Juin 2019
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- 09/06/2019 : Rock Progressio Italiano
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- Zuffanti
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- Buke And Gase
- 30/06/2019
01/06/2019
Metaphor
The Pearl
prog symphonique – 61’51 – USA ‘19
Metaphor, originaire de San Jose en Californie, s’est d’abord fait connaître comme groupe hommage à Genesis. Depuis la sortie de son premier album «Starfooted» en 2000, il nous propose du matériel original préservant son inspiration de base. Douze ans après la sortie de son troisième album, «The Sparrow» - transposant en musique le magnifique roman de science-fiction éponyme de Mary Doria Russell -, Metaphor revient en force avec un nouvel album concept, cette fois inspiré par un ouvrage apocryphe du dixième siècle. Il s’agit du «Chant de la perle», un poème d’une centaine de lignes relatant les tribulations d’un jeune prince chargé par son père de récupérer en Égypte une perle unique gardée par un serpent géant. La structure de l’album reste assez fidèle au texte d’origine et les paroles y empruntent plusieurs de ses figures de style. Les arrangements musicaux sont d’une grande richesse, proposant de nombreux changements de signature rythmique, même à l’intérieur d’une même pièce. Les claviers sont particulièrement versatiles. Sélectionnés pour rehausser l’expressivité des différentes étapes de la quête du prince, piano, orgue et synthétiseurs viennent ponctuer le jeu sensible et intelligent de Marc Spooner. Un bon exemple se retrouve dans la pièce «The Mist of Forgetting» où l’engourdissement du héros trouve écho dans les accords plaqués de l’orgue et la litanie de la guitare. Musicalement ça reste très près du vieux Genesis mais ça lorgne très souvent dans le Gentle Giant bonne période, autant par l’instrumentation que dans l’utilisation fréquente de phrasés syncopés. Au final, «The Pearl» est à ranger parmi les œuvres qui donnent à l’album concept ses lettres de noblesse.
Ugo Capeto
https://metaphorprog.bandcamp.com/releases
https://youtu.be/T_NHZ4GjlqA?fbclid=IwAR18Q1m5fsMzFTAwSAPyHr-iTb4XZ7jlKVhig69uCyOwCVwHh4DCVkuVrnw
02/06/2019
Fervent Mind
Tranquilize
prog-rock/trip-hop/post-rock – 51’39 – Norvège ‘19
Le rock progressif c’est une école, une tradition, une chapelle, un microcosme, et parfois dans ce carcan hermétique il est difficile d’innover. Il faut alors parfois attendre que la créativité vienne d’ailleurs, d’autres courants musicaux. C’est encore le cas ici, avec cette formation norvégienne fondée par la chanteuse Live Sollid. Pratiquement inconnue, (elle chante néanmoins sur 2 titres de l’album «Vokal» de Elin Rosseland), elle fonde Fervent Mind en 2014.
Entourée de musiciens venant de la scène jazz, le claviériste Martin Sandvik Gjerde (John Faxe, Isa, NilasaliN, Little Balcony) le batteur Henrik Håland (John Faxe, Bangkok Lingo), et d’autres venant davantage du prog et du métal: Simen Skrebergene et le bassiste Martin Skrebergene (son frère?), connu pour avoir fréquenté Formloff et surtout Leprous de 2013 à 2015, l’univers de Live Sollid est pétri de sources diverses.
Tout le long de l’album ces influences se succèdent et se fondent. L’album débute par des volutes de voix superposées afin d’introduire «Torid». On songe directement au célèbre «Angel» de Massive Attack. Évolution et rythmique similaires, et déjà quelques touches jazzy; ébouriffant! La suite avec les premières inflexions prog sur «Fervent», accents qui flirtent pourtant avec une ligne trip-hop évidente. La fusion de genres improbables? Pas vraiment! C’est effectivement un mariage qu’avaient déjà tenté des groupes comme Hooverphonic et son remarquable «The President Of The LSD Golf Club» ou Archive sur «Take My Head» et «You All Look The Same To Me». L’album se poursuit sur une pop atmosphérique mélancolique s’équilibrant sur les rives de divers courants. Il faut attendre «All Sounds Muted» pour renouer avec l’exceptionnel. Là encore on pense à Archive, à Massive Attack et rajoutons, (sinon ça va gueuler dans la chapelle), à Steven Wilson. Peut-être le meilleur titre de l’album avec ce phrasé mélodique entêtant, cette rythmique carrée, cette mélodie maladive et cette exceptionnelle montée en puissance. Autres titres remarquables «Disappearing Into the Masses part 1 & 2». D’abord de la trip-hop plaisante à la Hooverphonic, Hummingbird ou Blue States, et puis une seconde phase carrément prog (Steven Wilson) où le groupe part aussi dans des expérimentations suaves, jazzy (piano électrique, orgue Hammond) et juste maîtrisées comme il faut.
On termine en trip-hop/pop/prog avec un dernier titre («Strain») en incursion finale dans le post-rock; la mandoline, les spécialistes comprendront…
J’aurais dû mettre un 5/5 à ce «Tranquilize» mais leur potentiel est énorme et leur gamme très riche, alors je me réserve pour le second album qui sera, j’en suis sûr, encore meilleur!
Centurion
https://ferventmind.bandcamp.com/album/tranquilize
03/06/2019
Jordan Rudess
Wired for Madness
metal-progressif – 60’04 – États-Unis ‘19
En même temps ou presque que Dream Theater, Jordan Rudess nous offre son énième album, le 16e pour être précis. Ce stakhanoviste du clavier tempéré (lol) et de la production prog metal ne nous laisse pas une année de répit ou presque (bis)! C’est un véritable album solo rock cette fois, après quelques égarements (reprises/classique), le premier ainsi torché depuis «Rhythm of time» en 2004. Pour son retour, Rudess a invité les vieux copains du Dream, James Labrie, John Petrucci, Marco Minnemann, mais aussi Rod Morgenstein, Vinnie Moore, Joe Bonamassa et Guthrie Govan, bref une sacrée brochette de talentueux musicos qu’on ne présente plus.
Le claviériste du Dream Theater s’est aussi renouvelé puisqu’on trouve notamment une compo blues avec section de cuivres au grand complet pour «Just can’t win». Notre homme, de son propre aveu, nous a dit être entré dans un univers alternatif. De fait, l’autoproclamé «Keyboard Wizard» sait nous faire de l’attendrissant limite commercial (à l’américaine donc excellent), avec des titres comme «Just for today» (un peu S. Wilson sur les bords) ou «Off the ground» (blackfieldien celui-ci) aux mélodies savoureuses, parsemées d’inspirations guitaristiques dignes des grands maîtres s’y baladant, les doigts alertes. Mais aussi un «Drop twist» qui nous rappelle que Rudess est aussi un membre émérite de Liquid Tension Experiment! Plus à l’aise quand il s’agit de reconquérir des territoires proches de la folie d’un K. Emerson (R.I.P.)…
Bien sûr, que les «vieux» fans restent cool, nous n’échappons pas aux longues suites metal prog qui ont fait la renommée du divin chauve, le terme restant réducteur cependant face à un tel talent. Le titre phare «Wired for Madness», divisé en deux parties de 11’49 et 22’40 (ah oui, quand même!), fait la part belle au style avec force virtuosité, sans omettre des parties électro, un peu de jazz, de swing même! Autant vous dire que là, ça dépote, mais en conservant des espaces de respiration si chers aux fans de rock prog travaillé dont ce nouvel album peut se revendiquer malgré les approches grand public voulues (?). Toutes les extravagances entendues dans cet album sont volontaires et aucun musicien n’a été maltraité!
Commode
Album non disponible sur bandcamp
https://youtu.be/G317UGGft4A?fbclid=IwAR1wHjHMF26oHn09Ms3p6qD4SiS0ALZHXQ3Wp96mdUU2OdcsfPYMhFJLEn8
04/06/2019
Panzerpappa
Summarisk Suite
canterbury/RIO/rock de chambre – 42’02 – Norvège ‘19
Pour son neuvième CD, le groupe norvégien Panzerpappa nous délivre une suite intitulée «Summarisk». Les compositions sont équilibrées avec changements de rythme, moments où le saxophone entre en action, mélodies qui peuvent rappeler le groupe belge Aranis, dans un style plus rock. Le tout flirte agréablement avec quelques influences RIO ou de progressif de chambre, sans toutefois sortir d’une structure d’ensemble classique avec les instruments de bases traditionnels du genre prog.
Une note intéressante est l’accent mis sur les mélodies, surtout présentées par les dialogues saxophone/claviers, évoquant tour à tour des moments de tension plus grands ou des accalmies plus méditatives, comme dans l’intéressant «Belgerisk Improv», deuxième partie de la suite et qui semble indiquer qu’il s’agit d’une improvisation.
Comme on avance dans l’écoute, on arrive au très beau «Revidert Malist», avec son introduction de mallets et ses harmonies à l’accordéon. Ambiance méditative qui n’est pas sans évoquer certains de leurs voisins danois mais sans les harmonies vocales.
La suite, entièrement instrumentale, se termine sur un morceau plus résolu dans sa veine RIO, «Seriell Ballade», laissant un caractère méditatif à la sortie de cet album contrasté et intéressant.
Recommandé pour qui aime un prog bien construit, varié, avec quelques tensions dissonantes et de solides mélodies.
Lucius Venturini
https://panzerpappa.bandcamp.com/
05/06/2019
Bjorn Riis
A Storm is Coming
prog-rock floydien – 51’00 – Norvège ‘19
21e siècle. Malgré moult imprudentes sorties de route, le prog s’en sort. (Rires homériques.) Notamment grâce au tendre coussin gonflable norvégien placé récemment à l’intérieur de son vieil habitacle.
En 2009, l’album «Indentity» m'enthousiasme. L’œil bleu d’Airbag entre donc mirer le reste de ma discothèque sans trop de difficultés. Chemin faisant, j’omets de prendre des nouvelles de ces vaillants scandinaves. Scandaleux, me direz-vous, et à moi d’ajouter que comme je n’ai que peu de mémoire des noms... me voilà convaincu d’avoir à chroniquer l’éclatante reconversion d’un vieux briscard du cyclisme lorsqu’on me met ce disque de Bjorn Riis sous le nez. Le Dux Bellorum me signale froidement la variante orthographique.
Finirai-je un jour aux lions?
Être prudent, je m'imprègne préalablement du parfum des œuvres passées afin de vous livrer au mieux mon sentiment. Parcourant ce dédale de tempérance, apparaissent quelques palilalies dont résonne le ramage du volatile, quelques mots doux qui donnent ses couleurs à l’oiseau. Mais suivons le fil…
J’entame l’écoute de cette 4e création du chanteur-guitariste, pressentant pour l’occasion une chute significative de la pression atmosphérique.
«When Rain Falls», une drache nordique couronnée par un arc-en-ciel floydien, parfaite mise en bouche avant de valser cire et plumes. «Icarus» choit avec style, laissant ensuite le sublime «You and Me» m'emporter à travers ses courants émotionnels ascendants.
«Stormwach», dans sa 1re partie, m’évoque les effluves d’un Cherry Ghost. Le vent n’est encore qu’un murmure sifflant au travers des méandres du labyrinthe. Je m’assieds un peu puis sombre aussi sec sur le martèlement léger d’un Wurly panoramique lorsque, soudain, je me prends à revers la gifle glacée d’un riff tempétueux… Surprenant!
Enfin, mes espoirs d’Ariane s’effacent au détour d’un avant-dernier titre «This House» un peu court en bouche. L’on termine la quête avec les vapeurs angéliques d’un magnifique épilogue.
Un opus inscrit dans la continuité. D’amples espaces pavés de thèmes parfois répétitifs, que d’aucuns pourraient négligemment considérer comme du remplissage alors que ceux-ci transforment graduellement votre état d’esprit. Une sorte d’attente tantôt angoissante, tantôt mélancolique, qui se solde cependant souvent par une envolée salvatrice sauvagement contrôlée. Vaste univers, véritable vision d’artiste expirée naturellement. L'échappée belle!
