Décembre 2019

01/12/2019

New Immersion Blender
Feel Right, MF
rock psychédélique / space-rock – 61’52 – États-Unis ‘19
Trop souvent, des musiciens amateurs de rock psychédélique se définissent sommairement en indiquant leur béatitude à jouer des bœufs (prononcez "beuf" - des jams, quoi!), plaisir qui se transforme en propension à ne pas distinguer la limite entre l’excitant pour soi et l’intéressant pour l’autre (ou au moins certains autres). La longueur du morceau, si elle n’est pas un critère absolu, peut être un indicateur de cette tendance narcissique à rester concentré sur l’espace étroit d’un manche de guitare. En conséquence, je commençais la découverte de New Immersion Blender avec un certain a priori, puisque ce quatuor de Charlottesville (Virginie) répondait plutôt à ces deux critères délétères. Bon, l’instrumentarium varié (Moog’s, Farfisa, saxophone…) et une écriture (oui, quand même) qui cherche à dépasser le plaisir immédiat maturent ce premier disque, enregistré en un week-end "au même endroit, avec plein de matos et de chambres d’écho" et son feeling cosmique lui donne un espace aérien plus large que la moyenne («Futile, Fertile, Furtive, Fortifi»). Un bon début.
Auguste
3/5

https://newimmersionblender.bandcamp.com/releases

02/12/2019

The Pneumatic Transit
chordae tendineae
prog-rock/jazz contemporain/fusion – 48’32 – États-Unis ‘19
Ce second album du groupe américain The Pneumatic Transit est l'œuvre, comme le précédent album, du guitariste Jeff Zampillo qui, par le passé, exerçait son art dans Exotic Animal Petting Zoo, un groupe de mathcore expérimental. Dans sa nouvelle aventure pneumatique, il a embarqué quelques amis du Umphrey's McGee afin de louvoyer dans des contrées musicales, certes progressives, mais baignant aussi dans le registre du jazz. Mais nous y reviendrons...
Un album constitué de quatre longues plages dont la première, «Atriums», nous plonge dans un rock progressif un peu ténébreux. Typée très seventies, cette musique se complexifie au fur et à mesure pour «échouer» dans les entrailles de King Crimson. Bien au chaud au cœur de ces viscères torrides, le groupe prend ses marques et développe harmonies plaisantes et riffs tortueux à l'instar de certains groupes scandinaves. La suite semble du même acabit mais cette fois apparaît le sax. L'ambiance est certes toujours vintage, encore cramoisie, parfois dissonante et martelée par la batterie brute et les riffs rugueux du guitariste, mais subitement, changement d'univers, immersion dans le jazz. La trompette de Willie Waldman entre en jeu et chamboule tout; le saxophone de Carl Coan en remet une couche et s'implante. Nous sommes alors dans le jazz contemporain, voire le post-bop, on dira fusion pour faire simple. On pense à Freddie Hubbard, à Christian Scott, à Joe Henderson, mais aussi à l’univers particulier de Carla Bley ou encore davantage à celui de Michael Mantler. Cet interstice ouvert dans les entrailles crimsonniennes est détonnant; on se plaît alors à imaginer ce qu'aurait pu concevoir un certain Fripp s'il s'était davantage intéressé au jazz.
Le troisième titre suit les mêmes traces, mais cette fois d'un jazz-rock prog à la John McLaughlin. Échange échevelé entre clavier et guitare et évolution progressive complexe et atmosphérique.
L'opus se termine par un titre limite Canterbury par ses accents rappelant Happy the Man.
En conclusion, un album singulier car il n'est pas si fréquent de voir s'entrecroiser de cette façon ces deux univers musicaux.
Centurion
3/5

https://thepneumatictransit.bandcamp.com/album/chordae-tendineae

https://www.youtube.com/watch?v=IEnUVFnBt4s&fbclid=IwAR2lqiUgbKB5mYWkzBWolVfIs3fOGA9AD4E01DJddpK4ZQMN5OPUT7S8xO0

https://www.youtube.com/watch?v=xm-Yv10cptg&feature=youtu.be&fbclid=IwAR0KAPpGGcWA0ryB-xLz7tuZGcXENr6P9NNglPita9yTrNTUsOj3iSxMrgQ

03/12/2019

Liquid Shades
Locked Exit
rock progressif old school – 49’43 – Italie ‘19
Une porte fermée et l'incapacité de voir à l'intérieur mais aussi à l'extérieur. L'impossibilité de trouver une issue et de comprendre ce qu'est la vraie vie. Celle qui coule à l'intérieur ou celle qui ne coule pas du tout et se détériore lentement. Le sentiment que la vie, la vraie vie, est là-bas, loin, inaccessible, parce que ce n'est pas comme vous le vouliez, l'imaginiez; cela montre des aspects de vous-même qui semblent extérieurs. Emprisonné parmi d’autres par une «sortie verrouillée» (Locked exit!), comme nous l'indique le récent projet du groupe Liquid Shades de Ferrare en Italie. Le sentiment de claustrophobie est bien délimité dans les huit titres qui évoluent par arrangements pressants et tourbillonnants d’un prog basé sur des rythmes obsessionnels poussant parfois vers les terres du hard rock. Il est intéressant de noter qu’un groupe formé en 2007 et progressivement (!) transformé au fil des années jusqu’à maintenant décide de s’exprimer selon les sonorités d’un genre musical qui connut sa plus grande splendeur au carrefour des sixties et des seventies.
Liquid Shades, à l'instar d'autres formations de la nouvelle génération, montre que les enseignements des grands groupes de la période dorée du prog international peuvent toujours être actuels, valides et efficaces. Le groupe de Ferrare, dans cette nouvelle formation, grâce à un travail d’écriture impliquant tous les éléments du groupe, parvient à produire un son riche et syntonique, ample et harmonieux. Parvenir à combiner le langage musical avec le langage poétique dans la structure des pièces avec l’inclusion de voix récitantes toujours différentes donnent une dimension plus aérienne à l’œuvre. La plupart des pistes sont enrichies par la présence d'excellents invités. Tout pour impliquer l'auditeur dans ce réseau bien resserré. Seuls ceux qui seront entraînés vers le fond, sans craintes, auront l’opportunité de trouver la clé qui leur donne l’espoir de sortir…
Des sons à profusion qui, comme un magma simultané, traversent les saveurs du passé et le besoin toujours contemporain de créer à partir de zéro un puzzle émotionnel bien assemblé et toujours prêt à émerveiller. «Locked Exit» est un concentré de prog et de passion, une narration compacte qui traverse rapidement les années écoulées et s'inscrit dans la création d'un concept qui, à partir d'une photographie, s'ouvre sur des territoires non contaminés où la nécessité de donner un sentiment d’imprévisibilité s’inscrit dans les huit morceaux qui, au fur et à mesure que les suites sonores s’aventurent sur des territoires inhospitaliers, s’inscrivent dans l’imaginaire de l’auditeur. De la chanson titre à «Metamorphosis of darkness», en passant par «Ozymandias» et «Insomnia», Liquid Shades parvient à donner vie à un album devenu une nécessité obsessionnelle, rassemblant sur la terre et sur les expériences un point de vue courageux et en perpétuelle évolution.
Liquid Shades c’est: Diego Insalaco (guitares électriques, claviers, synthé, lap steel), Marco Gemmetto (voix, guitare électrique, acoustique et 12 cordes), Paolo Felletti (basse électrique, chant),
Lorenzo Dotto Checchinato (sax, cor, percussions, effets spéciaux, chant) et Filippo Avanzi (batterie).
Ont également collaboré: Giulia Artioli (claviers, voix), Valentina Palumbo (voix), Olga Mykulyak (violon), Matteo Tosi (voix récitée et chœurs) et Marco Vinicio Ferrazzi (voix parlée).
Commode
4,5/5
Album non disponible sur bandcamp

https://youtu.be/imIt77XdWVw?fbclid=IwAR0KKUHBwn6mG1fOT3TIoaULem9yX0KpvXJvPxyfymw1e9mcSI1rYeQZBxg

https://youtu.be/AyNCK2hLskM?fbclid=IwAR0xTA2uJHXUyRkmLwknf2mJawPMrrt00JobyiZWWi--Fk5uJR_FZDQQJAY

