Octobre 2019

01/10/2019

Atomic Time
Out of the Loop
rock progressif/néo-progressif – 62’06 – Brésil ‘19
Bien qu’originaire de Bauru au Brésil, la musique d’Atomic Time n’a strictement aucun rapport avec celle de leurs compatriotes d’Angra (RIP André Matos). Il est le fruit d’une longue amitié et complicité entre Pedro D’Incao (guitare) et Sylvio Serra (batterie) puisqu’ils jouent ensemble depuis plus de trente ans. Leur solide expérience, alliée à la fluidité de nouvelle génération de Roger Lopez (chant) et à la rébellion de Gabriel D’Incao (claviers), leur donne une assise certaine. Signalons que la basse est tenue par João Ribeiro. S’ils reconnaissent l’influence de groupes comme King Crimson, Radiohead ou Emerson, Lake & Palmer, leur son leur est propre! En écoutant distraitement «Robot Can Lie», la plage d’ouverture, ma première réaction fut que je n’étais pas la personne la plus qualifiée pour chroniquer «Out of the Loop» car j’avais l’impression de me trouver dans un trip e-music ou quelque chose du genre. À la deuxième tentative, à un niveau sonore supérieur, le nom de nos compatriotes Quantum Fantay me vint à l’esprit (désolé, je suis Belge et j’en suis fier!). Pourtant l’utilisation d’un Moog leur confère un son bien particulier. «Shooting Star» nous ramène en terres néo-prog, servi par un chant d’une grande justesse et de très beaux arrangements aussi bien à la guitare qu’aux claviers. Les perles s’enchaînent ensuite sans coup férir, voyageant allégrement entre le néo-prog le plus pur ou des ambiances plus planantes («Red Rain»), ou même des atmosphères pratiquement pop («The Same»). Sur «Living in the Ghost Streets», des nappes anxiogènes et mortifères soutenues par des guitares cristallines glacent les sangs. Le plus long morceau (dix minutes), «No Time For Angels», est introduit par de lugubres notes aux claviers et mélange, comme il se doit, parties enlevées et d’autres plus lourdes pour se clôturer en apothéose. N’ayez donc aucune crainte à laisser traîner vos oreilles de l’autre côté du monde: le trip en vaut largement la peine!
Tibère
https://atomictime.bandcamp.com/releases

https://www.youtube.com/watch?v=MzVnqfhswPE&fbclid=IwAR06Yxdf-q-qPmUXKroNg-3x2TqzbLZ_JQFfZk_aQj8BtXmAxwMHWe2UmtA

02/10/2019

Koen Herfst
LEO
métal-progressif – 63' 26 – Pays-Bas ‘19
Alors là, faites bien attention à cette chronique car vous êtes tombés sur du lourd en matière de métal-progressif! Petite présentation de Koen Herfst pour ceux qui ne le connaissent pas encore. Koen est un des meilleurs batteurs néerlandais de sa génération et certainement le plus polyvalent. Il se fait connaître avec «Armin van Buuren», un DJ célèbre dans le monde avec lequel il se prête à des lives dans des lieux mythiques comme le Madison Square Garden de New York, le Forum de Los Angeles. Début 2019, il fait partie de «The Cards», un groupe de blues rock fondé avec Paul Quinn, guitariste historique de «Saxon», et Harrison Youn, claviériste de «DORO» et «UDO». Il tourne également dans sa carrière avec «After Forever», Anneke van Giersbergen, «I CHAOS», «Dew-Scented» et «The Gentle Storm».
L'album qui nous intéresse aujourd’hui est son deuxième essai en solo… enfin en solo, il sait se faire aider! En guest sur cet album: Jordan Rudess, claviériste d'un petit groupe américain «Dream Theater», toujours Paul Quinn de «Saxon», Rood Jolie de «Within Temptation», Rob Van Der Loo, bassiste d'«Epica», Marcela Bovio «MaYaN», ex-«Stream of Passion», et bien sur l’inégalable voix de Anneke Van Giersbergen. Si si, vous avez déjà sûrement entendu Anneke; pour rappel, elle a commencé comme chanteuse du groupe «The Gathering», elle poursuit ensuite en solo avec «Agua de Annique», elle est la chanteuse principale de l'immense «Devin Townsend» et ses nombreux projets. Actuellement elle poursuit avec «Vuur» et son projet avec Arjen Anthony Lucassen du nom de «The Gentle Storm». Tout cela pour vous dire que le niveau technique promet. Le titre de l'album «LEO» est un hommage à Leo Herfst, le père de Koen, décédé lorsque celui-ci avait seulement 10 mois. Pour ce concept album, il s'est inspiré de la manière de faire d'Arjen Anthony Lucassen dans «Ayreon» pour concevoir un style d’opéra rock, en faisant jouer les personnages de la mère par Anneke, du père par Merijn van Haren de «Navarone». Koen, lui, joue son propre rôle et celui de la mort par certains effets. Musicalement on retrouve énormément aussi d'«Ayreon» mais avec un apport d’influence de chaque musicien; on reconnaît régulièrement qui apporte quoi dans les différents titres. Il y a donc du «Epica», du «Dream Theater», du «Pain of Salvation», du «Devin Townsend »… un sacré mélange mais parfaitement équilibré. La rythmique est relativement rapide et dure et, ne l'oublions pas, l'album est créé par un batteur et les moins métalleux d'entre vous risquent sûrement de décrocher à un moment. L'ensemble est d'une justesse parfaite, avec une production sans reproche et une créativité extrêmement recherchée. Pour ceux que cela rebute il y a très peu de voix gutturales. Que vous soyez progueux ou métalleux, vous ne pouvez pas passer à côté de cet album…
Vespasien
https://koenherfst.bandcamp.com/album/leo

https://www.youtube.com/watch?v=_dQHBlQP3Xs&fbclid=IwAR3JUHdyEpcfzeKrOoJy1PxiYJwg8LLPNYYHZNvH5pQRT6V7VwUTqCKeiuk

03/10/2019

El Jice
Landings
ambiant/minimal/new-age – 69’00 – Belgique ‘19
Septembre 2058. Pendant que le Dux Bellorum pédale au Sto-vo-kor, je continue l’écoute de son legs. (Voir épisode précédent, chronique de Alterra «Itopia».) Coincé quelque part entre Egg et ELP, le disque d’El Jice. Bien que les terroristes auditifs du début d’siècle se soient roulés sans vergogne dans la poisse glaciale du MP3 et fi de l’attrait récent des mômes pour le Holodeck, je reste fidèle à mes habitudes. Play...
Malgré une cover bricolée maison, l’élégante vénus callipyge à la crinière vermillon couchée sur lit de fleurs m’oblige à l’indulgence. Sirène médusée contemplant le visiteur, son vaisseau, ciel menaçant... une supplique à l’atterrissage.
Le vieux geek chloroformé par tant d’étrange pense machinalement à «Encounter at Farpoint», aussi aux difficultés que rencontra inévitablement l’équipe Prog censor afin d’éviter les prudes algorithmes du royaume de Zuckerberg. Anyway.
Lorsque je travaillais encore, il m’était surprenant de constater que l’intensité du café matinal était proportionnelle à l’état d’énervement du gars qui le préparait. Paradoxal. J’aurais volontiers conseillé en infusion à mes collègues pratiquant ce suicide nerveux une petite heure de «Landings»! Doux comme une séance de sophrologie en apesanteur, curieux comme une première caresse, des nappes vaporeuses bourdonnent puis scintillent dans un va-et-vient constant. Outre l'apaisement que m’apporte la découverte de ces pistes, je vous confesse ne pas saisir immédiatement l’intention de l’artiste. Je dépose ensuite la galette au sommet de la pile de papiers inutiles ornant constamment mon bureau.
Aujourd’hui, une nuit transparente et «fraîche» m’oblige à sortir le télescope pour scruter les étoiles. J’apprécie toujours d’agrémenter de musique mes escapades nocturnes. J’emmène donc With Me cette œuvre planante laissée de côté avant-hier. Mise en station terminée, je lance la galette. La magie opère aussitôt. Formidable BO, lancinante, enrobant cet œil pointé vers ailleurs en quête d’impossibles réponses, les atmosphères se succèdent créant un nid douillet aux mystères célestes. X-Files sonore, surprenant même, lorsque les caves cristallines sillonnant une hypothétique exoplanète de la constellation du Cygne se mettent à tinter mélodieusement annonçant délicatement de longues minutes brassées dans les océans acides d’Altaïr.
Rétrofusées en action, je pose le Nostromo. No Aliens Tonight. Il se fait tard. Je remballe le Newton en remerciant l’inconnu de m’avoir offert ce moment de quiétude, hors du temps, parfait! Les artistes sont des explorateurs. Je rends hommage à ceux qui ont l’humilité de créer ces espaces contemplatifs, essentiels parfois à réfréner notre boulimie d’action ou de surprise à tout prix. L’étonnement vient parfois alors qu’on ne l’attend guère, avec le calme, l’immobilité. Dif tor heh smusma!
Néron
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=MrVirZ03Zks&fbclid=IwAR2G2Dn_PK2Qmx2JJRXSWhewmH0-jdnA6TAvebnyqP7tbxMfoYxZsANvu5k

