin du morceau au thème initial. C'est efficace! Même si on reste un peu sur sa faim.
«Distant Lands», plus musclé et intrigant, avec sa voix dans la chambre d'écho, de belles guitares orientalisent le morceau qui y gagne beaucoup, et l'on regrette qu'il n'explose pas la barrière des 5 min.
«Awakening» est une courte balade au piano avec des nappes (pas de pot de fleur sur la nappe), dont le piano semble servir d'intro à «Imagination» où la voix et le phrasé évoquent Lou Reed dans les parties sombres; cependant l'ensemble sonne assez pop finalement mais sans être déplaisant. Enfin, l'album prend une belle épaisseur pour ses 3 derniers morceaux. D'abord «Dancing Spirit»: bruitages électroniques, avec un long accord de guitare saturée et une invocation très floydienne, pour un morceau cohérent où tout est bien en place; le riff de guitare est assez entêtant et le solo final est superbement emphatique.
«Rain & Cry»: percus et grosse guitare se répondent ici, initiant un rythme hypnotique. Très psyché, un peu à la manière d'un Steve Hillage, le riff orientalisant et la voix «échotée» nous (dé)livrent un joli refrain, toujours lentement balancé, et l'on regrette encore plus que le morceau s'achève si vite. L'ultime piste, «Lady Of The Dark Room», possède une ambiance suspendue et intimiste, avant que tout n'éclate; c'est une belle fin pour ce court premier album un peu inégal.
Cicero 3.14
https://baralespacetrip.bandcamp.com/album/baralespace-trip
https://www.youtube.com/watch?v=vaHwHdGAlsM
05/05/2023 : Leprous - Aphelion (Tour Edition)
Leprous
Aphelion (Tour Edition)
art-rock / pop-prog extrême – 108:15 – Norvège – 2023
Leprous est devenu un groupe majeur, innovant; il reprend sa tournée coupée par la pandémie; il sort cet album compilation (18 titres), «Aphelion (Tour Edition)», avec les deux bonus: «A Prophecy to Trust» et le live «Acquired Taste» de 2021, et les 6 titres «live at Motocultor» et «live in Berlin», enregistrés en 2022, d’une bonne quarantaine de minutes. Leprous surfe sur sa bonne étoile et prévoit le live en LP pour mai prochain, pour les ultra-fans. Sinon, pour l'album «Aphelion» (10 titres), allez voir ma chronique sur le site (http://www.progcensor.eu/2021-septembre.html#e9QwJK2L). Pour le live, je vous propose plutôt un petit compte-rendu d’une de leurs prestations récentes avec la setlist qui englobe les 6 titres et bien plus.
Brutus
https://open.spotify.com/album/6OR7RUTuEd8upaXIyFDO12
https://youtu.be/7m0cElkgGq8
06/05/2023 : Arð - Take Up My Bones
Arð
Take Up My Bones
doom / metal atmosphérique – 43:25 – Royaume-Uni – 2022
Premier album pour ARÐ, qui signifie «terre natale» dans le dialecte du royaume de Northumbrie (royaume médiéval situé dans l'actuel nord de l'Angleterre et le sud de l'Écosse). En fait ARÐ est le projet solo du compositeur et musicien Mark Deeks (du groupe de metal Winterfylleth). Il est accompagné du guitariste Dan Capp (du même Winterfylleth), du batteur Callum Cox et de la violoncelliste Jo Quail. Notons aussi que cet album a été masterisé par Greg Chandler du groupe de funeral doom metal, Esoteric.
«Take Up My Bones» est un conte musical conceptuel basé sur l’histoire de la dépouille de saint Cuthbert (vous en apprendrez davantage en lisant sa légende sur le lien Bandcamp ci-dessous).
Revenons-en à la musique: des sons lourds évidemment, les orchestrations du metal atmosphérique, mêlées à une chorale monastique (magnifiques chants qui s’élèvent vers le ciel) où interviennent parfois aussi des paroles de Mark Deeks d’une voix angoissante. On y trouve aussi des passages «quasi musique classique», tout en douceur: touches de piano et légères cordes et même quelques secondes d’orgues d’église vers la fin de la plage titulaire de l’album. Le titre «Raise Then The Incorrupt Bod» est un peu différent mais très écoutable pour les amateurs de prog; on peut y entendre des envolées de guitares et clavier, ainsi que des chœurs symphoniques qui pourraient se rapprocher de «In the Court of the Crimson King».
À peine 45 minutes, mais n’en fallait pas plus pour se laisser emporter par ce voyage dans le temps.
La Louve
https://ardnorthumbria.bandcamp.com/album/take-up-my-bones
https://youtu.be/Vrf-OidAJqg
07/05/2023 : Andy Pickford - Forbidden Spheres
Andy Pickford
Forbidden Spheres
chill-out / electronica – 79:53 – Royaume-Uni – 2023
C’est en visionnant une vidéo rapportant un incident dans les laboratoires de recherche de Los Alamos (Nouveau-Mexique) et de Livermore (Californie) qui avaient pour but de créer une arme nucléaire dans les années 40 que le terme «sphère interdite» évoqué a fait naître dans son imagination fertile un concept qui n’a en fait, dit-il, rien à voir avec ledit incident. Parfois un terme ou une association de deux mots peut créer des images et un concept final très éloigné de la source même de ces mots. Cette fois, la partie visuelle de l’opus est réalisée par Midjourney AI, un logiciel qui ne fait pas l’unanimité chez les graphistes qui ne veulent pas se voir remplacés par une intelligence artificielle (c’est mon cas). Ce n’est pas l’avis d’Andy Pickford qui ne se limite pas à une simple pochette puisque le pack comprend un livret de 14 pages au format PDF, de quoi ravir tous nos sens (il faut dire que les illustrations en jettent!). Inhabituel encore, «Zak the Juggler» se place carrément dans la mouvance techno par un rythme syncopé où se joint une batterie électronique des plus pêchues. Le thème musical répétitif hypnotique, additionné de bruitages robotiques hallucinés parfait ce mariage (d)étonnant. Andy a travaillé de la même manière que pour son précédent et excellent «Exospore» avec son Moog Subharmonicon, ici en mode improvisation (décidément, il laisse beaucoup de pouvoirs aux Cylons, les amateurs de SF comprendront 😉 ). Dès les premières notes de la partie «Spheres» proprement dite, on identifie la griffe Picko par ses scintillants synthés qui se muent au fil des minutes en une plongée astrale dans le portail de l’infini. Les puissants roulements de batterie (électro) colorent d’une touche dramatique une entrée en matière de haute voltige. La pépite de ces sphères porte le numéro 4. Une composition de pure énergie mélodique soutenue une fois de plus par un rythme obsédant en mode exponentiel. La formule inimitable d'Andy est ici: une mélodie simple où viennent se greffer des envolées de claviers coalescents. La partie finale nous achève dans un grand frisson épidermique par sa texture quasi symphonique. Sublime, définitivement.
Clavius Reticulus
https://andypickford1.bandcamp.com/album/forbidden-spheres
https://www.youtube.com/watch?v=gshiA7iHWEg
08/05/2023 : Mystery - Redemption
Mystery
Redemption
rock néo-progressif symphonique – 73:26 – Canada – 2023
Mystery s’est créé en 1986 par Michel St-Père, un nouvel élan en 2000 de par l’arrivée de Jean Pageau remplaçant Gary Savoie. D’un style AOR à la Styx, Kansas évoluant vers l’art rock sur Rush et Saga, axé sur des soli et ambiances acoustiques, breaks et mélodies accrocheuses pour une formation rock progressif respectée pour son symphonisme sophistiqué. Voyons voir ce que ce 8e opus a dans le ventre.
«Behind the Mirror»: entame imposante, dynamique et engageante; référence à Rush avec la basse et la voix haute de Jean; titre qui te martèle les oreilles par un son moderne, break léger vocal suivi d’un solo divin, oui Michel transcende le son du groupe par sa classe naturelle. «Redemption»: titre éponyme majestueux et solennel, sur une guitare rythmique et Jean à la proue, mélodique, morceau consensuel qui te berce; un solo, une montée onirique, efficace; beau jusqu’aux fûts de Jean-Sébastien. «The Beauty and the Least»: mélodie semblant soporifique, ouatée, Michel en met une couche rapidement pour avertir; déclinaison progressive, beau travail de François à la basse, de l’art; un rythme secondaire s’emboîte, bourré d’émotion; les synthés en rajoutent, versant sur une fresque musicale intense, bluffante; un peu de «Duke» des Genesis et le final chaleureux. «Every Note»: ballade acoustique, avec piano et flûte bucolique, le titre tout en guimauve, qui met Jean en avant avec sa voix caractéristique; un titre où le solo rehausse encore l’émotion.