04/12/2019

Weltraum
Nyx
psyché / space rock – 79’17 – Allemagne ‘19
«Zychedelics», premier voyage du présent opus, nous plonge d’emblée dans une construction mélodique proche de «A Saucerful of Secrets» de Pink Floyd. Les vagues d’échos complétés par des bruitages cosmiques se multiplient et enivrent les sens. Il s’en dégage une énergie sidérale et sidérante. Et ce n’est qu’un avant-goût de ce qui suit. Accrochez-vous! «Spiral3» (pourquoi 3? je ne sais pas mais on se met à rêver d’un 1 et 2) est une parfaite démonstration de la démesure mélodique que l’on peut apporter à un trip dont la recette paraît finalement assez simple: guitare prolongée en écho quand elle n’est pas en mode reverb, batterie et percussions de plus en plus déchaînées tout au long des 19 minutes qui s’écoulent, hypnotiques, et montée en force jusqu’à l’apothéose qui nous offre une riff final du tonnerre de Dieu. Une véritable claque! «The Sea» suit le même schéma tout en étant moins pêchu. Cependant, au fil des plages, on constate que notre band nous ressert la même recette tout en clôturant par un dessert plus atmosphérique («Styx»). La section rythmique se fait plus discrète, moins enragée, mais les effets de la six cordes sont, par contre, plus envahissants. Bien sûr tout reste «mind-blowing» mais les moins motivés d’entre vous trouveront peut-être que ça stagne trop dans le même ton et finiront peut-être par se lasser. Dommage. Les interventions du public, épisodiques et mal à propos, gâchent certaines plages (sifflets et beuglements en plein cœur du morceau, totalement dispensables). Il faut cependant rappeler qu’au départ, en 1999, le band s’est formé pour prester des improvisations live lors de sessions psyché et space rock; difficile dans ce cas d’éviter ce genre de parasites! Quoi qu’il en soit, l’album reste excellent! Il est disponible à l’écoute sur bandcamp.
Clavius Reticulus
4/5

weltraum.bandcamp.com

05/12/2019

Knight Area
D-Day
rock progressif/metal-prog – 54’38 – Pays-Bas ‘19
6 juin 1944… À l’aube de cette journée, plus de 200.000 hommes entament ce qui reste comme l'une des plus grandes opérations militaires de tous les temps. Le débarquement est lancé et, avec lui, un déluge de fureur, de feu et de métal s’abat sur les plages paisibles de Normandie. C’est cet événement qui marque un tournant dans le déroulement de la Seconde Guerre mondiale que les Néerlandais de Knight Area ont choisi de nous raconter dans leur nouvel album «D-Day». Vous l’aurez compris, il s’agit donc d’un concept album qui raconte cette folle épopée mais nous propose une réflexion sur la liberté chèrement protégée par le sacrifice de ces milliers d’hommes qui ont trouvé la mort loin de chez eux. Proposer un tel ouvrage présente toujours un risque. En effet, un concept album peut vite être un piège. Soit le groupe parvient à maîtriser son sujet et à donner une vraie consistance à son propos, soit il se laisse dépasser par son propre sujet et peut tomber dans une certaine forme de prétention. Un concept album peut parfois aussi transcender un groupe et l’amener à livrer le meilleur de lui-même. Je pense ici notamment à l’excellentissime «Generation 13» sorti en 1995 par Saga, l’archétype même du groupe dont on n’aurait pas attendu un tel effort et surtout une telle réussite. Je tairai par correction les groupes qui se sont plantés dans l’exercice… Et ce «D-Day»? Échec ou réussite? Et bien, à vrai dire, ni vraiment l’un ni vraiment l’autre… Les bons points tout d’abord: l’emballage est classe, la production est précise et rutilante sans être oppressante. La mise en son est réellement remarquable; dès l’intro «New Horizon», on est comme projeté au cœur des actualités de l’époque sur une musique digne de John Williams. Les musiciens sont tous excellents et délivrent une prestation sans faille. J’aurais personnellement un petit bémol pour le chanteur dont la voix dans les aigus rappelle Axl Rose, mais vraiment rien de rédhibitoire. Là où le bât blesse, c’est que, au niveau composition, le groupe nous propose un prog métal sans vraiment d’originalité. Les compositions s’enchaînent et, paradoxalement, peinent à donner un vrai relief et un vrai souffle à l’ensemble. On aurait pu être en droit d’attendre des mélodies fortes, voire un morceau un peu plus long qui aurait pu nous emmener au cœur de cette aventure humaine. Cela fait par moments penser à une version un peu plus prog de Within Temptation. Seul le dernier morceau, le bien nommé «Freedom for Everyone», nous donne la chair de poule car traversé par un vrai souffle épique. «D-Day» est donc pour moi une demi-réussite; cela reste un album tout à fait honorable et qui fera le bonheur de nombre de nos lecteurs. Mais, en ce qui me concerne personnellement, il ne me laissera pas un souvenir impérissable.
Amelius
3/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=bGHNBWfUOYw&fbclid=IwAR2SL8WroDuC54uZhaFAYHj1il5evMWkHgrfjlruMQrNFSfjEyIuR-eM_3Q

06/12/2019

Kanoi & KRPL
Stealth Chicken
krautrock psyché stoner – 45’54 – Autriche ’19
Kanoi, c’est Benjamin Kantschieder, originaire de Lienz (Tyrol), établi à Vienne où il se crée un home studio, espace nécessaire pour composer, jouer (la guitare surtout, mais pas que), enregistrer et produire sa musique - et, tant qu’à faire, s’occuper lui-même de l’art work. KRPL, c’est un trio originaire de Graz (Styrie), batterie / basse / guitare au service d’un rock heavy instrumental. Dans ce deuxième essai issu de cette collaboration autrichienno-autrichienne, on retrouve les mêmes axes qui avaient guidé «Das blutige Samenkorn»: 3 longs morceaux improvisés, témoins d’une jam un peu sauvage, entre psyché, stoner et krautrock. Josef Pranter (le 3e frère des guitariste / bassiste de KRPL, I presume) se charge, dans «Des Kobolds neue Kleider», le titre central, d’une contribution aux cuivres, avec lesquels interagit la wah-wah en un raccord surprenant - mais bienvenu dans une atmosphère, disons… fière et indomptée. (Regardez le lien youtube: à la place de la poule, j’aurais pas supporté.)
Auguste
3/5

https://kanoi.bandcamp.com/album/stealth-chicken

https://www.youtube.com/watch?v=G5dHBW1wQvE&fbclid=IwAR0Qn38E34-Yn6q0gWAcsvrcebYqoJsdgcahKbTB5BcVXnfxVn17KLYp83E

07/12/2019

Mother of Millions
Artifacts
metal progressif alternatif – 40'18 – Grèce ‘19
Mother of Millions est un groupe grec de metal prog alternatif de haut vol. L'album qui nous intéresse, «Artifacts», est leur troisième album. Dès les premières notes, on voit où se trouve la balance du groupe, entre les douces nappes de guitare sèche et le metal atmosphérique; on pense de suite à Leprous, Tesseract, Devin Townsend, Katatonia ou encore à DGM, de quoi vous donner une idée plus précise. La cohésion du groupe et du mixage saute aux oreilles, elle est totalement parfaite, une production de qualité. L'exemple le plus frappant est le titre «Amber» (un extrait est disponible en commentaire). Vous êtes dans le metal prog le plus classique avec des riffs lourds mais un chant harmonieux parfaitement maîtrisé par Georges Prokopiou, entrecoupé de breaks magnifiquement choisis et à propos. Sa voix est totalement magique. Le titre «Soma» nous offre un passage progressif avec un clavier atmosphérique qui nous fait voyager dans l'espace entre les météorites et autres astres métalliques telle l'Étoile noire de Star Wars. Cela paraît d'une simplicité singulière, mais là est toute la difficulté des groupes de metal prog: arriver à faire passer l'émotion au plus profond de nos cellules nerveuses. «Nema» continue dans ce sens avec un piano de Makis Tsamkosoglou au rythme aussi varié qu'une feuille morte tombant sur un sol d'automne. Heureusement, l'album est relativement court car, petit bémol, je pense qu'un titre ou deux en plus auraient été redondants. Je vous conseille fortement l'écoute de cet album et de retenir le nom de Mother of Millions.
Vespasien
3,5/5

https://vicisolumrecords.com/album/artifacts

https://www.youtube.com/watch?v=Sma0EXV_m2I&fbclid=IwAR0qfAEtNGj5zKd6LQcgcXM3ONKcWoxN-E3ONld2DI2tRCJ_AHuzIG1zxdQ