04/10/2019

Thank You Scientist
Terraformer
rock, prog, jazz, métal… – 84’12 – USA ‘19
Il y a des musiques totalement en dehors des lignes, qui passent au travers des radars à étiquettes. Ce troisième opus de Thank You Scientist est de cette trempe-là. Originaire du New-Jersey, le combo, dont ce «Terraformer» est déjà le troisième LP, et qui s’inscrit dans la lignée de ses prédécesseurs «Maps of Non-Existent Places» en 2012 et «Stranger Heads Prevail» en 2016, est décrit par son leader Tom Monda comme «un groupe de cinglés faisant de la musique pour des cinglés». Il ne croit pas si bien dire. En effet cette musique est tellement surprenante, tellement échevelée, qu’il est difficile de ne pas sortir un peu «fébrile» de ces 84 minutes de musique. Thank You Scientist, («TYS» pour les intimes), et qui fut remarqué dès 2012 par Claudio Sanchez (Coheed and Cambria), s’illustre par sa faculté à faire cohabiter divers genres musicaux dont les affinités ne sont pourtant en rien évidentes. Derrière son style un peu new-prog, comme une sorte d’indie-rock progressif, le band intègre une section jazz faite du binôme trompette/sax plus un violon (à la Ponty) tout en décoiffant à tout moment nos crânes pourtant dégarnis à la dynamite par des riffs métalloïdes et des brisures rythmiques tarabiscotées. Musique parfois fatigante tant sa richesse est quelquefois écœurante. Surviennent bien quelques heureux moments d’apaisement, mais ces intermèdes salvateurs ne durent jamais très longtemps; n’aurez pas le temps de changer de Pampers, une nouvelle salve est toujours prête à gicler, vous voilà prévenus.
Ce «Terraformer» est à la fois génial et rébarbatif. L’alliance de l’ensemble jazz avec le rock est totalement surprenante, et n’allez pas croire que c’est simplement du jazz-rock, non c’est autre chose, c’est Snarky Puppy qui rencontre Frank Zappa au détour d’un échange musclé avec Devin Townsend. Explosif, décapant, éprouvant, cet album est une expérience vivante. Une recherche novatrice, comme le furent celles de Mars Volta dans un autre domaine.
Sont-ce peut-être mes affinités pour le jazz… mais je trouve que le groupe est exceptionnel, bien supérieur, lorsque la section jazz prend les devants et dirige, assoit, maîtrise la joute. J’espère pour ma part que le groupe en prendra conscience et nous proposera à l’avenir un concept dont la mire sera pointée en priorité vers cette position.
Centurion
https://eirthankyouscientist.bandcamp.com/album/terraformer

https://www.youtube.com/watch?v=OKKWQEpS8hI&fbclid=IwAR0FBiYWXeG37xuK2ajQHsxZ2BGgkcZBdq28ltCtdbm4U-P3L057H2vAQUA

05/10/2019

Fervent Send
Denna’s Room
expérimental art rock – 41’03 – États-Unis ‘19
Un chouilla plus expérimental que l’album «Super Stereo» dont je vous ai entretenus il y a peu sur cette page, «Denna’s Room» (dédicacé à Manuel Denna, auteur historique des cover arts du band) lui succède de peu. «Hermit» en est le témoin principal, qui donne le ton: le groupe de Jon Du Bose (guitares, basses et quelques autres petites choses - à cet égard, il n’est pas le seul dans le groupe) cherche - se cherche parfois -, explore et enchaîne notes et sons plus ou moins concrets, au long d’un petit quart d’heure à la surface décousue et au schéma interne circonvolutionnaire. Le legs frippien est là, incisif dans «Banshee», attendri dans «Promise», en même temps que Fervent Send s’en émancipe, cette fois au détour d’une atmosphère, instrumentale, apaisée (les relents frelatés jazz de «Room») et quelquefois sibylline («Tumble Down», au mellotron vaguement pompier).
Auguste
https://ferventsend.bandcamp.com/album/dennas-room?t=4

06/10/2019

Introitus
Shadows
rock-progressif – 59’26 – Suède ‘19
«Shadows» est le quatrième album de ce groupe suédois Introitus agissant en famille, depuis 1999, et constitué de Mats Bender (composition et claviers), le père, Anna Bender (chant), la mère, Johanna Bender (chœurs), la fille, Mattias Bender (batterie), le fils. D’autres musiciens non issus de la famille complètent ce line-up: Pär Hele (guitare), Dennis Lindkvist (basse) et Linnéa Syrjälä (accordéon, ocarina, flûte). L’ombre d’Arena plane sur «Belong» ainsi que sur la plage titulaire. Le tout est très bien interprété mais ne révolutionne pas le genre. Une excellente surprise nous arrive ensuite grâce à «Beyond Fantasy», plage atmosphérique où s’invitent des claviers à la Vangelis; les chœurs et l’accordéon, aux trois quarts du titre, donnent une ampleur particulière au morceau. Du haut de ses treize minutes et quelques, «Desperation» se veut le titre le plus ambitieux et, en ce qui me concerne, remplit parfaitement son rôle avec ses accélérations salutaires. Retour au néo-prog classique avec «Figures», avant la faute de goût de cette plaque: la ballade «My Hero». Heureusement l’ultime titre, «Awakening», sauve les meubles avec sa magnifique intro au piano et à l’accordéon, une partie de guitare intéressante et un final emphatique comme il se doit! Goûtez donc par vous-mêmes les qualités de «Shadows»: il mérite que l’on s’y attarde.
Tibère
https://introitus.bandcamp.com/album/shadows

https://www.youtube.com/watch?v=y8_inmBoPYM&fbclid=IwAR2XJr5hJgty1xWg9_RB59YKIUjPrk0B2gNrfBYlrNZsQc1_b4GovOtZov4

07/10/2019

Devin Townsend
Empath
métal progressif – 74’08 – Canada ‘19
Premier album solo depuis l’excellent «Ziltoid the Omniscient», sorti en 2007, et aussi premier album non conceptuel depuis son "difficile" «The Hummer», dans la veine ambient expérimental un an plus tôt. On retrouve cette fois des pointures comme Steve Vai et Anneke van Giesbergen (The Gathering). Devin n’a pas son pareil pour nous concocter des galettes où se mêlent des plages atmosphériques évoluant vers un rock plus puissant aux colorations symphoniques pour aboutir à des morceaux épiques de métal hurlant. Les effets sonores se mixent aux voix inquiétantes ponctuées d’interventions "dead". La guitare est musclée, comme d’habitude, et la batterie vitaminée. Devin hurle plutôt qu’il ne chante mais les chœurs célestes qui souvent accompagnent sa relative agressivité créent une alchimie magique incomparable. Ce «Empath» très souvent énergique se conclut par une longue pièce de plus de 23 minutes qui ne peut en aucun cas laisser l’auditoire indifférent, quel qu’il soit (l’intro aux accents de guitare floydiens de «Singularity» fichent d’emblée le frisson). Stupéfiant comment Townsend parvient à passer d’une ballade primesautière à du métal en fusion, en passant par des envolées quasi classiques (le très beau «Borderlands» suivi du majestueux «Requiem»). Le style de Devin Townsend est unique dans toute la scène du métal progressif. C’est définitivement un créateur de paysages sonores qui boostent les émotions. Les arcs-en-ciel qui les illuminent comportent des couleurs encore jamais contemplées par l’œil humain. Le mélange des sens qui mène au délire.
Clavius Reticulus
https://www.hevydevy.com

https://www.youtube.com/watch?v=1n7uvokARQ4&fbclid=IwAR0j9uAUYb_FxAfnvgsnog5J5xtKL9zuzshSiv7zhzEiZ_DYFgobdseMDMA

08/10/2019

Vikingur Olafsson
Bach Reworks
classique intemporel – A Side 20:46 / B Side 24:18 – Islande-Allemagne ‘18
Le lien historique entre musique classique et rock est d’une évidence telle que le rappeler est inutile. Les innombrables créations inspirées par les œuvres anciennes ont fait le bonheur de bon nombre de groupes et il y a assez de références pour s’y replonger si besoin en était.
Dire que Johann Sebastian Bach est une source d’inspiration historique est un truisme et ce n’est pas Ekseption qui démentira. Pourtant, la main tendue au maître trouve ici une nouvelle respiration, sans plagiat, sans copier-coller. Le pianiste islandais Víkingur Ólafsson propose une relecture de certains préludes et autres grands classiques avec une émotion et une qualité inédites. On pourrait parler de «ré-imagination» des partitions, dans le respect du livret original. On retrouve le Prélude en sol majeur ou encore l’Adagio BWV 974, la Variation en do mineur (intemporelle).
Mais où est le prog là-dedans? Et bien il suffit d’écouter comment Olafsson transpose tout cela avec les interventions aussi précises que magnifiques de musiciens tels Valgeir Sigurosson (qui a travaillé avec Björk), Hans-Joachim Roedelius (qui a fondé Kluster-Cluster…) ou encore Ryuichi Sakamoto ou la violoncelliste Hildur Guonadottir. Cette dernière donne une dimension complètement actualisée qui apporte une réelle majesté musicale n'ayant d’égale que l’humilité d'Olafsson. La pièce «Bach mit Zumutungen» est une relecture de la transcription de Thomas Rabitsch, à laquelle le musicien apporte un sound design très personnel et qui revit à nouveau.
Le paradoxe avec le prog est que les titres dépassent rarement les 3 minutes; mais là n’est pas le critère, puisque le prog, c’est un état d’esprit, pas du marathon stérile.
Vikingur Olafsson a été désigné par le New York Times comme étant le «Glenn Gould islandais», mais il est sans doute un peu plus que cela.
Bach reste Bach, avec un souffle nouveau qui apporte une nouvelle vie à l’œuvre, qui décidément ne vieillira pas. Le progueux pointu et aventureux, ce qui est un pléonasme, posera délicatement ce 33 tours et prendra le temps de la découverte, loin de la pollution sonore. Qu’il en soit ainsi.
Marc-Aurèle

Deutsche Grammophon (quand même…)

https://www.youtube.com/watch?v=aYPld96pzR4&list=OLAK5uy_kHRzPDoS_IcwnGEvhnBP7RO0vlgAcpMDY&fbclid=IwAR3aBi0OTldETyFf95sbPOC5WW0GiT3Um7LCLS_vT9z04wwb8nOCbymHjMA