«Pearls and Fire»: attention tout va se jouer ici; titre plus long juste édulcoré ou aux ambiances prog travaillées: 3 minutes et je ressens les effluves floydiennes d’«Animals», puis Rush; le synthé gras, prog métal envoûtant; à mi-parcours le coup fatal avec un break divin semi électrique-symphonique, du Pink Floyd surboosté; reprise de l’air et solo de Michel pour une vibration au firmament. «My Inspiration»: arpège guitare, ballade champêtre dans l’esprit rock country sud-américain; synthé génésisien sur «Burning Rope» avec la touche d’Antoine. «Homecoming»: mélodie soft avec Michel et Jean qui se fondent dans l’air comme un autre instrument, Antoine sur la lignée des Marillion. «Is this How the Story Ends?»: avec ce clavier me rappelant les intros génésisiennes éclairées des 80, fraîches, chatoyantes et celles, mélodiques, de Camel; break à 6 minutes, innovant, rythmé, moderne; je ne reconnais plus Mystery mais c’est bien eux. Le second tiers sur un creuset musical irracontable, à écouter avec un air provenant du fameux «Métal Hurlant»; le 4e temps pour se poser en final à la Dream Theater, grandiose.
Mystery a frappé fort, voulant assumer une rédemption de son virage musical? Un album qui a gagné en sensibilité, en progression, en émotion. Rien à jeter, excellent.
Brutus
www.therealmystery.com
https://youtu.be/zcsFtwfT-ug
08/05/2023 : Wheel - Rumination
Wheel
Rumination
metal progressif – 12:36 – Finlande – 2022
Et au milieu coule une rivière! C'est l'image qu'évoque le son de Wheel, tour à tour chuchotant, rafraîchissant, constant et violent!!! Produit d'un «British» émigré en Finlande: l'habile James Lascelles et sa horde de Vikings (Saksala/Vitra/Turunen), cette prog metal formation piétine hardiment depuis 2015 les baskes d'un géant, spécialiste de l'hibernation: Tool! Il fait bien avouer que l'abordage a été savamment planifié. 1/2019, Moving Backwards, c'est un uppercut! 2/2021, Resident Human, c'est une raclée! En deux assauts studios, Wheel a plus que gardé une place au chaud, il s'est créé un avenir à l'international en intégrant le label Inside Out Music. Fin 2022, tournée américaine en prévision, engagés pour faire la première partie d'Apocalyptica et de Epica, nos barbares musiciens ont déboulé du confinement avec trois nouveaux titres à ruminer devant leurs potentiels nouveaux fans: «Blood Drinker», «Synchronise» et «Imprevious». Plus courts qu'à l'accoutumé, ces morceaux sont un parfait échantillon de leur savoir-faire. «Rumination» est un condensé de 12 minutes de l'univers linéaire et ultra-soigné du groupe, prêt à exploser de frustration (ou est-ce la nôtre?). Peu importe… entre autres manifestations de la parfaite osmose de nos compositeurs-interprètes d'Helsinki (ils y mettent tous la main), tout en déroulant le fil rouge, on frissonne à la portée d'une grosse basse graveleuse sous décors de batterie parcimonieuse, avant de se faire apporter sur un plateau une guitare-voix aussi pugnace que leurs textes sont métas et pertinents. Alors donc, même si vous avez mieux à faire pendant les prochaines minutes ou si votre bureau se trouve près de chez vous, vous savez comment remplir le silence ou le trajet!
Kaillus Gracchus
https://open.spotify.com/album/2lJ7fbaF6uMci8ClV3rmdZ
https://www.youtube.com/watch?v=uNeRmyjtsQ4
09/05/2023 : Wizrd - Seasons
Wizrd
Seasons
crossover – 43:57 – Norvège – 2022
Le 1er album de ces parfaits inconnus, pour moi, s'ouvre sur «Lessons». Chant choral avec des pointes de Beach Boys, sur une musique assez inqualifiable, et pourtant c'est ce que vous attendez à juste titre de ce type de chronique! Je me lance: un peu de Canterbury, beaucoup d'un jazz-rock effréné mais avec une slide guitare, parfois. Vous voilà renseignés? Non? Alors suivez les liens, vous ne serez pas déçus, car à défaut d'être en pays de connaissance, vous verrez du pays. La seconde piste, «Free Will», perd le chant choral, mais gagne en intensité et se dévale à toute vitesse. «Spitfire», plus rock, est encore plus speed et ferait un pendant aéronautique au «ME 262» de Blue Öyster Cult, mais, comme dans tout l'album, c'est vraiment non linéaire, avec souvent une rythmique en pleine tachycardie.
«All Is As It Should Be» démarre un peu comme un live psyché, une base rythmique solide, hypnotique, et l'on sent que cela peut partir dans tous les sens. On l'espère même, le chant choral revient, eh oui, tout est bien comme il faut, le break est pour le compte canterburyen, même si c'est dans une autre école, le Conservatoire de Jazz de Trondheim, que Hallvard Gaardløs (basse et chant), Karl Bjorå (guitare, voix), Vegard Lien Bjerkan (clavier, voix) et Axel Skalstad (batterie) ont formé Wizrd.
«Show Me What You Got»: piste tout schuss de jazz-rock, avec un rien de folie zappaesque et un final lumineux! «Fire and water» est plus syncopé et lisible, presque normal en comparaison. «Divine» débute par une batterie créative seulement accompagnée d'une basse synthé, et la voix vient se poser, lente, un riff guitare phasée virevolte parfois dans ce morceau d'une fraîche légèreté à la MGMT. «When You Call»: dernière piste avant le retour à la station, c'est du... psyjazz, l'ambiance avec du groove. Il y a même du sitar!
Pas même besoin d'un forfait, allez vite faire du hors pistes traditionnelles avec Wizrd!... Ne manquerait-il pas un «a»?
À suivre!
Cicero 3.14
https://wizrd.bandcamp.com/
https://www.youtube.com/watch?v=m72EJT3kayQ
10/05/2023 : Ogives - La mémoire des orages
Ogives
La mémoire des orages
rock de chambre – 74:46 – Belgique – 2023
Certains prétendent que l’acceptation même de l’idée d’OVNI relève de la croyance, comme la religion, la cartomancie ou la psychanalyse, mais la science (et le télescope James Webb) nous ouvrent le regard vers l’immensité d’un univers (encore n’en observons-nous, avec la vanité frivole du borgne au pays des aveugles, qu’une petite partie) où ce serait bien le diable si la vie ne dénichait pas les trois atomes de carbone et d’oxygène, enfin, le kit nécessaire à démarrer une petite sauterie vivace comme ce fut le cas sur Terre (enfin, surtout sa part aquatique), il y a quelque trois ou quatre milliards d’années: il est probable que nous ne soyons pas les seuls, même si on a peu de chance de se croiser (et de se foutre sur la gueule comme à l’habitude), vu la dimension de l’univers en question (et du temps qui va avec). Moi je n’aime pas trop les croyances et m’en méfie comme de la peste (doit-on dire «comme du Covid»?), pour autant, Ogives est un OVNI – dont on guette souvent l’irruption mais qu’on voit rarement atterrir (ou alunir, ou amarsir, ou asaturnir) et qu’on a encore moins l’occasion d’examiner de près – et, depuis que mes oreilles parcourent son premier album (qui paraît chez Sub Rosa, un label fouineur et intransigeant, mine d’or underground d’une belgitude fourmillante), en ingèrent la substance sonore, une esthétique riche qui explore (autant qu’elle s’en nourrit) le rock progressif (ses racines, son esprit fouineur) à ses frontières avec la musique contemporaine (certaines de ses interrogations, pas ses excès), qui se joue de mutations stylistiques cruelles mais cohérentes (harmonieuses, quoi), qui convoque un effectif peu courant (neuf musiciens, des voix lyriques, des synthés modulaires, deux batteries…), qui ose des contrastes longs, charpentés, aux textures denses (et un format de double LP pour son début), des compositions à l’écriture précise et soignée, éminente et invincible, aussi familière de la musique de chambre que du rock, je ne sais plus que penser (ou peut-être bien que croire) car le duo de têtes hybride Tchikov / Van Doosselaere (Pavel compose et joue, de ceci, de cela, et encore de cela; Alexis tient les baguettes du rythme et, de sa troisième main, le crayon du poète) bouleverse (sa musique émeut; les convictions partent en capilotade) et secoue (on se prend à espérer une rédemption, artistique peut-être?; son inspiration joue subtilement avec les attentes – auxquelles elle répond juste assez et qu’elle surprend… juste assez). On peut en citer certaines sources (King Crimson ou John Zorn, Einstürzende Neubauten ou Iannis Xenakis, Godspeed You! Black Emperor ou l’Estonien Arvo Pärt; la fougue adolescente de Van der Graaf Generator), mais en chercher l’impact direct nous éloignerait de l’écoute de «La mémoire des orages» pour ce qu’elle est: une immersion (et que personne ne s’avise de m’apostropher avec le concept marchand et creux d’«expérience immersive», où je le renvoie aux Carrières de Lumières et ses nauséeuses projections murales, plafond et plancher compris, de Kandinsky et Cézanne), un plongement, une dissolution comme celle de celui qui s’insinue subrepticement dans un monde qui n’est pas le sien mais résonne et sent comme une vieille connaissance. Électrique, lyrique, épique, mélancolique, Ogives est partout, déborde d’ambition (et l’assume), ne perd rien, nous emmène sur un chemin par lui tracé, de la transe à la sérénité. Redoutable.