08/12/2019

Monsieur Thibault
Go Gauthier!
post-rock/math rock/Zappa – 41’27 – France ‘19
Que voici une grande et belle surprise qui nous vient de Lille! Un quartet tout frais sorti des bois (ils se seraient rencontrés dans des jams sylvestres), qui nous sert un premier album respirant la bonne humeur, le talent et la richesse d’inspiration, alliée à un savoir-faire sans bavures.
On passe allégrement au travers de multiples climats et transformations que Monsieur Thibault nous propose avec un plaisir musical renouvelé et enchanté.
Je ne pense qu’à de grandes et belles références comme par exemple Tortoise pour «La mort du cowboy», Albert Marcoeur (qu’a-t-on fait de mieux et de plus original dans le prog français que Albert Marcoeur? – d’accord il y a Magma!) pour «Guirlande», ou des relents des Québécois de Miriodor. On trouve un peu de math rock également, mais baigné d’émotions, de vie et de sentiments, et, toujours, de l’humour et de la légèreté. Quelques bouffées zappiennes ne sont pas à négliger également.
En somme, un grand coup pour un premier album flamboyant, musical, humoristique, décapant, profond et léger à la fois. Ne perdez pas l’occasion de vous rincer les oreilles avec Monsieur Thibault. Nous leur souhaitons longue vie, de nombreux albums, et, bien sûr, une opportunité de voir ce que cela donne en concert. C’est dans cette veine-là que ce que la France peut nous apporter est unique et irremplaçable! Go… Go Gauthier!
Ah oui, et en plus ils nous gratifient d’un véritable "gran finale" avec «Cowboy Cheddar».
Lucius Venturini
4,5/5

https://monsieurthibault.bandcamp.com/releases

https://www.youtube.com/watch?v=LS9Y5hexseM&fbclid=IwAR0Qi7l5TH5ts6t7oWKwJbSSMLN2oVaJ68ipEw7wah07tV8xbN-JxwGyp1I

09/12/2019 : La journée Birdeatsbaby

Birdeatsbaby
The World Conspires
progressive metal / unknown mixtures – 67’56 – Angleterre ‘19
Singulièrement, je fis connaissance avec Birdeatsbaby, glané sur les chaussées hispaniques, certainement tombé du baluchon d’un pèlerin se rendant aux trois Jacques. «Tanta Furia» m’avait surpris par ses excentricités mélodiques ainsi que sa juste réponse à mes aspirations musicales. De retour à Rome, je courus à la boutique acquérir les autres disques. Surprenante discographie! Volatile et carnassière ou satinée comme une peau de bébé, Mishkin Fitzgerald incarne parfaitement son projet “Ornithanthropophage”...
Voici qu’aujourd’hui l’on m’annonce la sortie du nouvel opus de l’oiseau carnivore; ni une ni deux, je supplie le Dux Bellorum de m’en confier la chronique… «Je note» me dit-il.
Autant vous avouer mes incroyables attentes après pareille découverte. Play!
J’entre silencieux en des lieux obscurs, théâtre où d’insaisissables saltimbanques affûtent leurs riffs et galvanisent les chœurs. Je retiens mon souffle. Une douce mélopée rassure, habillée d’harmonieuses vapeurs. Soudain, retentit cet hymne envoûtant, dense comme du granit, rugueux à souhait. L’Orient y tourbillonne, dispersant le sable chaud dans d’épaisses nuées. Ce magistral «anti-douleur» se dilue ensuite progressivement faisant place à un songe teinté d'ésotérisme. Œuvre au noir remarquablement menée, construction passionnante, quête dont l'extraordinaire issue me met à genoux devant une conspiration amoureuse que l’on se méfiera de prendre au pied de la lettre tant elle remue la détresse du monde.
À peine quitté ce laboratoire où mille interrogations bouillonnent aux cornues, à peine congé pris du creuset rempli d’étoiles qu’une grise dame m’invite à l'apaisement. Easy listening, enrobée d’anthracite, la lumière auréole finement son visage. Un doux piano s’interroge puis la belle s’efface au hasard des souvenirs dépressifs de notre meneuse de revue. Tranchante boîte à secret, les maux universels dansent en ce long titre d’une majestueuse évidence.
Conclusion silencieuse,... essentielle.
«Esmeralda», décadente ballade dont le velours est sans conteste plus violent que 50 autres nuances. Chanson d’amour nimbée d’envolées post-rock, de corps et de cris. «Esmeralda» m'emmène au cœur d’un cyclone digne des meilleures divas électrifiées. Passée la tempête, me reste un nuage, un chuchotement,... de dangereuses cordes lancées des cieux où résonnent d'étranges lamentations. Je suis enfin propulsé vers un «triptyque» final follement musclé dont les ultimes nappes me ramènent délicatement au réel.
Les références sont inutiles tant, à l’évidence, nous sommes en présence d’une personnalité artistique complexe, un style, une aventure. Il y avait à peu de choses près de la matière pour un double album mais, intelligemment, Birdeatsbaby a fondu ce métal sans longueurs inutiles, en allant droit à l’émotion. Grandiose!
Néron
4,5/5

https://birdeatsbaby.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=eYp1_DK6Nho&fbclid=IwAR00uVBBN7mih_gtPGQiGZxiz4t8Ea6sXwLZHeJRmjAJafH0mO2xh7q9kvQ

10/12/2019

Marillion
With Friends from the Orchestra
rock progressif – 79’48 – Angleterre ‘19
Pour ce nouvel album studio, Marillion invite à son tour un ensemble à cordes, cor et flûte qui sied admirablement à sa musique. Et particulièrement pour ce choix des morceaux anciens et moins anciens de leur longue discographie. D’emblée, le «Praise of Folly String quartet» (ainsi s’appelle-t-il) colore superbement la refonte d’«Estonia» extrait de leur album «This Strange Engine» auquel ils vont d’ailleurs revenir plus loin. En tout, neuf classiques sont ainsi remaniés. La sélection a de quoi ravir nos écoutilles pendant ces près de 80 minutes extraites de «Holidays in Eden», «Marbles», «Brave», «Sounds that can’t be made», «Seasons End» et encore «Afraid of Sunlight» dont le coffret «deluxe édition» vient tout juste de sortir (également chroniqué précédemment par votre serviteur). «This Strange Engine», je le disais plus haut, est particulièrement mis à l’honneur puisque le morceau éponyme se voit ici sublimé par le quartet en 16 minutes de pur bonheur! Le chant de Steve Hogarth est toujours aussi mélancolique et colle parfaitement aux sonorités classico-contemporaines qui évoquent çà et là Gorecki dans les moments les plus pathétiques. Je pense notamment aux trois dernières minutes de «The Sky above the rain» et à l’éblouissant «Ocean Cloud» qui emporte l’âme bien au-delà des cieux. Tout simplement magique. Et bien sûr nos artistes ne pouvaient manquer de revisiter le très beau «Seasons End» en l’étoilant d’un magnifique arrangement orchestral qui se fond parfaitement dans la partie instrumentale de cette composition qui nous faisait déjà frissonner en 1989! Beaucoup de superlatifs, direz-vous, oui mais amplement mérités! Ici on atteint la quasi perfection.
Clavius Reticulus
4/5
marillion.com
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=c1UEHTMHkxM&fbclid=IwAR2wRI3fKvswIG2c07gpdE2ASFByzoZkMOMalWUeTQs0-RAP3bw-_EvLFn0

11/12/2019

Drifting Sun
Planet Junkie
rock progressif/heavy-prog – 59’28 – Angleterre/France ‘19
Lorsque, mi-2018, j’apprenais le départ du talentueux chanteur Peter Falconer du groupe avec lequel il avait enregistré trois magnifiques albums, je m’interrogeais sur l’avenir de Drifting Sun. Comment son leader, Pat Ganger Sanders (claviers), allait-il maintenir le vaisseau à flot? La solution est risquée mais intelligente et évite les commentaires du style: «Falconer c’était mieux», «le nouveau est bon, mais…». Bref, autour du noyau Sanders: Jones (batterie), Storey (guitare/basse) et Michael (basse), le groupe s'est adjoint pas moins de trois chanteurs plus un guitariste additionnel. En effet Marc Atkisson (Riversea), Colin Mold (Kandaka) et Joshua Corum (Head With Wings) se partagent le chant, quant à Mathieu Spaeter (Carducci), il magnifie ce nouvel album de solos de guitares.
Le résultat est une œuvre patchwork qui par moments fait penser à Alan Parsons, à Yes ou encore à Asia. À noter les sublimes harmonies vocales (l’association des différents vocalistes), qui donnent des éléments majeurs aux multiples colorations à ce nouvel album.
Tout dans cet album est mélodies, une excellente œuvre de rock progressif qui quelquefois devient pop, parfois AOR mais toujours avec classe.
Un nouveau coup gagnant pour cette formation franco-britannique.
Tiro
3,5/5

https://driftingsun.bandcamp.com/album/planet-junkie

https://www.youtube.com/watch?v=2Vh-WvyGo_c&fbclid=IwAR2s2Oag-dDfTQZm_2enDHPUc4H8acrUD3dwI6vCnIYijO3wLAZC6jBF_L8