09/10/2019

This Winter Machine
A Tower of Clocks / Live in Leeds
néo-prog symphonique – 61’06 / 38’17 – Angleterre ‘19
Le premier album de la formation du Leicestershire, «The man Who Never Was», sorti en 2017, m’avait laissé dans la perplexité: production moyenne mais avec un talent certain… C’est donc avec quelques appréhensions que j’ai abordé l’écoute de ce nouvel enregistrement, d’autant plus que du line-up original ne subsistent que le chanteur Al Winter et le claviériste Peter Priestley. Allez savoir si le changement de label et de partenaires de jeux y sont pour beaucoup, mais ce «A Tower of Clocks» montre à quel point la formation britannique est digne d’intérêt. On flirte certes avec tous les clichés du genre, les influences IQ sont présentes (écoutez «Carnivale» pour vous en convaincre), ou encore les claviers sur «The Hunt» y laissent entrevoir l’influence de Twelfth Night. Mais rassurez-vous, le groupe est capable de nous proposer des moments de pur bonheur, nous faisant oublier ses célèbres influences. Écoutez «In Amber», le premier single: l’intro piano-voix est à tomber.
L’opus est donc une création intéressante mais qui manque par moments de folie, peut-être trop scolaire bien que moins facile (dans le sens commercial du terme) que le premier album, et donc plus intéressant pour les progueux exigeants que nous pouvons être.
Le problème - et c’est une remarque qui vaut pour les productions actuelles - est qu'on a l’impression que les albums se suivent et se ressemblent. This Winter Machine en est un exemple de plus et ce n’est pas le mini live à Leeds qui balaie cette impression. En effet, ce nouvel album est disponible avec un CD bonus proposant trois enregistrements en concert, bien mais… plats, sans étincelles ni magie... N’est pas Genesis ou IQ qui veut…
Ceci étant, ne boudez pas cet album! Auriez-vous parié sur l’avenir de la bande à Gabriel à l’écoute de «From Genesis to Revelation»? Le prochain de This Winter Machine… pourrait être leur «Trespass»...

Tiro
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=EM2n62eA1go&fbclid=IwAR3m8ej6G3UVSxW9RB-j7NDvuDGsTEGgSBeRzEZkqoa9ZDqaEpHr_b5CBiE

10/10/2019

Broken Parachute
Living Dangerously
rock progressif – 61’52 – Angleterre/Canada ‘19
Le binôme Taylor/Bell, constitué depuis une longue amitié qui naquit dès l'université, nous propose le second volet de leur collaboration après un premier jet, «Down is the New Up», datant de 2013. S'ils ont sévi l'un et l'autre dans divers projets musicaux, c'est ensemble, avec Broken Parachute, qu'ils semblent s'épanouir, et ce «Living Dangerously» en témoigne.
La pochette laisserait penser qu'il s'agit d'un groupe de néo-progressif, mais c'est pourtant davantage vers la période des seventies que nous mettrons le cap, entre rock progressif traditionnel et une certaine idée du classic-rock. Les sonorités de vieil Hammond (assez présent sur cet album) évoquent les anciens Deep Purple, et la trame stylistique, elle, renvoie à la fois au classic-prog et au rock couillu des seventies. Des effluves d'un passé qui aujourd’hui sont régulièrement remis sur le métier par le biais de nombreuses formations; qui s’en plaindra!?
Même si on pourrait regretter un traitement un peu trop lisse, pas assez graveleux (les voix, le son, la production), le résultat global est à la hauteur. C'est dans les moments plus progressifs que le groupe (Markus Taylor: guitares, basse, programmation, percussions; Ben Bell: claviers, voix, basse; James Chapman: batterie) prend son envol. Exemple avec le titre «Ghost», où les deux hommes + le batteur donnent libre cours à leurs instincts. On regrettera donc un peu cette tendance à vouloir être mélodiques envers et contre tout, alors que leur potentiel semble mieux s’épanouir dans les moments plus complexes, comme lors des harmonies davantage tarabiscotées sur «Tempest» qui feraient même parfois songer à Gentle Giant. Confirmation de cette filiation avec la plage titulaire, piquée elle aussi par le gros dard des vieux et néanmoins toujours Gentils Géants.
Bref un bon album mais à l'attelage trop retenu, qui n'y va pas à fond. Malgré nos vieux os, on aurait pourtant bien aimé dévaler la montagne sans airbag; ben oui quoi «Living Dangerously»! Peu importe, cet opus est une belle réalisation qui souffre sans doute d'être le produit de deux musiciens travaillant à distance, séparés par un océan.
Centurion

https://brokenparachute.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=g_SDS42mzKA&fbclid=IwAR1w9BjuA45YBpvk45n52nqM4MPdZ4ykbvs89Cqzo9CF-lCt5Bc5ADzQxoM

11/10/2019

Twink (with Moths & Locusts and Heavy Friends)
Think Pink IV Return to Deep Space
rock psychédélique/space rock – 38’04 – Angleterre ‘19
Il a croisé les baguettes en compagnie de Syd Barrett, Steve Howe, Ronnie Wood, Jon Lord, Nik Turner ou Mick Farren. Il a joué avec The Fairies, Tomorrow, Pretty Things, The Deviants, Santa Barbara Machine Head, The Rings, Elton Motello, PinkWind. Il a été des vagues psychédélique, progressive, punk, new wave - rock, quoi. Avec son album «Think Pink», paru en 1970, il a marqué le courant psychédélique anglais au fer rouge - ou d’une pierre blanche, c’est selon. À 75 ans, John Alder (c’est lui, Twink), réédite son coup avec ses copains de Moths & Locusts, space rockers de Vancouver, et quelques autres pour un «Think Pink», le retour. Et quel retour! «Travailler sur cet album au Canada m’a ramené, en direct et sur un tapis volant, aux sessions originales de 1969 à Londres», sourit-il. Il a raison, la maturité - celle de la technique qui magnifie le son - et le mélange intergénérationnel en plus. La balance semble pencher un peu plus vers le space (l’excellent «Sara from the Sahara» qui ouvre l’album, le cap-canaveralien «Bluebeard» ou le cinématique «Year of the Muskox»)? Mais non, le plateau psyché est également fourni: «High & Dry», à l’atmosphère puissamment orientée «Careful With That Axe, Eugene» (Pink Floyd), «Witches of Love» où "l’amour trouve un chemin", le rassembleur chant de barricade «Ain't Got a Clue», ou «Fear the Unknown», dont le phrasé évoque, lui aussi, le poète punk mancunien John Cooper Clarke. J’ai rencontré John (Alder) en 1977, dans les toilettes d’une entreprise de "bonneterie en gros" (c’est comme ça que ça s’appelait) de la banlieue bruxelloise, où je travaillais comme étudiant et lui pour nourrir sa compagne du moment, belge. S’adressant à l’urinoir, il chantait à tue-tête "God save the queen / The fascist regime", j’ai répondu au mien "They made you a moron / A potential H bomb" et on s’est tout de suite bien entendus.
Auguste

https://thinkpink50th.bandcamp.com/album/think-pink-iv-return-to-deep-space

https://www.youtube.com/watch?v=u545qSCO7SM&fbclid=IwAR1wQa6bBi3fMK2YKSnLLFSCRqUcerPSdyxSYQ_DogUj18mxLYODPsVjZr8

12/10/2019

Chachuba
Live at Moonshadow Tavern 2.18.19
space-rock/électro – 79’67 – USA ‘19
Un band de Chicago formé par quatre musicos qui aiment arranger l’électro et les rythmes syncopés typiques du space-rock. Certains critiques y voient du jazz-fusion. Je cherche toujours. D’autre part ils se revendiquent des influences Pink Floyd, STS9, Disco Biscuits et Board of Canada. À part le premier cité, je ne vois pas de qui il s'agit, et je cherche de toute façon le rapport avec Pink Floyd... Oubliez ça et plongez dans ces rythmes mesmérisants menés par une batterie énergique sur laquelle planent des phrasés électro reverb cosmiques. Aucune plage en dessous de 10 minutes et «Atmos» fait à elle seule près d’une demi-heure. Pris par le déferlement rythmique, vous serez rapidement hypnotisés. Les mélodies sont très simplistes, ne cherchez aucun artifice dans les compositions mais elles sont diablement toniques! Il y a des moments clairement Hawkwind (Atmos) et d’autres qui évoquent Sweet Smoke (Float Goat). Les plages sont également efficaces du fait de leur longueur. On n’imagine pas ce genre de musique se conclure au bout de 3 ou 4 minutes. Il faut s’y fondre, se laisser envelopper pour ne pas dire “engourdir” pour en goûter tout le sel. Les beuglements et commentaires d’un public restreint de bistro, par contre, on aurait pu s’en passer. Mais il y a des musiciens qui doivent toujours meubler et raconter l’une ou l’autre chose «spirituelle» entre les prestations. Dispensable par exemple sur «Dream Wave» qui fait 16 minutes mais avec quatre minutes de bruitages démonstratifs et de blabla aviné. Ce qui rabaisse ma cotation.
Clavius Reticulus
www.chachuba.bandcamp.com/