Auguste
https://ogivesband.bandcamp.com/album/la-m-moire-des-orages-mixed-by-steve-albini
11/05/2023 : Kerygmatic Project - Dreams World
Kerygmatic Project
Dreams World
rock progressif symphonique – 119:20 – Italie – 2022
Trio créé en 1998 en Italie et qui se présente comme un groupe chrétien. Kerygma, signifiant à la fois «proclamation» en grec et, dans le sens philosophico-théologique, désignant le premier exemple de prédication chrétienne.
Musicalement, l’inspiration est à chercher du côté de la grande tradition du rock progressif britannique des années 70 et 80. Le groupe ne s’interdit aucun apport pop, jazz, fusion ou classique.
La prédominance des claviers fait immédiatement penser à ELP, même si l’influence des grands Transalpins est indéniable, tels Banco Del Mutuo Soccorso, Le Orme… Le tout est chanté en anglais!
«Dreams World» se présente sous la forme d’un double CD contenant chacun 9 titres. Le premier CD contient la version réduite au «power trio», tandis que le second contient la version symphonique de l'œuvre, dans laquelle chaque composition de Kerygmatic Project est mise en dialogue avec un orchestre. Je dois vous avouer avoir été plus sensible à la version orchestrale qui, par essence, remplit l’espace d’une richesse auditive, là où la version trio semble sombrer dans le minimalisme. «The Old World (Overture)» est, à ce titre, le plus représentatif. Mais peut-être vous faudrait-il (personnellement, je vous le conseille) écouter en premier la version trio, ce que je n’ai pas fait!
De manière générale, la version orchestrale soulignera mieux les aspects dramatiques, symphoniques et dynamiques de la musique que propose Kerygma.
La version trio ravira les aficionados du prog «pur» pour qui un enrobage orchestral gâche, en définitive, la substantifique moelle de ces musiques italiennes symphoniques d’une richesse harmonique et mélodique sans pareille.
Quoi qu’il en soit, Kerygma n’est pas le premier groupe à proposer deux versions d’un même disque et cela nous permet de ressentir, grâce à des aspects différents mais supplétifs d’un même titre, des sensations multiples et complémentaires.
Publius Gallia
https://maracashrecords.bandcamp.com/album/dreams-world-2
https://www.youtube.com/watch?v=MX29jwOPOiw
12/05/2023 : Och - Pö om pö
Och
Pö om pö
krautrock – 40:28 – Suède – 2022
Suivant l’humeur du moment, j’aime, en matière de musique comme en littérature, en cinéma ou en théâtre, découvrir, être surpris – voire secoué comme un olivier à la récolte – ou au contraire, retrouver l’odeur connue de sentiers déjà battus, le confortable parfum de la pluie d’orage sur la terre chaude, celui que certains recherchent pour la rassurance, d’autres pour le plaisir de (re)connaître un style, un cadrage, une façon de mettre en scène – même si l’artiste m’est étranger, je me sens alors en terrain connu. C’est le cas avec Och, suédois plutôt qu’allemand, mais connecté à la trame cosmique des ancêtres germaniques de la fin des années 1960 (Popol Vuh, mais aussi Cluster, pour la décennie suivante), qui, à sa sauce (moins motorique, plus lo-fi; plus psychotrope, moins psychédélique) poursuit un périple, à la fois intérieur, intimement en soi et déroulé dans la troposphère, exposé à la vue de tous – un peu à la manière de cet état ambigu de conscience, entre veille et sommeil, légèrement hallucinatoire, où l’on se sait encore éveillé mais déjà presque endormi – ou le contraire. Vieille connaissance inconnue, Och vient de Linköping; «Pö om pö» est son troisième album et signifie «petit à petit».
Auguste
https://o-c-h.bandcamp.com/album/p-om-p
https://www.youtube.com/watch?v=pLnYTYJF1P8
12/05/2023 : Voivod - Ultraman
Voivod
Ultraman
thrash metal – 14:29 – Canada – 2022
Le Japon a conquis le monde avec ses automobiles, ses multimédias, ses électroménagers et ses super-héros… Côté musique, on connaît moins d'exportations que d'importations célèbres, si on compte Mireille Mathieu, Salvatore Adamo ou le «Tokyo Tapes» de Scorpions; a contrario, nous avons Tokyo Hotel… L'invasion occidentale a cassé la baraque en papier! Pour Voivod, c'est un peu plus subtil. Cadors underground de la scène thrash metal eighties, nos Canadiens n'ont jamais fait de concessions ou si peu…On leur connaît une dizaine d'années prog en clôture de siècle! Pour ce qui nous occupe aujourd'hui, après le passage de Jason Newsted et un quinzième album maîtrisé et arrosé de sang neuf, «Away», «Snake», «Chewy» et «Rocky», sur les starting-blocks de leur tournée avec Opeth, ont exhumé des archives télévisuelles soixante-huitardes le robot extraterrestre, ami des humains-nippons: Ultraman! Intitulé de leur nouvel EP, ce rock-android décliné, à leur sauce, en 3 chansons-chapitres, et en autant de langues, a littéralement pulvérisé la yé-yéterie de l'originale ou autre Bernard Minet. C'est rugueux-fantaisiste, c'est ridiculo-inspiré mais carré voire monolithique comme on l'aime. Nos «bêtas» métalleux sont venus sauver la Terre à renfort de leurs accords mécaniques et de leur simplicité sophistiquée. Cet OVNI (faut bien l'admettre, à bien considérer leur disco habituelle) devait figurer en cadeau sur le petit nouveau «Synchro Anarchy», mais, question of time ou question of marketing, l'enregistrement fit bande à part et ça le fait bien. Une bonne nouvelle ne venant jamais seule, en bonus des «pas bonus», l'aventure japonaise partage l'affiche avec la créature de Tolkien. Rappels retrouvés de leur live anniversaire de 2018: «Return to Morgoth», deux enregistrements supplémentaires sont venus apporter leurs sombres parades, à la fois faussement crasseuses et soigneusement visqueuses. C'est une bonne double boucle bouclée! Un duo de clins d'œil apprécié! Après tout, les groupes qui font de vieux os sont ceux qui prennent leurs fans au sérieux sur la durée! À méditer, mais avant tout à écouter!
Nota bene: et, au prix où est le billet pour l'Asie, pourquoi ne pas en profiter pour revisionner leur DVD «Tatsumaki: Voivod in Japan» publié en 2009? Comme quoi, leur japonmania ne date pas d'hier. Arigato à tous!
Kaillus Gracchus
https://open.spotify.com/album/2yvZPVVaGO197S8nfygJkq
https://www.youtube.com/watch?v=r17gqbpOWMY
13/05/2023 : Przemysław Rudź & Roman Odoj - Daydreamer and Nightwalker
Przemysław Rudź & Roman Odoj
Daydreamer and Nightwalker
rock électronique atmosphérique / Berliner Schule – 71:12 – Pologne – 2023
Przemysław Rudź est un scientifique, climatologue, composant de la musique électronique depuis 2009. Aidé de son compère Roman Odoj aux guitares, il sort un prog électro ambient moderne influencé par les maîtres du genre, avec des circonvolutions intimistes invitant à l’introspection; c’est son 26e album.
«Molecular Surgery»: envolée spatiale, planante, électrique et prenante sur une invitation à la transe et/ou au voyage.
«Song For The Leaving»: guitare légère égrenant un air des Pink Floyd, autre montée épique à la sauce Tangerine Dream première mouture, titres ambiants longs et crescendiques.
«Muse In The Moonlight» renvoie aux compositions expérimentales du rêve mandarin et de Vangelis («Beaubourg»), avec des recherches sombres sur la S.-F.; Roman apparaît surtout sur le deuxième tiers sortant des notes ciselées au goutte-à-goutte.