12/12/2019

Red Sand
Forsaken
néo-progressif – 44’39 – Canada (Québec) ‘19
Ce groupe québécois n’est pas né de la dernière pluie, ce «Forsaken» est déjà le huitième album d’une carrière commencée en 2004 avec le premier album «Mirror of Insanity». Si le groupe a connu quelques remaniements de personnel depuis cette époque, on note qu’au niveau du style il est resté fidèle à sa marque de fabrique. En effet, Simon Caron, guitariste leader du groupe, ne cache pas ses affinités pour le Marillion de la première heure, alors toute la carrière de Red Sand est comme un témoignage de cette filiation presque charnelle. À l’image d’un Clepsydra ou de ce que représente pour ce genre musical un Clive Nolan, il y a en Red Sand comme l’ADN du néo-progressif des années 80/90. Ce style immuable de Red Sand a néanmoins pris, au fil de son évolution, quelques lapées dans la fontaine de jouvence, et le son très typé années 80 des premiers albums s’est à présent un peu modernisé. Rien de révolutionnaire pour autant, les qualités du groupe, (dont le son de la guitare de Simon Caron reste le fer de lance par ses envolées «rotheriennes» progressives échevelées et mélodiques), demeurent celles qui ont façonné l’identité de la formation depuis ses jeunes années.
Contre vents et marées Red Sand continue donc son petit bonhomme de chemin dans des structures stylistiques éternelles, certes passéistes mais qui continuent à plaire à une frange non négligeable de progsters. C’est en écoutant ce genre d’album que l’on se rend compte que le progressif connaît, et a connu, des époques diverses et stratifiées. Que le néo-progressif était, et est sans doute encore, un genre à part entière, dont on peut toujours se revendiquer sans rougir. Alors ne boudez pas votre plaisir si vous étiez parmi les fans des premiers ténors du néo des années 80/90. Cet album n’est certainement pas le meilleur des meilleurs, mais il perpétue une tradition, une période révolue qui a compté énormément à une époque où le prog était complètement sorti des radars médiatiques.
Centurion
2,5/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=zQGRJAlCNGI&fbclid=IwAR2iZQ6cj9wpGYVo2gujzJTCOoQ5aAcJ-PFXu4tTNi36HBPLKH-z1M9Qw-0

13/12/2019

Warmrain
Back Above the Clouds
rock progressif floydien – 72’12 – Angleterre ‘19
Warmrain nous présente son premier album, double pour le coup, «Back Above the Clouds». Le membre fondateur du groupe, Leon J. Russell (composition, écriture, chant, guitares et batterie), est accompagné de Matthew Lervill à la guitare et Simon Bradshaw à la basse. Pour les aider, ils s'entourent d’un guest de marque puisqu'il s'agit de John Mitchell, membre, notamment, d’It Bites, Frost, Kino, Lonely Robot... Leon J. Russell a créé ce concept album sur la mort et le deuil. Nous connaissons tous la perte déchirante d'êtres chers et les mécanismes d'adaptation qui nous donneront la force de nous reconstruire nous et nos vies. L'album raconte comment la personne qui a vécu cette histoire a tenu une série de journaux, documentant les pensées et les sentiments qu’il éprouvait. L'album est composé uniquement d’extraits de ces journaux. L'ensemble de l'album est complètement floydien; sur certains titres on croirait que c'est Roger Waters lui-même qui joue. En fermant les yeux on reconnaît certains passages plus modernes comme Anathema sait si bien le faire. On peut y retrouver également du Steven Wilson ou du Pineapple Thief sur une ballade comme «Metamorphosis». La base des titres est composée d'arpèges acoustiques où viennent se greffer des riffs planants à la façon de David Gilmour, et croyez-moi la technique et le feeling y sont bien présents! J'ai envie de dire qu’ils font du Pink Floyd acoustique et atmosphérique avec le psychédélique en moins. Mais le voyage de l'esprit y est bien présent. Cet album est un exemple de justesse, de feeling et d'émotion. Ce groupe n'est pas un copier-coller de Pink Floyd, heureusement, mais j'ai pris autant de plaisir à écouter ce double album qu'en écoutant les anciens de la bande à Waters comme «Dark Side of the Moon» ou «Wish you Were Here».
Le petit plus de l'album: la superbe reprise d'Eurythmics où «Here Comes the Rain Again» y est totalement modifié avec brio. Je vous conseille fortement d’écouter «Back Above the Clouds» au calme et de passer un bon moment d’émotion musicale entre les mains de Warmrain.
Vespasien
4/5
http://warmrainband.com/
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=cLr3TxbVxhs&list=OLAK5uy_kNcO6OJ2S-j3SUSUkgPAOLLWy3yToDZtw&fbclid=IwAR2qb71gxq8edmoEhQPpNuFzu0mK4MTgp1vitbOGY-GtdJ-pGjmb4kkQSKA

14/12/2019

Acid Rooster
self titled
rock psychédélique – 44’08 – Allemagne ‘19
Dans ce vaste mouvement de résurgence du rock psychédélique qui mêle goût des développements qui prennent leur temps, appétence pour les effets en général et la distorsion en particulier, murailles sonores, improvisations débridées et imaginaires échevelés, certains se noient à trop appliquer, sans âme, une recette qui, d’ancienne, devient éculée. Même si le trio de Leipzig, assidu plus que découvreur, ne s’affranchit pas de tous les écueils, Acid Rooster intègre plaisamment l’héritage de ses grands frères Amon Düül (la schizophrénie en moins), Agitation Free (l’influence orientale en moins) ou Neu! (l’expérimentation électronique en moins) et va plus loin que la narcissique écoute de son propre nombril dans ce premier album, capable de proposer temps de repos («Time Lapse»), échappée-et-retour («Focus») en plus de son évident fonds de commerce («Oculatus Abyss»).
Auguste
3/5

https://acidrooster.bandcamp.com/album/acid-rooster

https://www.youtube.com/watch?v=6p5SQygT_70&fbclid=IwAR3LhI287cVpHPG_NlNQ9RM1HNYggXYgDKIMLeoAuZExOBRTFaLxkOZlvGw

15/12/2019

Hawkwind
All aboard the Skylark/
Acoustic Daze
space rock – 42’34+49’01 – Angleterre ‘19
On ne présente plus Hawkwind: c’est la référence incontournable en matière de space rock. Ils ont à leur actif une discographie qui remplirait une étagère complète dans votre appartement. Cela dit, ils ont difficilement égalé des albums comme «Doremi Fasol Latido», «Xin search of Space» (ou «In» ou «Xin»… controverse connue et mystère toujours complet), «It’s the business of the future to be dangerous» et surtout le magnifique «Warrior on the Edge of Time» que Steve Wilson avait remixé en 5.1 surround en 2013 pour une édition coffret de trois rondelles contenant également bon nombre d’inédits. Mais le fan se doit de posséder aussi le vinyle dont la pochette se déploie en bouclier estampillé «chaos». Un must. Revenons à ce nouvel album auquel Dave Brock a joint un CD bonus compilant d’anciens moments de bravoure en version acoustique (ou presque). Si la première plage reste dans la ligne musicale du band faite d’effets d’écho vocaux et de bruitages «cosmiques» sur une rythmique vitaminée, la suite offre quelques surprises sous forme de ballades atmosphériques et de six cordes aux sonorités Steve Hillage nappées d’un vrai mood planant. «All aboard the Skylark» se révèle un album plutôt cool par rapport à leurs précédents actes plus hypnotiques de par leurs rythmes de la catégorie locomotive en furie.
«Acoustic Daze» présente des versions acoustiques ou enregistrées en live de plages anciennes comme «Down through the Night» (loin d’être acoustique, celle-ci!) ou «We took the wrong step years ago» (et son petit côté mélancolique), titres issus entre autres de deux albums dont je parlais plus haut. Une très bonne cuvée, donc, que cet écrin où deux mondes se côtoient.
Clavius Reticulus
3,5/5

https://hawkwindhq.bandcamp.com

https://www.youtube.com/watch?v=5pwZjWtB_zo&fbclid=IwAR2qb71gxq8edmoEhQPpNuFzu0mK4MTgp1vitbOGY-GtdJ-pGjmb4kkQSKA

16/12/2019

Yogi Lang
A Way Out of Here
néo-prog – 50’50 – Allemagne ‘19
Pour ceux qui l’ignoreraient, Yogi Lang n’est autre que le chanteur du groupe RPWL qui nous revient afin de nous présenter son second album, après «No Decoder» paru en 2010. Outre lui-même au chant et claviers, on y trouve son compère guitariste au sein de RPWL, Kalle Wallner sur deux titres, ainsi que Torsten Weber (guitares), Yvo Fischer (basse), Stephan Treutter (batterie), Klaus Reichart (pedal steel et mandoline) ainsi que les choristes Conny Kreimeier et Bine Heller. Le premier titre (et aussi le plus long), «Move On», débute sur des notes orientales, malheureusement trop vite remplacées par une mélodie pas désagréable, certes, mais terriblement convenue malgré des claviers encourageants. Le travail sur les voix (y compris les chœurs!) est en tout point remarquable. Arrive ensuite la plage titulaire, entraînante comme les fans peuvent s’y attendre. La ballade «Shine on Me», emplie de pedal steel(!), n’a que peu de chances de faire carrière dans les hit-parades. Il faut attendre le quasi funky «Love is All Around» pour relancer la machine. Sur «Early Morning Light», l'influence du grand Pink Floyd se fait clairement ressentir, tandis que la ballade «The Sound of the Ocean» nous fait parvenir de beaux arpèges de la pedal steel. Nous quitterons cet album sur une dernière ballade: «I’ll be There for You». Que les amateurs (et je sais qu’ils sont nombreux) ne se méprennent pas: ils peuvent faire l’acquisition de cette galette car ils y trouveront de très belles mélodies défendues par des instrumentistes d’un excellent niveau, tout comme le chant d’ailleurs, mais, en ce qui me concerne, je n’ai pas trouvé, à son écoute, le plaisir ou l’étonnement attendu…
Tibère
2,5/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=t_K0K3jVJnA&fbclid=IwAR2Mi_a8R_txxuSylfIaKdvr4bMo_dEmGLF548uIICjlI76HzBWik91OMTo