13/10/2019

Andrew Roussak
Storm Warning
rock progressif – 51’37 – Allemagne '19
C’est le 3e album solo d’Andrew Roussak, musicien d’origine russe (né en 1968), de formation classique, résidant maintenant en Allemagne.
La première approche des huit titres de «Storm Warning» m’a immédiatement impressionné: virtuosité, créativité, brillante maîtrise des claviers (piano classique, clavecin, orgue Hammond, Moog), références évidentes - et plaisantes - à Rick Wakeman et Keith Emerson, pas mal d’énergie et de mélodies accrocheuses.
Cependant, après plusieurs écoutes, j’ai quelque peu déchanté…
Le vernis s’écaille assez rapidement. L’œuvre ne tient pas totalement ses promesses. La bonne volonté, l’inspiration de l’auteur et le talent des musiciens et vocalistes qui l’accompagnent ne sont pas en cause. Que du contraire! Malheureusement, je perçois cet album comme un fourre-tout de différents genres, du prog des seventies («Regata Storica») au jazz fusion («Storm Warning»), en passant par la ballade(-guimauve) «Chasing Shadows» et le prog metal, sans parler des effets électroniques futuristes («Enter Code») ou du clavecin et des chœurs issus en droite ligne de la Renaissance anglaise («Can She Excuse My Wrongs»). Dans la seconde moitié du long et très décousu «Malta Sketches», on a même droit à ce qui ressemble furieusement à un pastiche (?) du «Kashmir» de qui vous savez!
Passe encore pour cette diversité: elle est inhérente au genre. Le problème (pour moi) est que, au sein même de certains titres, les transitions sont négligées, pour ne pas dire inexistantes. C’est souvent une juxtaposition abrupte et frustrante de parties ultra-explosives et de passages plus doux.
L’auteur ne manque certainement pas d’idées mais n’arrive pas toujours à les structurer et semble dépassé par sa propension à l’emphase et à l’excès de démonstration de son (immense) savoir-faire.
L’unité de l’album s’en ressent fortement et le confort d’écoute est très affecté par cette livraison en vrac, au point que l’auditeur risque - comme moi - de fatiguer rapidement, désemparé par la profusion de fragments, souvent inspirés mais trop disparates à mon goût.
Finalement, la tempête annoncée ne m’a pas emporté bien loin et je le regrette.
Avais-je entré le bon code?
Vivestido
https://andrewroussak.bandcamp.com/album/storm-warning

https://www.youtube.com/watch?v=a6_ER6fzXK0&fbclid=IwAR3JSR6cLmuLyALmTmd-EvdNmrtIQ_eYe9mfuB4DJFesE5mNkEUMcuf7qvg

14/10/2019

IQ
Resistance
rock-progressif/néo-prog – 119’53 – Angleterre ‘19
Autant vous dire que chroniquer un IQ (on ne ‘critique’ jamais un IQ!) est une tâche ardue destinée aux meilleurs et je ne pense pas être à la hauteur, tellement ce groupe parti du courant néo-prog des early eighties est devenu un étendard de la ‘progitude’ absolue depuis ces trente-sept dernières années. Au départ, petit succédané de Genesis, plus précieux dans l’allure, le chant et surtout la dégaine (qui se souvient des airs de garçons coiffeurs aux look corsaire et perruque new wave, sans parler de l’horrible collier bondage de Mike Holmes?).
Depuis, ils n’ont eu de cesse de distiller des albums attendus comme des hosties à la fin de la messe. Le corps du prog’ est en toi, mon fils... Chaque rondelle est un nouvel instant de recueillement pour tous les fans de rock progressif, un phare qui brille dans la tempête, une lumière divine à laquelle on peut se raccrocher quand on n’a plus envie d’écouter telle ou telle nouveauté ‘vach’ment bien’!
Et là, comme tous les cinq ans, nous l’attendions tous, la nouvelle offrande est enfin là pour nous aider à franchir le cap automnal en quelques mélodies mélancoliques et visionnaires et encore un double album pour en prendre plein les mirettes. Que du bonheur.
D’un autre côté, il est facile de parler d’IQ car tout ceux qui lisent la chronique savent plus ou moins à quoi s’en tenir, du moins si Nicholls et sa bande s’en tiennent au cahier des charges habituel. Je sais, IQ n’est pas n’importe quel groupe et, à l’instar d’un Marillion, et, à un degré moindre, d’un Pendragon, ils savent entretenir le niveau de composition à une hauteur stratosphérique. Ici encore, nappes de claviers brumeux en apesanteur sur la durée, chant souffreteux et volontairement cahotant, percées de guitare vers l’infini et au-delà, climats moroses et emphatiques, spleen entretenu avec sagacité, tout ce qui concourt à faire d’un opus de IQ une grand-messe progressive est là, même entré en ‘Resistance’, ce que le groupe fait depuis 1982 entre parenthèses…
Je ne saurais extraire tel ou tel titre de cette double obole offerte au bon peuple prog’; oh… pas par fainéantise, juste parce qu’aucun morceau ne fait pâle figure ou ne dénature la performance. C’est rare ça. D’habitude, on extirpe tel ou tel titre pour assumer son propos ou démontrer qu’il y a du bon dans le disque dont on cause. Avec IQ, pas la peine: chaque morceau vient s’écouler derrière l’autre avec une aisance et une grâce naturelle, au point qu’on a l’impression d’avoir déjà entendu ce qu’on écoute, ce qui est la preuve d’une grande classe! Comme le niveau d’exigence est grand, aucune déception ne vient pointer son vilain petit museau et l’extase qui guette l’auditeur d’IQ le laisse pantois et vidé d’émotion quand il en a fini. Comme disait quelqu’un de célèbre à propos de Mozart: la minute de silence qui suit est encore du IQ! Nichols, Holmes, Durant, Esau et Cook ne feront jamais leur «Lamb lies down» car ils n’ont pas besoin de révolutionner leur propos musical, ou alors tout doucement, de galette en galette, en façonnant le meilleur du rock progressif depuis le renouveau des eighties, ajustant le menu à leur manière, sans brusquer, ajoutant les ingrédients subtils et les condiments savoureux sans faire chavirer leur frêle esquif sur une embardée inutile.
Le voyage révélé par ‘Resistance’ est une forme d’aboutissement jusqu’au prochain IQ en… 2024 (?!) et si je devais quand même mettre en exergue ou déraciner quelques edelweiss de cet Everest, chef-d’œuvre absolu, je citerais pour l’honneur le brûlot qui ouvre les portes du paradis, «The missile», sorte de Rammstein IQisé (!), le final à l’orgue de «If anything», l’intro acoustique de «Fire and security», «Alampadria» pour son climax menaçant à la sauce IQ, le faux Hammond saccadé de «Perfect space», autre tic salvateur de l’esprit du groupe si exaltant, et puis les deux pièces intenses aux atmosphères si changeantes des plats de résistance que sont «The great spirit way» (21’44) et le final «Fallout» (19’54)…
Bon, c’est sûr, on ressort une fois de plus épuisé de l’écoute globale; heureusement qu’il faut se lever pour changer de disque comme au bon vieux temps du rock… non du 33 tours. Car le traumatisme positif est bien là, on reste écrasé dans le fauteuil par ce nouveau monstre qu’a su enfanter IQ sans se distraire de la voie empruntée depuis ses débuts.
Mon disque de l’année de toute évidence! The boss is back!!!
Commode

Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=WjSahsKfrhQ&fbclid=IwAR2lGjSHLABUKtjrA8zgD93FxWsDgUdG2QxI_ZA1DB1afVkPvTk6RyZkgkk

15/10/2019

North Sea Radio Orchestra with John Greaves & Annie Barbazza
Folly Bololey - Songs from Robert Wyatt’s Rock Bottom
rock progressif/Canterbury – 56’42 – Angleterre ‘19
Ils ont dû tourner autour quelques fois avant d’oser s’y attaquer: «Rock Bottom» est un monument qui surplombe des étendues bien plus amples que la mer du Nord. D’une réinterprétation, n’est-on pas en droit d’attendre quelque chose en plus, quelque chose qui, d’une certaine façon, justifie l’emprunt fait à l’auteur? Mais briguer cela quand on s’approprie «Rock Bottom», n’est-ce pas à l’évidence prétentieux, voire déplacé? L’écueil est alors de reproduire, imiter - singer. Dans le chemin étroit qui sinue entre les branches de cette alternative, Craig Fortnam a posé des choix, déterminés: il arrange les six titres du disque original en y introduisant des interventions de violoncelle, basson, clarinette et alto; il obtient la participation de John Greaves (Henry Cow) et il invite au chant Annie Barbazza (celle-là même qui épaule Greg Lake sur «Lucky Man» dans le disque «Live in Piacenza»). L’option féminine est intelligente: comment rivaliser avec les caractéristiques reconnaissables entre mille de la voix de Wyatt? N’essayons même pas, mais jouons avec les timbres (5 voix sur 10 musiciens), telle est la - avisée autant qu’adéquate - décision de Fortnam. Je ne suis pas enthousiaste pour chacun des traitements retenus: la partie centrale d’«Alifie» confond dissonance et maltraitance, deux notions pourtant dissemblables, et le parti pris frivole enlève de son assise à «O Caroline» - je ne vous l’avais pas dit? 4 morceaux complètent l’album original, dont celui de Matching Mole ou le splendide «Shipbuilding» co-écrit par Elvis Costello -, mais je fais le difficile - ce qui, quand on aime, est bien légitime.
Auguste
https://darkcompanionrecords.bandcamp.com/album/folly-bololey

https://www.youtube.com/watch?v=gPGUXX9UHME&fbclid=IwAR34NaK-o9lYlgJRDiNCmexKLD91jXI8xbpsCBNn204TgOBqoJFOQxBSH8A

16/10/2019

Issun
Dark Green Glow
rock progressif - «forest métal» – 69’46 – Allemagne ‘19
5 heures du mat', j’ai des frissons... L’automne claque déjà ses sabots humides contre le seuil en pierre bleue de la porte d’entrée. Au coin d’ma table de nuit, un album de circonstance reçu hier et dont le premier titre crie bien fort l’idée qui me trotte aujourd’hui dans la tête: je resterais bien au lit! Effort sublime, je me traîne jusqu'à la liseuse de galettes et au passage remets une bûche dans l’âtre. Ambiance.
Sapé tel un prince, propret-chic, nettoyé par brosse à dents & coton-tige à l’instar d’un titre de «Flying Colors», l’ensemble n’en reste pas moins agréablement vivant. C’est un enregistrement “moderne” dont on peut d’autant saluer la qualité qu’il s’agit d’une autoproduction! Ce second projet du groupe Issun nous mène donc en forêt, mais craignez fort que ce ne soit guère pour cueillir des champignons.
«Dark Green Glow» vous entraîne effectivement au pays des terreurs nocturnes enfantines. Passée l’envie de rester au lit, «Lost Generation» démarre à peine que je suis déjà en nage sous la couette. Rythmique incisive, riffs précis, chant maîtrisé puis mélodique en diable, le tout ornementé d’un solo comme on les aime... point trop shred, bien senti.
La suite, un peu plus calme, permet d'apprécier la nuance ainsi que la maturité musicale dont fait preuve cette jeune formation.
«Sleep in the Forest» nous sort ensuite de cette douce torpeur. Très belle pièce aux accents variés, joliment construite autour d’un beat original. La folie s’estompe et l’enfant rêveur se rassure, bercé par le son paisible des claviers. L’étrange songe est pourtant loin d’être terminé...
Quelques titres se distinguent en cet éventail de cauchemars sylvestres. C’est le cas de la pièce centrale du disque, «Tempest of Laughter», qui, bien qu’un tantinet Roller Coaster à mon goût, ne démérite pas. Après un démarrage façon vieux diesel, le pick up toussant-riant de «Freddy Krueger» brave la tempête, malheureusement suivi de molesses dommageables à la cohérence du tout. Bon gré mal gré, avouons-le, l’édifice reste solide. Également, «Even», titre de clôture presque pop, m’emballe avec ses pianos électriques nerveux martelant une “positive song” aux effluves heavy, tout droit sortie du grand bahut des eighties. M’sens quand même à l’étroit, oppressé par le similicuir d’mon pantalon d’époque...
Issun n’a certes pas inventé le fil à couper la mesure en 5; on utilise ici des ressorts bien connus. Néanmoins, la qualité de production, mais aussi la beauté manifeste de certains morceaux, font de ce concept album un moment évidemment plaisant. Promenons-nous-y, tant que le loup...
Néron
https://issunmusic.bandcamp.com/releases