Néron
https://bjornriis.bandcamp.com/
https://youtu.be/pNolawWyMjQ?fbclid=IwAR2Rrg1VcX8pJdcwha-BKf3rI8BZZjf9HUHHNis3a9GUUUAmor-nhUhCSFw
06/06/2019
Jelly Fiche
Comme au dernier jour
prog-rock – 42’28 – Québec ‘19
En 2012, alors que Jelly Fiche est encore en tournée à faire la promotion de son deuxième album, Éric Plante contacte le groupe et lui propose de se réunir afin de réaliser un troisième opus. Éric, un des trois membres fondateurs de la formation québécoise, s’était envolé vers Las Vegas pour bosser sur un spectacle du Cirque du Soleil. C’est sans lui que Syd Bédard (basse et chant) et Jean-François Arsenault (guitares) avaient terminé l’enregistrement de «Symbiose» et réalisé une tournée pour supporter leur dernière œuvre. Trop heureux de ces retrouvailles, les trois compères s’attellent à la tâche. Les pièces du nouvel album sont composées, principalement par Syd, sur des textes de lui-même et de sa complice Andrée Belle-Isle. Éric étant retenu par ses activités à Las Vegas, l’enregistrement se fera à distance; guitares, basse et voix à Montréal, tout le reste à Sin City. La batterie est assurée par Jean Ainsley, un autre transfuge du Québec pratiquant son art dans la ville des casinos. Alors que les séances de mixage débutent, Jelly Fiche a un doute; craignant avoir dilué l’art du groupe avec une écriture plus pop et ne voulant pas décevoir ses fans férus de prog, il décide de mettre le projet sur la glace! À la fin 2018, Éric apprend le décès de Jean Ainsley, emporté par le cancer. En guise d’hommage à cet ancien collaborateur, il entreprend de mixer trois des pièces du projet abandonné pour les offrir à la famille du défunt. Emballés par le résultat, Syd et Jean-François demandent au claviériste de mixer le reste des pièces. Cinq ans après son enregistrement, «Comme au dernier jour» va finalement trouver son public. Et l’attente en valait la peine. L’album est un petit bijou de concision et de retenue; tout le talent de Jelly Fiche dans un écrin mettant en valeur des textes plus pertinents qu’au moment de leur écriture ainsi que des arrangements justes, efficaces et bourrés d’émotion. Tout ce qu’on aime de cette formation phare du prog québécois est bien présent: les inflexions particulières de la voix, la versatilité d’une guitare dont la palette englobe l’ensemble des textures des années 60 à nos jours, et ce petit accent jazz toujours en filigrane. L’impression d’ensemble en est une de sérénité, autant musicalement que dans les concepts abordés. En passant d’une pièce à l’autre, on dénote, malgré une variété de styles assez impressionnante, une unité organique évidente. Les thèmes se répondent; l’idée de renaissance évoquée dans «Comme au dernier jour» trouve écho dans l’image du phénix proposée dans «Je recommence à zéro». Le phénix devient pigeon dans «Pigeon de ruelle» - incursion improbable dans l’univers rockabilly - puis le gris de la ruelle bascule dans la new-wave des 80’s et s’étend dans «Dans le gris des avenues» où la nature tente de reprendre sa place. La voie est ouverte pour laisser libre cours à «Eau bleue», pièce qui avait à l’origine paru au profit de la Fondation David Suzuki. La nature devient ensuite le théâtre des conflits humains dans le superbe «Le 28 avril», magnifique morceau soulignant le 259e anniversaire de la bataille de Ste-Foy. La pièce suivante, «Marilyne», voit Jelly Fiche verser dans le folk avec ce portrait d’une adolescente aux prises avec ses démons intérieurs. L’album se termine en beauté sur la longue instrumentale «Fenêtre ouverte», morceau synthèse, résumant en quelque sorte l’ensemble de l’œuvre du groupe, parvenant au grandiose tout en faisant preuve d’une grande économie de moyens. La boucle est bouclée…
Ugo Capeto
https://jellyfiche.bandcamp.com/
07/06/2019
Aria Primitiva
Sleep No More
electro-symphonic/art-rock – 53’31 – France ’19
On attendait ce premier album avec une avidité grandissante, excités par la toute première prestation publique du nouveau projet de l’ex-Art Zoyd devant l’audience médusée du festival Les Intemporelles. Le trio est atypique: violoncelle électrique, basse, samplers et voix (Thierry Zaboitzeff), claviers et samplers (Cécile Thevenot), ondes Martenot et clavier (Nadia Ratsimandresy). Le trio est choc: des cultures (classique, rock), des styles (avant-garde, expérimental), des sonorités (électronique, tribale), des écritures (précise, improvisée). Le trio est énergie: hypnotique, inquiétante, puissante. Il amalgame deux générations, qui ont en commun le goût de l’aventure sonore et quelque chose à dire au bout de leurs doigts. L’album intègre les trois éclatants titres annonciateurs de l'EP «Work in Progress», remixés au coup de poing un brin plus acéré - «Maïdaykali» y gagne d’ailleurs une minute. «Endayi Endesi» donne le ton d’entrée de jeu: étrangeté aérienne des ondes Martenot, claques brutales de la basse, rythmes motoriques et claniques de la non-batterie, voix de gorge ou de catacombes, additifs concrets (rire, aboiement). Improvisés et live, «Hystamack» et «Kletka» élargissent l’espace nécessaire à l’album pour s’épanouir encore un peu plus, quand «Nixen» renouvelle l’oxygène pour la déclamation d’amour aux héros de Bowie («Helden»). Variation parmi les variations («… pour une porte et un soupir»?), «Mais ouvrez donc cette porte!» referme d’une époustouflante manière celle d’un album insolite et fertile.
Auguste
Album non disponible sur bandcamp
08/06/2019
Afterhand
Escaping Misfortune
prog-rock heavy – 60,53 – États-Unis ‘19
Originaire de Salt Lake City, Utha, États-Unis, Afterhand nous propose ici son tout premier album. D'emblée ce qui me frappe c'est l'excellente production de celui-ci et la qualité des musiciens de ce quatuor. Qui dit premier album dit quelques maladresses. Elles ne sont pas bien graves. Le groupe, qui visiblement a bien galéré pour enregistrer cette rondelle, a tendance à s'éparpiller, aborder tous les styles, quitte à perturber l'auditeur. Bien que prog-rock dans l'ensemble, il est évident que les musiciens ont des accointances avec le métal: riffs saccadés et utilisation de la double grosse caisse typique aux métalleux. Tout au long des 10 morceaux, cette particularité est frappante, n'hésitant pas à dérouter l'auditeur dans un même morceau, en confrontant les styles dans leurs aspects les plus extrêmes, comme dans la plage la plus longue «You Carry Them With you» (12'29) qui commence par un tapis de synthés typique prog space rock (rythmes prog, riffs metal à la Dream Theater), puis, au bout de 2 minutes, pour quelques poignées de secondes, un chant extrême digne des meilleures formations du genre, pour ensuite en revenir à du pur prog... Tout l'album est bâti sur le même schéma. Courageux car l'un ou l'autre aspects peuvent décourager les moins curieux ou les plus intégristes de la sphère progressive. Et ce serait dommage, car il y a là un réel potentiel. Gageons qu'à force de concerts et de travail ils affineront leur style. Une bonne surprise donc. N'hésitez pas à prêter une oreille attentive à cet album dont j'attends déjà la suite avec impatience.
Tiro
https://soundcloud.com/search…
09/06/2019 : Rock Progressio Italiano
Watchers of the Trees
Fireflies in the Wood
prog-rock contemplatif – 67’37 – Italie ‘17
Il y avait «Watcher of the skies» de qui vous savez, il y aura maintenant «Watcher of the trees»! Actif depuis 1986 avec le groupe de garage Electric Shields puis avec les Moonshiners, qui ont plutôt proposé un répertoire de chansons à la réverbération irlandaise traditionnelle, Dario Marconcini, aux multiples facettes, choisit de modifier à nouveau toutes les cartes. En fait, cette fois-ci, il apparaît en solo derrière le surnom «Watcher of the Trees», assisté d'un groupe d'amis, sur un album de rock alternatif offrant un agréable interlude orchestral.
Pour "baptiser" son alter-ego discographique, Marconcini s'est installé comme un ermite dans sa maison de montagne, appréciant ainsi la compagnie du monde naturel, au milieu de silences mélodieux et de visions vertes. La beauté séculaire des bois offre de nouvelles idées pour la méditation, à tel point qu'il décide de dédier un album concept aux arbres. «Fireflies in the wood» est donc divisé en douze pistes et quatre segments bien définis qui évoquent le cycle des saisons, mais également les phases de la vie d'une personne: enfance, jeunesse, maturité et vieillesse. Pour rendre le travail plus complet, Marconcini propose, dans le livret du CD, la traduction de tous les textes et un dernier conte de fées intitulé «L'arbre et l'étoile».
Au début, nous trouvons l’aube, n’importe quel jour du printemps, le chant des grillons qui ouvre «Trees of light at dawn» est lentement remplacé par une section orchestrale évocatrice qui nous conduit directement à la piste titre, la première chantée sur le disque. Et c'est la voix vraiment excitante de Marconcini, qui atteint un sommet sur le refrain suggestif. Si ici son passé chez les Moonshiners semble l'emporter, l'héritage du garage est plutôt présent comme un fantôme dans les rythmes soutenus de la deuxième partie de «Trees», bien qu’atténué par un gracieux solo de guitare électrique.
L'atmosphère se réchauffe et semble être un prélude au début de la saison estivale, qui commence sur le disque avec «Trees are blooming», une ballade semi acoustique qui se transforme en un crescendo intrigant, comme pour rappeler le moment de la floraison qui passe ensuite par «The beech and the birch» et «Standing still as stony trees» avec des sons de plus en plus aérés.
La section automne, formée par la triade «The shadows of the trees», «The tree with the spoon» et «Trees in november», présente par contre des thèmes plus introspectifs, sans toutefois dédaigner des digressions progressives. Les guitares semblent plutôt dominer les territoires hivernaux de la dernière section «The old man tree», «I remember the trees» et «Anthem to trees» qui se termine par une dernière prière devant les arbres nus, tout en ayant conscience de la "succession infinie de fois".
Commode
https://watcherofthetrees.bandcamp.com/releases
Zuffanti
In/Out
prog éclectique – 41’57 – Italie ‘19
Fabio Zuffanti n’est plus à présenter pour qui est au fait des petits maîtres du rock prog. Leader de Finisterre et participations pléthoriques avec Hostsonaten, La Maschera di Cera, Aries et j’en passe, il se fait le chantre du prog italien presque à lui seul. Il nous propose son sixième album sous son nom propre et une fois de plus, le compositeur génois nous gratifie d’un somptueux opus. Il a fait le ménage, ne gardant que le batteur Paolo Tixi (Hostsonaten), et surtout laissé la place au chanteur Fabio Cinti, une bien belle idée tant la voix du bonhomme est claire et musicale… Effacement judicieux. Je sais que la langue italienne chantée peut en rebuter certains sur la longueur mais il faut faire fi de cette latinité exacerbée pour savourer la musique de Zuffanti.
Son univers échappe aux clichés du genre et le musicien si prolixe, continue de s’échapper vers un prog non formaté en explorant d’autres échappatoires musicales, ceci bien aidé par des collaborations humaines qui renouvellent son propos. À la façon d’un Steve Wilson, Zuffanti semble s’éloigner des rivages prog pour mieux redessiner les contours du fleuve capricieux de son inspiration et ainsi créer sa propre musique progressiste… Synth wave, electro, prog classique, jazzy, mélange sulfureux digne du talent généralement attribué à l’Italien.