17/12/2019

Isildurs Bane / Peter Hammill
in Amazonia
rock progressif complexe – 40’16 – Suède/Angleterre ‘19
Voici un projet bien surprenant et intéressant! Chaque année, les musiciens d’Isildurs Bane organisent un événement appelé «IB Expo» et c’est l’occasion pour eux d’inviter des musiciens qui font des choses «différentes». Rien d’étonnant donc que la cuvée de 2017 fut l’occasion d’une rencontre avec Peter Hammill. De là surgit un projet d’association dont voici le résultat avec «In Amazonia».
Les compositions sont signées par Mats Johansson, la tête pensante de IB, mais, de manière surprenante, l’univers sonore qui est produit constitue une rencontre - improbable - entre Peter Hammill et le combo suédois.
Évidemment, il y a la voix, unique, du chanteur de VDGG et l’auteur de «Killers, Angels, Refugees» nous redonne quelques ambiances poético-dark dont il a le secret.
Les orchestrations sont variées: clarinette, koto, marimba, alto, en plus de l’orchestration traditionnelle. Les mélodies sont étranges à souhait, on entre dans cet univers pour un voyage musical passionnant et riche.
L’album est varié, les ambiances contrastées, les orchestrations fines et équilibrées et, s’il est vrai que la voix de Peter n’a plus la tension tragique qu’elle avait sur «Pawn Hearts», le timbre et les scansions sont bien là, inimitables.
Une grande rencontre entre le maître suédois, Mats Johansson, et le poète musicien intemporel Peter Hammill… Isildurs Bane est un groupe extrêmement dynamique, qui continue ses recherches et expérimentations quand ils auraient pu en rester à quelques formules bien rodées qu’ils inventèrent au fil des albums. Mais, non, ce groupe va toujours de l’avant, ce qui nous occasionne de belles surprises comme ce magnifique album, improbable, mais une indéniable réussite!
À na pas éviter… Excellent pour un dimanche après-midi pluvieux…! Profitez-en…
Vous trouverez sur Youtube le concert qu’ils ont donné au Gouveia Art Rock 2019: https://www.youtube.com/watch?v=uRFaquFVGmY
Lucius Venturini
4/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=3VaMGra5PXw&fbclid=IwAR2qb71gxq8edmoEhQPpNuFzu0mK4MTgp1vitbOGY-GtdJ-pGjmb4kkQSKA

18/12/2019

Sleeping Pandora
Yellow Sphere
psyché/space rock/kraut – 45’26 – Allemagne ‘19
La recette space/psyché reste la même: guitare servie avec une solide dose d’écho et de reverb, section rythmique faite d’un jeu de basse simple et envoûtant accompagnée d’une batterie qui monte progressivement en puissance. Ajoutez ici la pédale wah-wah (couché le chien, je travaille!) et des sonorités qui ne seront pas sans vous évoquer Ash Ra Tempel (Join inn) ou encore Steve Hillage, tout en restant moins speedé pour ce qui est de la première référence. Le mélange est en tout cas superbe. Ceci constitue le quatrième voyage des sphères en compagnie de notre Berlinois Mathias Rosmann. Avec «Santenna», on décolle en douceur sur un tempo paisible fait de résonances à facettes irisées. C’est connu de longue date, les Allemands savent y faire pour ce qui est de nous faire planer. Trois plages dont la durée permet à l’auditeur une totale immersion progressive (tiens oui!). Le son Hillage est plus présent encore dans le deuxième track («Cold Fever»), une sonorité de guitare similaire qui complète un rythme plutôt électro-séquentiel en ouverture. «Cold Fever» et «Frozen» ont tous deux une rythmique plus marquée et un jeu de six cordes aérien qui pétille comme du champagne. Mathias Rosmann confirme son statut d’artiste talentueux qui, tout au long de ses quatre albums, s’inspire tant de Pink Floyd (album de 2018, «From Above», qui reste mon préféré) que de Ashra, tout en conservant cette coloration très légère de space rock, cependant à des parsecs de Hawkwind ou Monster Magnet. Tout son univers est fait de douceur et de nuances intemporelles. Les albums sont également disponibles en CD ou digipack pour un prix stupide. Encore un artiste qui travaille par pur plaisir! Extra.
Clavius Reticulus
4,5/5

https://sleepingpandora.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=xBglH-ws6mw&fbclid=IwAR2qb71gxq8edmoEhQPpNuFzu0mK4MTgp1vitbOGY-GtdJ-pGjmb4kkQSKA

19/12/2019

The Psychedelic Ensemble
Mother’s Rhymes
rock progressif/neo-prog – 51’15 – États-Unis ‘19
Cela semble être devenu une marque de fabrique: semer son monde! Unanimement salué par la critique et sa profession, cet homme-orchestre new-yorkais anonyme se cache derrière le pseudonyme doublement trompeur de The Psychedelic Ensemble. Doublement trompeur car on a en effet affaire ici à un one man band, et qui pour le coup n’a de psychédélique que le nom! En fait de psychédélisme, l’homme verse plutôt dans un rock progressif de la meilleure facture, tant sur le plan de l’écriture que de l’exécution, et qui convoque un très large panel d’influences (prog symphonique, metal prog, folk, néo-classique) dans un ensemble redoutablement bien maîtrisé. Pour ce nouveau concept album, sa sixième livraison en dix ans, The Psychedelic Ensemble (TPE pour les intimes) s’est aventuré dans l’univers des comptines pour enfants, un domaine qu’il n’est certes pas le premier du genre à explorer mais qui lui inspire en l’occurrence huit morceaux d’une grande richesse et d’une diversité stylistique, où jamais la verve ne se tarit et dans lesquels les tableaux se succèdent à travers un ahurissant foisonnement de virtuosité à aucun moment démentie. À l’aise sur absolument tous les instruments auxquels il s’attaque, TPE ne délègue que sur le plan des vocaux, avec la participation de plusieurs chanteurs (donnons leurs noms puisque ceux-là on les connaît: Amy Lee, Mina Keohane, Lisa Brooks et C. Francis), tandis que viole et violon sont tenus par Davis Brooks et le violoncelle par Raphael Soren. Pour sa part et toujours en parlant de vocaux, TPE présente toutes les caractéristiques du caméléon puisque l'on jurerait par moments (en particulier sur le morceau d’ouverture «Mother’s Rhymes») entendre un autre fameux chanteur, également flûtiste et adepte sur scène de la position du flamant rose… Mais ne cherchez pas, ce n’est pas lui!
Cenomanus
4/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=bpctNCRe56M&fbclid=IwAR0iNau63iSLi29j1XhIapx88XJaNSZJXQwYAuLmeM1VZ09VRdQpP71SsqU

20/12/2019

Wolmari
Wolmari
folk-prog – 45’49 – Finlande ‘19
Folk et prog sont deux genres entremêlés parfois pour le meilleur comme en témoignent les innombrables expériences à travers l'histoire du rock. Ici les Finlandais de Wolmari ne transgressent pas la tradition; leur rock progressif baigné d'une ambiance folk fait montre de toutes les garanties nécessaires pour porter haut le drapeau de ce genre musical. Cette musique, c'est la rencontre de deux traditions: d'abord celle d'un art, (celui du folk finlandais), et ensuite des poncifs du progressif ancestral, un peu comme si Gryphon valsait avec le Floyd; notons d'ailleurs quelques solos de guitare assez gilmouriens («Sarastus») et parfois des claviers très «progiens». Comme de vieux et lourds sabots, cette musique lancine pesamment sans aucune précipitation, mais non sans vigueur, au travers de paysages d'un autre temps. On se renvoie les politesses, une fois toi, une fois moi, pour laisser apparaître des moments de belles passes entre accalmies folkeuses et poussées progressives.
Un chant en finnois aux sonorités parfois rebutantes, (dont le timbre rappelle Dick Annegarn), ancre, s'il en était encore besoin, cette offrande dans les nordiques sillons médiévaux. Mais cette âpreté est parfois compensée par un chant féminin, par de délicats arpèges acoustiques, et de belles sonorités claviéristiques. Et ces claviers aux accents souvent pastoraux tissent une trame doucereuse de laquelle émergent de jolies mélodies.
Wolmari maintient un savant équilibre entre ses deux faces jumelées, chacune s'exprimant à satiété pour finalement se corréler et former un tout convaincant.
Une belle découverte, dont on remarquera l'étendard émergeant de la multitude de productions actuelles. Se démarquer est déjà un atout.
3/5
Centurion
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=pW-FycOb2w8&fbclid=IwAR2Q6ecZyvHS9adMiF2WqTKARz4K3Az6tHDAVThppp-YiyTStrKYhlJ_f1Q