https://www.youtube.com/watch?v=qBzNxljVA0E&fbclid=IwAR34NaK-o9lYlgJRDiNCmexKLD91jXI8xbpsCBNn204TgOBqoJFOQxBSH8A

17/10/2019

Sowulo - Mann
La Louve

Sowulo
Mann
pagan folk – 47’16 – Pays-Bas ‘19
Mann est le 3e album des Hollandais de Sowulo. Un album concept, composé, produit et enregistré par Faber Horbach qui est aussi aux chants (notamment une voix rauque), à la lyre, au nyckelharpa (instrument de musique traditionnel à cordes frottées d'origine suédoise), au bouzouki irlandais et au jouhikko (pour rappel c’est une lyre à archet), aux synthés et au VST (système de musique assistée par ordinateur).
Faber est accompagné de Chloe Bakker à la harpe celtique, de Sophie Zaaijer (aussi membre de Cesair) au violon, de Klaartje van Zwoll à l’alto, de Pan Bartowiak aux percus et Fieke van den Hurk qui a travaillé aussi avec Omnia, Shireen et Cesair, entre autres... Il y a donc un mélange d’instruments inspirés du Moyen Âge et de techniques modernes.
Voici la description de Mann par le leader du groupe: «Avec ces chansons, j'invoque intentionnellement mon guerrier intérieur, mon amoureux, mon roi et mon magicien… Ces compositions expriment mon interprétation des quatre archétypes que je connecte aux quatre saisons à l’intérieur et à l’extérieur et suivent donc la nature cyclique de l’homme». Vous pouvez obtenir une signification des textes, en cliquant sur chaque titre via le bandcamp.
Même si le groupe se dit influencé par notamment Heilung, Wardruna ou (l’excellent) Garmarna, et fonctionne avec les mêmes éléments, il n’en est pas l’égal. Sur «Wulfwiga» (à écouter sur le lien youtube ci-dessous), le chant répétitif est un peu trop long. Les rythmes médiévaux typiques sont présents sur une grande partie de l’album mais il y a aussi quelques titres plus légers comme la belle ballade «Hēahlufu».
Ce groupe est parfait pour le Castlefest où il s’est produit en 2018; on sent même que certains titres comme «Brego in Brēoste» ont été écrits pour être joués en live, et je pense que c’est en concert que Sowulo doit donner le meilleur de lui-même.
La Louve
https://sowulo.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=tSITHrvAyTw&fbclid=IwAR1AuJD9BG6E7riHOI9-ZcZNLsG61MHH4qV9QbDUxRSIP6W9PNwZoJuJ5MY

18/10/2019

Not Otherwise Specified
Deadweight
rock progressif/métal progressif – 60’34 – USA ‘19
Troisième album studio pour Not Otherwise Specified, «Deadweight», l’album dont je vais vous parler aujourd’hui, est en fait une œuvre complexe et riche que l’on doit au seul capitaine de N.O.S., à savoir le multi-instrumentiste Craig Kerley (chant, guitare, claviers et basse). Originaire d'Atlanta en Géorgie, l’homme nous propose un prog/métal prog dont les influences sont à chercher du côté de Kansas, Starcastle pour les plus vieux, et Dream Theater, Spock’s Beard pour les contemporains; rajoutez aussi IQ et Riverside côté influences européennes.
L’utilisation du mellotron comblera les plus nostalgiques d’entre vous («Marked for Birth» et «Memories»); dans ce dernier, Van der Graaf n’est pas loin!, alors que «Filling My Soul» vous rappellera Dream Theater et la voix de Kerly les grands standards de Fates Warning. Un premier bémol pour le titre «I Don’t Know», qui n’a pas sa place sur cet album et lui coûte la note maximale, alors que «In This World» nous amène à nous souvenir d’un autre grand de la scène US… Styx.
Le second bémol: peut-être quelques longueurs... L’album aurait gagné en puissance avec une dizaine de minutes en moins; un détail, mais qui aurait fait de cette galette un des grands moments de 2019.
Cependant, vous l’aurez compris, si vous êtes fans de métal progressif, ce «Deadweiht» de N.O.S. est incontournable!!!

Tiro

https://nototherwisespecified.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=ZqL-RgjBQbk&fbclid=IwAR0kkZ7BADHmhYxkvLuLcaIQQBUgJ_d3QP3IcmyYMGofN7t9aStfay43iwc

19/10/2019

Amarok
The Storm
prog/ambient/chill out/score – 72’07 – Pologne ‘19
Le nom du groupe, Amarok, à ne pas confondre avec son homologue mexicain, fait référence de façon très évidente à Mike Oldfield et son album éponyme (pas le meilleur, loin s’en faut, si vous voulez mon avis au passage). Mais là s’arrête la comparaison. On évolue ici dans des strates quasi ambient ou atmosphériques teintées de chill out. Certains riffs de guitare évoquent Pink Floyd («All the Struggles»), mais l’ambiance oscille entre rêverie, méditation et exploration mélodique au son de cloches tibétaines et de mélopées orientales qui viennent s’y greffer pour nous laisser glisser sur des arabesques harmoniques éthérées. «Natural Affinity» louche même du côté de Brian Eno et nous emporte comme une plume légère dans le vent du temps. Les glissandos de guitare sont comme des caresses astrales où s’immiscent des riffs plus marqués et quelques interventions de piano en cascades scintillantes comme les étoiles sur la voûte céleste. Ces moments où pulse une rythmique obsédante raccrochent l’album à la mouvance progressive et l’éloigne alors du pur chill. Les partitions, d’une grande douceur, sont d’une palpable beauté onirique. Les plages instrumentales (majoritaires) ont été créées pour le show chorégraphique du James Wilton Dance «The Storm» actuellement en tournée. Une alchimie subtile des genres, une parfaite réussite au confluent des styles. Les effets reverb et les longues notes qui s’envolent en vapeurs de mélancolie laissent les frissons courir librement le long de l’échine et par tous les dieux du cosmos, on en redemande!
Clavius Reticulus
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=07mq0xhAVFE&fbclid=IwAR0kTlcGih1JyM2f_UlnJrrGRcdJznbOB4WGmWEINbAskpJrLiXKN11bamk

20/10/2019

Dreadnought
Emergence
dark metal prog – 46’38 – USA ‘19
Dreadnought nous vient des USA, plus précisément du Colorado, et - il faut l’avouer - leur musique fait partie des ovnis du prog. Si, en lisant le descriptif «dark metal prog», vous étiez prêts à ne pas aller plus loin, continuez de lire la suite et cliquez sur le lien pour écouter… Nos amis ne font pas que du metal prog avec voix gutturale venue d’outre-tombe. Ils intègrent de manière magistrale une voix douce ainsi que des notes de doom, de prog et même un coté jazzy avec, en fond, ce piano lancinant. Mais reprenons les choses dans l’ordre. «Emergence» est le quatrième album depuis 2013. Il n’est pas, comme beaucoup d'albums de groupes de metal prog, orienté principalement sur le son de guitare. Bien au contraire, ici c’est plus l’ambiance lourde des piano, flûte, harpe et autres claviers qui font la base. Cela n’empêche pas la batterie d'Ordan Clancy et la guitare de Kevin Handlon de recouvrir l’ensemble de l’œuvre de manière subtile, parfois douce, parfois plus virulente. Un des piliers de l’album est également le mélange de la voix claire de Lauren Vieira avec celle de Kelly Schilling, beaucoup plus lourde et sombre, des voix volontairement noircies par des cris stridents comme le black metal sait nous en apporter. J’ai rarement entendu un si bon accord entre deux personnes aux voix si différentes. L’album comprend cinq titres dont trois font plus de 10 minutes. Il m'est très difficile de mentionner un titre en particulier (l’album doit s’écouter en entier), mais si je devais en mettre un en avant ce serait «The Waking Realm». Il clôture l’album de manière magistrale. Il commence en chant clair un peu à la Björk pour monter crescendo en insérant un duo batterie/piano carrément jazzy. Quelques minutes plus tard, une guitare s’immisce doucement, ce qui nous donne un son à la Opeth version actuelle, plus prog. Ensuite tout devient plus noir, plus faussement décousu, plus doom… Enfin arrive l’apocalypse et la partie «dark». L’ensemble de l’œuvre me fait penser à Tribulation.
Assez régulièrement chez Prog censor nous constatons que des groupes devraient se trouver un son ou une originalité. Et bien ici Dreadnought l’a fait: une production parfaite, des ressentis différents tout au long de l’album qui vous permettent de ne rien lâcher. On ne s’embête pas une minute. Je ne peux que vous conseiller d’écouter et d’acheter cet album. Espérons qu’ils passent en concert près de chez nous… Juste une parenthèse, mais quand on achète physiquement l’album pour moi ça compte beaucoup, la pochette de Mark Facey est magnifique.
Vespasien
https://dreadnoughtdenver.bandcamp.com/album/emergence

https://www.youtube.com/watch?v=GtwWbC4IfqA&fbclid=IwAR2UUrZ2BGKePXgIwmVeDyo1dQrC-xwY1cNfXwHGMi6ysN3rDZKv5eqvpJc