«Top Of The World»: titre le plus court et le plus ambiant, base douce avec des retours vibrants par la guitare.
«Daydreamer & Nightwalker Part 1 & 2» en LP, un titre enchaîné heureusement en digital sur une déclinaison spatiale un temps, une avancée méditative ambiante par la suite avec bruits de mer et sons enveloppants à la manière d’un Klaus Schulze; les synthés se font plus gras, présents, puis laissent la place à Roman pour un final hard rock stratosphérique et bluesy-jazzy rock, ensorcelant où le synthé revient pour une transe.
«Dusk & Dawn»: pour le final austère, envahissant, vrombissant, bucolique, minimaliste, idéal pour se relaxer.
Przemysław et Roman ont sorti un florilège de sonorités déjà entendues de-ci de-là; c’est beau et usité, c’est mélodique, dense, suffisamment pour ne pas s’ennuyer sur ces longues traversées oniriques. Pour fans et envies de détente musicale.
Brutus
https://przemyslawrudz.bandcamp.com/album/daydreamer-nightwalker
14/05/2023 : Glass Hammer - At The Gate
Glass Hammer
At The Gate
rock progressif symphonique – 61:28 – États-Unis – 2022
Avec ce 21e album depuis 1996, Glass Hammer (GH) met un point final à la trilogie «fantasy» initiée en 2020 avec Dreaming City et poursuivie en 2021 par Skallagrim - Into The Breach. Autour des fondateurs Steve Babb (claviers, basse) et Fred Schendel (claviers, guitare), le groupe est complété par Aaron Raulston (batterie) et Hannah Pryor (voix), cette dernière est assistée de compagnons habituels de GH: Jon Davison (Yes) et John Beagley. Reece Boyd (guitare) complétant le groupe sur ce disque, comme souvent!
Le thème du premier album de GH était déjà fantasy, inspiré de J.R.R. Tolkien; le fantasy est donc présent depuis longtemps dans ce groupe assez littéraire dans son inspiration pour les livrets, et toujours symphonique pour les partitions, telle l'intro «The Years Roll By» si délicieusement pompeuse que j'en viens à douter de la nationalité du groupe! Les titres s'enchaînent, parfois plus hard rock («Savage» ou «All Alone»), parfois avec une influence dans la pulsation Tangerine, tel le très bel instrumental cinématique «North Of North», qui lorgne vers un Uriah Heep doté d'une électronique moderne du plus bel effet, ce qui sera moins le cas avec «Nowblind Girl», plus remarquable pour sa guitare que pour sa digression de synthé basse.
«All For Love» propose alternativement une incantation et un déchaînement de guitares énervées, le tout laissant un sentiment de majesté sans doute dû au tempo lourd, où excelle, ici et tout au long de l'album, la basse ciselée et tonitruante de Bab. Et pour clore la trilogie «In The Shadows & It's Love», cet epic de plus de 17 min, prend son temps pour sortir d'une simple chanson, mais le grand orgue (wakemanien) magnifie le thème, un souffle nous emporte avec bien-être. Les ruptures, nombreuses, font de cet ultime morceau un patchwork composé où alternent avec bonheur chorus de voix et de guitares (Queen), jusqu'à un final guitares et synthés vraiment enthousiasmant. Profitez!
Cicero 3.14
https://glasshammer.bandcamp.com/album/at-the-gate
https://www.youtube.com/watch?v=_b0hzcZ74dU
15/05/2023 : Wax Machine - Hermit's Grove
Wax Machine
Hermit's Grove
rock psychédélique / musique brésilienne – 30:23 – Angleterre – 2022
Né au Brésil, Lau Ro vit à Brighton depuis ses huit ans – la plage des retraités que les rivalités entre Mods et Rockers bousculent dans les années ’60 – et joue de pas mal d’instruments sur «Hermit's Grove», son deuxième album estampillé Wax Machine, protagoniste d’une musique brésilienne teintée de psychédélisme (Lau se réfère à Os Mutantes, son ancêtre plus électrique) et de sonorités West Coast et jazz, riche en percussions, parcourue de flûte et saxophone (des chants d’oiseaux pour «Guardians of Eden»), gentiment ondulante et précisément agencée. Entourée des compositions de Ro, «Canto de Iemanjá», désuète mais charmante chanson de Vinicius De Moraes et Baden Powell dédiée à la déesse marine Iemanjá, lui suggère un lien transcontinental entre la Manche et l’océan de son pays d’origine (qu’il n’a plus revu depuis l’émigration de ses parents): c’est l’articulation centrale d’un album essentiellement agréable, roulé comme une vague bien faite et sans surprise.
Auguste
https://waxmachinebbib.bandcamp.com/album/hermits-grove
https://www.youtube.com/watch?v=ToWBUbM56Wo
16/05/2023 : The Rome Pro(G)ject - V - Compendium of a Lifetime
The Rome Pro(G)ject
V - Compendium of a Lifetime
rock progressif symphonique – 51:10 – Italie – 2022
The Rome Pro(G)ject de Vincenzo Ricca est son projet de rock progressif symphonique débutant en 2012, entouré de musiciens tels Steve et John Hackett, David Jackson et Tony Levin, avec Franck Carducci et Roberto Vitelli en guests. Un observatoire sur la musique progressive, des chroniques romaines sur la grandeur romaine avec «symphonisme», lyrisme et décadence et un 5e opus à décortiquer.
«V»: intro yessienne, tout est dit des 70 puis des 80, en orgue et guitare, majestueux. «Compendium of a Lifetime»: pour l’intro solennelle, fleurie au Mellotron et les vocaux génésisiens de Bernardo et d’Aragon aussi; déclinaison entre le sax de David, la flûte de John et la guitare de Franck pour un symphonisme bucolique et la pièce éponyme. «Vesuvius»: pièce courte mais majestueuse, s’élevant vers l’Olympe avec Mellotron pour un côté dramatique. «The Last Night in the World»: suite sur Pompéi avant la fin; comptine mélancolique génésisienne amplifiée par la voix de Tony avec piano de Nick et guitare spleen.
«Have Caesar!»: titre en 4 temps, bien plus sombre avec toujours des synthés en veux-tu en voilà et Paolo encore à la guitare aérienne; final avec pads accompagnant les claviers et l’orchestral qui se suffit à lui-même. «Morituri te Salutant» continue sur la même veine musicale avec flûte de John et une basse soutenue. «Gladiatores», avec Tony et sa basse frappée, vient seconder un titre où Genesis revient en force; ça virevolte des claviers, pur son de Vincenzo gras, lourd, aérien et vif. «Have Caesar! (reprise)» vient clôturer ce quadra-titre avec la batterie de Daniele apportant un peu plus d’énergie, comme s’il n’y en avait déjà pas assez. «Exegi Monvmentum 2021» en final et reprise du titre de 2017 avec Steve en avant, naviguant entre son âme musicale et celle des Genesis; beau et langoureux.
The Rome Pro(G)ject continue sa fresque musicale de la Rome antique sur ses grandes heures et ses malheurs tels Pompéi entouré de nombre de musiciens chevronnés qui montrent qu’on peut avoir de la belle musique symphonique sous un nom peu connu; peut-être est-ce là justement la solution. Un album passé sous les piles de 2022 qu’il fallait chroniquer car un potentiel top 2022.
Brutus
https://www.youtube.com/watch?v=ijSu3MYRIbM
17/05/2023 : Ten Jinn - Ardis
Ten Jinn
Ardis
cross over / art rock – 47:37 – États-Unis – 2023
5e album depuis 1997 pour Ten Jinn, qui ne sont ni 10, ni esprits arabes, mais qui ont assez d'esprit pour justifier le nom du groupe! Nom qui fait, d'ailleurs, pour être précis, référence à un philosophe chinois! Sur cet album, John Strauss (voix, claviers), Mark Wickliffe (batterie, basse, synthé, back voices), Mike Matier (guitare), Matt Overholser (basses), Matt Brown (claviers, back voices) et Kenneth Francis (guitare, bass, clavier, back voices) nous offrent 9 pistes ébouriffantes aux orchestrations foisonnantes.
Au lieu d'essayer d'imaginer un album où la tonalité va de Sparks à Sound of Contact, où les guitares sonnent parfois comme le meilleur de Queen («Say Aye») ou de King Crimson («The Red Virgin»), où l'humeur va de franchement euphorique à assez flippante («Nightmare»), où les voix s'harmonisent merveilleusement façon Sparks, Queen ou Eno: FONCEZ sur les liens plus bas!