La voix suave de Cinti est, pour ce disque, la valeur ajoutée au sein d’un album de neuf titres au timing raisonnable (2’19 à 8’01). On se laissera surprendre cependant par le titre éponyme «In/Out» dont les accents synthétiques penchent furieusement vers Depeche Mode, avant de se reprendre pour revenir à de sages résolutions symphoniques, tandis que «In quieti» se déroule sur des synthés que n’aurait pas reniés Human League à ses débuts. C’est comme çà, Zuffanti avance dans sa nouvelle œuvre en nous surprenant, touillant allégrement mille saveurs en piochant dans la culture cold wave, tout en exaltant les saveurs usuelles du second pays du prog! Il est clair dorénavant après «In/Ou » que Zuffanti, au même titre que les Wilson, Morse et Lazuli dans des registres différents, peut être considéré lui aussi comme un défricheur de nos contrées progressives contemporaines.
Commode
https://zuffanti.bandcamp.com/album/in-out
https://youtu.be/Un0CeyI4Cag?fbclid=IwAR3gJHnzs2-ZwBRtNhz6ousA1J6wnzM75IZmXYa-EYCAvvdrBekJo7R7ees
Banco del mutuo soccorso
prog-rock – 69’00 – Italie ‘19
Début 2014, le chanteur de Banco, l’iconique Francesco Di Giacomo, trouve la mort dans un accident de voiture. Un an plus tard, Rodolf Maltese, guitariste extraordinaire du groupe depuis 1973, décède, terrassé par la maladie. Quelques mois plus tard, Vittorio Nocenzi, fondateur et leader du groupe, est saisi d’une hémorragie cérébrale. Plutôt que de mettre définitivement fin aux activités du groupe, cette suite de tragédies semble avoir ravivé la flamme de jadis. Banco del mutuo soccorso nous arrive en effet avec un nouvel album intitulé «Transiberiana». Transsibérien est un réseau de chemins de fer parcourant le vaste territoire russe et reliant Moscou à la ville portuaire de Vladivostok. C’est la route que Banco nous propose de suivre dans ce dix-huitième album studio, vingt-cinq ans après leur dernier opus («Il 13» en 1994)! Ce trajet sert de toile de fond à une autobiographie allégorique du groupe en onze titres constituant une véritable suite. Dès les premières notes, un ciel étoilé, le moteur du train qui se met en marche et on fonce dans la nuit. C’est parti pour 54 minutes d’exploration. On rencontre l’imprévu, on descend du train pour chercher de l’aide et on est attaqué par les loups. On s’attarde dans un champ de fraises et on croise un chamane avant d’affronter les rigueurs du goulag pour enfin rejoindre le littoral. Musicalement, les fans vont retrouver avec bonheur les caractéristiques propres au style de Banco: beaucoup de claviers - piano, orgue et synthétiseur à parts égales -, des riffs agressifs, de nombreuses envolées clavier/guitare, parfois en échanges, souvent à l’unisson. Ce nouvel opus tient très bien la route (ou les rails) et est à classer parmi les meilleurs de Banco. Sans nous faire oublier Di Giacomo, le nouveau chanteur Tony D’Alessio tire très bien son épingle du jeu, aussi bien dans les sections «hard» que dans les passages plus lyriques. Nocenzi est derrière la composition, épaulé par son fils Michelangelo aux musiques et Paolo Logli aux textes. L’album est complété par deux titres en concert, enregistrés en 2018 au Festival Prog di Veruno, les incontournables «Metamorfosi» et «Il ragno». Mi piacere moltissimo!
Ugo Capeto
Corporesano
Corporesano
prog-rock/néo-prog – 74’54 – Italie ‘19
Issu de l’écurie Mellow records, label italien qui contribua dès le début au renouveau italien du rock progressif, le groupe Corporesano s’inscrit dans la tradition italienne des groupes progressifs mélodiques, symphoniques et néo-progressifs avec chant en italien. Les influences sont à chercher du côté des Le Orme, Locanda Delle Fate ou de certains projets de Zuffanti. Un premier album prometteur mais qui souffle néanmoins le chaud et le froid. Le titre d’ouverture, «Alle Porte di Zion», est une totale réussite. Un sens mélodique et symphonique d’une grande profondeur, d’une extrême efficacité, qui a la mérite de lancer l’album sur d’excellentes bases. Mais au fil du temps, et l’album est long, cette impression s’étiole au gré de quelques approximations, quelques maladresses. Un peu comme si le groupe avait manqué de quelques heures de studio pour peaufiner à sa guise certaines de ses compositions. Question de mixage, de post-production, d’ingé-son? Je n'en sais rien, mais transpire parfois de certains passages une impression de bâclage, (d’amateurisme), d’un manque d’équilibre dans la cohésion des instruments. L’arrangement des voix sur «Statim Vivus Fierem» ou la ligne de basse sur «Lo spirito della montagna» par exemple, sont pour le moins perfectibles, et en général, la batterie ne se glisse pas parfaitement dans l’ensemble, un peu comme si elle était à l’écart. Marco Dolfini, le batteur, n’est pourtant pas un débutant, il vient de Moogg, un groupe de prog canterburien qui, en 2011, a sorti un plutôt bon «Le Ore, I Giorni, Gli Anni».
Tous ces petits détails, qui énervent, gâchent un peu le plaisir, donnent une impression mitigée. On sent que tout est là mais que ce n’est pas correctement exploité, pas aiguillé avec suffisamment de maestria. Bien dommage car ce Corporesano a tout pour séduire, les moments vraiment réussis, souvent les plus symphoniques, (le claviériste Lorenzo Ussoli y contribue grandement), témoignent de l’énorme potentiel de cette formation. C’est sans doute grâce à cette aura qui plane au-dessus de cette formation, que, malgré mes critiques, je peux conseiller cet album aux férus du prog italien, tout en espérant qu’à l’avenir le groupe arrive à gommer les imperfections pour nous proposer le grand album qu’il a la capacité de nous offrir. À suivre de près…
Centurion
https://mellowlabelproductions.bandcamp.com/alb…/corporesano
Celeste
Il risveglio del principe
prog-rock – 50’56 – Italie ‘19
Plus de 40 ans après son premier album, des forces telluriques ont semble-t-il réveillé ce groupe légendaire de la scène progressive italienne. Celeste, qui dormait donc du sommeil des justes après avoir produit un seul petit album, est sorti de son immaculé sarcophage harnaché d’os un peu rongés par le temps mais revigorés à l’idée de reprendre du service. Si le groupe recouvre la vie aujourd’hui, c’est grâce à Ciro Perrino, seul rescapé de la grande époque. Par la même occasion, l’engin mythique de la formation, le mellotron, a lui aussi été extrait des entrailles mémorielles. Un instrument qui, à l’époque, contribua grandement à donner l’identité du groupe. Ce premier disque date de 1976, et je vous conseille vivement de le découvrir...
Le second album, «Il risveglio del principe», dont il est question ici, et qui paraît donc 43 ans plus tard, est certes à l’image de son grandissime prédécesseur, mais il n’en atteint pas totalement le niveau, même si son style est pourtant comparable. On évolue en effet dans un progressif au tempo très lent, aux ambiances éthérées, à l’instrumentation suave (mellotron), au chant en italien délicat. Ajoutons que de nouveaux instruments (saxo, flûte, violon, violoncelle) y apportent même indéniablement de la fraîcheur et un sentiment de nouveauté. Mais ça n’est sans doute pas suffisant pour rivaliser avec son ancêtre, témoin d’une autre époque sans doute impossible à imiter avec exactitude aujourd’hui. Ce n’est du reste très certainement pas l’ambition de ce Celeste nouvelle mouture constitué de pas moins de 10 musiciens auxquels il faut encore ajouter 4 invités. Ce Celeste propose donc toujours une musique doucement progressive mais flirte aussi parfois avec la musique acoustique. L’apport des instruments à cordes et de la flûte accentue délicatement cette impression, je serais par contre plus mitigé sur l’utilisation des saxos...
Je ne voudrais pas faire penser que ce nouvel album est raté ou sans intérêt, bien au contraire, il est même d’un assez bon niveau et plaira sûrement aux amoureux du progressif soft à l’italienne, mais il ne tient pas totalement ses promesses sur la longueur. Il s’enlise peut-être un peu trop dans son carcan très lent, souffrant d’un manque de relief et de surprise. Ceci le ferait-il passer pour un tantinet soporifique?
Centurion
https://mellowlabelproductions.bandcamp.com/…/il-risveglio-…
Tout premier album en intégralité :
10/06/2019
Alan Davey’s Bedouin -
Time Is Made Of Gold
oriental space-rock – 61’45 – Angleterre ‘19
Passablement assagi depuis son album «As Above So Below» de 2001, signé Bedouin, l’ancien bassiste de Hawkwind nous revient avec 18 titres envoûtants, d’inspiration résolument moyen-orientale.
Est-ce sa rencontre avec Michelle Jimenez-Alder - la «Tina Turner arabe» (comme il l’appelle) - ou sa découverte d’instruments de la musique traditionnelle arabe (l’oud, notamment) qui ont guidé Alan «Boomer» Davey vers cette musique aux exquises saveurs orientales?
Difficile à dire car l’homme est plutôt avare en informations sur son œuvre. (Impossible, par exemple, de connaître le line up pour cet album.)
Le prolifique bassiste semble avoir (provisoirement?) tourné la page du rock-prog (tendance hard parfois!) qui était la marque de fabrique de ses nombreuses expériences extra-hawkwindiennes.
Point de basse assassine ici, pas plus que de gros effets de batterie ou de guitare, comme si Alan avait tout «unpluggé»!
Les compositions de «Time Is Made Of Gold» s’enchaînent dans une parfaite unité de ton.
Dès le 2e titre «Karma Is Coming», la darbouka plante le décor et il ne changera plus: on sait où se déroulera l’action jusqu’au dernier titre. Elle sera une succession d’instants magiques de grande poésie («Seven Stars») et de rêverie sur fond d’images orientales sucrées («A Starless Night»).
On se laisse doucement bercer par ces mélodies charmeuses et ces rythmes raffinés qui ne sont pas sans rappeler parfois ceux de «The Last Temptation Of Christ» de Peter Gabriel («Last Caravan East»).
On succombe aux délices de l’Orient, mais on ne s’endort pas pour autant: le tempo enlevé de «Full Is The Well» et de «Picture The Pieces» nous sort de la torpeur qui nous guette.
Pour suivre, la belle voix de MJA, les percussions, guitares, oud et synthés nous concoctent un subtil alliage de musique orientale et de space rock calme, sous-tendu par le jeu de basse aussi discret que précis et toujours inventif d’Alan Davey.
Un album relaxant à souhait, pas vraiment déroutant mais très séduisant.
Vivestido
https://alandavey.bandcamp.com/album/time-is-made-of-gold
11/06/2019
Sid Vision
Feverish
prog-rock/psyché/kraut – 36’55 – Allemagne ‘19
Un groupe inconnu, mystérieux, dont on ne sait rien, qui, à l’heure où j’écris cette chronique, n’est toujours pas référencé ni sur Prog Archives, ni sur Discogs. Alors essayons de vous éclairer un peu.
Sid Vision est un quatuor berlinois fondé par les frères Klein: Paul à la batterie, Sydney à la guitare et au chant. Aux claviers Erik Zaiser et à la basse Sebastian Däßler.
L’appétit musical des frères naquit à l’écoute de «Do You Feel Like we Do» d’un certain Peter Frampton et de «An American Prayer» des Doors. Ils découvrent aussi les sons étranges du mellotron et de quelques claviers vintages, ainsi que les rythmiques lourdes promulguées par certains batteurs des années 70. Forts de ce bagage, les musiciens allemands ne peuvent créer qu'une musique empruntée à ces mystères d’autrefois.