21/10/2019

Mantra
Medium
métal-progressif avant-gardiste – 34’14 – France ‘19
Le groupe Mantra, originaire de Bretagne, est de ceux qui explorent, qui cherchent, qui fouillent, et ce depuis dix ans. Forts de cette identité en constante construction, en perpétuelle évolution, les musiciens expérimentent leurs pensées novatrices, tarabiscotent leurs influences, magnifient des concepts dont ce «Medium», troisième opus du groupe après «Into the Light» en 2013 et «Laniakea» en 2016, fait montre d’une originalité conceptuelle tout à fait étonnante. En effet le groupe matérialise ici l’idée d’explorer la dualité corps/esprit en proposant deux titres («Body» et «Mind»), longs de 17’07 minutes chacun, dont l’union, (la superposition), donne naissance à un troisième titre.
La fusion du corps et de l’esprit, (où la question sous-jacente est de comprendre si l’âme est indissociable du corps), questionne sur l’interaction entre raison et spiritualité. Un concept métaphysique qui, dans l’exercice proposé, a obligé les concepteurs à produire un travail d’orfèvrerie afin d’arriver à agencer ces deux titres pour qu’ils puissent, in fine, n’en former qu’un. Vous avez compris, les deux titres peuvent donc s’écouter indépendamment l’un de l’autre mais, superposés, constituent un troisième titre que le groupe a nommé « Medium». La version physique de l’album ne comprendra que les deux titres, mais le groupe a préparé un site permettant d'écouter les 2 morceaux simultanément et de manière interactive.
Incroyable concept, vous l’avouerez. Sont-ce les seuls à avoir tenté l’aventure? Je n’en sais rien, mais l’idée est vraiment géniale.
Musicalement le groupe évolue dans un métal à tendance progressive avant-gardiste. On songe à Tool, à une certaine idée du post-métal, parfois à Devin Townsend, aux anciens titres de A Perfect Circle, un peu aussi à Meshuggah ou plus exactement aux travaux expérimentaux de Fredrik Thordendal. Ça foisonne, c’est construit, c’est riche. Les ambiances se succèdent, les passages calmes rehaussés de chœurs sont irrémédiablement contrebalancés par des montées de riffs implacables et mutent perpétuellement d’une atmosphère à une autre. Une très grande densité! Instinctivement on se pose la question de savoir comment tel ou tel passage donnera une fois couplé, superposé à l’autre entité de l’album, comment le corps répondra à l’esprit, et inversement.
Là où beaucoup font un peu la même chose, suivant le canevas emprunté par mille autres avant eux, un groupe comme Mantra est d’une fraîcheur conceptuelle revigorante. De l’invention à l’action, de l’idée à l’expérimentation; un laboratoire en perpétuelle mutation, un bouillon de culture duquel sortent des créatures hybrides, innovantes.
Démarche à fortement encourager. Rien que l’aspect conceptuel mérite votre attention.
Centurion
3,5/5

https://mantrafr.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=ZEPnJaOBKRE&fbclid=IwAR0eCpP0FcBMxCW6rYullEJ6rTotuLAQ05Dmt5vJfOKsudQsbpnZ-uMtNbk

22/10/2019

Ape Amplitude
Escape Routes
rock progressif/néo-prog – 80’13 – Allemagne ‘19
Après «Flaming Bess» et «Mindmovie», Achim Wierschem est au cœur d’un nouveau projet, Ape Amplitude. Avec Peter Zahn, également multi-instrumentiste, ils ont créé «Escape Routes», un album instrumental (mis à part quelques escapades vocales) qui joue sur l’immensité des paysages sonores progressifs. Il y a également cinq musiciens invités à bord, dont les tâches ne sont pas précisées sur le livret, aucune information n’ayant été donnée sur les instruments.
Ape Amplitude veut nous démontrer que la réalité est plus étrange que la fiction. Des décisions politiques insensées prises par des hommes politiques peu au fait de l’évolution des choses, où le stade final reste flou, surtout pour les pessimistes les plus sombres. Le dessin de la pochette, cet homme qui, tel une autruche, se fourre le crâne dans le sable pour ne pas voir ce qui va advenir, le sable ou plutôt un désert, ce qui devrait rester de la surface terrestre, si ça continue ainsi…
Comme le nom de la chanson l'indique, les issues de secours ne concernent pas uniquement l'état actuel des choses. Mais aussi d'autres moyens artificiels, échappatoires que les gens considèrent comme des façons de sortir de n'importe quoi, d’une vie morose, robotisée, fugue sous l'emprise de la drogue, de l'alcool, du monde virtuel (jeux video/tv) et même du salut final, le suicide! Une chose difficile qui aboutit à parler donc de la planète mourante. Cependant, il y a aussi la dernière piste (très pianistique), «A Little light of hope», qui suscite un petit sursaut d’espérance. Que cet espoir s’applique maintenant aux humains ou à la planète, chacun peut répondre par lui-même. Que notre planète avec la mort de son étoile bénisse le temporel dans environ cinq milliards d'années, pourquoi pas? Personnellement, je doute que quiconque devrait en faire l'expérience. De nombreuses cultures se sont déjà effondrées avant la nôtre et les fantastiques années que dure une vie humaine ne sont de toute façon que poussière dans l’infini. Mère Terre surveillera et retournera la situation à sa façon d’ici là et tant pis pour nous, pauvres rejetons refoulés de quelques hoquets ravageurs de la surface.
Musicalement, il s’agit d’une végétation vaste et variée digne des meilleurs élans du rock progressif. Des prairies rêveuses et luxuriantes côtoient des endroits dénudés et désolés, majeures du côté mineur et mineures pour un espoir majeur. Ici, la guitare est l’instrument phare mis en exergue avec un enthousiasme exacerbé et franchement jouissif! Des murs de claviers peuvent venir à s’inviter, la guitare survole tout cela avec une extrême virtuosité. Un travail rythmique intense crée le suspense, ainsi que d’habiles pauses fort à propos. Le chant des oiseaux, les sons de la jungle («Ape Amplitude»), des battements solitaires, des notes de piano viennent s’inviter et cette guitare gilmourienne, prog’ dans sa forme la plus pure.
Des structures complexes comme dans l'ancien Genesis ou - oui parfois - un clavier fonctionnant à la Pendragon, quelques bonbons des confiseries Pink Floyd et Camel, parfois modérément frippiens, passages passionnants pour nourrir la tête de l’auditeur, malgré le scénario lugubre. Je m'accroche plus au dernier titre sur «Escape Routes». Mais, malgré le fait qu’il soit essentiellement instrumental, cet album générera un bel enthousiasme chez tout progster digne de ce nom. La suite «A long and painful path» et ses quatre volets sont un must où s’invitent les sonorités de Camel, Pendragon et où s’acclimatent parfois certains développements floydiens. Plus que du néo-prog sans paroles, déjà un must de l’année!
Commode
4,5/5
Album non disponible sur bandcamp

https://youtu.be/WTMLsDbARAs?fbclid=IwAR1-g1kCgj_40hY2fHWXiQrXGCOlHtycet7gzr4e5LInBETtZd7mEvv5Jzg

23/10/2019

Hasse Fröberg & Musical Companion
Parallel Life
rock progressif/néo-prog – 65’28 – Suède ‘19
Cinquième opus pour le second guitariste, gaucher de son état, et chanteur complémentaire des Flower Kings, alias Hasse Fröberg. Pour ceux qui l’ignoraient encore, depuis 2010 le bonhomme mène une carrière parallèle avec quelques copains musiciens (facile...), HFMC - Hasse Fröberg & Musical Companion, et ce ne sera pas sans déplaire aux nombreux fans du Roi Fleuri du maître Roine Stolt, dont la très attendue nouvelle double rondelle est annoncée pour le 8 novembre prochain. Plus que quelques fois dormir avant de découvrir ce que nous réserve ce «Waiting for a miracle». Alors la question que vous allez me poser est sans aucun doute: «Ce «Parallel Life» permettra-t-il de vous faire patienter jusque-là?» Je répondrais que, sans atteindre des sommets, cet album pourrait plaire aux fans les moins exigeants. Les autres y verront sans doute une sorte de Flower Kings «allégé», dans lequel le génie du duo Stolt-Bodin ferait défaut. Cependant je m’en voudrais d’avoir ce jugement, par trop réducteur, et vous avouerai avoir écouté cet album avec plaisir. S’il ne va pas révolutionner la planète «prog», le nouvel HFMC a certains points intéressants. Déjà visuellement, la pochette nous ramène aux classiques du genre, Marillion et Pendragon en tête. Cela ne fait pas pour autant un bon album, certes, mais ça accroche l’auditeur. Ensuite, la plage titulaire qui ouvre l’album et se décline en six tableaux ne laissera pas indifférent. C’est incontestablement le morceau le plus réussi de l’album. Les six chapitres se succèdent en alternant les ambiances et rythmes comme il se doit, avec un final qui n’est pas sans évoquer celui d’un «Starship Trooper» de qui vous savez... un morceau d’une vingtaine de minutes qui nous plonge dans la fin des années 90, époque où un Roi des Fleurs et un Vulcanien Barbu faisaient la loi. Un bon début auquel succède un «Sleeping with the Ghost» aux accents FK indéniables et qui tient la route. On appréciera également un peu plus loin le «Time Waits» à la mélodie accrocheuse et au solo de guitare de bon aloi. Ajoutons à cela le bluesy «Never Alone» qui clôt l’album avec emphase et qui ne démérite pas. Et le reste, me direz-vous? Si Hasse Fröberg a d'indéniables talents de mélodiste et de chanteur, on lui reproche souvent, à juste titre, d’en faire parfois un peu trop. Comme sur «Friday», plus pêchu mais dispensable, selon moi. Car il faut bien reconnaître que certaines plages de cet opus, aux accents plus pop et donc «progressivement parlant» moins intéressantes, font office de remplissage. Dommage qu’il n’ait pas un peu retravaillé certains passages! Ceci dit, ne boudons pas notre plaisir car, si l’album n’a pas le panache d’un «Stardust we are», il reste tout de même digne de figurer en bonne place dans la galaxie Flower Kings.
Hadrien
3/5
https://glassville.bandcamp.com/album/parallel-life

https://www.youtube.com/watch?v=ml_3aXbKDxE&fbclid=IwAR28qu12TOqYqCOwzo-jz9NuOcv9YxASXggI0jiiEyWIQ_mnnHIYKE3JuBc