21/12/2019

The Tronosonic Experience
II: The Big Blow
jazz/rock progressif – 44’04 – Norvège ‘19
Positionnée par The Tronosonic Experience, lui-même au croisement de l’avant-garde jazz des années 60 et du rock progressif des années 70, la musique de ce quatuor instrumental d’Oslo (renforcé ici par Henning Svoren dans la fonction de bidouilleur sonore) se cherche, à travers les frontières des genres, une identité qui, si on va vite, peut égarer son auditeur, se revendiquant tour à tour du punk jazz ou d’influences enchevêtrant Charles Mingus, Led Zeppelin, Miles Davis ou Black Sabbath. La couleur dominante est toutefois le plus souvent dictée par le saxophone ténor de Ole Jørgen Bardal, les guitares de Øyvind Nypan se chargeant des matières plus progressives - voire psychédéliques comme dans «Rasputin» -, quand l’atmosphère ne glisse pas - c’est rare - vers l’ambient («Voyager Pt. 2»). Même si «Lost Highway» le conclut joliment - mais sans originalité -, ce deuxième album du groupe privilégie un son lourd (la basse de Per Harald Ottesen; «Maelstrom»), dont l’enregistrement live en studio conserve intacte l’énergie mais manque de subtilité - au point de lasser par la monotonie de sa palette sonore, voire de son écriture.
Auguste
2/5

https://thetronosonicexperience.bandcamp.com/album/ii-the-big-blow-2

22/12/2019

Retrospective
Latent Avidity
rock progressif/métal progressif – 48’49 – Pologne ‘19
Quatrième album depuis 2008 pour Retrospective. Le groupe nous propose un «métal» progressif dans la lignée du grand frère Riverside, étant capable de nous donner de magnifiques mélodies tout en sachant durcir le ton au moment venu. Le clavier de Beata Lagoda y est discret mais indispensable. Sans compter l’apport de la voix féminine de Beata, elle colle parfaitement à l’ambiance de l’album. Elle apporte de la douceur, de la consistance et du feeling. La voix de Jakub Roszak est magnifique de justesse, d’émotion et de mélancolie, sans trop en faire; sobriété est le maître-mot. La balance musique - solis - chant est parfaite. La remarque vaut pour l’ensemble des instruments. La production et la prise en son, ainsi que le mixage, ne peuvent être plus aboutis. Même si la part belle est faite à la guitare, chaque musicien y trouve sa place. Comme pour le clavier, le batteur Robert Kuzik nous propose un jeu technique varié et rythmé en toute discrétion. C'est sobre, simple et complexe à la fois. On retrouve des influences, bien sûr, de Riverside, Anathema et Pain of salvation, et par moments un petit côté Paradise Lost. Le titre «Still there» résume bien les qualités du groupe, c’est une merveille (lien youtube sous cet article). Il est totalement sombre, mystérieux, construit et recherché… l’âme de l’album. Si vous ne connaissez pas la discographie de Retrospective, je vous recommande chaudement cet album. Laissez-vous porter par leur magie musicale. Ils méritent d’être connus et encouragés. J’espère les voir un jour en concert, et en tout cas suivre la suite de leur carrière.
Vespasien
4/5

https://retrospectivepl.bandcamp.com/album/latent-avidity

https://www.youtube.com/watch?v=wYET2IHxIIM&fbclid=IwAR3at_zTewQW9mBp2TLjo4CHkOygIIGkLkPLefPCsryPHsz41l3QBHeU6fw

23/12/2019

Franck Carducci
The Answer
rock 70’s – 68’26 – France ‘19
À l’heure où sortira cette chronique, le nouvel album de Franck Carducci aura déjà suscité de nombreuses critiques enthousiastes, passionnées, voire dithyrambiques. Et je viens ajouter la mienne à l’excitation populaire engendrée par le rock de ce trublion au double manche, bonhomme passionné à la gentillesse extrême pour une «rock’n’roll star», rôle assumé ironiquement dans la joie et la bonne humeur.
Car Franck Carducci s’il est Français, peut se targuer d’une internationalisation que peu de groupes de rock prog’ (souffrez que je donne cet adjectif pour une fois restrictif) d’ici peuvent assumer. Les tournées en Grande-Bretagne et autres concerts européens sont devenus la norme pour son groupe et lui. Mais c’est grâce à un travail acharné et une présence scénique débordante d’énergie que le F.C.B. doit sa réussite! Je n’ai pas voulu m’immerger outre mesure dans la biographie du guitariste/bassiste/chanteur/compositeur pour ne pas être trop influencé et juger ce nouveau disque, «The Answer», sans recul. Après tout, si je compte bien, ce n’est que le troisième opus d’une carrière discographique studio, sans oublier un live. Avec une belle régularité depuis 2012, F. Carducci et sa troupe distillent une joie de vivre rock sans discontinuer et cette «Réponse» tombe à point pour un tas de questions que se poserait le public français souvent moins enclin à s’ébahir sur telle ou telle œuvre qui ne lui a pas été présentée dans les règles de l’art.
(«Love is the answer») qui démarre le disque nous met dans le bain de suite, l’orgue Hammond et le mellotron d’Olivier Castan répandent leurs premières brumes avec une savoureuse aisance et les chœurs féminins conjugués sonnent plus 70’s que les 70’s elles-mêmes! Ah, mais au fait, on a déjà notre réponse, c’est l’amour, of course… Ce que j’apprécie surtout chez Carducci, c’est cette facilité (apparente?) à faire du rock qui n’est pas recroquevillé dans un genre auquel on l’assimile bien souvent (le prog). Moi j’y décèle du Stones, du southern rock, du Floyd… Témoin le désormais fameux «Slave to rock’n’roll» (le clip!) qui, à mon humble avis, pourrait être joué par Lynyrd Skynyrd sans aucune honte. On sent bien que Franck a baigné dans le rock depuis toujours. Les influences sont multiples et assimilées par la grâce d’un groupe qui semble sortir tout droit de 1974. «Superstar» reste dans cette veine alors pourtant parcouru de claviers et de guitares à teneur progressive hautement bénéfique et c’est là que s’élève la voix diaphane de la blonde Mary Reynaud, un amour de jeune femme, pétillante sur scène comme dans la vie, je n’en doute pas. Les chœurs féminins sur fond d’Hammond nous ramènent vers un rock américain des grandes surfaces, pas ‘Aux champs’ ou ‘Le Clair’, non, celles de l’Amérique profonde. Ce melting-pot anglo-américain, prégnant dans la musique de «The Answer», nous plonge dans ces fameuses seventies dont on ne voudrait jamais sortir (enfin moi!) et, c’est assez rare à souligner, ce titre «Superstar» mélange avec une magie soutenue deux mondes rock qui, souvent, sont parallèles; là est la force de F. Carducci. Passons à «The after effect» où Mary emploie le theremin, instrument bien peu usité aux capacités envoûtantes. Plus prog’ rock que le reste de la galette, cet ‘effet d’après’ arrive à nous faire rêver bien avant la fin avec ce thème répétitif et pressant pour un morceau clôturé par le piano d’O. Castan. C’est au tour du court et troublant «The game of life» joué par un trio acoustique: Carducci chante, R. Vecchi au piano et surtout cette trompette en ballade feutrée, soufflée par T. Seneau, une parenthèse qui doit à Bowie et tombée à point pour souffler. On en finit déjà, hélas, avec «Asylum» et sa rugosité blues, autre palette du touche-à-tout quand tout s’efface pour un climat à la Supertramp avant que le mellotron de Mr. Derek Sherinian himself vienne gambader, batifoler même, avec une aisance sans pareille. Là ça devient funky, la basse est ronde et un solo de batterie (Jimmy Pallagrosi), chose rare sur un album studio, vient s’imposer avant le retour d’une guitare déchirée, celle de Fabrice Dutour. Quatre bonus concluent le disque dont deux radio-cut de «Love is the answer et Slave to r’n’r» mais se cache une dernière perle «Beautiful night» digne du «Beautiful» tout court de Marillion!
Cet album est comme un rêve dont on ne voudrait pas se réveiller. Écouter une rondelle de cet acabit en 2019 me rend nostalgique d’une époque mais heureux de pouvoir la revivre à l’infini, grâce à des artistes comme Franck Carducci's rocking friends around the world et ses musiciens. On a retrouvé l’homme au grand chapeau!
Commode
5/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=ZT6E7o2ilpU&fbclid=IwAR1b5DuoYw_3p7WmqNeRKVW38On3PQYe0Gr5q8ly3QX-9jk7aCwAqehX9BQ