En effet l’album débute déjà par un étrange petit morceau d’introduction claviéristique, dont l’emphase rappelle the Enid. On est dans l’ambiance, on sait qu’il va se passer quelque chose. Confirmation avec le titre «The Darkness We're In», son rythme lent, la voix rauque et féminine «de fumeuse de Gitanes» de Sidney, la guitare aux sonorités «landberkiennes», les claviers augustes en soutien, la basse lourde en maintien. C’est bon, vraiment bon. Chose confirmée à la suite d’un second interlude planant, avec «For The Kids». Toujours cette voix très étrange, cette lenteur, cette ambiance mélancolique, mélodieuse, cette atmosphère de vernis écaillé qui finit par plonger dans un bain d’une grande profondeur progressive. C’est King Crimson, c’est Anekdoten, c’est sublime! La suite, «The Tribe», du rock plus brut, plus graveleux qui rappelle les Belges de The Same. Et puis déjà la fin avec la suite «Drown Pt.I et Pt.II», respectivement d’une durée de 7’33 et 8’55. Les regrettés Landberk est le groupe qui me vient à l’esprit dès les premières notes de guitare. De la finesse dans «la pesanteur», cette voix encore, le couple basse/batterie en douce ossature rythmique kraut, des claviers ancestraux, ambiance! La seconde partie instrumentale pulse lentement, prend de l’ampleur au fil du temps et finit comme un combat que se livreraient Jan Erik Liljeström (bassiste d’Anekdoten) et Reine Fiske (guitariste de Landberk). Époustouflant!
Espérons que nous ne serons pas les seuls à causer de cet album, sinon autant déclarer tout de suite que le prog est mort!
Centurion
https://sidvision.bandcamp.com/album/feverish
12/06/2019
Fernando Perdomo
Out To Sea 2
prog-rock/smooth jazz – 52’07 – USA ‘19
Fernando Perdomo, ce nom ne vous dira sans doute pas grand-chose, pourtant le barbu est considéré comme un des piliers de la scène musicale de Los Angeles, on dit même de lui là-bas qu’il est «the millennial answer to Todd Rundgren». Question pedigree le guitariste multi-instrumentiste est reconnu en tant que producteur, (il gère le Reseda Ranch Studios), mais pointons aussi la carrière de l’instrumentiste qui s’illustre par exemple sur «New World» et «Static» de Dave Kerzner qu’il accompagne en tournée durant le «Cruise to the Edge», (croisière maritime regroupant quelques grosses pointures du rock progressif), et quelques festivals de renom: ProgDay, ProgStock…
Au niveau de sa carrière solo, Fernando compte 5 premiers albums dans une veine rock, puis deux albums d’obédience progressive avec «Out To Sea» en 2018 et sa suite «Out To Sea 2» aujourd’hui.
Musique instrumentale dominée par la guitare voguant entre progressif et touches smooth jazz («Beautiful») et qui nous renvoie un peu dans les années 80/90. Pièces courtes, de 2 à 4 minutes, où le guitariste retranscrit ses idées musicales; une idée = un morceau. Côté style, outre l’aspect général qui voyage entre progressif gentillet et jazz-rock de croisière, on note particulièrement les influences de Todd Rundgren bien sûr, de Santana, de Camel («Five Four», «Seven Stars»), et de Focus («the Angle of Ardent»). Mais même si on se laisse happer au sillage de cette musique, on finit, on fil de l’eau, par ressentir une certaine lassitude.
Centurion
https://fernandoperdomo.bandcamp.com/album/out-to-sea-2
13/06/2019
The Desert Furs
Soluble
pop-prog floydienne/pop psyché – 42’16 – États-Unis ‘19
On est dedans. Dans quoi? Dans le pot de miel floydien. Ça dégouline, ça colle aux doigts, c'est sucré de légende. C'est de cette façon que l'on aborde l'album avec ce premier titre intitulé «222». Mais très vite, dès l'entame du deuxième morceau, The Desert Furs nous entraîne dans la pop psychédélique. Demeurent toujours des réminiscences du Floyd mais l'orientation du style nous renvoie doucement vers une pop psyché plus convenue. On découvre par la même occasion une section rythmique qui a fière allure, le couple basse/batterie tient la baraque, chose qui se vérifiera tout le long de l'album. La pop s'installe durablement, la voix de Billy Wassung (un des protagonistes de ce binôme) nous rappelle Pineapple Thief, pas que la voix du reste, musicalement, il y a là aussi quelque chose qui tient du style du groupe anglais. Alors on oublie le Floyd? Pas vraiment, il est là, en filigrane, ou via l'intervention appropriée du guitariste dont le doigté bluesy rappelle sans ombrage celui de David Gilmour. Musique plaisante, bien servie par un gros son et une production lissée (c’est pourtant du fait maison) qui nous invite à voyager aux confins de la bande à Roger Waters, comme sur «Story is Gold», où la rythmique carrée pourrait vaguement évoquer le côté commercial consenti sur certains titres de «the Wall».
Peu de surprise, on regrette que le duo ne lâche pas la bride, on espère en vain qu'il sorte de son confort trop policé, qu'il montre une fougue qui lui fait jusqu’à présent défaut.
Peut-être avec «Photophorescent», un titre un peu space-rock,... mais c'est encore bien trop propre.
Le miel continue à couler inexorablement, le schéma semble immuable, la section rythmique métronomique assure, les nappes de claviers enrobent, la guitare évoque des souvenirs, OK mais ce n’est pas suffisant. Faudra un peu se sortir les tripes les gars, tout ça manque de folie. L'album porte finalement bien son nom, «Soluble», comme le miel dans le lait pour bien faire dodo.
Centurion
https://thedesertfurs.bandcamp.com/releases
14/06/2019 : Album du Mois
Lonely Robot
Under Stars
neo-prog spatial – 56’10 – Angleterre ‘19
«Under Stars» est le troisième album du projet de John Mitchell, Lonely Robot qui diffère de son impressionnante carrière de guitariste, producteur et chanteur avec des groupes tels que It Bites, Frost, Arena et Kino. Utilisant le personnage central de l’Astronaute en tant qu'observateur, Mitchell a déjà publié des albums de chansons rock accessibles finement conçues avec une touche progressive dans «Please Come Home» et «The Big Dream». Cette dernière version est très en phase avec ces albums et tire le thème à sa conclusion. Cette ultime pièce de la trilogie s’intéresse particulièrement à la génération du millénaire et à l’inverse, l’effet isolant et déconnectant que la connexion permanente aux médias sociaux et à la technologie influent sur leur perception et leur compréhension du monde qui les entoure.
Une fois de plus, John Mitchell s’est associé au batteur de renom Craig Blundell, qui avait déjà joué avec lui au sein de Frost et Lonely Robot, aux côtés de Steve Wilson et de ses prochaines tournées avec Steve Hackett. Steve Vantsis de l'excellent groupe live de Lonely Robot, et collaborateur de longue date de Fish, contribue à la basse sur cinq des morceaux. Cependant, l’acteur principal et la vedette de ce projet est forcément Mitchell lui-même. Parallèlement à sa voix impressionnante et assurée, il interprète la grande majorité des autres instruments, y compris des guitares, des claviers et une partie de la basse. Il est remarquable avec «Under Stars» qu'il soit revenu à la guitare et s'est davantage tourné vers la création de textures et de paysages sonores avec clavier et programmation.
Comme dans les deux précédentes sorties de Lonely Robot, il existe un sens très réel de la cinématique sur «Under Stars», en particulier sur la piste d’introduction atmosphérique, «Earth Earth», qui pourrait facilement être un thème pour films de science-fiction, rappelant Vangelis. Ceci nous amène au début vocoderisé d’«Ancient Ascendant» qui nous replonge très vite dans un univers musical reconnaissable aux murs du son caractérisés par la guitare distinctive de Mitchell et la batterie percutante de Blundell. Ces passages alternent de manière caractéristique avec des sections vocales plus restreintes, revenant ensuite aux lignes de chorus croquantes et accrocheuses.
Écoutez les progressions de «Inside this machine» et son intégration d'une mélodie accrocheuse à l'aide d'un thérémine, des riffs de guitare volant haut… C’est comme regarder des vaisseaux entrer à la vitesse de la lumière dans un espace lointain et filer à travers notre ciel étoilé. J'entends les synthés scintillants au début de «Icarus» et je vois les aurores vives qui enduisent souvent les cieux sombres de la nuit autour du monde. Les tonalités songeuses et émotionnelles de la chanson titre dénotent l’émerveillement de notre enfance lorsque nous regardions le ciel, curieux d’imaginer ce qui se passe réellement là-bas. Ces sentiments eux-mêmes prêtent à l'esthétique de la sci-fi, l'un des principes fondamentaux du genre étant ses thèmes exploratoires. Avec «Under Stars», Lonely Robot permet de se sentir à nouveau comme un enfant, désireux d'en apprendre davantage sur l'univers et de sortir dans l'espace pour une toute nouvelle perspective. Cela donne envie d’un isolement apaisant qui l'accompagnerait. Nous sommes définitivement de retour dans l'orbite de Lonely Robot et les fans du Floyd et de Camel devraient s’extasier devant le bonheur auditif que Mitchell tire de son jeu atmosphérique…
Commode
Album non disponible sur bandcamp
15/06/2019
Huis
Abandoned
prog-rock – 72’30 – Canada ‘19
Le groupe canadien Huis est de retour avec son troisième album! Après «Despite Guardian Angels» en 2014 et «Neither in Heaven» en 2016, voici «Abandoned» et l’on peut dire que Michel Joncas, fondateur et bassiste du projet accompagné de son équipe (Sylvain Descôteaux: claviers et voix, William Régnier: batterie et percussions, Johnny Maz: claviers et Michel St-Père: guitare, également membre de Mystery) nous livrent un excellent cru!
Pour plus d’infos, ne manquez pas de relire l’interview rapidus de Michel Joncas parue dans ces pages il y a une semaine.
La plage titulaire ouvre le bal par une ambiance que je qualifierai de planante pour se poursuivre par des envolées plus progressives, notamment grâce à une partie de claviers me faisant penser à Genesis (la rythmique ajoute d’ailleurs à cette impression!). «The Giant Awakens» suit de manière nettement enjouée, avec des parties de guitare d’un haut niveau. C’est avec une certaine emphase que débute l’épique «Caducee» (douze minutes), mélangeant habilement accalmies et passages plus musclés, sans oublier pour autant l’aspect mélodique que doit revêtir cette musique. Une autre plage d’une certaine longueur, «Stolen», poursuit l’impression que nous sommes en présence d’un grand album de progressif! Un grand moment de spleen nous attend: «Solitude» se fait aérien et les volutes s’emparent de nous. Pour profiter du superbe travail vocal de Sylvain et des qualités guitaristiques de Michel St-Père, arrêtons-nous quelques instants sur «Chasing Morning Glory» et ses harmonies subtiles. Après un «Haunting Days» enjoué, quelques délicates notes égrenées au piano déroulent l’autre superbe ballade de cette galette: «We Are Not Alone». Mais il est déjà temps de prendre congé de nos amis, rôle confié à «Oude Kerk III», clin d’œil chanté (neuf minutes quand même!) aux parties I et II présentes sur leur premier album, mais purement instrumentales celles-là!
Pour nos lecteurs européens, le groupe devrait nous rendre visite en avril 2020 avec Mystery, notamment pour un festival en Allemagne: ne les manquez surtout pas!
Et d’ici là, régalez-vous à n’en plus finir à l’écoute de ce «Abandoned» de très belle facture.
Tibère
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16/06/2019
Alain Pire Experience
APEX
rock psychédélique anglais – 38’53 – Belgique ’19
À chaque parution, «Cambridge» en 2014, «Song From the 13th Floor» trois ans plus tard et le simplement dénommé «APEX»(*) aujourd’hui, le plus british des trios belges - qui se frotte d’ailleurs depuis peu et avec succès aux scènes insulaires, dont celle de Liverpool - épure et fortifie la formule: redonner vie en 2019 à l’esprit psychédélique des mid-sixties, exploratoire autant que jubilatoire - bon, surtout jubilatoire puisque l’exploratoire a, entre-temps, été largement exploré. «I Saw the Light Today» s’inscrit dans les pas de Clapton / Bruce / Baker, power trio de légende et «Have some Fun» présente les symptômes d’une (bonne) chute de studio de Lennon / McCartney l’année du Summer of Love: voilà déjà deux références édifiantes, auxquelles on aura soin d’adjoindre les ‘ouh ouh ouh’ au léger parfum de plage à la Beach Boys («Never Go Your Way») et le terriblement «Set the Controls to the Heart of the Sun»-nien «Lost on a Cloud», qui exalte nos sens comme Pink Floyd en avait le secret - à Pompéi ou ailleurs. La rythmique (Marcus Weymaere, batterie et René Stock, basse) est d’une efficacité confondante, alors que le jeu de guitare d’Alain Pire a encore pris un peu plus d’assurance, prenant le soin de poser ses effets sans démonstration («Into the Deep»), voire même avec une certaine bonhomie - le pétillant single «Run Away».