Concept album librement inspiré du roman d'anticipation «Le Talon de fer» de Jack London, où une oligarchie qui avait pris le pouvoir est vue, 4 siècles plus tard, par un érudit qui vit dans une société éclairée. Les morceaux sont des allers-retours entre ces 2 périodes.
S'il ne fallait ressortir qu'un morceau, ce serait «The Red Virgin», un concentré détonant: la virtuosité des claviers, la préciosité des vocaux (et le mantra OM!!), les nombreuses ruptures de rythme sont le souhait de tout amateur de prog prêt à s'aiguiser l'esprit hors des sentiers battus et rebattus. Prenez le temps de découvrir ce très bel album, indispensable.
Cicero 3.14
https://tenjinn.bandcamp.com/album/ardis
17/05/2023 : Zahorí - El doctor don Worry y los don Worry doctor's
Zahorí
El doctor don Worry y los don Worry doctor's
rock progressif ‘70 – 28:35 – Espagne – 2022
Court concept album, «El doctor don Worry y los don Worry doctor's», deuxième disque de Zahori, explore le délire du docteur don Worry (on devine le trio andalou bilingue et facétieux), au travers de six morceaux à la chair nourrie des claviers de Jarri García (il compose et s’occupe aussi de la batterie), avec la complicité de la guitare électrique d’Alfonso Caro (et de sa basse) et du chant (parfois hargneux) d’Adrián Simón: la prosodie de la langue espagnole – la guitare flamenco dans le dernier morceau ajoute à la couleur traditionnelle –, assortie aux sonorités seventies (soigneusement choisies) de l’orgue et du piano électrique – l’intro d’«Amanece» évoque, avec quelque délice, Supertramp –, contribue à la personnalité du groupe, soucieux de donner peu mais de donner bien, y compris dans le détail du bref intermède «La mente ociosa (interludio)».
Auguste
https://zahori.bandcamp.com/album/el-doctor-don-worry-y-los-don-worry-doctors
18/05/2023 : Seventh Station - Heal The Unhealed
Seventh Station
Heal The Unhealed
metal progressif – 58:47 – Israël – 2022
Seventh Station est un jeune groupe israélien de par ses créateurs Dmitri Alperovich et Alexey Polyansky (mais basé en Slovénie). On y trouve des membres turcs, belges et grecs. Ils sortent «Heal The Unhealed», leur deuxième album depuis 2016. Ils développent une musique metal progressif avant-gardiste avec de multiples changements d’atmosphères. On y retrouve notamment du Dream Theater (naturellement), du Devin Townsend, Haken, Fates Warning ou encore Ayreon. Seventh Station développe un concept album inspiré de la Seconde Guerre mondiale et de l'Union soviétique sous Staline. «Unspoken Thoughts», qui commence cet album, montre leur amour pour les gros riffs tout en multipliant les breaks. «Seven digits» qui suit est beaucoup plus aventureux et le chanteur Davidavi (Vidi) Dolev peut nous exposer toute sa folie. Car, il faut bien l’avouer, l’originalité du groupe vient particulièrement de lui. Les sons de guitares et synthés s’entremêlent à la perfection et créent par moments une ambiance malsaine et tortueuse. «The Heart of a Nation (Nadia)» est un titre magnifique, des mélodies symphoniques entremêlées de moments plus métalliques enchainés avec une partie flamenco… On peut dire qu’ils ont un côté agressif très technique mais mélodique, complété avec une bonne dose de folie. Avides de musiques qui sortent des sentiers battus…cet album est taillé pour vous.
Vespasien
https://seventhstation.bandcamp.com/album/heal-the-unhealed
https://www.youtube.com/watch?v=kBFH3PkL_WI
19/05/2023 : Yes - Mirror To The Sky
Yes
Mirror To The Sky
rock progressif – CD1 (6 titres) 47:08 + CD2 (3 titres) 16:31 – International – 2023
«And then there were one» aurait pu être le titre de cet album. Le 26 mai 2022, Alan White rejoignait son vieux pote Chris Squire au paradis des musiciens, laissant Steve Howe (76 ans depuis le 8 avril dernier) seul à décider du sort de Yes. Ce nouveau coup dur aurait pu convaincre Howe de tirer un trait définitif sur l’aventure Yes ou de signer la paix des braves avec ce qui reste de la formation classique (Anderson et Wakeman). Ce n’est pas le choix qu’il a fait. Fidèle à lui-même, il creuse son sillon et, sans grande surprise, c’est Jay Schellen qui est appelé pour occuper le siège derrière le drum kit. C’est loin d’être un inconnu puisqu’il suppléait déjà Alan White affaibli lors des dernières tournées. Il est d’ailleurs amusant de constater que la constellation de musiciens tournant autour de Yes se connaît depuis des années. Les projets tels que Conspiracy, Circa, ou Yoso recyclaient tous ces musiciens à géométrie variable. Il est aussi cocasse de constater que non seulement plus aucun membre du line-up actuel ne jouait sur les deux premiers albums du groupe mais que surtout, avec ce recrutement, le cador du progressif typiquement britannique est à présent composé à 60% d’Américains.
Venons à l’album à présent; ce ne sera une surprise pour personne mais l’appréhension était grande tant «The Quest» avait été catastrophique (revoyez ma chronique parue le 1er novembre 2021); je fus d’ailleurs aussi surpris de voir un successeur paraître aussi rapidement. Une bonne surprise pour commencer: quatre titres dépassent les 8 minutes. La plage titulaire flirte d’ailleurs avec les 14 minutes. La première plage, «Cut from the Stars», introduit joliment l’album comme «The Ice Bridge» le faisait pour le précédent; un morceau catchy et pas mal foutu mais qui semble sorti d’un album de Asia. Le deuxième morceau, «All Connected», commence et ô joie! le groupe a retrouvé sa patte et son allant. Sur ses 9 minutes, le morceau déroule joliment son rythme lancinant et son pont musical fait merveille. Ce n’est certes pas «And you and I» mais on se dit que c’est bien parti. Le troisième morceau est le deuxième morceau de 9 minutes et là patatras… tout s’écroule. Après une intro correcte, le chant commence et ânonne une mélodie digne d’un chant de Noël. Le morceau se termine par un solo de Howe sans intérêt. Le morceau suivant déroule sans grand intérêt, puis arrive la plage titulaire et ses 13:54. Miracle: le morceau est bon et même très bon, il y a de la fougue et des idées. Les paroles sont un peu nunuches mais les arrangements accrochent vraiment avec l’utilisation d’un orchestre. Certaines harmonies vocales rappellent «Drama» et le final est de toute beauté. Suit ensuite une jolie ballade acoustique pour faire la place à «Unknown Place» et ses 8 minutes. Le morceau ne commence pas mal du tout mais ne décolle jamais vraiment. Un passage ravive brièvement le souvenir des grandes orgues de «Awaken» mais sans la verve de Wakeman. L’album se conclut ensuite sur des morceaux courts qui peinent à relever le niveau.
Le tout n’est pas mal joué mais, comme pour le précédent, Steve Howe étale sa guitare partout, laissant peu de place aux autres (pas un seul vrai solo de clavier à nouveau) et je continue de penser que, pour le chant, Jon Davison n’arrive pas à la cheville d'Anderson, même s'il reste un chanteur tout à fait correct.
En conclusion, cet album contient certainement les meilleurs moments de musique composés par le groupe depuis «Fly from here» en 2011, mais il n’en reste pas moins totalement indigne de la carrière et de la légende du groupe. Le fan hardcore du groupe que je suis continue de souffrir en constatant cette lente agonie.
Amelius
https://www.youtube.com/watch?v=NdEF-vMO8vc
20/05/2023 : Kerry Livgren - Q.A.R.
Kerry Livgren
Q.A.R.
adult oriented rock – 43:34 – États-Unis – 2022
Il y a à peu près un an, je chroniquais l’album (posthume) de Robby Steinhardt. Eh bien, voici Kerry Livgren et son 10e album solo depuis 1980.
Serais-je amené dans quelque temps à chroniquer le prochain album de Dave Hope et son groupe The IRS? Nous verrons bien…
Si vous êtes fans de Kansas, alors Q.A.R. vous conviendra avec un côté prog léger, pour peu que vous acceptiez les quelques éléments commerciaux distillés pour attirer le public adepte du rock des années 80.
Sinon, pour tenter de décrire ce à quoi nous avons affaire, disons que si vous avez suivi l’artiste depuis ses débuts, vous retrouverez aussi du «AD» (Anno Domini), groupe de rock chrétien créé en 1983 par Kerry et du «Proto-Kaw» («One Out Of One», «Above This Night» et «The Days We Live»). Pour simplifier, disons que «Proto-Kaw» est un groupe (avec «White Clover») à l’origine de la formation de «Kansas» et qui s’est reformé au début des années 2000.