24/12/2019

Lee Abraham

Lee Abraham
Comatose
rock progressif – 46’55 – Angleterre ‘19
Déjà le septième album solo pour Lee Abraham, guitariste depuis peu de temps (2017) du groupe Galahad, après plusieurs épisodes en qualité de bassiste, notamment sur les tournées et l’album «Empires Never Last». C’est en 2003 qu’il se lance dans l’aventure en solitaire avec la sortie de «Pictures in the Hall», pressé à peu d’exemplaires et depuis lors complètement épuisé. Remarquons que son travail avait tellement impressionné Martin Orford (IQ, Jadis) et Karl Groom (Threshold) qu’ils avaient tous deux participé à la réalisation de l’album suivant, «A View from the Bridge». Comme son nom le laisse supposer, «Comatose» est un album concept racontant l’expérience traumatisante d’une personne dans le coma après un accident de circulation. C’est d’ailleurs sur les «bips» lancinants d’un moniteur cardiaque (soutenus par une sombre nappe de claviers) que débute la plus longue des plages présentes ici, «Numb Pt. 1». il faut attendre près de deux minutes pour qu’une musique aussi grandiose que dramatique ne prenne part à l’action, mais quelle claque! Outre lui-même aux guitares, claviers et basse, on trouve Rob Arnold au piano, Gerald Mulligan à la batterie, Marc Spencer et Diane Abraham (son épouse) aux chœurs. Ce sont encore des nappes anxiogènes bien qu’apaisées qui nous accueillent dans «Realisation» où la guitare se montre planante et envoûtante. De délicats gazouillis nous emmènent vers les cieux dans «Ascend the Sky» où les chœurs font merveille. Sur fond de délicats arpèges à la guitare acoustique, le clocher d’une église nous appelle dans le lointain sur «The Sun». Quel doigté dans tous ces phrasés! Avec «Numb Pt. 2», le thème principal nous revient en tête avant de faire place à des guitares autrement plus imposantes. Mais pas de retour possible et inutile de se demander pourquoi: voici «No Going Back» où la musique se fait plus dure avant le retour à la sérénité et un côté presque primesautier avec «Awaken?». Comme d’habitude Lee Abraham nous livre ici de la belle ouvrage que je vous conseille vivement de vous procurer!
Tibère
4/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=TPT42Vs4C2Q&fbclid=IwAR0z4KQOYodGBVDfrwjL-ju84dJXp7FZr1gLrSBeeuMt61yZnRoe3mszclo

25/12/2019

Villagers of loannina City
Age of Aquarius
psyché/stoner – 66 ’15 – Grèce ‘19
Si le nom vous évoque de la musique new age, ne vous y fiez pas! Il y a une petite touche de folk rock dans les deux premières plages. Juste une goutte d’eau dans l'ouzo. Suit un son plein aux guitares saturées soutenant un chant envoûtant quasi incantatoire. L’enchaînement est hypnotique, serti d’une mélodie simple, de riffs ponctuels assassins et d’une batterie y étroitement mariée. De cette conjonction naissent des envolées de guitare nappées d’effets «reverb» bien à propos. «Part V» a toute cette énergie qui nous entraîne dans une spirale ascendante vers les hauts sommets de l’Olympe, marqué par des percussions dessinées comme des marches vers l’infini. Tout simplement grandiose. La six cordes vous achève aux portes du domaine des dieux. Un track hallucinant de près de 10 minutes. Mais le voyage continue avec «Dance of Night» aux parfums mélodiques grecs bien dosés. Un mariage improbable entre un rock soutenu et les fragrances du pays de Zeus. Ça tue! «Millenium blues», ensuite, n’a de blues que le nom. Le solo de guitare est carrément ravageur, porté une fois de plus par une rythmique d’enfer. Du survitaminé d’une efficacité du diable et qui dépote un max. À aucun moment l’album de Villagers of Ioannina City ne baissera la garde! «Cosmic Soul» poursuit la route et nous fait grimper les derniers échelons vers les étoiles au son de guitares atomiques et d’une section rythmique époustouflante. Leur premier opus, «Riza», était déjà dans le ton avec en sus une clarinette bien plus présente qu’ici. Ces deux perles confirment que nous avons là un quintet qui marie les styles avec brio.
Clavius Reticulus
3,5/5

https://vicband.bandcamp.com

https://www.youtube.com/watch?v=Cr7u-F3Uuyw&fbclid=IwAR2RmdjuTtrFCBnj1l1pfB9_H9q8TCQitYlkNB6k3HFXnrrd0PxZ6IKr238

26/12/2019

October Equus
Presagios
avant-prog/RIO – 41’36 – Espagne ‘19
Le dernier October Equus est sorti et qu’on se le dise, nous sommes ici en présence d’une galette qui vous permettra de passer d’excellentes fêtes dans la meilleure compagnie. Le groupe espagnol continue ici sa trajectoire passionnante avec son septième album.
Le style est clairement défini: avant-prog avec de solides relents de RIO, nimbés selon les compositions d’un zeste de jazz fusion, comme dans «Igneo» par exemple. Nous y découvrons également une veine de rock de chambre, superbe… Si ce genre vous agrée, vous êtes partis pour 41 minutes de pur bonheur. Il n’y a absolument rien à jeter.
Les compositions sont divisées entre la main de Ángel Ontalva et de la flûtiste Yolanda Alba Rodriguez. Œuvres subtiles, tout en nuances, où l’on se prend à rêver, à voyager au travers de nos paysages intérieurs. Cela nous évoque les albums de French T.V., Kotebel ou Finnegans Wake ou encore de Yugen.
Depuis quelques années, Ángel, qui est également le producteur du groupe, l’ingénieur du son ainsi que le responsable pour la mastérisation, passe son temps en Russie et il semblerait qu’il réside entre l’Espagne et Moscou…
Nous publions dans la foulée une interview de Ángel, où il nous parlera de son superbe dernier opus avec October Equus.
Bonne écoute…!
Lucius Venturini
4,5/5

https://octoberxart.bandcamp.com/album/presagios-official-cd

https://www.youtube.com/watch?v=5yE2uzqaz2A&fbclid=IwAR3iOFpJQIHoOXvH185Q2XFWhE-zbc80m1nGWV5F_9x2VFdQkjtUr8IXfqo

27/12/2019

Poulpie
Multidimensional Love (Remastered)
rock progressif divers – 42’29 – France ‘19
Poulpie, très jeune musicien, 18 ans, a commencé le piano dès l’âge de 6 ans, et a récemment entamé une première année en musicologie. Depuis quelque temps il s’acharne seul à produire et interpréter une musique matérialisant un rêve dont il aimerait ne pas être le seul à jouir. Mais l’hermétisme médiatique engendre bien des destinées funestes pour les créations de bon nombre de musiciens à travers le monde. Des rêves à partager mais confinés dans un carcan pouvant altérer jusqu’à leur existence.
Sur sa page Facebook le musicien dit: «Osez rêver, donnez-vous une chance. Chacun a la force en soi d’accomplir tous ses rêves, il suffit de persévérer, d’y croire, et de se relever après, et surtout ne jamais abandonner (…)». Profession de foi qui croisera le chemin de Prog censor et qui permettra, peut-être, à ce jeune musicien prometteur d’exister grâce à vous.
Poulpie, fan notamment de Pink Floyd, du vieux prog et de Rachmaninov, compte déjà plusieurs créations à son actif (111 compositions publiées officiellement). «Multidimensional Love (Remastered)» est l’album qui fait l’objet de cette critique mais sachez que le musicien vient de publier «Symphony of Modern Love», une pièce expérimentale et orchestrale postmoderniste.
Musique progressive alternant entre inspirations passées et constructions parfois plus actuelles, ce «Multidimensional Love» est un album essentiellement instrumental. Comme maître à penser un piano, parfois triste, seul ou en support rythmique, des synthés symphoniques et occasionnellement néo-prog en gage d'opulence orchestrale, une guitare en fer de lance mélodique, et des rythmiques basse/batterie lourdes et cadencées dont les structures rappellent parfois celles du metal-prog ou du black-metal («Lonely Spirit Space Ascension Rock»). Divers tableaux où mélancolie introspective («Onirism», «Visionnary Requiem of the Heartbreaking Love») et pièces puissantes se côtoient, s’aèrent, interpellent: «Le but de ma musique c’est de montrer que les émotions sont fortes, et qu’il n’y a pas de honte à les ressentir.»
En effet cet album est une éponge, un concentré d’émotion. Perfectible mais sincère, il est de ces créations qu’il faut encourager. Alors c’est à vous maintenant, chers lecteurs, de jouer votre rôle.
Centurion
3/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=ANQdpXjlljY&list=PLKZ_Dd_8CrzMWFFKy9F8hBqLFPAjPtFou&fbclid=IwAR0Zxm_EA2utHEmkPsZ3rPAw3sWYwxPqcTs0hhTaxPAiK4g8WSFBxHzCjyk