(*) ‘Simplement’, c’est relatif: en astronomie, l’apex est un point situé dans la constellation d'Hercule, vers lequel se déplace notre système solaire.
Auguste
https://alainpireexperience.bandcamp.com/album/apex
17/06/2019
Eclectic Maybe Band
Reflection In A Moebius Ring Mirror
avant-garde//RIO/jazz – 74’23 – Belgique ‘19
Quand j’ai vu que la dernière réalisation de Guy Segers était sur la liste des chroniques à venir, je n’ai pas hésité une seconde, l’assurance de découvertes hors des sentiers battus, de prises de risque, étant plus forte que l’appréhension de s’attaquer à une tâche bien ardue pour le modeste chroniqueur que je suis. Bien m’en a pris! Même si j’ai réalisé après coup que j’avais pas mal de retard à combler dans la discographie du bassiste, à commencer par le premier opus d’Eclectic Maybe Band («The Blind Night Watchers’ Mysterious landscapes») paru l’année dernière.
Petit rappel pour nos lecteurs peu au fait des méandres et connexions autour du RIO (Rock In Opposition), Guy Segers, Belge, bassiste et compositeur, est une figure historique de ce mouvement ayant officié chez Univers Zéro à l’époque où les Anglais d’Henry Cow rameutèrent auprès de leur collectif les quelques formations européennes semblant réunir leurs visions et idéaux face aux dérives commerciales instaurées par les majors de l’industrie musicale. Ceci se passant fin des années 70 et début 80, cela paraît bien loin du sujet du jour. Et pourtant, Guy Segers n’a eu de cesse ces dernières décennies de produire, composer, jouer avec le même esprit, une certaine intransigeance où l’honnêteté du propos prime avant toute considération économique. Revers de la médaille, s'il n’y a aucun doute sur la reconnaissance que nombre d’amateurs de musiques audacieuses lui donnent volontiers, la notoriété n’a pas forcément suivi. C’en est bien triste si nous le comparons à d’autres pointures du style qui ont eu la chance d’évoluer dans des sphères géographiques plus propices.
J’y vois même dans le nom du groupe qui nous concerne aujourd’hui un clin d’œil à cette démarche, tellement il a su s’entourer toutes ces années de musiciens d’univers différents aux multiples influences et parcours. C’est encore vrai pour ce projet et le premier album (du coup, je l’ai écouté) nous le démontre avec force.
«Reflection In A Moebius Ring Mirror» a gardé le même noyau d’interprètes mais largement augmenté d’intervenants venant de pays aussi éloignés que la Suède, les USA, l’Espagne, la France et j’en oublie sûrement. Il n’est pas possible de citer ici tel ou tel musicien plus qu’un autre, le degré d’excellence de chacun étant à la mesure du projet, sans compromis, aventureux, respectueux des compositions et thèmes proposés. Chaque participant y va de sa touche personnelle, magnifiant ainsi une trame solide où la basse tient son rôle tantôt groovy, hypnotique, ou simplement support harmonique, délicate parfois. J’ai particulièrement apprécié la complicité avec le piano dans certains morceaux où les deux lignes de basses s’accordent et s’entremêlent avec bonheur.
Musicalement, le spectre est assez large: on touche au jazz, parfois même un peu free, la musique contemporaine, l’avant-garde, un soupçon de zeuhl, un chant habité loin des standards, des envolées de saxes, flûtes, guitares, trompette et tardivement sur le dernier titre, au RIO. La longue pièce «Perfume Of The Flying Room» clôt l’album avec ambition telle une longue plainte chorale avec de remarquables soli, un riff digne d’Univers Zéro, voire Présent (autre figure emblématique du genre).
Mention particulière pour «Day Of Tsunami» où le chaos annoncé dans l’intitulé est amené par de délicats bruitages, de fines notes clairsemées à la flûte, puis progressivement le piano prend l’espace et se déchaîne. Ensuite la vague se retire, le calme revient, la désolation aussi… Durant l’écoute et forcément influencé par le titre, j’ai eu en mémoire les terribles images de 2006 sur les côtes indonésiennes. Reconstitution terrible et parfaite à l’image de l’album: entier et téméraire.
Arthurus
18/06/2019
United Progressive Fraternity
Planetary Overload Part 1: Loss
prog-rock – 74’51 – international ‘19
J’avoue être totalement passé à côté de Unitopia, groupe originaire de Adelaïde en Australie et qui a sorti quatre albums entre 2005 et 2012, à chaque fois bien accueillis par la critique.
Si je vous parle de Unitopia, c’est parce que United Progressive Fraternity (UPF) est le nouveau projet de Mark Trueack, le leader du groupe. Si Unitopia était un groupe, UPF se présente comme un collectif et un rassemblement de personnalités somme toute assez impressionnant. En effet, un coup d’œil sur leur site montre toutes les personnalités impliquées dans le projet. Côté musical, relevons la présence de Jon Davison, Steve Hackett, Hasse Fröberg (Flower Kings), Colin Edwin (Porcupine Tree) et Jerry Marotta (ex-batteur de Peter Gabriel) parmi d’autres. Plus surprenant, le site mentionne également une série de personnalités issues du monde scientifique ou de la société civile qui ont apporté une contribution plus «intellectuelle» au projet (notamment David Attenborough et Jane Goodall). Le fil rouge est à la fois simple et terriblement actuel: la protection de l’environnement. Le titre de l’album «Planetary Overload» (par ailleurs tiré d’un livre) ne laisse planer aucun doute sur les intentions du collectif.
«Et la musique?» me direz-vous? UPF propose un prog assez classique; on sent clairement l’influence de Yes, notamment. Les morceaux sont variés et alternent le court et le long (les 20 minutes de «Seeds for life»); l’instrumentation est riche avec l’utilisation de violon, de flûte (avec un clin d’œil à Jethro Tull), des cuivres (avec des interventions d’une trompette mutée qui donne un côté jazz du plus bel effet), le tout donnant une musique toujours agréable à l’oreille avec quelques fulgurances mélodiques. J’y retrouve parfois l’ambiance de l’album sorti en 1989 par «Anderson, Bruford, Wakeman & Howe» alors en rupture de Yes. Le chant de Mark Trueack n’est pas révolutionnaire mais sa voix chaleureuse respire l’authenticité; on sent une véritable sincérité dans la démarche. Le message écolo n’évite malheureusement pas toujours un côté un peu «prêchi-prêcha» («What are we doing to ourselves» ou «What if») et certains morceaux courts font un peu remplissage et auraient pu être évités. Mais ce sont là les seules véritables faiblesses de cet album qui est vraiment à découvrir. À noter qu’un Vol. 2 est prévu pour fin 2019 - début 2020.
Amelius
Album non disponible sur bandcamp
19/06/2019
Taliesyn II
Contes Apocryphes
opéra rock progressif – 68’36 – Belgique ’19
Il faut saluer la persévérance des frères Mary, sur fond d’ambition et d’inconscience, qui à la fin de Taliesyn (Mk I) en 2013, après deux bons albums de rock enraciné dans les seventies, d’Ange aux Doors en passant par Deep Purple (édités chez Moonzoo), s’attellent à un projet fou, hors du temps: un vaste opéra rock, ancré, à la fin du XIXe siècle, dans un pays imaginaire - et destiné à se décliner en plusieurs disques successifs. Tous les ingrédients de l’épopée sont là: la guerre, la noblesse (celle de l’homme, celle du cheval), le progrès et l’industrialisation (la sidérurgie des canons et des fusils), l’inconnu et l’étrange, la superstition et la croyance, la mort, guerrière ou suicidaire, le dilemme et la gloire, et même la prodigieuse devise qui guide la Nouvelle Fédération («envahir, occuper, coloniser, civiliser») - celle-ci (la Fédération) ayant commis la grave erreur de «tuer les dieux avec des équations». L’histoire s’ancre dans la réalité autobiographique du duo (les frères vivent dans une région longtemps dépendante des mines et des aciéries et ont fait de leur passion du cheval un métier), et peut-être la forêt de Nerival leur a-t-elle été inspirée par un des bois de la forêt d’Anlier. Outre l’écriture, Julien et Geoffroy assurent guitares, basse, claviers et batterie. Ils chantent aussi, mais ont confié - avec bonheur - les voix des deux personnages principaux à Jean-Philippe Suzan (Gens de la Lune; et en matière d’ambition, on pense évidemment à «Epitath») et Gianni Galli (Diez Trio, Arold), ici respectivement colonel De Rocroy et Auguste Belory. Ajoutons, au plaisir des oreilles (le riff hautement mémorisable de «Terres conquises», la puissance d’«Orage», le lyrisme d’«En pleine retraite»), l’élégant souci du détail apporté au digipack et à son livret (textes et contextes): un objet rare. Bien! On a l’histoire, on a la musique. Ne manque que la mise en scène…
Auguste
Album non disponible sur bancamp
20/06/2019
Cosmograf
Mind Over Depth
prog-rock – 45’30 – Angleterre ‘19
C’est en 2008 que le multi-instrumentiste anglais Robin Armstrong lance son projet Cosmograf avec la sortie de sa démo «Feed from the Anguish». Si l’on fait abstraction de cette première ébauche ainsi que de la réédition de «When Age Has Done Its Duty» l’année dernière, nous sommes ici face à sa septième sortie, pour laquelle notre protagoniste est aidé, à la batterie, par Kyle Fenton (déjà présent sur «The Hay Man Dreams» en 2017) ainsi qu’un invité très spécial à la basse: Colin Edwin (Porcupine Tree, O.R.k.), ayant, pour sa part, participé à «Capacitor» en 2014. Bien que plus «heavy» que ces réalisations précédentes, nous sommes ici devant une œuvre introspective et allégorique: notre réalité personnelle est définie par l’attention que nous accordons à nos pensées, nos émotions, notre ressenti qui, s’ils se montrent négatifs, nous éloignent de notre profondeur… Pour nous mettre dans l’ambiance, une longue plage de presque douze minutes, «A Million Choices», nous entraîne immédiatement dans les tréfonds de l’âme humaine, au son d’un progressif moderne que ne renierait pas Porcupine Tree justement. Une intro lente sur laquelle le chant se montre honnête et «Godspeed» peut ensuite décoller sur la même lignée. C’est également le cas pour «The Smoke and the Flame» ou «Sharks», ce dernier titre ponctué, il est vrai, par de nombreux changements de rythme. Cette plage se révèle, pour ma part, la plus intéressante de l’album! Pour quitter cette plaque, «Goodbye to All Illusions» nous montre un aspect planant jusqu’ici absent! En tous les cas, pour un gars qui fait tout (ou presque) tout seul, Robin démontre un grand talent de musicien, de producteur, d’arrangeur et même de concepteur de pochette!