Tentative d’explication de la filiation pour expliquer que c’est presque toujours la même bande de copains présents. Même Robby est là avec son violon sur un titre («Song Du’ Jour»)!
Tous ces invités, non seulement au chant mais aussi à la guitare, à la flûte, aux claviers et au violon, ajoutent de la valeur à cet album.
Kerry a composé un très bon rock «tendance progressif», quoique légèrement assaisonné avec du rock classique, voire du rock sudiste («Fire In The Boiler», «Block And Tackle Blues»).
Les non-fans de Kansas, s’il y en a, auraient peut-être aimé que notre musicien explore davantage le côté progressif de son écriture et inclue (au moins) une seconde épopée en plus de «One Out Of One». L’album aurait ainsi aussi été plus long!
Pourtant, ne boudons pas notre plaisir, l’album est agréable et mérite une écoute qui pourrait révéler plus qu’il ne paraît!
À ce titre, ne loupez pas le premier titre, «The Intelligence Theory», 2:23 de pur bonheur ELPsien!
Publius Gallia
https://kerrylivgren.bandcamp.com/album/q-a-r
https://www.youtube.com/watch?v=gDveB38lOFQ
21/05/2023 : Alase - Matter Of Time
Alase
Matter Of Time
rock atmosphérique / metal – 43:14 – Finlande – 2023
Alase est le groupe finnois de métal prog aux atmosphères mélodiques sombres. Un peu de Katatonia, A Perfect Circle, Vola, Textures et Tesseract avec basse et batterie en avant; des compositions torturées avec crochets pour donner dans du prog extrême.
«Understanding the Waves»: atmo-métal, du rock lourd pesant au tempo freiné, sur du Paradise Lost; le solo comme éclaircie courte, la voix growl pour ameuter les suppôts de Satan. «Clear Sky is Not a Curse»: intro arpège aux My Dying Bride avec cette lumière nauséabonde avant de verser sur un air mélancolique. «Fate’s Intervention»: retour de la voix growl un temps puis ça ralentit avec alternance de voix criées et phrasées; l’orchestration sur une triple pédale, le solo guitare torturé passe très bien. «Unburden»: plus sombre, plus lourd, une basse qui en impose, me renvoyant à Klone, la voix toujours, la guitare spleen. «Life Ahead»: titre plus long et intro travaillée pour une ballade doom atmo mélancolique agréable, douce. «The Source»: sur un beau crescendo, un développement où la voix chantée sur la basse lourde fait effet; mieux avec un solo torturé et sombre. «Out of Place»: longue compo sinistre, suintant de pétrole noir, ne laissant pas échapper une note d’espoir, si une note growl en fait. «Feeling Free»: pour la comptine dépressive au tempo lent d’où la gaieté peut enfin s’extraire. «Ajan kysymys» en langue de là-bas lourd, pesant, vous êtes écrasés par un 5G atmo-musical.
Alase sort son 2e album dans un genre convenu, pas mauvais en soi, manquant d’espace réellement progressiste. C’est fort, souvent redondant, le noir sur du noir laissant peu de place à l’envolée; c’est sombre et malheureusement trop répétitif pour trouver la lueur d’espoir progressive.
Brutus
https://alase.bandcamp.com/album/a-matter-of-time
https://youtu.be/J1oHrKPKf2E
22/05/2023 : Samtar - Shadow Of The King's Charade
Samtar
Shadow Of The King's Charade
pop / rock progressif – 46:36 – États-Unis – 2023
Les treize chansons de «Shadow Of The King's Charade», cinquième album de ce multi-instrumentiste de Madison (Wisconsin), au format temporel tournant autour des 3:30, souvent entraînantes («The Fool»), parfois languissantes («The Shadow From My Dreams»), le cas échéant acoustiques (le bref «The Man»), capables d’envolées («You Bleed») ou de chevauchées («River Spirit» ou «Wild Boys»), se caractérisent toutes par un sens, simple mais affiné, de la mélodie («She Will Have Her Revenge», ou l’irrésistible «Cool to me»), profitant d’une voix au spectre chaleureux, d’arrangements spécialement équilibrés et d’une production bien au point (satinée: pas d’aspérités rebutantes, ni de vernis rébarbatif): aucune ne réinvente le fil à couper le saindoux, mais toutes bruissent d’une efficacité intemporelle – seule «Lost Vision», avec son riff métalleux, fait une concession, ostensible et pardonnable, à la mode.
Auguste
https://samtar.bandcamp.com/album/shadow-of-the-kings-charade
23/05/2023 : RPWL - Crime Scene
RPWL
Crime Scene
rock progressif / art rock – 45:01 – Allemagne – 2023
RPWL (Risettio-Postl-Wallner-Lang) est un groupe de rock progressif formé en 1997, excellant dans les reprises des Pink Floyd. Ils essaient de trouver leurs marques avec Ray Wilson un temps et s’écartent du Floyd par un son plus brut, agressif tout en gardant des atmosphères art-rock. Un 8e album sur les crimes et autres perversions avec deux des initiateurs encore à la barre, c’est parti.
«Victim of Desire»: rien que l’intro me donne envie d’aller les voir; montée progressive avec un solo planant de Kalle, la voix samplée de Yogi; ça me rappelle la transition moderne des Pendragon sur «Pure»; émotion, langueur, errances sur le Floyd, quoi qu’on en dise, en plus rock; break spatial et riff saccadé, bonne évolution cinématique pour la baffe avec un solo flirtant avec ceux de Michel des Mystery. «Red Rose»: ballade piano pour une mélodie funky sur la basse et une histoire macabre sous-jacente qu’il vaut mieux ne pas ébruiter; ambiance RPWL floydienne pour le romantisme et solo fondant puis spleen si cela est possible. «A Cold Spring Day in '22»: court, radio-edit, sur un meurtre bavarois horrible, oui le prog n’est pas gai; un refrain enjoué ironique et un air convenu mélodique. «Life in a Cage»: intro que j’aime entre Peter Gabriel «Biko» et Talking Heads; boîte à rythme caverneuse, synthés discordants versant dans la mélancolie pour une atmosphère sombre, un solo gilmourien même si l’on sait que c’est Kalle au grattoir. «King of the World»: masterpiece pour la durée, les circonvolutions, changements de tempo, l’apparition d’un Moog, la guitare plaintive; break intimiste et une envolée de notes au spleen avéré, bref toute la panoplie du rock progressif d’aujourd’hui; le second break instrumental fait monter la beauté et brutalité rock; pièce à réécouter longuement. «Another Life Beyond Control»: ouah, Hendrix, les White Stripes au son écorché, un riff bluesy gras saturé vieux comme mes robes, un refrain entêtant; le break, que dire novateur, psyché ; retour final planant avec un solo de Yogi pour parfaire l’image du rock prog nerveux.
RPWL va être critiqué, évoluant sans pour autant renier ses bases; moderne, du fouillis complexe pour donner le meilleur; une durée suffisamment courte pour tenir en haleine et provoquer le manque; de la puissance pour ne pas s’endormir, problème de certains groupes actuels. Un superbe album bien plus novateur et entraînant, mélodique, du prog de très belle facture d’un grand groupe.
Brutus
https://youtu.be/Sjxadr2oqWY
24/05/2023 : Ticket to the Moon - Elements
Ticket to the Moon
Elements
metal progressif – 45:52 – Suisse – 2022
Ticket to the Moon est un groupe suisse formé en 2003, «Elements» est leur troisième opus.
«Elements», le titre éponyme, montre d'emblée le côté métallique du groupe avec des parties symphoniques et une pointe de progressif plein de changements de tempo. La section rythmique est solide et en constante évolution, on alterne entre des passages plus lourds et plus doux. «Ebb & Flow» en est encore un bon exemple. «XYZ» est le moment de douceur à la guitare sèche et synthés mais cette pause ne va pas durer. Les compositions coulent à la fois de source et à la fois la recherche y est poussée. Le mix entre simplicité et complexité. Cet album va plaire aux amateurs de metal prog instrumental aimant la symbiose entre les différents instruments. Malheureusement, en ce qui concerne l'originalité, on ne peut pas dire que l’on soit surpris par les créations. Le son est parfait et l’album est magnifiquement produit. Je conseille l’écoute de cet « Elements» à tous les fans de metal progressif classique. Vous n’allez pas le regretter et passer un agréable moment.