28/12/2019

Dolorosa
Hordhen
dark atmosphérique – 51’48 – France ‘19
2e album «physique» pour Dolorosa (2 autres sont uniquement numériques). Peu d’infos sur ces Parisiens pas du tout inspirés par leur ville, si ce n’est par le Père-Lachaise (d’où provient peut-être l’image d’en-tête sur leur bandcamp), pour leur côté gothique.
Toutes les paroles (chantées dans une langue inventée aux consonances germaniques) et musiques sont de Vinz Dolorosa qui s’attache aussi à la guitare, à la basse, aux percussions et à la voix (d’outre-tombe, comme sur «Horden II»). Les arrangements, ainsi que saxophones, EWI (Electronic Wind Instrument) et clarinettes sont de Daniel Palomo Vinuesa (qui participe aussi à Missing Waves et dont l’album «Post-Crash» a été chroniqué par Auguste sur votre page Facebook favorite!).
Pour ma part, la plus belle ballade se trouve sur «Horden III» où le chant et le son mélodieux du saxo sont accompagnés par la voix de Marie-Catherine Mossé qui me rappelle les Heavenly voices du label français Prikosnovénie. Au fur et à mesure que l’on avance dans cet album, il me semble que l’atmosphère angoissante du début s’adoucit, déjà sur «Hordhen VI» où la voix éthérée de Marie-Catherine nous rassure: le chant céleste a-t-il fait fuir les démons? Le rythme de la guitare nous surprend sur «Horden VII» et on termine tout en légèreté par «Hordhen VIII»: il n’y a plus d’inquiétude à avoir, les voix des anges sont là pour nous apaiser… ou pour nous hypnotiser?
La Louve
3/5

https://dolorosa.bandcamp.com/album/hordhen

https://www.youtube.com/watch?v=FUDbK-FgT2U&fbclid=IwAR0wIKUtVfoj5of03-b8qv0qK09eHvfNxYhMS3aurjmID1YUb8NJZi3u4xc

https://www.youtube.com/watch?v=PA3plnF2ySE&fbclid=IwAR2XFfQ-NaREO_Kha6pwsoBUs2gYHTvoaxIcqXeXE8yKddr8-YVsHqvQrGU

29/12/2019

Milk For The Angry
Extraterrestrial Desert
psychédélique garage – 42’29 – États-Unis ’19
Dans une veine garage US, aimablement brouillonne et plutôt ordinaire quoique correctement torchée, le trio de San Francisco propose dix chansons au format serré sur un nouvel et deuxième album, édité en format digital ou CD, mais aussi en cassette, de différentes couleurs: rose, mauve, brune ou… écume de mer. Né en 2017 des œuvres du songwriter et guitariste Dana Lindström, Milk for the Angry prend sa vraie carrure lorsque Dana fait tope-là avec Cole Bailey (batterie), Kyle Stringer (basse) et Jackson Langford (guitare - au statut plutôt… intérimaire dans le groupe), passant du même coup du studio à la scène - celle de la baie de ‘Frisco. Le tout pulse une énergie juvénile («The Wall» ou «My Sugar»), se cale facilement sur le bout de la langue («Going Underground» ou «Aluminum Radio Flyer»), mais souffre d’uniformité («Eyes On Polaris») et dénote parfois un coup de mou - «Make Waves» trouverait naturellement sa place au bal du samedi soir.
Auguste
2/5

https://milkfortheangry.bandcamp.com/album/extraterrestrial-desert-album

https://www.youtube.com/watch?v=1ATzjsM00kI&fbclid=IwAR2srszYhUDm70saNW-GnDPf7luLxTavubs_kuGTbulcA76nrHej7AE6Va8

30/12/2019

Lost World Band
Spheres Aligned
crossover prog – 46'49 – Russie '19
Si l’on excepte leurs premières productions sorties en nombre limité, «Spheres Aligned» est présenté comme le septième album studio de Lost World Band.
Le groupe russe est formé en 1990 par 3 musiciens et amis de conservatoire. Autour des 2 membres d’origine restants, au look d’adolescents, que sont Andy Didorenko (violon, guitares, voix & compos) et Vassili Soloviev (flûte), on retrouve Yuliya Basis (claviers), Evgeny Kuznetsov (basse), et Konstantin Shtirlitz (batterie). Vu la formation classique des protagonistes et l’ancienneté du groupe, on s’attend à entendre une musique mature de haut niveau technique.
En effet, on démarre sur les chapeaux de roues avec «Aligned», un instrumental décoiffant mené tambour battant par un violon qui frôle parfois l’excès de vitesse. La section rythmique, la flûte et les claviers ne sont pas en reste et se donnent la réplique; on relève çà et là quelques influences (Kansas et UK pour le violon mais aussi pour certains sons de claviers, la flûte, elle, évolue dans un registre souvent proche de Focus). On sent d’emblée les fortes racines classiques mêlées à une bonne culture anglo-saxonne (une touche de King Crimson qui revient souvent). Mais toutes ces références ne sont jamais envahissantes et ne sont qu’une partie de l’ADN d’une musique très personnelle.
Une excellente entrée en matière donc, et qui donne envie d’en entendre plus avec «Rockfall», un nouvel instrumental du même acabit bien mis en valeur par des synthés très expressifs. Après ces 2 titres bien enlevés, «Dawn Day Dusk Night» calme le jeu avec piano et violons aériens sur des harmonies vocales, puis arrive le chant (en anglais) avant une accélération finale. Tout est condensé en 3 min 40, un thème n’est jamais utilisé pour délayer le propos et atteindre une durée progressive "standard".
Les pistes s’enchaînent intelligemment, bien équilibrées entre énergie et apaisement, comme sur «Aise», bref solo de piano qui introduit «Sail Away», une chanson très calme soutenue par la flûte qui montre une voix fragile et un peu faible entrecoupée de belles interventions de guitare.
Les 2 derniers morceaux présentent une facette légèrement plus sombre. D’abord «Pressured», instrumental captivant qui repose sur un fond de guitares lourdes et de synthés, puis «I Am The World» et ses presque 9 minutes, qui démarre lentement avec 3 minutes chantées avant que ne déferlent les cassures de rythmes et les accélérations, les guitares répondent aux claviers jusqu’au final avec le retour du refrain pour le titre le plus progressif de l’album.
Superbe! On ressort de l’écoute d’un tel disque le cœur léger et reconnaissant.
Ceux qui aiment la dominante instrumentale moderne tout en reposant sur les valeurs sûres de l’âge d’or du prog auront sans nul doute envie de se pencher sur la discographie de ce groupe et sur cet album d’une grande richesse, qui se révèle un peu plus au fil des écoutes.
Titus
4/5

https://lostworldband.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=7tDrqcECjcE&fbclid=IwAR1sAIivdLhC-CF-12S87lV1JnU3Tdnb1Ux47OuUOhsCjss6GaGYILZbGnk

31/12/2019

The Onirist
Seventh Son
rock atmosphérique/rock progressif – 58’07 – France ‘19
«Seventh Son» est le premier album de ce groupe français prometteur The Onirist. Attention, rien à voir avec «Seventh Son of a Seventh Son» de Iron Maiden. Il s’agit d’un concept album où on raconte l’histoire d’un jeune homme orphelin, seul au monde, dont on suit les péripéties de la vie. Le style de l’album est principalement du rock atmosphérique accompagné de poussées de rock progressif, notamment grâce à l’apport des guitares d’Evan Chauvigné et d’Alexis Mankowski. Dans pratiquement chaque titre on retrouve des soli très floydiens, particulièrement dans «Into the dream». Dommage que le reste ne suive pas pour permettre des envolées plus techniques et plus recherchées. «Everything Has An End» sort un peu du lot avec une construction plus longue, mais cela reste assez basique. L’accroche de l’auditeur est directe, pas besoin de plusieurs écoutes pour s’imprégner des émotions. On y reconnaît beaucoup d’arrangements, de rythmiques, de constructions venant des entrailles du grand Pink Floyd dans sa partie moins psychédélique comme celle de «The Wall». Un bémol pour moi au niveau du chant: on est souvent à la limite de la justesse et trop souvent sur le même timbre. En résumé, un bon premier album pour The Onirist, même si pour la suite ils devront creuser un peu plus leur imagination pour avoir plus de consistance. Il faudra surveiller leur évolution…
Vespasien
2,5/5

https://theonirist.bandcamp.com/album/seventh-son

https://www.youtube.com/watch?v=oHOY3RJfijk&list=PLbPlojBOeiF_U4ZGAw6yxCfbezX9r8yPO&fbclid=IwAR0lKFtkcSv8uC2Ulg0P8Q8AYhSZcyr2_B8uPUFe_SBCv4qLDoGfRM_ebHY