Tibère
https://cosmograf.bandcamp.com/
21/06/2019
Mostly Autumn
White Rainbow
prog-rock folk – 79’08 – Angleterre ‘19
En un peu plus de 20 années d’existence, Mostly Autumn a porté à nos augustes oreilles, comme un métronome, une petite dizaine d’albums de qualité irréprochable. Fidèle à son style musical bien huilé, mêlant habilement un rock progressif «floydien» à des balades folk électrisées, la bande du ménestrel Brian Josh est devenue au fil des ans ce que l’on pourrait appelé une valeur sûre dans le domaine et un exemple honorable de réussite pour la jeune génération de progueux en herbe. Pour ce nouvel opus, on peut dire que les Britons ont préféré jouer la carte de la sécurité plutôt que de tenter une aventure en terra incognita parsemée d’incertitudes ou de risques du point de vue commercial (bien que le genre soit toujours qualifié «underground»). Les adeptes y retrouveront de quoi combler leurs désirs, à savoir de belles plages planantes, énergiques, ponctuées par quelques envolées de guitare «gilmourienne» du magister Josh et des morceaux plus calmes aux accents folk et celtiques, emmenés par la voix cristalline de la muse Olivia Sparnenn. Rien de neuf en provenance des frontières de l’Empire, au pied de mon célèbre mur? Non, si ce n’est un malheureux événement, à savoir la disparition du guitariste, et ami de toujours de Brian, le discret Liam Davison. La touche folk des compos du groupe, c’était lui. On comprend aisément que cet album lui soit dédié, comme un dernier chant pour que son âme s’en aille retrouver l’éternité des Champs Élysées. Dès lors, les textes aborderont les thèmes de la séparation brutale d’un ami parti trop tôt («Young»), le deuil et le recueillement («Procession», «Viking funeral» ) ou le dernier voyage («Into the Stars»). Musicalement on reste dans des ballades à la façon de Fleetwood Mac ou du prog à la Floyd et même du Camel des années 80. L’imposant guitariste fondateur partage le chant avec son égérie Olivia, à la voix, certes agréable, mais qui selon moi manque un peu d’originalité. Dommage qu’ils n’aient pas convié la belle Heather Findlay à venir rendre un dernier hommage sur un titre. L’autre bémol de l’album est le manque d’un titre-phare, une plage qui sortirait du lot, celle qui ferait partie des futurs classiques du groupe. Mais que demande le peuple? Certes, les adeptes ne seront pas déçus car la rondelle reste du Mostly Autumn labellisé, d’autant plus qu’ils pourront les retrouver en tournée dans toute la Gaule le prochain hiver, autre régularité à laquelle ils nous ont aussi habitués.
Hadrien
Album non disponible sur bandcamp
22/06/2019
Tim Bowness
Flowers at the Scene
prog-rock atmosphérique – 42’50 – Angleterre ‘19
Aujourd’hui, réunion avec Tiberius, ancien directeur artistique du cercle des gladiateurs disparus. Seul à l’arrêt de chars, je guette anxieux l’arrivée d’un attelage.
Histoire de passer l’temps, ‘me rappelle avoir sous ma toge le dernier envoi du Dux Bellorum: «Flowers at the Scene», récent ouvrage d’un NO-MAN pas tout à fait inconnu des légions. Je saisis mon “galea-musica” et lance l’écoute, plutôt que de maudire le service public. Où sont donc ces chevaux?!
L’on visite d’emblée les profondeurs happé par un gimmick électrifié façon eighties.
Puis «The Train that Pulled Away», il en a de la chance, m’entraîne au rythme pointu de ses ‘spiccato’ tambour-majorés avant un démarrage détonnant. Arrive ensuite l'orchestré «Rainmark», agréable morceau, qu’une guitare légèrement hors propos vient toutefois déranger. Un trouble délicat s’ensuit, accompagné de fleurs circonstancielles.
Tim Bowness ne périra certes point des ravages du stress. Voix posée sur la mélodie comme le Peter Hammill du délicieux empire, relief exclu. Sans aspérités, l’homme déclame. Pas un mot plus haut que l’autre. Chaque pièce, magnifiquement construite, paraît malgré tout monotone saupoudrée de ce sucre “candide”.
Et ce maudit chariot qui n’est toujours pas là!
«Is the World» me sort un peu de la torpeur des attentes interminables; quant à «Borderline» je trouve la piste fort réussie.
Poursuivons cet album qui ne m’a pas encore vraiment émoustillé. Voilà enfin une percussion soutenue, tribale, habillée de sonorités Cold Wave où s’insinue le toujours placide maître Tim. «The War On me», next track, se prête en revanche admirablement bien à son interprétation soyeuse. Dès lors je profite du moment avant d’enchaîner...
Les secondes filent sur quelques Stratocasters lustrées, je suis toujours à quai!
Par Jupiter, que font ces bourriques? Dernier titre déjà.
Condamné à poireauter, j’opte pour un replay complet. Si seulement j’avais un moyen de communication portable, Tibère doit me maudire à l’heure qu’il est!
43” à nouveau très agréables. J’y retrouve des arrangements sympathiques aux accents symphoniques ainsi que de mélodieux solos mais qui, à l’instar du chant, manquent parfois d’articulation, de précision, d’incision.
Vous vous en doutez, mon moyen de locomotion ne s’est jamais présenté. Peut-être un essieu brisé ou un cheval fourbu… Me reste à envoyer ASAP un pigeon afin de m’excuser de ce rendez-vous manqué.
Néron
https://timbowness.bandcamp.com/
23/06/2019 : Heavy Prog
ProtoMythos
Heavy Crowns
métal progressif – 52’39 – Angleterre ‘19
ProtoMythos est le projet de l’Israélien (résidant à Londres) Tom Treivish. Après un premier album («In Human Sight») en 2013 ayant pour concept la perception humaine de la cause animale (!), Tom nous revient avec «Heavy Crowns». S’il n’y a plus réellement de thématique à cette galette, la cause animale en reste malgré tout la clé de voûte puisque ce sujet passionne notre ami (voir à ce propos la page «Learn» de son site internet – www.protomythos.com). Sa passion pour des musiques «heavy» (dans la lignée de Mastodon ou Opeth, par exemple) abreuve sa musique, ce qui n’était guère le cas sur «In Human Sight» (je confirme, après avoir écouté quelques-unes des compositions dudit album). Tom cite également Devin Townsend comme influence, bien que la folie de ce dernier ne se retrouve absolument pas dans ses compositions. De délicats arpèges nous accueillent d’entrée de jeu («Walking the plank») pour se transformer très rapidement en un riffing métallique du meilleur aloi. Notre Tom remercie par ailleurs les personnes qui ont participé d’une manière ou d’une autre à la réalisation de cette œuvre, sans toutefois citer précisément leurs rôles respectifs. Bien que cette galette soit le résultat d’un labeur de trois années, reconnaissons que notre Tom se montre capable de pondre des mélodies entraînantes et mémorisables à l’envi et que son chant se montre d’un excellent niveau. La ballade «Fragile fallacy» permet, en quatrième plage, de nous offrir une respiration bienvenue, prolongée par «Bitter truth». Mais revenons à une plage plus rentre-dedans avec «Flip of a coin» avant un «The candle», planant (en tout cas dans sa première partie). On termine en beauté durant les neuf minutes de «A shadow play», que ne renierait pas un Dream Theater au sommet de son art!
Au total, un bon moment à passer à l’écoute de «Heavy Crowns».
Tibère
https://protomythos.bandcamp.com/album/heavy-crowns
Yaatra
Arkhan
heavy-stoner-prog instrumental – 42’10 – Argentine ‘19
Il y a comme ça des groupes qui vous plaisent dès la première écoute et dès les premières notes. Je ne connaissais pas encore Yaatra mais il en fait partie. Ce quatuor argentin sort son deuxième opus «Arkhan», après «Astrofuneral» sorti en 2018. Le moins que l'on puisse dire c'est qu'ils nous emportent dans leur univers, du début à la fin il n'y a pas moyen d'en sortir! C'est un exercice délicat car, souvent, avec un instrumental, je décroche facilement.
On y trouve un fil conducteur avec une guitare rythmique rock qui me fait penser au groupe belge Pillow ou autres arpèges de genre Radiohead mélangés à un son de guitare heavy; entendez par là une deuxième guitare très lourde. Au fil de l'écoute vous trouverez des titres plus stoner-rock comme le magnifique «Kraken» où l'on pense à du Orange Goblin qui aurait fusionné avec Black Sabbath. Même avec ce son heavy le groupe y incorpore souvent de l'orgue Hammond ou différents synthétiseurs qui assurent une ambiance toujours différente tout au long de l'album. Celui-ci commence avec un superbe titre de 12 minutes, «Port d'Arkhan», où les parties lourdes, entremêlées à une mélancolie laissant entrevoir des notes de piano sensibles, une guitare, un bodhrán, et autres tambourins, sont particulièrement agréables. À chaque nouveau titre on découvre la suite de l'univers initié par le précédent, mais toujours en gardant une identité propre, et sans une minute d’ennui. Je ne peux que vous conseiller d'aller écouter et de soutenir Yaatra…
Petite parenthèse, ne confondez pas Yaatra et Yatra, qui est un autre bon groupe de stoner doom américain mais qui n'a rien à voir avec nos Argentins mis à l’honneur ici sur Prog censor.
Vespasien
https://yaatra.bandcamp.com/album/arkhan
La Stazione delle Frequenze
Physis
prog-rock/métal-progressif – 54’31 – Italie ‘19
Dans quelle eau trempe ce groupe italien, le prog ou le métal? Les deux mon capitaine, car La Stazione delle Frequenze alterne couramment entre les deux tendances. Après une introduction symphonique et poétique, on entre illico dans le vif du sujet avec un gros riff de guitare soutenu par un phrasé de clavier. «Voilà encore un groupe de métal progressif» se dit-on… Pourtant durant le troisième titre «Ombre Sul Mare» l’ambiance se diversifie, elle se calme… un peu, mais cela laisse apparaître l’ombre d’un autre profil. Chose confirmée avec «Racconto» où le groupe nous emmène humer quelques folkeuses odeurs iodées des embruns transalpins. On persévère avec l’intermède «Non ci Resta che Aspettare L'Aurora» qui annonce «Il Sentiero del Vento», long titre de 22 minutes scindées en deux parties. Ambiance folk encore, petite flûte, et puis guitare acoustique avant de replonger dans le prog couillu et ses gros riffs de guitare et de claviers. Ce claviériste, d’ailleurs, souvent en verve, nous renvoie parfois dans le cœur des seventies avec quelques sonorités d’orgue Hammond à la John Lord. Ce long titre épique est à l’image du groupe, il croise le fer entre moments calmes, changement de tempo et progressions métalliques.
Outre un chant en italien plutôt lisse, sans aspérité, l’album se tient correctement mais finit un peu par s’enliser; jamais mauvais, mais pas davantage passionnant.
Centurion
Album non disponible sur bandcamp
Union Rails
Orbit of the heart
heavy-prog/pop/AOR – 51’31 – Finlande ‘19
Le travail de chroniqueur est une passion, une joie, mais a aussi ses revers, ceux de décider, d’orienter le lecteur dans ses choix, de l’influencer. En quelques lignes, nous choisissons si un album est bon, mauvais, en oubliant que derrière toute œuvre il y a des musiciens qui y ont mis toutes leurs énergies, passions, temps, amours, espoirs. Mais il y a toi également, fidèle lecteur, qui attends de nous que nous t’orientions au travers des innombrables productions, et ce n’est pas toujours chose aisée, crois-moi… Aujourd’hui me voilà confronté à un tel dilemme à l’écoute de ce premier album de ce groupe finlandais Union Rails. Un groupe qui fête son dixième anniversaire avec la sortie de son premier véritable enregistrement professionnel, «Orbit of the heart», si l’on met de coté un EP, «Season’s of Pathos» en 2012, qui était plus une démo carte de visite. Et pourtant c’est avec beaucoup d’intérêt suscité par la bio du groupe qui nous promet un prog influencé par Anathema, Pink Floyd, Radiohead et Steven Wilson… (le pied quoi!), que je me lance à l’écoute de cet album.
Tout commence par la plage qui donne le nom à cet album, « Orbit of the heart», qui est de loin le meilleur morceau de cet opus: rythmique plombée, riffs de guitares incisifs sur une mélodie accrocheuse et la voix de Tomi Reunanen, magnifique. C’est d’ailleurs en celle-ci que se trouve la qualité essentielle de l’album. Mais tout au long des 52 minutes que dure cet enregistrement, aucune trace des influences citées plus haut dans cette chronique. Malgré quelques réussites mélodiques, «The Drowning», «February Woe», «Polar Caravan», cet album se complaît trop dans des ballades mid tempos, très pop et à des miles du progressif.