24/10/2019

The Winstons
Smith
canterbury – 41’19 – Italie ‘19
C’est joyeux, pétillant et faussement brouillon. Avec ses tonalités vintage assumées, The Winstons, power trio péninsulaire (claviers, basse, batterie) de faux-frères (Rob, Enro et Lino, tous se surnomment "Winston") se revendique de l’influence cosmique, astrale et sidérale de la planète Gong - même si, en réalité, ces Italiens-qui-sonnent-anglais se retrouvent bien plus souvent dans les pelouses de Canterbury. À l’appui de ce propos, l’élégant cover de «Impotence» des Wilde Flowers où Richard Sinclair (Caravan) tient le micro en lieu et place du Robert Wyatt originel, responsable du texte - Hugh Hopper noircissant, lui, la partition -, ou le final de «Blind», qui fait irrésistiblement penser à Caravan. Si l’écriture de «Sintagma» est un brin plus osée (une guitare déchirée à l’avant-plan d’une basse imperturbable) et celle de «Rocket Belt», au parfum glam, plus heavy, l’ensemble, bien fait, dérange rarement les tympans: «A Man Happier Than You», slow des bals de lycée, se pose comme une pause à mi-parcours et le mixage "mono en stéréo" de «Not Dosh for Parking Lot», aux voix qui se répondent franchement d’un canal à l’autre, rappelle avec facétie une époque révolue. Une mention pour l’intro du disque, «Mokumokuren», court morceau ésotérique aux influences orientales.
Auguste
3/5
https://thewinstons.bandcamp.com/

https://www.youtube.com/watch?v=8Q1tvjFjvrM&list=PLULcLoXNpj-e4Ba4hsYDXnOHpHGPtrbpZ&index=10&t=0s&fbclid=IwAR2Hi4Nx-N26Np5ABUmB2Q0zJfDdqy9uNOETx4j1o2bYDLIxpC9oralXyRI

25/10/2019

Moonrise
Travel Within
néo-prog/pop-progressive – 52’02 – Pologne ‘19
À nouveau une chouette découverte que cet album du groupe polonais Moonrise qui n’en est pas à son coup d’essai. En fait de groupe, il s’agit plus du projet d’un homme, Kamil Koniecznika, qui s’entoure de musiciens et vocalistes de talent.
«Travel Within» est le quatrième album du groupe et présente une musique vraiment intéressante car difficilement classable. Le premier réflexe à l’écoute de l’album serait de le classer dans une mouvance entre néo-prog et pop; les compos sont accrocheuses sans être mièvres, la production est chatoyante et les instrumentistes assurent sans démonstration inutile.
Mais une écoute attentive relève une richesse et des influences insoupçonnées et improbables qui donnent un vrai caractère personnel au projet. Prenons le premier morceau «Dive» qui commence sur une ambiance un peu électro et, directement, les accords et les progressions harmoniques nous font penser à un album de Seal qui aurait avalé des amphétamines. Le second morceau commence plus classiquement; le chanteur Marcin Staszek s’y exprime joliment dans un timbre qui rappelle Steve Perry. Le morceau fait d’ailleurs penser aux meilleurs moments de Journey, impression encore renforcée par «Little Stone». Pour «Between the Lines», on revient vers Seal et avec un final que Marillion ou Frost* n’auraient pas renié. «Like an arrow» mélange saxophone et passage un peu plus prog métal avec une fluidité qui fait vraiment plaisir à entendre, le tout toujours servi par l’excellent chanteur qui ne démérite pas tout au long de l’album. L’album se conclut par une jolie ballade, «Time», que Journey à nouveau n’aurait pas reniée, pour se finir sur «Calling your number» et son final un peu plus symphonique.
En conclusion, «Travel Within» révèle une fausse simplicité qui lui donne un charme réel, le tout joué par des musiciens talentueux qui n’ont visiblement pas calculé leurs effets mais ont laissé leur spontanéité s’exprimer.
À découvrir assurément!
Amélius
3/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=zUhvJqckvXA&fbclid=IwAR131SiIiuGQe_pTmpiQAhLnZ_3sOqDkJTtMeA3EOEqGbKcN1lv18P4-BAA

26/10/2019

Andy Pickford
Psymanteum
électronica/prog – 77’45 – Angleterre ’19
Une discographie énorme, un talent absolu et un style tout à fait personnel. On dirait qu’Andy Pickford ne peut contrôler le flux de son inspiration; une fois lancé sur un thème, il l’exploite jusqu’à sa dernière étincelle. «Harmonics in the Silence», en 2016, nous emmenait pour un voyage mélodique de plus de trois heures et demie. «Orgonon», en 2017, poursuivait dans les œuvres-fleuves de plus de trois heures sans interruption, avant de revenir à une découpe plus traditionnelle ne dépassant plus les 70 minutes, en 2018, avec cependant un thème en trois volets nommés «Objects & Expressions». Cette année, toujours aussi prolifique, il commet un nouveau concept qui a nom «Panopticon», servi d’un jet mais pouvant se diviser en deux albums, et enfin ce petit bijou baptisé «Psymanteum». Andy renoue ici avec un style plus atmosphérique en y ajoutant ponctuellement des rythmes séquentiels. Sonorités parfois proches de la Berlin school où viennent se greffer des glissandos de guitare évaporée soutenue par une rythmique douce. Effets reverb comme nés d’un spectral «Echoes» pinkfloydien, mélodies aux chœurs synthétiques angéliques mahlériens, sons cristallins: tout est là pour nous emmener en voyage au sein d’un internal cosmos. «Psymanteum» nous est proposé en un pack comportant le titre d’une plage continue, un découpage en deux sections et enfin sous forme d’album de 11 titres. Attention! Toute écoute répétée de cet artiste entraîne irrémédiablement une accoutumance. La musique d’Andy est tout simplement extraordinaire et à nulle autre pareille.
Clavius Reticulus
5/5

https://andypickford1.bandcamp.com/album/psymanteum

27/10/2019

Karfagen
Echoes From Within Dragon Island
art rock symphonique – 93’35 – Ukraine ‘19
Encore une nouvelle production du prolifique Antony Kalugin! Ce dernier sort en effet, outre des albums sous son propre nom, les productions de Karfagen (comme celle qui nous occupe aujourd’hui), Sunchild, Hoggwash, AKP ou encore AKKO 2, excusez du peu! Cette galette constitue en fait la dixième production (!) sortie sous la dénomination Karfagen et ce n’est pas la moindre, vous pouvez m’en croire!
Basée sur un long poème de l’Écossais Robert Louis Stevenson (1850-1894), «A Child’s Garden of Verses» (1882), en principe destiné aux enfants mais très populaire auprès de leurs parents, l’œuvre qu’il m’est donné de vous présenter aujourd’hui a de quoi donner le tournis: pas moins de 17 musiciens y participent et le splendide artwork est réalisé par Konstantin Kanskiy.
Mais venons-en à la musique: le symphonisme émanant de ces différentes pièces emporte l’auditeur bien au-dessus de la mêlée! Ici, tout n’est qu’ordre, calme et volupté! Hormis trois longs titres, «Dragon Island Suite» dont les trois parties dépassent chacune les 15 minutes, la plupart des autres morceaux constituant cette œuvre se montrent (comparativement) plus ramassés au niveau du timing: de 2’45 à 6’28 pour autant de plaisir musical. Le nombre impressionnant d’instruments utilisés rend l’écoute particulièrement riche en émotions avec des parties plus délicates, comme «My Bed is a Boat», par exemple. On sent Antony influencé par quelques pointures du genre (Camel, Jethro Tull, Genesis et même King Crimson...), sans toutefois que l’ensemble ne se fasse ressentir comme un melting pot sans queue ni tête. L’univers de notre homme est bien trop riche et personnel pour cela!
Je n’hésiterai donc pas une seule seconde pour attribuer la plus haute note et vous le recommander chaudement…
Tibère
5/5

https://antonykalugin.bandcamp.com/album/echoes-from-within-dragon-island

https://www.youtube.com/watch?v=8LV6rNoPOfg&fbclid=IwAR0QHVu2csKsV7wgY-wtDXIqT0HBskeU17DmaluJLGYHrS7-hvd6V6qHAG4