Vespasien
https://open.spotify.com/track/0DwvHtxUmmVV3LqWJYXofH
https://music.youtube.com/playlist?list=OLAK5uy_nCR-7WMZ3SY9gdzyxkffjbfTheEI5ewRU
25/05/2023 : Various Artists - A Beginner's Guide to Sublime Frequencies vol. 1 & 2
Various Artists
A Beginner's Guide to Sublime Frequencies vol. 1 & 2
world / folk progressif / psychédélique – 125:11 – International – 2023
Pour ceux qui ne connaissent pas Sublime Frequencies, l’excellent label défricheur de Seattle (États-Unis), dont l’idée germe (en réaction à la réaction) peu après le 11 septembre dans l’esprit de Hisham Mayet et des frères Alan et Richard Bishop, partisans de garder les yeux ouverts sur le monde (plutôt que de les fermer sous les bombes) et qui met son esprit découvreur (les chansons de partout – mais obscures, de minorités peu diffusées, plus ou moins underground, parfois de résistance ou révolutionnaires –, de Java, de Bali, de Saigon, de Syrie, d’Irak, du Mali, de Phnom Penh, de Pyongyang, du Sahara et d’ailleurs), ses mains fouineuses (dans les bacs de microsillons et de cassettes), ses voyages de baroudeur des villes et des champs, au service de la récolte, l’acquisition et l’exposition (par la publication, mais pas que) de ces musiques inconnues (en occident), «A Beginner's Guide to Sublime Frequencies vol. 1&2», compilation particulièrement nourrie, ouvre une alléchante perspective d’approfondissement de ce riche catalogue rassemblé depuis plus de deux décennies par des ethnomusicologues passionnés: 45 titres venant d’un peu partout et de différentes époques, aux auteurs parfois inconnus, qui s’écoutent comme autant d’émouvants témoignages de la diversité et de l’universalité du monde.
Auguste
https://highcastleteleorkestra.bandcamp.com/album/a-beginners-guide-to-sublime-frequencies-vol-1-2
26/05/2023 : Initial Mass - Alluvium
Initial Mass
Alluvium
metal progressif – 59:50 – États-Unis – 2023
Los Angeles ne dira jamais son dernier mot… et ce n'est pas Initial Mass qui lui coupera la chique. Power trio mis sur pied en 2015, ses rangs sont peuplés par Mark Baldwin (encore un?) gratteur et chanteur, Kevin Robertson bassiste affranchi et Scott Smith batteur rabatteur. Quand est venu le temps d'«Alluvium», notre triade musicienne avait déjà semé quelques pépites sur son passage: «Time & Measure» (2016), «Tidal Force» (2018) et «Bending Light» (2019). À chaque sortie, nos artistes se sont éloignés de leur zone de confort. Fatalement, à force d'être habitués au changement, leurs fans (et le public metal prog) attendaient beaucoup de cette nouvelle aventure qui dépeint en 13 titres le «rise and fall» d'un homme faisant écho à «l'humanité» tout entière. Fiers du résultat, nos hôtes nous conseillent d'aborder leur œuvre par le titre «Wake», auto-proclamé «best song ever» de leur répertoire, avec la voix troublante aux accents o'connoriens de leur guest, Liz Granite. Et c'est banco les petits gars! Entrés par la porte du single, vous pourrez sans retenue vous disperser, vous ne serez jamais bien loin de la qualité. Perso, je vous recommande de suivre «Out of the Mold» et son gros riff bien crado. Une pleine cuillère de caviar! Un autre conseil? Pourquoi ne pas prendre l'allée sombre sur «A Crow in the Dark»? Vous y croiserez certainement Alice Cooper ou plutôt son cousin (pas son chien). Tant que vous y serez, perdez-vous dans la brume de «Trails Behind»; vous vous repérerez au son capiteux des cordes vocales de Liz. Une fois sortis d'affaire, je vous laisse répondre à «The Calling» et sa rengaine rock dynamique. Partout où vous irez sur les sillons de cet album, vous rencontrerez l'inventivité et la diversité. Rien n'est à jeter, jusqu'au final «In Stone», quasi christique, où s'affrontent les voix de Mark et Liz en apothéose… Bien entendu, ce ne sont que des suggestions, vous restez maîtres de votre programmation, mais je n'ai aucun doute sur votre cotation: dithyrambique sur treize!
Kaillus Gracchus
https://open.spotify.com/album/3gTQdqvci6zIg4WDNCucGm
https://www.youtube.com/watch?v=CBZ88rWC3Lw
27/05/2023 : Leon Alvarado - Charging The Electric Dream
Leon Alvarado
Charging The Electric Dream
Berlin Electro wide range – 37:56 – International – 2022
Leon en est à son 3e LP. Auparavant, il a collaboré avec B. Brufford, T. Levin, T. Gunn (King Crimson), R. Wakeman, J. Marotta (Gabriel), B. Sherwood, mais sur cet album il est seul à jouer en réel et/ou virtuel MiniMoog, Jupiter-8, Korg M1, ARP 2600 et TR-808.
«Alternate Frequencies»: une dizaine de notes spongieuses sur un synthé bien riche nous accueillent avant qu'un second synthé ne brode sa lente mélodie, puis un troisième (assez Kitaro) plus percussif... Les couches suivantes s'empilent tout aussi parfaitement. Viennent ensuite de courts apports transitoires, tout aussi pertinents. Il faut toujours soigner son intro, le but est très largement atteint!
«Megapolis»: plus germain, itératif puis soundscape en son centre. «Space Glitter»: rythmique très électro, et des mélodies/riffs façon Eno fournissent un confortable voyage dans l'éther. «Orion»: pulsion plus tonique encore, pour une cinématique plus effrénée; les ruptures permettent de reprendre l'élan. «The Rising Sun»: percussions réverbérées pour une tension palpable, un synthé «vent» assez typé Kitaro fait un appel, mais un parfum de Tangerine qui répond en longues vagues avant qu'une rupture abrupte, percussive de «vent» ne poursuive le parcours. La partie finale, typée Oldfield, apporte fraîcheur et apaisement. «The Electric Dream»: la pulsion faite pour partie de synthé «chœur» amène un inconfort totalement perturbant et quasi techno/ethnique.
«Outside The Dream»: le synthé module (Schulze/Tangerine), mais des grandes orgues (que ne renierait pas R. Wakeman) soutiennent l'ensemble pour une mélodie qui prend son temps et dévoile l'apothéose de cet album.
Sentiment mitigé, même après 4 écoutes; je reste sans fil conducteur, étourdi par tant de courtes bonnes idées mêlées au sein de 7 pistes coquilles. Cette ultime piste est, pour moi, la plus aboutie. J'aurais aimé que chaque idée ait le temps de se développer comme sur cette dernière piste.
Mais le voyage reste largement conseillé, et... dites-nous par où vous êtes passés!?
Cicero 3.14
https://leonalvarado.bandcamp.com/album/charging-the-electric-dream
28/05/2023 : Bärlin - State of Fear
Bärlin
State of Fear
heavy progressif – 38:22 – France – 2023
Auguste vous avait déjà dit à l’époque du précédent album tout le bien qu’il pensait du trio lillois Bärlin et ce n’est pas moi qui vais le contredire à l’écoute de ce State of Fear, que du contraire. Nos Nordistes ont encore affiné leur approche de la musique et, si l’on peut toujours citer Tuxedo Moon ou Tom Waits pour «visualiser» leur musique, n’oublions pas d’y inclure également Morphine (surtout pour le jeu de basse, sublime) ou même Einsürzende Neubauten. Il paraît également que leurs prestations scéniques ne peuvent laisser le spectateur indifférent: ils sont complètement déchaînés… La dernière plage de cet album, «Sturm», également la plus longue, est une mélopée incantatoire à vous mettre des frissons d’angoisse. Un must have pour les plus curieux d’entre vous.
Tibère
https://baerlin.bandcamp.com/album/state-of-fear
https://www.youtube.com/channel/UCYjD4WVXlemuP2m7_Y1Ge2g
29/05/2023 : HamaSaari - Ineffable
HamaSaari
Ineffable
post-progressif / heavy progressif – 38:48 – France – 2023
HamaSaari, né en 2021 des cendres de Shuffle, propose son 1er album dans la lignée d’un rock puissant tels Anathema, Klone, Porcupine Tree ou Karnivool; son doux et explosif. HamaSaari, île scandinave utopique; le groupe s’attelle à nous écarter de la vie M-B-D, proposant son royaume enchanteur, mélancolique et mélodiquement torturé d’art, d’émotion pour voyager dans un univers singulier.