Attention, les musiciens sont excellents, mais cet album n’a pas sa place dans les rayons rock progressif. Si vous êtes, par contre, amateur de belles mélodies pop, alors cet album a peut-être une chance de vous plaire.
Tiro
Album non disponible sur bandcamp
Althea
The Art of Trees
prog-metal – 56’57 – Italie ‘19
Se présentant comme un groupe de metal prog, Althea n’a pas tort sur le fond mais la forme demande réflexion car c’est foutrement bien joué, bien chanté, bien mélodique, bien produit et ce, dès l’intro («For now»), un titre pour le moins déconcertant dans sa construction mais chut… Originaires de Milan, le quatuor italien en est déjà avec «The Art of Trees» à son quatrième album depuis 2014, une production foisonnante qui n’altère pas la qualité de son prog metal. Bien sûr, Althea n’a pas inventé le genre mais en perpétue les (bons) tics et les recettes à sa sauce, assez goûtue, il faut le préciser. Le metal ne prend jamais le pas sur le prog et le mélange se fait à chacun des neuf morceaux dans une allégresse et un savoir-faire qui permet la découverte de quelques titres plus aguichants les uns que les autres.
Du mélodique «Today» au déraciné «Not me» (piano comme désaccordé et ponts pur prog!), de la ballade mélo qui s’excite «Evelyn» au métallifère «Away from me» et un «Burnout» qui clôt l’entreprise pour un titre que n’aurait pas renié Anathema, Althea nous épate et sublime le genre avec grâce et inspiration. Un mot sur la pochette, superbe, un arbre-main qui s’apprête à écrire sous un soleil naissant. Grosse réussite à tout point de vue, le genre de disque qui permet d’écouter une heure de metal non bourrin sans avoir envie de passer à autre chose et on y va jusqu’au bout, conquis et ravi par l’ingéniosité des thèmes qui n’ont pas cet arrière-goût de déjà entendu, c’est déjà beaucoup!
Commode
https://althea.bandcamp.com/album/the-art-of-trees
24/06/2019
The Gödel Codex
Oak
fusion – 43’38 – Belgique ’19
Même si on discerne, au détour d’un riff, d’un trait d’écriture ou d’une tournure d’esprit, les axes d’influence symptomatiques, on tient, avec «Oak», un de ces albums, plutôt rares, où les musiciens se permettent d’apporter de tout, de partout et de tout temps. Les musiciens, ce sont Michel Delville, Antoine Guenet, Étienne Plumer et Christophe Bailleau, chacun pétri des expériences d’autres formations plus ou moins pointues (Univers Zero, The Wrong Object, Animus Anima…), chacun mêlant écriture et improvisation, chacun - et c’est une autre des caractéristiques fascinantes de ce projet - exploitant l’électronique comme ils le font de leurs racines: avec autant d’appétit que d’acuité, avec une jubilation mêlée de discernement. Ce qui aurait pu être un "beau bazar" construit sa consistance avec la succession des morceaux: on démarre sur un rythme de dromadaire («Oak Overture»: une frappe puissante, une ligne de basse de métro aérien, un acharnement de moustique en forme de glockenspiel); on passe à un titre Canterburien («The Needle's Eye*», où la voix de Delville, certes hésitante, évoque le chevrotement de celle de Robert Wyatt); on enchaîne sur «Granules» (on pense à David Sylvian) et sur un frisson mélodique («One Last Sound», qui mue à mi-course en un embrasement à la Hatfield And The North); puis vient «Matisse», évocation aquatique des Frippertronics, que suit «Stand or Fall», aux dissonances pianistiques troublantes, puis «Bells» (on pense à Brian Eno) et «Can It Be» (très british), avant «Oak» (original: «Oak Overture» se retrouve au milieu du morceau), où Plumer et Bailleau s’en donnent à cœur joie, ce dernier clôturant l’album avec «Lux 4», montée au ciel de nappes électroniques en formes de soucoupes. Carrément excellent.
* Après le camélidé précité et avant les références de « Bells », le titre s’imposait…
Auguste
https://stilll-off.bandcamp.com/album/oak
25/06/2019
Mythopoeic Mind
Mythopoetry
Prog-rock/canterbury – 42’38 – Norvège '19
Sorti de la tête bien pleine de Steinar Børve, membre de Panzerpappa, (un des meilleurs groupes actuels de rio/avant-prog), le groupe Mythopoeic Mind a pour origine un projet que Steinar a mené il y a 20 ans en hommage à Tolkien et à son «Seigneur des Anneaux». De ce projet musical qui fit long feu, (une seule représentation lors du festival Tolkien à Oslo), le musicien s’est inspiré pour constituer une partie de l’architecture de ce nouvel album «Mythopoetry». Entouré de ses compères actuels de Panzerpappa et de quelques musiciens comme Arild Brøter issu de Pymlico, de Pål Selsjord Bjørseth de Gentle Knife et de Kjetil Laumann (au chant nasillard) venant de Dødsverk, le saxophoniste norvégien explore les anciennes contrées du rock progressif, et plus particulièrement celles du canterbury qui sera le fil conducteur de toute cette œuvre.
Après une courte introduction en guise d’invitation, l’opus se déclare et révèle ses ambitions en nous plongeant dans une rythmique digne d’un «Roundabout» yessien lorgnant parfois un peu vers Van Der Graaf Generator et déjà, le canterbury (le solo à la guitare sur ce titre est une pure merveille).
Par petites touches par-ci, petites interventions par-là, le saxo et le drôle d’instrument du leader qu’est l’Akai EWI, (instrument midi usb qui se joue comme un instrument à vent et qui en restitue les sons), hantent l’album d’une présence remarquée. L’ossature de l’album est notamment constituée de deux morceaux dont la durée dépasse les 10 minutes, mais la pièce la plus remarquable est à mon sens «Train of Mind», et son Fender rhodes envoûtant, son chant entêtant, son lent cheminement ensorcelant; une véritable merveille! «Sailor's Disgrace», (13’40), est aussi un aliment majeur de cette omelette norvégienne. On y trouve tous les arguments, toutes les ressources de la formation. Un p’tit clin d’œil à Yes avec cet orgue délicat qui nous évoque un passage d’«Awaken», ce chant toujours un peu bizarroïde, ces ambiances lentes et raffinées, et ce son, cette atmosphère canterburienne diaphane qui berce perpétuellement l’âme, tout ça est très bon.
Mythopoeic Mind est une très bonne surprise que je conseille avec vigueur aux adeptes des musiques progressives issues des seventies.
Centurion
https://mythopoeicmind.bandcamp.com/album/mythopoetry
26/06/2019
Professor Tip Top
Hybrid Hymns
prog-rock/classic-prog – 46'04 – Norvège '19
Vous est-il déjà arrivé en écoutant de la musique que soudain l'air vous semble plus pur, plus doux, que le soleil soit plus brillant, plus chaud... que soudainement vous vous sentiez bien, heureux... bref en vie...? Voilà ce qu'ont produit sur moi les 12 titres qui composent ce cinquième album des Norvégiens de Professor Tip Top. Ici tout est douceur et apesanteur, la voix de Svein Magnar Hansen est mélodieuse et envoûtante; écoutez les titres «the Final Night», «Turing Machines» et «Machine Emotions». Laissez-vous aussi entraîner aux rythmes répétitifs qui font penser à Alan Parsons, mélangés à la guitare floydienne sur «the Dogs are Coming».
Vous l'aurez compris, Professor Tip Top va chercher son inspiration dans les années 70 du côté de Camel, Pink Floyd, Alan Parsons... sans jamais singer ni être ridicule. Mais n'attendez pas de surprise de cet album qui ne fait, (certes avec talent), que suivre le chemin tracé par ces illustres prédécesseurs. Le grand talent de Professor est de nous livrer des compositions faussement simples dont la complexité apparaît au fil des écoutes, un peu comme ces bonbons dont la saveur éclate lentement en bouche.
À consommer sans modération.
Tiro
27/06/2019
Nine Skies
Return Home
prog-rock – 68’57 – France ‘18
C’est en 2013 que le duo niçois, composé d’Éric Bouillette (chant, guitares) et Anne-Claire Rallo (claviers) sort un premier EP, «Dark Void». Ils ont été rejoints par Freddy Scott (chant), Alexandre Boussacre (chant), David Darnaud (guitares), Alexandre Lamia (guitares, claviers), Bernard Hery (basse), Laurent Benhamou (saxophones) et Fab Galia (batterie) tandis qu’Éric s’est recentré sur la guitare et le piano. L’album qui nous occupe ici s’avère, en réalité, une nouvelle édition de «Return Home», paru en 2017, augmentée pour l’occasion de quatre nouvelles versions de certains des titres initialement présents. Le concept sous-tendant cet opus est relativement simple: le regard extérieur de quelqu’un par rapport à la vie de plusieurs protagonistes dans une grande cité contemporaine. Nos Méditerranéens font montre d’une grande capacité dans l’écriture de leurs pièces (et également en termes de production): ils peuvent rivaliser sans rougir avec les standards venus de la perfide Albion!
Si la plage titulaire débute en douceur par quelques notes égrenées au piano, l’album nous emmène ensuite vers un progressif de haut niveau, digne d’un Steven Wilson. C’est une mélodie joliment troussée qui débarque ensuite avec «Season of Greed», accompagnée de douces notes de flûte. L’instrumental «Catharsis» nous invite à la recherche de l’univers parfois feutré que pouvait revêtir les maîtres Genesis! La suavité d’un saxophone s’empare de nos sens sur «Blind Widower (Part I)». Sur la seconde partie de ce titre (un peu plus loin), la flûte nous revient avec des passages moins «bucoliques». Des passages plus jazzy surviennent dans «The Slight Snake», toujours cintrés de mellotron. Sur «Time for Them to Go», je suis aux anges: les glissandos à la guitare acoustique sont très présents et j’ai toujours adoré entendre ceux-ci!
Un bien bel objet sonore que je vous invite à découvrir par vous-mêmes avant la sortie très prochaine du nouvel album!
Tibère
https://nineskies.bandcamp.com/
https://youtu.be/ZAupEwoxCsY?fbclid=IwAR1sA1okqGV1spm4_oANgL-ZI6ImuuvNL8WB1S8jF29Lpm_ac0nHGzHsppc
28/06/2019
Romantechs
U.P.F. present Reimagine
chansons progressives – 40’18 – Australie ‘19
Fondée par Mark Trueack (Unitopia) et Steve Unruh (Resistor), l'U.P.F. (United Progressive Family) est un collectif mondial d'artistes, de musiciens, d'arrangeurs et de producteurs internationaux qui se consacrent avec passion au renforcement du changement dans le monde en dirigeant un mouvement artistique et musical dédié à l'environnement durable. Ça, c’est fait… Mais l’album d’U.P.F. (Planetary Overload Part I: Loss) comprend également un album complémentaire intitulé U.P.F. présente Romantechs: Reimagine qui ressemble, selon Trueack, à la visite de Vangelis à Unitopia, (le groupe avant U.P.F. ... Vous suivez?)! En outre, la deuxième partie de Romantechs est en cours de préparation et pourrait être prête à être lancée en octobre 2019.
«Planetary Overload: Loss» est la première publication d'un projet en deux parties. Steve Hackett, Jerry Marotta, Nick Magnus, Hasse Fröberg, Michel St-Père et bien d'autres ont participé à cette première partie mais je dois ici vous parler de ce fameux Romantechs et là, imaginez vous un Barclay James Harvest qui aurait «copulé» musicalement avec Jon Anderson et Vangelis! Oui, la voix de Mark Trueack n’a rien en commun avec celle du sémillant chanteur de Yes mais musicalement, c’est un pur océan de bonheur mélodique et ‘habité’ d’une grâce féérique comme Jon Anderson sait faire. N’attendez pas du rock progressif au sens du terme mais un opus de neuf chansons magnifiques d’un lyrisme bouleversant, se rapprochant des travaux de Vangelis et Anderson. Nulle plus qu’une autre n’est à extraire ou mettre en exergue tant elles se ressemblent, ceci dit sans reproche mesquin caché derrière.