28/10/2019

Orion 2.0
Virtual Human
rock-funk/prog jazzy – 40’22 – France ‘19
Ce 2.0 en dit long sur l’ambition du groupe (ORION - groupe) à tourner la page. Celle de son ancien catalogue discographique jalonné d’albums s’inscrivant dans un rock à la française, inspiré des grands meneurs de l’époque qu’étaient Ange ou Mona Lisa. Ce «Virtual Human», 5e réalisation du groupe français pouvant s’enorgueillir de compter 44 ans au compteur, est un changement de cap radical. Même si sur le précédent album «Le Survivant» on pouvait déjà noter quelques réminiscences jazzy, ici, avec ce nouvel ouvrage, ce ne sont plus des digressions, mais une nouvelle identité.
L’album s’ouvre par la plage titulaire, et dès l’entame, deux choses sautent aux yeux, d’abord le chant de Jérôme Nigou, très soul funk jazzy, et le jeu du batteur dont la rythmique jazz est époustouflante. Ce titre, qui doucement nous fait entrer dans ce nouvel univers, est savamment ponctué de riffs guitaristiques à la Steven Wilson époque début Porcupine Tree. Une accroche rassurante qui tend à nous démontrer que cette musique n’oublie pas totalement sa genèse progressive.
Si dans cette introduction on songe déjà un peu à un certain Toto, «T.O.W.U.», le deuxième titre de l’album, rappelle indubitablement certains titres funky («Georgy Porgy»,«You Are the Flower», «Takin’it Back», «Mama», «Waiting for Your Love»,…) ayant jalonné les premiers albums du groupe américain. Filiation intéressante, (sans doute involontaire, voire même inconsciente), car Toto, comme Orion aujourd’hui, a géré diverses tendances musicales pour se constituer une ossature solide. Et c’est peut-être le nouvel adage d’Orion, qui, à travers cet album, cherche à se reconstruire.
«Le Nuage», titre chanté en français, renoue peut-être un peu avec le catalogue passé, mais de subtiles touches jazzy tissent un fil d’Ariane vers la désormais nouvelle constellation d’Orion. La suite avec «Silicon Cirkus» et son country-funk rock à la rythmique bien carrée genre Marcus Miller, (d’ailleurs Eric Halter se fend d’un sacré solo que le bassiste américain n’aurait pas renié). Un morceau bien groovy, bien funk, qui nous éloigne encore un peu plus du rock progressif. «Silicium» ensuite, en français toujours, une ballade soul/jazzy; des touchettes prog, un piano très bon, une ambiance langoureuse, l’intervention d’une guitare en filigrane, de fines nappes claviéristiques, c’est pas mal.
L’album se clôture par «Shagreen» au début presque zeuhlien. Dimension plus rock, plus prog, et puis nouvelle immersion dans l’univers jazzy, qu’on pourra qualifier cette fois de prog-jazzy. Un titre chanté en anglais qui s’avère être un des meilleurs morceaux de l’album.
Que dire en conclusion? Je m’adresse à des fans de rock progressif,… alors je vous le dis comme je le pense: quand on a des références, des affinités avec le jazz et le funk (ce qui est mon cas), ça ne pose aucun problème, on trouve ses marques, ça coule tout seul. Les autres devront consentir à l’effort, s’ouvrir l’esprit, et peut-être plus tard accepter de humer ce que se fait ailleurs, dans d’autres domaines, (ça pourrait commencer par le live «Gratitude» 1975 d’Earth Wind and Fire, un must). Alors peut-être…
Centurion
3/5

https://orion11.bandcamp.com/album/virtual-human

https://www.youtube.com/watch?v=mD7V1G9KHq4&fbclid=IwAR0a2HGFz0DFM5xVPjjYt_KnbsLprrCw9y2SEPX9UeRhxRRnnkrx_2kH3gM

29/10/2019

Whispers on Tree
Whispers on Tree
blues-rock/prog – 37’39 – France ‘19
J’avoue rester circonspect à l’écoute de ce premier EP des Français de Whispers on tree. Nous parlons essentiellement de rock progressif chez Prog censor et Whispers on Tree, malgré sa pochette et son nom, n’en fait pas vraiment au sens du terme ou de celui auquel on associe ce type de musique. Je serai franc, il s’agit d’un blues-rock avec un chanteur à la voix «rauque’n’roll» et des compos qui doivent autant à Joe Cocker qu’à G. Thorogood et Bad Co (restons flatteur…!).
Le groupe a envoyé son disque et nous nous devons d’en parler, mais ils se sont trompés de boutique. Perso, ça ne me gêne pas en soi car et d’un, ils sont Français et de deux, leur rock est plutôt bien foutu. Mais la voix est franchement trop bluesy pour le genre dont ils se réclament (page facebook). À mes oreilles de progster, trouveront grâce «Percy Fawcett, Pt. 2» où la voix se fait plus douce et l’instrumentation plus aventureuse et «So sillent» qui le suit, plus évocateur et intimiste avec des claviers enfin prog' (alléluia) mais ça reste parcimonieux. À l’écoute du dernier morceau «Rythm of time», je dois réviser mon jugement initial d’un poil ou presque mais la voix, excellente pour du blues ou du rock pur, est ardue à envisager pour un groupe qui se dit «concentré de rock progressif teinté 70’s»! Là encore, les claviers deviennent pur prog’ et c’est un petit régal momentané - hélas trop court - car le son est là, rien à redire sur la prod’ cossue et ronflante.
Donc oui, teinté 70’s, ça c’est certain, mais rock prog non… Ou alors plus Atomic Rooster que Yes et Trapeze que Genesis quoi!... Je ne veux pas résumer un disque à une question de sémantique, alors Whispers on Tree a fait du bon boulot sur ses deux ans de compo et son année d’enregistrement en home studio, c’est clair, mais un passionné de rock blues ou de 70’s pur en parlera mieux que moi. Mille excuses…
Commode
3/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=uHvNXVrfSeY&feature=youtu.be&fbclid=IwAR2hSWKJkGGltHb32uE2kRiri-0J1SXCkQt8QdAdOU0iSLn88i1exJyNcv4

30/10/2019

Tool
Fear Inoculum
metal-progressif – 79’13 – USA ‘19
Annoncé depuis 2013, ce cinquième effort des Américains de Tool sort finalement le 30 août 2019, soit 13 ans après le cultissime «10000 days». Et le moins qu’on puisse dire c’est que l’attente n’a pas été vaine: une dizaine de plages dont 7 dépassent les 10 minutes. «7» était d’ailleurs le titre initialement choisi par les membres du band en rapport avec les riffs en 7, les 7 pistes initiales que contenait l’album, et une certaine fascination de Maynard James Kennan (chanteur du groupe) pour ce chiffre à connotation religieuse et mythologique. Il restera de l’idée de départ le titre «7empest», excellent au demeurant. Finalement, le choix se portera sur «Fear Inoculum», un concept autour de la peur et de la douleur qui permettraient une sorte d’émancipation de la nature humaine, une renaissance à partir des échecs du passé mais aussi des expériences positives. Vous aurez compris que le quatuor de Los Angeles aime entretenir un côté mystique faisant référence à une sorte de philosophie sectaire nommée la «lacrymologie», qui n’est autre qu’une manière de critiquer la scientologie et ses dérives. Visuellement aussi, Tool a su créer tout un univers déroutant et dérangeant, ce qui rend leurs (rares) prestations live particulièrement intéressantes. Car vouloir réduire la musique envoûtante de ce groupe-phare de la scène actuelle à du métal progressif sans autre qualificatif serait bien trop réducteur et inapproprié. On est dans l’univers musical et visuel de Tool comme on est dans celui d’un Kubrick ou d’un Tarantino au cinéma. Chaque titre est une histoire à lui seul. Généralement la section rythmique et la guitare commencent en mode mineur pour progressivement monter dans les tours, au fur et à mesure que le duo basse-batterie libère sa puissance rythmique. Pendant ce temps Maynard entame son entêtante incantation. Ensuite Adam Jones envoie un riff de guitare assassin dans la panade et c’est l’apothéose. On en prend plein la face pendant qu’on est sous l’emprise du gourou Maynard. La batterie de Danny Carey devient tribale, tandis que la basse de Justin Chancelor martèle une cadence plus soutenue. C’est le pied intégral! Great! On redescend à peine de son petit nuage que le morceau suivant enfonce le clou de plus belle. Bien que l’on puisse qualifier «Fear Inoculum» de concept-album, j’épinglerais tout de même le puissant «7empest» qui contient dans ses 15 minutes toute la quintessence de la musique de Tool: la puissance du métal, l’envoûtement psychédélique et la richesse du rock progressif. Mon album 2019 toutes catégories confondues.
Hadrien
5/5
Album non disponible sur bandcamp

https://www.youtube.com/watch?v=9D2R69gVyZ0&fbclid=IwAR14MUc227rib18l_eTv8H9kCT_BVBXUqWQCNKJKMYk9ydVnDd2XuV09rXY

31/10/2019

Cellar Noise
Nautilus
rock progressif/métal progressif – 52’24 – Italie ‘19
Le point de rencontre entre Porcupine Tree, Riverside, Dream Theater et Fates Warning existe! Il s’appelle Cellar Noise, et l’album, «Nautilus»! Voilà en quelques mots ce que m’inspire l’écoute de ce deuxième album des Italiens.
Il y a deux ans, leur premier essai, «Alight», produit par Fabio Zuffanti, m’avait séduit par son approche très 70’s. 24 mois plus tard, riche de ses expériences live, d’un mixage au studio suédois Fascination Street (Opeth, Leprous, Haken) sous la houlette de Jens Bogen, c’est un combo au son heavy et très moderne qui nous revient. Mais rassurez-vous, il y a toujours des parties douces, et beaucoup de claviers et de mellotron pour donner une touche symphonique à l’ensemble.
Pour vous en convaincre, écoutez la première plage de l’album, «The Creator», huit minutes d’un condensé de 40 ans de musique progressive, et déjà cet album aura conquis vos platines! L’orgue Hammond est ici, et durant toute l’œuvre, un support aux riffs distorsionnés.
Signalons la présence au chant et en duo de Laura Meade (IZZ) qui donne une réplique toute romantique à Francesco Lovari sur le titre «Her».
Un album riche musicalement donc, et très inspiré au niveau des textes qui explorent l’esprit humain souffrant d’anxiété, de paranoïa et de maladies mentales qui font partie de notre vie quotidienne d’homme occidental moderne et stressé. Bref un opus qui parle de nous, vous, moi, nos voisins, nos potes, ce qui le rend d’autant plus attachant.
Tiro
4/5

https://cellar-noise.bandcamp.com/album/nautilus

https://www.youtube.com/watch?v=otfE_VaY0GE&fbclid=IwAR0OJX5rhaLms-hXPIAtf95KxGjDOcxDPrpcJfyp3NYft194Z9U_R8fHvAk