«Different Time»: intro éthérée, spatiale comme celle de Klone; air Porcupine Tree, fait de rock brut, d’envolées avec chœurs sombres et riff ambiant; un final tempête heavy à la Riverside, trop court. «Crumbs»: montée progressiste mettant en scène un riff des Black Sabbath sur une mélancolie abrasive; le chant plaintif, religieux, se mélange au clavier avant que la furie du riff ne te donne envie de headbanguer sur une fusion métallique onirique; final à la Oceansize fondant qui t’isole, telle l’histoire de l’homme en décalage avec son monde. «Lords»: acoustique cristallin en prog jouissif, celui où tu ne sais où le titre va partir; complainte avec Jordan qui distille des notes douces; «Stagnation» des Genesis, des airs spatiaux à la Pink Floyd avant la montée et ses vocaux en chœurs rappelant Alice In Chains; break floydien éclairé où la mélancolie devient belle, l’atmosphère se veut feutrée avec le clavier solennel à la «Burning Rope», guitare qui clôt. «Bleak»: compo planante, anesthésiante; long déroulement au temps suspendu, post-rock bien marqué; la seconde partie explose d’un coup avec son lourd, monolithique et pesant sur My Dying Bride; rupture avec un didgeridoo pour le decrescendo onirique. «White Pinnacles»: rock touffu extrême changeant le répertoire, floydien, Elie en furie avec sa batterie; les chœurs growl causent sur Opeth d’un coup; le final explosif, champ de guerre sur coulis de mines. «Old Memories»: air pop folk convenu, flirtant avec ceux de Steve Wilson; chaque instrument donne plus de profondeur à la guitare acoustique; final avec clavier éthéré et la guitare. «Prognosis»: arpège et voix feutrées des limbes atmosphériques, notes en réverbération, fond d’Oceansize qui me plaît fortement; complainte sur l’émotion où la voix devient bien un instrument.
HamaSaari sort donc un OMNI à base de sons doux et puissants, d’atmosphères sinistres, froides et imaginatives; un album oxymore mélangeant ses groupes référents, pour se détendre; un album qui montre le savoir-faire des musiciens, qui nous entraîne sur des pistes progressives variées et détonantes, sur du prog atmosphérique qui livre sa violence, tel un éclair s’échappant de l’orage. Merci Jordan et Jonathan, Sullivane, Albertini et Elie.
Brutus
https://open.spotify.com/album/4ag3YFJ2DUs8Cweqb2jXz1
https://youtu.be/JuJ6a8hDQJ0
30/05/2023 : Ultraphauna - No No No No
Ultraphauna
No No No No
art rock / rock de chambre / électro pop – 68:01 – International – 2023
Le duo à la base d’Ultraphauna, Timba Harris (violon et trompette; il joue avec une ribambelle de groupes de rock expérimental, de rock arabe, de musique contemporaine) et Dorothy Wave (voix, synthétiseurs), s’est adjoint, dans ce premier album, la collaboration à distance d’une section rythmique (Toby Driver à la basse, à New York et Joel Murray à la batterie, à Liverpool) et propose une dizaine de chansons aux esthétiques diversifiées – si disparates même, qu’on imagine les chatons ainsi dispersés issus de plusieurs saillies : autant la première partie du disque, dès son morceau d’ouverture («Spilling from the Mouths of Babes») évoque Henry Cow ou Aranis (en soi, c’est déjà un pédigrée, aléatoire mais réjouissant), permet à la voix et au violon de creuser un sillon, certes déjà défriché, mais d’une ferveur rafraîchissante («Collidascope»), au synthé et au rythme de s’allier pour des grooves orientaux («Summoning the Maker» et, plus mesuré, «Little Maker»); autant, en deuxième partie, l’esthétique électro pop de «I’m You Now» ou de «Behind Mine» incite au décrochage – ce qui serait dommage pour «Wow, João!» où le violon reprend ses droits, mais pas longtemps, puisque «Pearl» clôture l’album dans un déséquilibre ironique inopportun. Un vinyle de 40 minutes aurait concentré l’essentiel.
Auguste
https://duretdoux.bandcamp.com/album/no-no-no-no
https://www.youtube.com/watch?v=rfU2AWGu7sg
31/05/2023 : Furio Chirico's The Trip - Equinox
Furio Chirico's The Trip (The TRIP - Furio Chirico's)
Equinox
rock progressif symphonique et vintage – 43:33 – Italie – 2022
Je vous la fais courte: créé en 65 au Royaume-Uni comme support band du chanteur beat Riki Maiocchi, The Trip comptait alors dans ses rangs Ritchie Blackmore qui les quitta à leur retour en Italie pour créer Deep Purple. Weg Anderson restant, entrent alors Pino Sinnone à la batterie, et Joe Vescovi aux claviers et aux commandes! 2 albums furent produits ainsi («The Trip» et «Caronte»). Puis 2 autres sans Pino qui avait été remplacé par Furio Chirico derrière les fûts. Fin de la 1ere partie en 1973.
Furio va chez Arti e Mestieri, Joe Vescovi passe chez Acqua Fragile, puis Dik-Dik.
Pino remonte the Trip avec de nouveaux musiciens, et réenregistre «Caronte», leur chef-d'œuvre, 50 ans après (voir notre chronique de 2021) et tourne de nouveau.
Mais Furio avait reformé ponctuellement The Trip en 2010 pour la prog Exhibition de Rome avec Weg et Joe. Weg décède en 2012, suivi par Joe en 2014. En 2022, Furio revient nous proposer cet album, entouré, lui aussi, de nouveaux musiciens. Alors, ne boudons pas notre plaisir d'avoir 2 The Trip, car cet «Equinox» est remarquable.
Furio, le bien nommé, nous livre, dès la piste instrumentale introductive, un déferlement de basse, de batterie, et un B3. C’est «I'm Fury». On est... frappé par le mixage avec la batterie très en avant, mais ce parti pris se révèle remarquable. Avec l’orgue déchaîné, on pense bien sûr à ELP! Ensuite, avec «Mother Earth» et l'apparition du chant en anglais, on migre vers Deep Purple/Vanilla Fudge, le B3 se fait plus sage et la guitare émerge, le tout émaillé de jolis soli de clavier et de guitare. «A Suite For Everyone», avec son emprunt à Bizet, élargit encore l'éventail de notre plaisir, ajoutant le concept rock/classique à cet album plus généralement (prog)rock vintage.
L'album se termine avec nostalgie par «Remember Joe» et «Story Of A Friend».
Remercions à notre tour Gius Lanari à la basse et au superbe chant vibrato, l'orgue fou et lyrique de Paolo Silvestri et la guitare incisive de Marco Rostagno.
Vivement un prochain voyage avec Furio!
Cicero 3.14
https://furiochiricosthetrip.bandcamp.com/album/equinox
31/05/2023 : Geminii - Geminii
Geminii
Geminii
metal alternatif – 20:59 – France – 2022
La France n'est pas une bleue, la musique, ça la connaît, mais pour ce qui est du metal, on n'y a pas toujours trouvé midi à sa porte. Alors quand voici Geminii, il faut laisser entrer la lumière. Quartet débarqué de Normandie, il en est à son coup d'essai: un EP, bien grunchouillet, saturé par ses instruments à cordes! Croyez-le, Julien, Thomas, Émile et Marsouin ont bien des choses à jouer sur ce premier beau petit lot! Un stoner où la sauce vient de partout, une giclée d'adrénaline qui nous donne l'envie de sauter partout contre les murs. Un pogo inégal qu'on recommence encore et encore. L'album nous sert quatre arguments alternatifs qui nous déballent du rétro allié à du neuf, pour un trip bougrement décapant. Jetez un oreille par ici! «Megalomania» serait arrogant s'il n'en avait pas dans le pantalon. Émile dégomme tout sur ses caissons. C'est lui le tueur! Sa frappe est captivante juste au-dessus des riffs/raffs de Julien, enmicroté sous quelques effets. «Pull the trigger» est affublé différemment, plus mystérieusement, plus kaléidoscopiquement; on va chercher plus loin le Major Tom… avec une gamme aiguë en arrière et en dedans, sur six cordes perdues dans voie lactée. «Drive Away» nous fait revenir au brut, la basse de Marsouin est baveuse, ses comparses ne tarderont pas à électrifier tout ça, duel Julien et Thomas au Napalm! Le son est plus concret, tout d'un coup. Le stoner a (re)sonné. «Anything Anyone» donne l'occasion à Julien de chanter sans artifices et il fait bien. La compo se renouvelle à chaque couplet et fait durer le plaisir. Notre Quattro dispose d'une mécanique chaudement huilée, chacun de ses joueurs déploie génialement son rouage, chacun d'entre eux se fait entendre, façon diesel. Y a plus qu'à déposer un brevet et faire fructifier la licence. Pronotics? Le début d'une Saga? Ce serait Kanon!
Kaillus Gracchus
https://geminii.bandcamp.com/album/geminii-ep-2