Il est temps de vous présenter le trio formé par Romantechs. Grâce à la voix unique de la chanteuse Grâce, le chanteur/compositeur Mark Trueack a réalisé le rêve de sa carrière dans l’industrie musicale. Du milieu des années 80 au début des années 90, Trueack a travaillé de l’autre côté du secteur, acquérant de précieuses connaissances en tant que responsable de la maison de disques EMI Music avant de fonder Unitopia, le groupe de prog’ australien.
Il a aussi poursuivi sa passion pour la performance en recréant le spectacle hommage à Genesis ‘The Genesis Touch’. Le groupe jouit d’une excellente réputation au niveau national et joue constamment dans des salles bondées. Il faut aussi parler du second larron, le Français Christophe Lebled qui a travaillé plusieurs fois avec Jon Anderson, fournissant des outils essentiels au célèbre album conceptuel du leader de Yes, «Survival and Other Stories». Christophe a commencé à apprendre à jouer du piano classique, puis divers claviers lorsqu'il s’est ouvert au rock progressif.
Chris rend hommage à Vangelis sur l'album Tribute to Vangelis (2011), tout en conservant la même mélodie et les mêmes structures complexes d'harmonie dans les compositions de Vangelis, le son et l'atmosphère lui sont propres, ce qui en fait une recréation magistrale pour compléter le paysage sonore gracieux du compositeur.
Quant à Steve Unruh, il a produit des musiques profondes, organiques et réalistes en collaboration avec des projets tels que Resistor, The Samurai of Prog, Mark Bernard Decameron I, II, III, Babylon Voices tout en ayant son propre groupe prog/folk, Unruh…
Cet album est donc un condensé de chansons progressives d’une qualité exceptionnelle qui vient en complément pour les admirateurs d’Unitopia et United Progressive Family, les autres devraient savourer cette galette pour ce qu’elle est, un monstre de mélodies addictives!
Commode
Album non disponible sur bandcamp
29/06/2019 : Les samedis étranges
Bunkr
Schluss
math-rock – 45’38 – Suisse ‘19
Premier album pour ce duo instrumental helvète qui, s’il ne révolutionne pas le genre, propose un disque plein d’idées. Un batteur sûr de lui qui maîtrise les mesures asymétriques et en change avec une virtuosité rare, secondé par une guitare non moins précise qui sait offrir des colorations très différentes grâce à un usage important de différents effets. C’est particulièrement le cas sur le début de l’album, les progressions mélodiques peuvent déboucher sur des riffs en plein territoire du rock alternatif mais aussi lorgner sérieusement sur les territoires du stoner rock, notamment sur la seconde moitié du disque. Le mélange entre le côté clinique du math-rock et l’aspect gras, “blueseux” du stoner a de quoi surprendre et on sent que le groupe hésite parfois entre les deux. D’aucuns qui apprécient ces deux styles ne pourront qu’être intéressés par ce mélange.
Je reste toutefois sur une certaine impression de flou, ces deux musiciens sont jeunes et talentueux, ils donnent encore un peu l’impression de chercher leur voie. J’ai hâte d’écouter leur prochain disque.
Eutropius
https://bunkr.bandcamp.com/track/schluss
Lyod
Mysterious not Terrible
dark-folk – 38’58 – Russie ‘19
Lyod s’est fondé en 2017. Formé de Dmitry Fokin, le poète, qui écrit les textes et de deux compositeurs: Vadim Aleksandrov l’ex-leader de Benjamin’s Dreams (je n’ai pas trouvé d’info à propos de cette formation) et de Sergei Igorevich, ex-leader de Adron (projet black metal industriel). Tandis que Vadim chante d’une voix rauque et joue sur un hurdy-gurdy (pour info, il s’agit d’une vielle à roue), Sergei joue sur un jouhikko (seconde info, c’est une lyre avec un archet) qu’il a fabriqué lui-même; on peut en visualiser une démo avec la reprise de «Dagr» du groupe norvégien Wardruna qui adhère aussi à cet instrument. À l’écoute de cet album, on pourrait pourtant croire qu’il existe bien d’autres instruments: j’entends par exemple souvent le son d’un didgeridoo notamment sur «Emili», mais aussi le tintement du bâton de pluie sur le même titre, il faut donc supposer que seuls, les deux instruments précités ci-dessus peuvent diffuser une belle gamme de sons.
Lyod est inspiré par la mythologie nordique ainsi que par la beauté de la nature, même s’il s’agit de l’étrange cri d’une corneille ou d’un ruissellement d’eau, comme sur «Forge World», un cover de «Rising Arrows» du groupe de metal biélorusse Gods Tower (pour moi, une bonne découverte).
L’atmosphère est parfois envoûtante, on assiste à un rituel sur la crête de l’Oural: «The Ridge of the Urals», parfois plus joyeuse sur le dernier titre: «Sword and Feather», qui pourrait ressembler à une musique médiévale traditionnelle.
En conclusion, Lyod propose à tout le monde de faire le plein de couvertures chaudes, de réduire la lumière et d’aller dans leur univers…
La Louve
https://lyod1.bandcamp.com/releases
https://www.facebook.com/iicefolk/videos/1912694418851156/?hc_location=ufi
Identikit
Mind's Eye Meteorology
klezmer prog jazz – 38’52 – États-Unis ’19
Avec ses influences d’Europe centrale, de l’Est et balkanique, la musique klezmer a intégré, en particulier aux États-Unis, des éléments de jazz, adjoignant, tel que le propose ce sextet américain, saxophone et piano au violon et à la clarinette, typiques du genre. Le Hammond rehausse parfois de sa touche nostalgique («Horizons») une musique expressive, enlevée, à la mélancolie virevoltante et aux tempi irréguliers - historiquement, les musiciens ajustaient le rythme à l’état de fatigue des danseurs, lors des (interminables) fêtes qu’ils animaient. «Mind's Eye Meteorology» est le premier album d’Identikit, jeune pousse qui sévit à Atlanta (Géorgie) et s’est imprégnée des bonnes vibrations de Tigran Hamasyan - même si le groupe revendique «ne rien comprendre au jazz» -, Mr. Bungle ou Frank Zappa. Parmi ces 7 compositions, «Arrested in Amber» marque une pause ballade, un peu à la Tom Waits, après un partiellement déclamé «West coast is incredible, love it out here!!» et un impétueux «In Torrents» (qui débute par un craquement de tonnerre, et une poignante plainte au violoncelle), et avant «The Little Finger Tango», d’abord langoureux - mais pas pour longtemps.
Auguste
https://identikitatl.bandcamp.com/album/minds-eye-meteorology
Carla Diratz / Pascal Vaucel
pRéCis.AiMaNt
jazz-rock psychédélique – 52’15 – France ’19
Avec ce titre qui joue sur deux mots (ou un) et dont la graphie titille, le duo parisien revisite une atmosphère qui n’est peut-être pas de son âge, fouissant des quatre mains la terre fertile du début de la décennie ’70 (Paris figure la France mais Pascal parle de régions ‘septentrionales’ dans… «Septentrional»), mais peut-être bien finalement - ou alors de celui de leurs parents, qu’ils ont bien connus, forcément - et donne à entendre une dizaine de compositions irrégulières, entre jazz et rock et bruits et sons et voix enregistrée comme l’était le clavier de Joy Division par Martin Hannett (fausset, décalé, pour tout dire légèrement désaccordé), celle de Carla Diratz, prêtresse de l’invocation déstructurée, que Pascal Vaucel traque de sa guitare et de ses cymbales. «Sea Song» (de Robert Wyatt) apparaît dans ce froissement sonore comme une oasis, scindant en deux l’album (le premier je crois) de ce couple en musique, d’une tranche fidèle à la fois au monde sonore originel et à celui du duo (Wyatt dixit), "inhabituel, inventif". Et il a raison, Robert: dans cette chimère fourbue de réminiscences, une tristesse infinie sourd de la voix, une peur émouvante exsude des cordes, une conscience émerge.
Auguste
https://carladiratz-pascalvaucel.bandcamp.com/releases
Buke And Gase
Scholars
pop-progressif électro baroque – 37’18 – États-Unis ’19
Duo de Brooklyn, il (Aron Sanchez) et elle (Arone Dyer) inventent textes, musiques - et instruments: le buke, un ukulélé baryton ou la gase, hybride basse/guitare - les deux ont accouché du nom du groupe. Plus récemment (c’est ça, les six ans entre l’album précédent et «Scholars»), naît de ces quatre mains créatrices l’Arx, un dispositif qui déclenche des sons percussifs, modifie les effets appliqués aux instruments et contrôle les harmonies vocales - avec, en conséquence, une profonde remise en cause de la palette sonore: directe, concise, colorée électro bien sûr, percutante et signifiante. «Stumbler» sonne comme un «Out on the week-end» où Neil Young se serait shooté avec les gars (et les garces) de Superlux. «Scholars» signe la rencontre entre Bizet et Nirvana - les grooves sont joués aux pieds (grosse caisse, tambourin, caisse claire…). «Derby», c’est Madonna sur une pulsation plus inquiétante que torride, le string (à la Alex Gaudino) en moins, la (quoi?) en plus. «Pink Boots» révèle Bananarama en flagrant délit d’accointance avec Bow Wow Wow (si!). «Temporary» évoque les riffs grattés de l’excellent autant qu’éphémère The Minnaars (ici au ralenti - enfin c’est relatif tant le groupe speedait la salle entière). L’album est d’une originalité novatrice (Buke And Gase puise à tous les étages de l’héritage), mais sans pitié, qui n’autorise la moindre respiration - si, «Qi Ball», mais qui perce seulement aux deux tiers de l’album, ou peut-être «Ranger», qui le clôt.
Auguste
https://bukeandgase.bandcamp.com/album/scholars
30/06/2019
Francis Décamps
The Gift
néoclassique progressif – 59’54 – France ‘18
Le but poursuivi par Francis était d’emmener l’orchestre des jeunes du pays de Montbéliard pour y donner un concert en l’honneur des 130 ans de la Statue de la Liberté à Manhattan. Le 28 octobre 2016, un concert est donné (et filmé) dans une salle de Montbéliard avec cette formation TAKAJOUER constituée donc de jeunes dont certains issus de milieux défavorisés. «The Gift» est donc le résultat des nombreuses heures de mastering nécessaires à sa réalisation et à sa sortie le 17 mai 2018.
Précédé d’un prologue plus rock et moins symphonique que le reste, «Prologue THE», les quatre mouvements de la «Symphonie No 9», dite «Symphonie du Nouveau Monde», d’Antonin Dvorak sont ici réinterprétés dans un esprit plus moderne. Tout le monde connaît certains extraits de cette œuvre (n’oublions pas que Gainsbourg par exemple s’en est inspiré pour certaines de ses chansons, notamment «Initials BB»).
Les musiciens constituant l’assise «rock» de cette formation sont: Francis Décamps (clavier), Pascal Gutman (basse), Damien Chopard (guitare), Thomas Lotz (clavier) et Senri Kawaguchi (batterie).
Dans le premier mouvement, «Génération», on retrouve le thème déjà évoqué ci-avant avec de beaux développements. Moi qui ne connais pas l’œuvre originale de Dvorak, je suis conquis d’emblée!
Le second mouvement, «Innovation», intimiste dans son introduction, rattrapé par les cuivres, montre ensuite une écriture très progressive qui ne peut que me réjouir.
C’est la section rythmique qui ouvre le troisième mouvement, «Fraternité». Les cuivres ont ici aussi la vie belle! Mais un solo de batterie nous enfièvre après la sixième minute, laissant la place à de bien beaux arpèges de guitare. Le morceau se termine tout en douceur.
Vient le tour du dernier mouvement, «Tolérance», coupé d’un passage pianissimo pour se terminer en fanfare (façon de parler!).
Sans conteste une pièce différente pour notre cher Francis, mais que je vous recommande chaudement!
Tibère
https://www.thegift-fdc.com/the-gift/musique/